Jean-Théophile PINCHON1814 - 1891
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 0515
Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1846 - 1891 (Chengdu)
Biographie
[0515] Jean-Théophile Pinchon a été vicaire apostolique, pendant plus de trente ans, pour le Sichuan, Chine, au XIXe siècle.
Il naît au hameau Muraveau, commune de Chard (Creuse), le 7 janvier 1814, 13e enfant d'une famille très chrétienne. Il fait ses études à l'institution ecclésiastique de Felletin et au Grand séminaire de son diocèse. Après son ordination sacerdotale qui a lieu le 21 décembre 1839, il est nommé vicaire de la paroisse Sainte-Marie à Limoges. Il y reste jusqu'à son entrée au Séminaire des MEP le 3 octobre 1845. Il part le 27 février 1846 pour le Sichuan (Se-tchoan).
Chine (1846-1891)
Il est d'abord chargé du district de Koan hien, et y fonde la station de Tsa-ko-lao, bientôt bouleversée par la persécution. Dix-huit mois plus tard, il est nommé professeur au séminaire de l'Annonciation à Muping (Mou-pin). Peu après, il devient supérieur de cette maison, et reste pendant dix ans dans ces fonctions.
Lors de la division du Sichuan (Se-tchoan) en plusieurs vicariats en 1856, il fait partie du Sichuan (Se-tchoan) occidental. En vertu d'un bref du 23 avril 1858, Mgr Pérocheau le choisit pour coadjuteur en avril 1859, et le sacre évêque de Polémonium, à Ho-kia-in, le 4 septembre suivant. Pendant le temps de sa coadjutorerie qui dura deux ans, il visite les chrétientés.
Devenu vicaire apostolique le 6 mai 1861, il développe l'œuvre du baptême des enfants de païens en danger de mort et celle des séminaires. Par ses soins, on construit d'abord un Petit séminaire à Ho-pa-tchang, et, dix ans plus tard, non loin du même endroit, un Grand séminaire ainsi qu’un orphelinat de filles à Chengdu (Tchen-tou), et un orphelinat de garçons dans les montagnes de Tchang-chang-pin. Entre temps, Mgr Pinchon revient en Europe pour assister au concile du Vatican.
Pendant son séjour à Rome, il prend part à la révision du Règlement général de la Société des MEP, et se montre plutôt opposé aux réformes.
De retour dans sa mission, il reprend sa vie active, continue d'administrer un district comme un simple missionnaire, fait élever de nombreux oratoires, et un hôpital aux portes de Chengdu (Tchen-tou). Il tient un synode en 1880, à Yibin (Soui fou), avec les vicaires apostoliques ou leurs délégués de la quatrième région des missions de Chine. Il meurt à Chengdu (Tchen-tou) le 26 octobre 1891, et est enterré au cimetière Mo-pan-chan. Son épiscopat aura duré 30 ans.
Nécrologie
MGR PINCHON
ÉVÊQUE TITULAIRE DE POLÉMONIUM, VICAIRE APOSTOLIQUE
DU SU-TCHUEN OCCIDENTAL
Né le 6 janvier 1814.
Parti le 20 février 1846.
Mort le 26 octobre 1891.
Mgr Annet Pinchon naquit à Char (Creuse) le 6 janvier 1814. Entré prêtre au Séminaire des Missions-Étrangères, le 23 septembre 1845, il partit le 20 février 1846 pour le Su-tchuen. Nommé coadjuteur en 1859, il succéda à Mgr Perocheau comme Vicaire apostolique, en 1861.
C’est à la plume de M. Têtu, procureur de la mission du Su-tchuen Occidental, que nous devons la notice suivante sur la vie et les tra¬vaux apostoliques de Mgr Pinchon.
« La mission du Su-tchuen occidental vient de perdre son Vicaire apostolique. C’est une épreuve bien douloureuse, au milieu des cir¬constances que nous traversons. Quarante ans de mission, une longue expérience, plus de trente ans d’épiscopat, tout cela joint à de grandes vertus faisait de Mgr Pinchon un supérieur de mission estimé et vénéré. Dieu l’a retiré à Lui, que sa sainte volonté soit faite
« Mgr Pinchon était le treizième enfant d’une famille patriarcale de la Creuse. Les bons exemples du foyer paternel influèrent, de bonne heure, sur les dispositions naturellement excellentes du futur élu du Seigneur. Tout semblait concourir, dans les desseins de la Providence, à maintenir le futur apôtre dans la voie de sa vocation. Plusieurs générations de prêtres se sont succédé dans cette heureuse famille ; le cloître possède encore deux religieuses, nièces du vénérable Vicaire apostolique.
« C’est le 6 janvier 1814, jour de la fête des Rois, que naquit Annet Pinchon, devenu plus tard évêque de Polémonium, Vicaire apostoli¬que du Su-tchuen occidental. Ses premières années se passèrent sous les yeux d’un oncle prêtre, qui lui donna les premières leçons de latin. De là, Annet Pinchon fut envoyé au petit séminaire. Ses humanités finies, semblable à un paisible cours d’eau que le courant tranquille emporte à travers les campagnes, le jeune séminariste entra sans hésiter au grand séminaire, sous la conduite des vénéra¬bles Sulpiciens qu’admirent tous ceux qui ont eu le bonheur de les connaître. Ce que furent les progrès du jeune lévite dans les sciences et la vertu sous des maîtres si habiles, nous ne le dirons pas dans cette courte notice. Qu’il nous suffise de savoir qu’à cette époque, l’évêque du diocèse, ayant besoin d’un prêtre pour remplir momen¬tanément un poste, crut pouvoir élever à la prêtrise le diacre Pinchon, auquel il restait encore un an de théologie à faire.
« Ses études terminées, prêtre déjà depuis un an, l’abbé Pinchon fut nommé vicaire de la paroisse de Sainte-Marie de Limoges. Tel il s’était montré dans sa jeunesse, donnant toujours pleine satisfaction à ses maîtres, tel il fut dans les occupations du ministère paroissial. Pieux, zélé avec prudence, toujours grave, il laissa une impression profonde dans les âmes qui lui furent confiées. En 1870, alors que Mgr Pinchon était retourné en Europe pour assister au Concile, se trouvant à Limoges pour la Fête-Dieu et portant le Saint-Sacrement en procession, beaucoup de personnes en le voyant se disaient : « C’est l’ancien vicaire de Sainte-Marie ; « c’est lui qui nous a fait faire notre première communion. » Son souvenir était donc encore bien vivant, après plus de vingt ans d’absence !
« En effet l’ancien vicaire de Sainte-Marie, depuis plus de vingt ans, pour réaliser en sa personne cette parole de Notre-Seigneur Jésus-Christ qui disait à Pierre : « pousse ta barque au large et jette tes filets », avait quitté les charmes du pays natal, s’était rendu à Paris au Séminaire des Missions-Étrangères pour se pénétrer, sous la direc¬tion des vétérans de l’apostolat, des vertus qui sont plus spéciale¬ment requises des ouvriers évangéliques, et se préparer à porter les lumières de la foi aux peuples assis à l’ombre de la mort. Après quelques mois passés dans la bénite maison de la rue du Bac, où l’on respire les parfums des confesseurs et des martyrs, l’abbé Pinchon reçut sa destination pour la mission du Su-tchuen, en Chine. Quitter les lieux de sa naissance, laisser loin derrière soi les doux rivages de la patrie est un dur sacrifice pour la nature. L’abbé Pinchon le fit allègrement. Dieu cependant voulut augmenter la valeur de ce sacri¬fice. Notre apôtre avait encore sa mère. Cette pieuse femme qui espérait revoir son fils, en apprenant que tout était fini, se consume en quelques heures et rend le dernier soupir. L’abbé Pinchon l’ap¬prend, son cœur se laisse aller à l’émotion bien légitime d’un si tra¬gique événement, la bile se répand dans le sang, et en arrivant à Bordeaux il tombe dangereusement malade. Un grand vicaire du diocèse s’intéresse au jeune missionnaire ; le Saint-Sacrement est exposé dans une communauté de religieuses ; le mal s’arrête subite¬ment, et quand les vents favorables permettent de s’embarquer, l’abbé Pinchon peut se joindre à ses compagnons et faire voile pour les rivages de la Chine.
« Laissons de côté les périls de la traversée. Ne nous arrêtons pas dans les pays du Tonkin qu’on traversait, à cette époque, pour s’introduire clandestinement en Chine. L’abbé Pinchon, en compa¬gnie d’un autre missionnaire, après des marches qui paraissent incroyables aux jeunes générations de missionnaires, arrive enfin au Su-tchuen. Son cœur est content ; la terre promise est foulée par ses pieds ; la moisson est abondante ; l’ouvrier va se mettre à l’ouvrage.
« Après quelques mois passés à l’étude des éléments de la langue chinoise, le supérieur de la mission charge son nouveau missionnaire de visiter le district de Kouan-hien, qui comprenait alors cinq sous-préfectures, dans lesquelles on comptait environ deux mille chrétiens. Qui pourrait redire les difficultés d’un tel ministère ? Ces deux mille chrétiens, répandus en plus de vingt stations éloignées les unes des autres, demandent de la part du missionnaire des déplacements conti¬nuels. Il faut aller, de bourgade en bourgade, prêcher la parole de Dieu, entendre les confessions pendant le jour ; la nuit, être prêt au moindre signal à courir au chevet des malades. L’abbé Pinchon eut du succès dans ce poste. En plein pays barbare, à plusieurs journées de marche du centre de son district, une chrétienté fut ouverte ; plu¬sieurs dizaines de païens devinrent enfants de Dieu. Puis, le diable jeta le trouble dans le pays ; une révolution politique bouleversa tout, et cette jeune station de Tsa-ko-lao, semblable à un jeune arbre nou¬vellement transplanté dont les racines ne sont pas encore solidement adhérentes au sol qui vient de le recevoir, tomba sous l’effort de la tempête. Mais un rejeton était sorti du tronc de l’arbre, une tige uni¬que s’éleva, grandit et put se voir, jusqu’à ces dernières années, comme un témoin des eflorts passés.
« Dix-huit mois se passèrent à travers les rudes travaux de cet immense district, et l’on vit alors, ce qui n’est que trop souvent cons¬taté, une âme éprise du plus grand désir de la gloire de Dieu, mais unie à un corps qui refuse de donner tout ce qu’on lui demande. L’abbé Pinchon épuisé, languissant, menacé d’extinction à brève échéance, fut envoyé par Monseigneur Perocheau dans les montagnes de Mou-pin, au collège de l’Annonciation. Là, il serait permis au vaillant missionnaire de goûter un peu de repos tout en vaquant aux fonctions moins pénibles du professorat.
« L’air vif des montagnes, le calme de la solitude, l’exercice modéré du corps, les tranquilles occupations de l’enseignement réagirent bien vite sur la santé ruinée du missionnaire. Les forces revinrent et l’on put croire que notre apôtre allait reprendre le cours de ses prédications et de ses visites aux chrétiens. Mais le supérieur du collège de l’Annonciation vient à mourir, et Monseigneur Perocheau nomme à sa place l’abbé Pinchon. C’est là que nous voyons le nou¬veau supérieur, pendant dix ans, prodiguer à la jeunesse destinée au sacerdoce les enseignements les plus appropriés à sa vocation ; c’est là que nous voyons déjà poindre ce qui fut comme le trait distinctif de sa longue carrière épiscopale, je veux parler de son entente des affaires. En pays de mission, un supérieur d’établissement doit sou¬vent, outre ses fonctions de supérieur, être économe, agriculteur, traiter à la fois le spirituel et le temporel, car le personnel de la mission trop restreint ne permet pas toujours de donner des aides. M. Pinchon sut faire face à toutes les exigences. Son souvenir est encore vivant parmi les bonnes populations de la montagne. On redira longtemps ses bienfaits. C’est lui qui fut l’introducteur de la pomme de terre dans ces pays, et, nouveau Parmentier, laissa aux monta¬gnards une ressource de plus pour les nécessités de la vie. Ces dix années passées à Mou-pin furent, disait-il souvent, les plus heureuses de sa vie. Volontiers il y eût passé le reste de ses jours. Dieu l’appelait ailleurs.
« Monseigneur Perocheau parvenu à un âge avancé, accablé d’infir¬mités, chargé d’un Vicariat immense, prévoyait les inconvénients du long veuvage d’une mission à la suite du trépas de son Pasteur. Il résolut donc de se choisir un coadjuteur et son choix se porta sur le supérieur de l’Annonciation. Le choix fut agréé ; le nouvel évêque fut sacré ; le collège eut un autre supérieur, et notre coadjuteur âgé de quarante-cinq ans reprit ses travaux de prédilection, c’est-à-dire la visite des chrétiens, comme aux premiers jours de son entrée au Su-tchuen.
« Deux ans se passèrent ainsi. Monseigneur Perocheau, comblé de mérites, en grande réputation de sainteté parmi tous les chrétiens de la Province, rendit son âme à Dieu, et Monseigneur Pinchon de coadjuteur devint vicaire apostolique. Sa nouvelle charge fut un stimulant pour sa nature calme, indomptable, qui savait patienter et attendre, mais qui ne recula jamais d’un pas. Il envisagea la position avec résolution. La Chine venait de donner quelques libertés aux Églises réduites à vivre, dès leur origine, dans les catacombes : il fallait profiter de cet heureux événement.
« Plusieurs œuvres de premier ordre s’imposaient tout d’abord. Personne n’ignore le sort déplorable des enfants en Chine : les parents dénaturés, pour peu qu’ils soient dans la misère ou que le trop grand nombre d’enfants soit une charge pour la famille, jettent sans scrupule leurs filles à la rue ou s’en débarrassent en les tuant. Beaucoup d’autres enfants, sans être victimes de ces affreux traitements, meurent de misère et d’étiolement, dans le bas âge. Mon¬seigneur Perocheau avait déjà fait une large part à l’œuvre des enfants de païens en danger de mort ; Monseigneur Pinchon donna un nouvel accroissement à cette œuvre de charité. Sous son incessante impulsion, chaque année a vu enregistrer les baptêmes de quelques dizaines de mille d’enfants païens, dont la plupart ont joui presque aussitôt du bonheur du ciel.
« L’œuvre des séminaires pour le recrutement du clergé indigène s’imposait aussi impérieusement. Tant qu’avait duré l’ère des persé¬cutions, les élèves étaient formés, soit en dehors de la Chine, à Pinang, soit dans les pays barbares de Mou-pin. Aussitôt qu’un peu de liberté apparut, l’érection de collèges ou séminaires dans de meilleures conditions devenait absolument nécessaire. Un petit sémi¬naire fut d’abord fondé à Ho-pa-tchang ; puis, dix ans plus tard, le grand séminaire construit non loin du petit mettait la mission en état de se recruter convenablement pour le personnel des prêtres indigènes.
« Entre cette double fondation du grand et du petit séminaire, se place un événement dont le théâtre fut Rome et qui eut un retentis¬sement universel dans le monde, je veux parler du Concile du Vati¬can. Monseigneur de Polémonium, se rendant à l’appel du Souverain Pontife, retourna en Europe, assista aux mémorables assemblées où tant de grandes questions furent résolues, surtout celle de l’Infailli¬bilité du Souverain Pontife. Après cela, le grave conflit qui surgit entre la France et la Prusse ayant interrompu les travaux du Con¬cile, Monseigneur de Polémonium se hâta de revenir en Chine pour veiller aux intérêts de sa mission.
« Il avait alors cinquante-six ans. Pendant plus de vingt ans, il continua à se montrer infatigable. Dans presque tous les districts, où auparavant la visite des chrétiens se faisait dans de pauvres familles dont les masures servaient d’oratoires, des églises modestes et convenables furent édifiées. Le missionnaire, en dehors de ses courses, avait un lieu de repos pour récupérer les forces du corps et retremper son âme, dans la solitude, par le moyen des exercices de piété.
« Non content de ces travaux qui eussent suffi à une activité ordi¬naire, Mgr de Polémonium voulut toujours vivre de la vie de mis¬sionnaire et s’astreindre à la visite d’un district. Jusqu’à l’extrême vieillesse, il ne se donna aucune relâche, aucun repos. Et ce n’est que lorsque la surdité lui rendit impossible l’audition des confessions qu’il se résigna à devenir, comme il le disait fort humblement « un homme inutile ». Un homme inutile ! Oh non... Il continua à diriger sa mission jusqu’à la mort. Une œuvre, excellente entre mille, fut le couronnement de sa vieillesse : il bâtit un hôpital, aux portes de Tchen-tou, capitale de la province. Ce fut réellement la joie de son cœur, pendant ses deux dernières années de vie. Il se plaisait à aller, de temps en temps, rendre visite aux pauvres in¬firmes, leur adresser quelques paroles de consolation, et activer le zèle de ceux qui étaient préposés à guérir les maladies du corps en même temps qu’à montrer les clartés de la foi à ces déshérités du monde et à leur ouvrir les portes du ciel par le sacrement de régé¬nération.
« Mgr Pinchon jouissait, depuis près d’un an, d’une santé si pleine, si active, que nous redoutions tous une catastrophe soudaine. Car l’expérience nous avait appris que Sa Grandeur, après quelques mois de santé parfaite, était sujette soit à l’enflure des jambes, soit à la dysenterie. Cette fois-ci, ce fut la dysenterie qui se déclara, le 22 octobre, à quatre heures du matin. Ce jour-là, Monseigneur put encore célébrer la sainte messe, dire son bréviaire, écrire quel¬ques lettres ; mais il m’avoua, dans la journée, qu’il se sentait très fatigué, que l’appétit avait disparu. A cinq heures du soir, il vint encore dans ma chambre et me dit qu’il ne fallait pas l’attendre pour souper, car il avait hâte de se reposer. Vers huit heures du soir, j’allai le voir. Il me parut dormir paisiblement. Il ne s’éveilla pas, malgré le bruit que je fis ; j’en conclus que la fatigue de la journée, jointe à la surdité habituelle, l’empêcha de s’éveiller et de remarquer ma présence. Je me retirai donc. Le lendemain, dès cinq heures, j’allai prendre de ses nouvelles. Du premier coup d’oeil, je compris le danger. Sa Grandeur ne pouvait plus se lever ; le timbre de sa voix était changé : vite, je fis appeler un médecin. Ce dernier, après avoir tâté le pouls, fit un geste significatif et me dit en particulier que le vénérable malade, vu son âge, ne pourrait pas supporter cette maladie, que l’usage des médecines ne donnait que peu d’espérance. Le soir du même jour, 23 octobre, dans une seconde visite, le médecin ne changea pas son appréciation. Il ajouta même que le malade pouvait trépasser, d’un moment à l’autre. Vers neuf heures du soir, nous étions deux missionnaires présents : tout à coup le vénérable malade, qu’on avait mis un instant sur un fauteuil, laisse tomber sa tête sur sa poitrine, la respiration devient rare et nous croyons la catastrophe imminente. Heureuse¬ment cela ne dura que quelques instants et Monseigneur reprit ses sens. Celui qui d’habitude s’occupait des intérêts spirituels de Sa Grandeur lui proposa la réception des derniers sacrements. Monseigneur répondit simplement: « A votre volonté. » Il reçut donc le saint viatique et l’Extrême-Onction, fit ensuite une longue action de grâces et demanda à se coucher. Le reste de la nuit fut pénible ; plusieurs commencements d’agonie se manifestèrent. La journée du 24 fut également très mauvaise. Monseigneur, en pleiné connaissance, pouvait à peine prononcer quelques paroles. Nous fûmes constamment en alerte, croyant à chaque instant que c’était la fin. Cet état se prolongea ainsi jusqu’au 25, au matin. A ce moment, il y eut un peu d’amélioration. Monseigneur demanda à se lever et parut même vouloir s’aider des pieds et des mains pour épargner la fatigue aux personnes qui le soignaient. Mais dans la matinée le mal reprit sa marche et plus terrible et plus rapide. C’était l’agonie lente, certaine, avec de légers moments d’amélioration.
« Dans la nuit du 25 au 26, Monseigneur, en pleine connaissance, fixa longtemps la croix, baisa à plusieurs reprises le crucifix avec de grands sentiments d’amour. M. le Provicaire profita de ce mo¬ment pour proposer au vénérable agonisant de recevoir encore la sainte communion, Monseigneur accepta la proposition avec reconnaissance. La sainte communion lui fut donnée. Il reçut ensuite l’indulgence de la bonne mort. Alors les missionnaires, les prêtres indigènes, le personnel de la résidence épiscopale, tout le monde se mit à genoux et obtint une suprême bénédiction. Le mal ne relâchait rien de sa rigueur, la respiration devenait embarrassée, l’expectoration des glaires ne pouvait plus se faire, quelques gouttes de thé, prises de temps en temps, calmaient un peu l’étouffement qui devenait de plus en plus visible, et le 26, à dix heures du matin, Monseigneur rendait le dernier soupir.
« Les obsèques de Monseigneur furent faites avec un certain éclat. Plus de mille chrétiens y assistèrent. Beaucoup de païens voulurent être témoins de la manière dont nous honorions les morts et furent édifiés du ton religieux de la cérémonie, car chez eux, les superstitions faites ou plutôt le culte rendu aux morts consiste surtout en beaucoup de bruit, en de grands festins et autres choses qui ne disent absolu¬ment rien à l’âme, tandis que chez les chrétiens, les prières et les cérémonies font sentir et comprendre même à ceux qui l’ignorent que la mort est le passage du temps à l’éternité.
« A travers la ville, le cortège qui accompagnait sa dépouille mor¬telle au lieu de repos, entendit plusieurs fois les païens se dire entre eux : « Cet homme devait être un saint. » Pour nous, prêtres et mis¬sionnaires, qui avons été témoins d’une partie de sa longue vie, de ses vertueux exemples, de son édifiante régularité, de sa pleine con¬fiance en Dieu, nous dirons : Beati mortui qui in Domino moriuntur. »
Références
[0515] PINCHON Jean-Théophile (1814-1891)
Bibliographie. - Decreta quinque Synodorum jussu S. Pontificis Leonis XIII in Sinis habitarum anno 1880, a S. Cong. de Propaganda Fide approbata [Rome, 1884]. - In-8, pp. 87.
Contient :
Acta et decreta Synodi quartæ regionis Sinarum imperii habitæ diebus 20 et 29 septembris, 3 octobris anni 1880, in civitate Souy-fou, provinciæ Se-tchouan, pp. 66-76.
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1874 (janv.), pp. 35, 36 ; 1874 (déc.), p. 7 ; 1875, p. 10 ; 1876, p. 9 ; 1877, p. 11 ; 1878, p. 15 ; 1879, p. 16 ; 1880, p. 21 ; 1881, pp. 24, 26 ; 1882, p. 21 ; 1885, pp. 42, 177, 206 ; 1886, pp. 39, 231 ; 1887, p. 64 ; 1888, pp. 63, 246 ; 1889, pp. 59, 60, 324 ; 1890, p. 58 ; 1891, pp. 75, 317 ; 1898, p. 85.
A. P. F., xxii, 1850, p. 132 ; xxiii, 1851, pp. 254, 407 ; xlii, 1870, p. 65 ; xliv, 1872, Des obstacles à la conversion des Chinois, p. 405 ; Ib., p. 415 ; xlvii, 1875, Persécution à Chouen-kin fou, p. 88 ; xlviii, 1876, p. 138 ; xlix, 1877, pp. 101, 102 ; lvii, 1885, Soulèvement des païens, p. 24 ; lxiii, 1891, p. 147 ; lxiv, 1892, p. 153. - A. S.-E., iii, 1850-51, p. 351 ; xxii, 1870, p. 75 ; xxiii, 1872, p. 147 ; xxv, 1874, p. 88 ; xxxiii, 1882, p. 78 ; xxxv, 1884, p. 381.
M. C., ii, 1869, pp. 23, 373 ; iii, 1870, p. 252 ; iv, 1871-72, Discussion de deux faits allégués dans le Memorandum, p. 632 ; vi, 1874, p. 143 ; viii, 1876, Un nouveau libelle, p. 398 ; Ib., Persécution, pp. 554, 590 ; Ib., p. 590 ; ix, 1877, p. 3 ; x, 1878, Pacification, p. 194 ; Ib., pp. 400, 435, 555 ; xi, 1879, p. 174 ; xvi, 1884, pp. 518, 556 ; xx, 1888, pp. 281, 617 ; xxii, 1890, p. 554 ; xxiii, 1891, La famine, p. 397 ; Statistique de la mission, p. 509.
Sem. rel. Limoges, 1861, p. 436 ; 1891, p. 1081 ; Ib., Notice extraite de l'Abeille de la Creuse, p. 1184 ; 1892, pp. 52, 885. - Sem. rel. Lyon, 1891, 2e sem., p. 1141.
Hist. gén. Soc. M.-E., Tab. alph. - Hist. miss. Thibet, Tab. alph. - Hist. miss. Kouy-tcheou, Tab. alph. - Act. et hist. du Conc., vii, Notice, p. 53.
Collect., 26 août 1877 : n° 1478.
Notice nécrologique. - C.-R., 1891, p. 241.
Portrait. - M. C., xxiv, 1892, p. 150. - Act. et hist. du Conc., vii, p. 40.