Julien CLERC1844 - 1885
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1032
- Bibliographie : Consulter le catalogue
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1870 - 1885 (Yibin [Suifu])
Biographie
[1032]. CLERC, Julien-Nicolas, né le 14 décembre 1844 à Fresnes-sur-Apance (Haute-Marne), fit ses études au petit séminaire de Langres. Il entra laïque au Séminaire des M.-E. le 23 août 1866. Pendant les heures de loisir que lui laissaient ses études, il s'occupa des archives sous la direction de M. Rousseille ; il se dévoua à ce qu'on appelait l'Œuvre des carrières ", qui consistait dans la visite hebdomadaire (le mercredi, jour de congé) par quelques aspirants, des ouvriers travaillant dans les carrières de Meudon. Ordonné prêtre le 22 mai 1869, il fut envoyé le 3 août suivant au Se-tchoan méridional.
Après un séjour de deux ans à Su-tcheou fou, il fut placé à la tête du district de Lou tcheou, où il resta treize ans. Il acheta un assez vaste terrain, construisit un bel oratoire, réinstalla deux écoles, et en établit même une pour les filles païennes que dirigèrent des vierges chrétiennes. Nommé provicaire par Mgr Lepley dès 1875, il sut en 1876 conjurer le pillage dont sa paroisse était menacée ; en 1884, il fonda un hospice. L'année suivante, pendant une épidémie de fièvre typhoïde qui fit, dit-on, plus de 10 000 victimes à Lou tcheou, il fut atteint par le fléau. Il voulut cependant aller administrer les sacrements aux mourants. Epuisé par ce dernier effort, il tomba pour ne plus se relever, et mourut le 22 mai 1885 à Lou tcheou.
Il avait fait preuve, dans son administration, d'une rare prudence, en même temps que d'une grande activité et d'une parfaite régularité. Il parlait et écrivait bien le chinois, était versé dans la littérature, et pouvait rivaliser avec de bons lettrés pour la composition de certaines pièces.
Nécrologie
M. CLERC
PROVICAIRE APOSTOLIQUE DU SU-TCHUEN MÉRIDIONAL
Né le 14 décembre 1844.
Parti le 3 août 1869.
Mort le 22 mai 1885.
Julien-Nicolas Clerc naquit à Fresnes-sur-Apance, le 14 décem¬bre 1844 ; son curé fut son premier maître, il jeta dans cette jeune âme les semences des fortes vertus, et l’envoya au Petit Séminaire de Langres pour achever ses études. Sous le brillant élève perçait déjà l’homme, et le vénérable M. Manois l’inscrivait avec cette note : « Bonne tête et bon coeur. Caractère énergique et capable de grandes choses. Sera un prêtre distingué. Ses humanités finies, il prit son diplôme de bachelier.
Au Grand Séminaire les qualités sérieuses s’accusent et la volonté se trempe. On sent qu’il sera quelqu’un, et l’éminent supérieur le signale comme un jeune homme sérieux, très ardent pour l’étude et fort régulier.
Lorsque Dieu l’appela aux Missions, M. Clerc n’hésita pas ; il demanda à ses supérieurs l’autorisation de partir, et après l’avoir obtenue, il écrivit à sa famille : « Mettez-vous à genoux et priez, car tout est décidé. »
Ordonné prêtre le 12 mai 1869, il fut destiné au Su-Tchuen Méri¬dional. Avant de partir, il passa quelques jours à Fresnes. On a gardé le souvenir des dernières paroles qu’il adressa à ses compatriotes :
« Adieu ! nous ne nous retrouverons peut-être plus sur les rivages du temps, mais n’oubliez pas que le rendez-vous est aux cieux I
« Adieu ! vénéré Pasteur qui avez favorisé ma vocation, que l’ange du missionnaire vous récompense !
« Adieu ! chers condisciples et amis qui m’avez donné des marques si sympathiques de votre attachement !
« Adieu ! bons vieillards, et vous surtout, jeunes gens, qui avez partagé les jeux de mes premières années, n’oubliez pas vos devoirs. Soyez un jour la joie de vos familles, l’orgueil de votre pays, la con¬solation de l’Église !
« Adieu ! paroisse chérie, prie pour le missionnaire du Su-Tchuen Méridional : prie Dieu de réaliser le rêve de ses jeunes ans, celui de teindre de son sang le glaive du bourreau, s’il plaît à la sainte volonté de Dieu ! A Dieu seul, honneur et gloire à jamais ! »
Arrivé en Chine au mois de décembre 1869, M. Clerc, se montra dès le premier instant ce qu’il fut jusqu’à son dernier soupir : un grand et dévoué serviteur du divin Maître.
« Pendant seize ans que nous l’avons possédé au milieu de nous, écrit M. Boucheré, il a été notre modèle à tous par son amour de l’étude et la pratique de la vertu. Doué d’une belle intelligence, d’une mémoire des plus heureuses et d’un jugement solide, il ajouta à ces excellentes qualités naturelles une ardeur infatigable au travail, qui le rendit bientôt un sujet des plus distingués, et lui permit de rendre les plus grands services à la mission ; peu de confrères, je crois, en Chine, ont autant approfondi l’étude de la langue chinoise ; il la parlait et l’écrivait tout comme un indigène. Il pouvait même lutter avec les premiers lettrés pour la composition de certaines pièces ou de livres de haute littérature.
« Toutefois cette ardeur à l’étude de la langue chinoise ne nuisait en rien à son application aux sciences sacrées : liturgie, Écriture Sainte, théologie, droit canon, tout lui était devenu familier ; et la sûreté de son jugement unie à sa science le mettait à même de débrouiller les cas difficiles, et de donner une solution claire aux questions proposées.
« Mais la science sans la vertu ne fait pas le missionnaire, et M. Clerc fut pour nous et parmi nous un modèle de vertu. Qui de nous n’a pas été édifié de son esprit de foi pratique en l’accomplis¬sement de ses devoirs quotidiens où la routine se glisse si aisément ? de sa constante régularité à ses exercices de piété ? Le cloître n’eût pu former un religieux plus ponctuel à la règle. Que dire de son zèle et de sa charité ? Sous une apparence un peu austère, M. Clerc cachait un cœur d’or. Parce que l’amour de Dieu le possédait complè-tement, il aimait ses confrères et ses chrétiens jusqu’aux sacrifices les plus durs ; il a été toute sa vie de mission, tel que sa maladie nous l’a révélé : immolation jusqu’à l’oubli de soi-même. Et certes je puis bien en parler pertinemment, puisque depuis seize ans la Providence a uni mon sort au sien. Je ne rappellerai pas les actes de dévouement que ce cher ami m’a prodigués tout le long du voyage, depuis le départ de Paris, sur terre et sur mer, pendant quatre mois jusqu’à notre arrivée à Souy-Fou ; pour tout dire, il n’eût pas hésité, s’il l’eût fallu, à donner jusqu’à son sang pour me guérir ou sou¬lager. En mission, le bon Dieu a voulu que nous fussions toujours voisins de district, soit pendant ses deux ans à Souy-Fou, soit pen¬dant ses douze à treize ans de résidence à Lou-Tchéou : ce fut toujours chez lui, charité tendre, compatissante, prévenante à l’envi. Comme dit l’Apôtre : il ne pouvait savoir ses confrères souffrants, sans souffrir réellement avec eux, et les aider de son mieux avec un esprit pratique très remarquable. Plus on l’approchait et plus on l’estimait, plus on l’appréciait et plus on l’aimait. Pour abréger, j’ajouterai seulement que sa rare prudence sut éloigner de son dis¬trict de Lou-Tchéou, en 1876, le danger des désastres qui affligèrent Kang-Pè et Louy-hiIitig. Depuis plusieurs années son bon coeur lui avait inspiré de s’occuper du salut des déshérités de la fortune, en particulier des mendiants malades, et, l’an dernier, il avait pu fonder un hospice qui devint bientôt prospère. »
Comme le disait le P. Clerc lui-même dans ses dernières lettres : « Tout jusqu’alors pouvait lui faire bien présager de l’avenir », lors¬que hélas ! fondit sur la contrée le fléau dont il devait être la victime. « Depuis deux à trois mois, écrit M. Gaztelu, la famine avait déjà emporté beaucoup de victimes ; il y en avait eu plus de dix mille. Le mardi, avant-veille de l’Ascension, notre cher P. Clerc se sentit très fatigué et les premiers symptômes de fièvre se manifestèrent. Le lendemain après la sainte Messe, il dut s’aliter ; cependant, malgré son état de fatigue, il visita un malade en ville.
« Le jour de l’Ascension, il célébra la sainte Messe pour la der¬nière fois ; ce jour-là encore, il dut administrer les derniers sacre¬ments à deux malades ; l’un d’eux mourut sous ses yeux, à peine la cérémonie terminée ; le cher Père bénit le corps, et retourna chez lui épuisé.
« Le vendredi, il se trouva trop faible pour dire la sainte Messe, néanmoins il alla porter les derniers sacrements à un malade. Le bon Pasteur donne sa vie pour son troupeau ; plus malade lui-même que celui qui l’appelait, il voulut mourir sur la brêche et ne sut jamais refuser. Les chrétiens, inquiets de son état, envoyèrent le jour même prévenir un prêtre chinois.
« Le samedi au soir, la triste nouvelle m’arrivait, et le lendemain dimanche, j’étais à Lou-Tchéou ; la vue du malade m’inspira quelque inquiétude, il parlait encore, et sur la foi du médecin chinois, en qui il avait pleine confiance, lui-même conservait tout espoir.
« Le lundi, la journée se passa assez bien ; il put prendre quelques remèdes et je lui lus quelques lettres de confrères ; vers le soir, il eut une crise, et le lendemain matin, de plus en plus inquiet, j’envoyai chercher un confrère, depuis neuf ans voisin et ami de notre Provicaire.
« Le mercredi, la maladie s’aggrava, je demandai à mon cher mou¬rant s’il voulait recevoir les derniers sacrements. En souriant, il me répondit oui, par un geste de la tête. Il ne pouvait guère que dire un mot ou deux.
« Le lendemain jeudi, il n’y avait plus d’espoir. Le P. Scherrier arriva dans la soirée ; le malade le reconnut parfaitement. Le jeudi au soir, les chrétiens agenouillés auprès de son lit, reçurent sa der¬nière bénédiction ; sa main était trop faible, je la soutenais. Parmi ces chrétiens, il y en a deux que le cher malade a aimés et soignés plus particulièrement ; ils s’approchèrent de lui ; je lui demandai s’il les reconnaissait, il répondit par un dernier sourire.
« Le vendredi matin après minuit, le P. Scherrier apporta la sainte Communion à notre cher Provicaire, entouré toujours de ses chrétiens qui se succédaient auprès de son lit. Enfin vers midi, pendant que nous étions à prier pour lui à la chapelle, on vint nous avertir que l’agonie commençait. Elle a été fort douce. Le P. Scher¬rier récitait les prières des agonisants, et moi, penché sur le mori¬bond, je lui suggérais quelques oraisons jaculatoires. Le 22 mai à midi vingt minutes, sans secousse, notre vénéré Provicaire nous avait quittés, et aux prières succédèrent les larmes des assistants.
« Nous pleurions un confrère bien-aimé, qui nous laisse au mo¬ment où nous avions le plus besoin de ses lumières. Sa perte est pour nous irréparable autant que le sont les choses humaines. Dans nos doutes, dans les difficultés du ministère apostolique, nous recourions avec pleine confiance à notre cher défunt. Maintenant il n’est plus là, mais au ciel, il ne peut pas nous oublier. Mon Dieu, que votre sainte volonté soit faite !
Références
[1032] CLERC Julien (1844-1885)
Bibliographie. - Seize ans en Chine. Lettres du P. Clerc, provicaire du Su-tchuen méridional, recueillies et publiées par Jules Viard. - René Haton, éditeur, 35, rue Bonaparte, Paris, 1887, in-12, pp. viii-363.
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1877, p. 13 ; 1883, p. 48 ; 1890, p. 67 ; 1891, p. 90 ; 1910, p. 93 ; 1911, p. 299. - M. C., ix, 1877, p. 372 ; xx, 1888, p. 444. - A. M.-E., 1909, p. 34. - Sem. rel. Langres, 1866, p. 159 ; 1869, p. 73 ; 1870, p. 147 ; 1885, p. 634.
Hist. miss. Kouy-tcheou, Tab. alph. - Hist. miss. Thibet, Tab. alph.
Notice nécrologique. - C.-R., 1885, p. 202.