Guillaume AROTCARENA1944 - 2015
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 4208
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Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Malaisie - Singapour
- Région missionnaire :
- 1972 - 1987 (Malacca)
Biographie
[4208] AROTCARENA Guillaume est né le 18 mai 1944 à Hasparren (Pyrénées-Atlantiques).
Ordonné prêtre le 18 juillet 1971, il part pour Singapour le 19 mai 1972.
À son arrivée, il complète sa connaissance de l’anglais pendant quelques mois, puis il est nommé vicaire à la paroisse St-Vincent de Paul (mai-septembre 1972). Il étudie ensuite le chinois à Taïwan. De retour à Singapour, il est vicaire à la paroisse du Christ Ressuscité (1974-1977) puis à la paroisse de la Sainte-Famille (1977-1980). Durant l’été 1980, il ouvre un centre dans le quartier de Geylang. C’est un projet dans la ligne des insertions nouvelles. Il fonde ensuite, en 1980, le "Geylang Catholic Center", dont il prend lui-même la direction. Il s’occupe très activement des prisonniers et des drogués, secondé par un bon groupe de laïcs, et il soutient la promotion des travailleuses étrangères. Son action n’est pas toujours acceptée et il doit quitter Singapour en 1987.
De retour en France, il est chargé de l’agence d’Information des MEP « Églises d’Asie », qui publie un bulletin bimensuel d'information sur l'actualité religieuse en Asie et un supplément mensuel fournissant des dossiers ou des documents en relation avec les événements. En 2000, il ouvre sur la rue du Bac la nouvelle librairie des MEP, la librairie de l’Asie culturelle et religieuse, et en 2002 le centre François Pallu, pour la formation des cadres chrétiens.
Il meurt le 3 septembre 2015 à Saint-Girons. Il est inhumé dans le cimetière des MEP à Montbeton.
Nécrologie
[4208] AROTCARENA Guillaume (1944-2015)
Notice nécrologique
Guillaume AROTÇARENA
1944-2015
Il a belle allure le jeune basque d’Hasparren qui débarque à Singapour en juillet 1972.
Sûr de ses racines et de sa langue, de ses traditions familiales et religieuses, il y est accueilli par l’archevêque Mgr Michel Olçomendy, un voisin né à Saint-Étienne-de-Baigorry, missionnaire dans ce pays depuis plus de quarante ans.
Cheveux noirs légèrement ondulés, favoris encadrant son visage bien du terroir, il regarde, il écoute et analyse. Accueilli chaleureusement par les confrères – il y a longtemps qu’on attend un jeune – il s’intègre vite à notre groupe et prend part à nos réunions. Il nous fait sortir de nos bavardages pour réfléchir à la situation dans laquelle nous vivons sans nous poser de questions. On le taquine : « Allez, prend un whisky – ce qu’il fait volontiers – et ne t’inquiète pas. Singapour n’est pas si mal que ça ! ».
Guillaume Arotçarena – Father Arrot comme on l’appellera bientôt – car son nom est imprononçable pour les asiatiques – Father Tom Jones comme le surnomme les adolescents de l’école catholique qui ont un faible pour lui – Guillaume qui est devenu Willliam nous rappelle que tout en étant de nationalité française, il est né et reste basque. Avec plaisir et humour il fait connaître autour de lui la réalité de ce pays atypique et il sait comment dire « basque » en chinois. Sans attendre on lui précise qu’il ira à Taïwan étudier le mandarin. Il s’appellera alors Yang –Yang Shern Fu – le Père Yang. Mais pour l’instant, c’est l’anglais qui l’occupe au service d’une paroisse.
Le lundi, il est heureux de partager notre repas de groupe et de trouver quelques confrères pour des parties de tarots. Nous apprécions ses points de vue qui secouent notre routine. Les sentiers battus ne seront pas pour lui, mais il sait attendre et prendre racine dans un nouveau terroir. Il est de la race de François-Xavier.
Famille et jeunesse
Guillaume Arotçarena nait le 18 mai 1944 à Hasparren, quartier Hasquette, et est baptisé le jour même. Il est l’aîné de cinq enfants : quatre fils et une fille. Son père est ouvrier dans la chaussure, une industrie traditionnelle de cette petite ville.
Il suit la filière habituelle : école libre, collège Saint-Joseph, puis petit séminaire d’Ustaritz. En septembre 1963 ils sont quatorze nouveaux aspirants à entrer à Bièvres. Deux seulement, Guillaume et Léon Harostéguy, seront ordonné prêtre.
Tout au long de ces années de formation, les observations des supérieurs ou des curés ne sont que louange. Le chanoine Greciet supérieur d’Ustaritz écrit : « Intelligence et volonté au-dessus de la moyenne. A de la personnalité, sait prendre des initiatives. Influence réelle sur ses camarades. »
En 1969, le supérieur de Bièvres donne son rapport en vue de l’agrégation dans la société : « Avis très favorable. G. Arotçarena est foncièrement sérieux sous des dehors décontractés… plein d’humour…en parlant avec lui on a l’impression d’avoir affaire à un homme fait … sinon parfait… semble avoir réfléchi très sérieusement aux problèmes du sacerdoce et de la mission… issu d’un milieu plutôt traditionnel semble être parvenu à une vraie personnalité, capable d’une indépendance d’esprit de bon aloi. »
Son curé dira que sa vocation est sérieuse mais ajoutera : « Porté à la sévérité, très autoritaire, a besoin de s’adoucir un peu, de devenir plus humble et compréhensif ».
On mentionne que concernant sa coopération aux Comores – il y enseigna le français et le latin en soutane – « Le témoignage reçu est très élogieux ».
Il doit travailler pendant les vacances pour gagner sa vie et il le fait sans plaindre sa peine, à Saint-Jean-de-Luz. « Il aurait eu une très bonne influence sur les six autres séminaristes au travail. » précise le curé.
Tonsuré en 1970 à Corbeil, il reçoit les quatre ordres mineurs à Issy-les-Moulineaux ; sous-diacre à Versailles, il est ordonné diacre à Bayonne le 29 juin 1970.
Destiné à la mission de Malacca le 8 juin 1971, il est ordonné prêtre à Hasparren par Mgr J.P. Vincent le 18 juin 1971. « C’est avec une grande joie que j’ordonnerai prêtre un missionnaire originaire du diocèse et je suis heureux qu’il s’en aille à Singapore pour être le collaborateur de Mgr Olçomendy. Peut-être cette ordination fera-t-elle naître de nouvelles vocations missionnaires. Je souhaite de tout cœur que le Pays Basque continue, comme par le passé à être tourmenté par le salut des âmes, non seulement dans le diocèse, mais dans l’Église toute entière. »
Guillaume a 27 ans. Après un séjour en Angleterre, il part pour Singapour le 19 mai 1972.
Un premier contact : Singapour mai-septembre 1972 puis Taïwan 1972-1974
Mgr Olçomendy l’envoi pour quelques mois à la paroisse de Saint-Vincent-de-Paul dont l’église a été terminée depuis par le P. Henri Saussard. Un confrère haut en couleur, très dévoué à ses paroissiens, qui avait passé une dizaine d’années à Pondichéry et qui pour des questions de castes avait dû prendre du large. Il introduit le nouveau venu dans le milieu tamoul, lui fait découvrir la pauvreté de beaucoup, l’initie aux curries bon marché aussi bien qu’au fastes culinaires des grands restaurants. Un mélange original et surprenant dans lequel Guillaume se trouve à l’aise, adaptant son anglais à la manière locale.
Quatre mois sont vite passés et le voilà pour deux ans à Taïwan, Hsinshu, l’école de langue tenue par les Jésuites apprenant le chinois mandarin, découvrant un peu de la culture locale et visitant nos confrères de Hwalien.
Il nous revient en octobre 1974 avec une bonne connaissance de la langue parlée, mais ce ne sera jamais un sinologue de haut vol.
Vicaire : Toa Payoh – Katong 1974-1980
C’est auprès du P. Pierre Abrial, un remarquable missionnaire, catéchiste infatigable qui prépara des milliers de gens au baptême, un ancien de Chine, fluent en mandarin, qu’il commence son travail pastoral. Curé et vicaire deviennent vite amis dans cette paroisse du Christ Ressuscité ouverte en 1971, au cœur de la ville satellite de Tao Payoh – autour de 250000 habitants tous logés dans les HLM – avec de nombreux catéchumènes et organisations de qualité – Les prêtres visitent régulièrement leurs paroissiens – Ça « ronfle » avec 6000 à 8000 personnes aux messes du dimanche.
Guillaume s’intéresse non seulement aux personnes mais essaie de découvrir les mécanismes sociaux et politiques du pays qu’il trouve par trop structuré et téléguidé. Un parti unique au pouvoir depuis des années avec une opposition muselée. Il analyse et s’exprime dans le dossier France-Asie sous le nom de plume de Gilles Asquet : « Singapour, les problèmes de la succession. »
Il remarque vite la situation des employées de maison, venues pour la plupart des Philippines, sans protection légale, au salaire imposé, avec alors un jour de repos par mois et entrant dans l’illégalité si elles changeaient d’employeurs. Comment les aider lorsqu’elles viennent demander secours dans les paroisses.
En octobre 1977, il est nommé vicaire à la Sainte-Famille, une vieille paroisse de tradition eurasienne dans le faubourg de Katong. Les prêtres des trois églises de ce quartier essaient de travailler en équipe. Le dimanche, ils changent de paroisse pour la prédication, ils préparent ensemble leurs homélies et après une mission, organisent des groupes de quartier qui une fois par mois partagent sur la parole de Dieu et la vie quotidienne. Ces groupes sont encore bien vivants en 2017… Ils s’aident pour le ministère de la prison. Guillaume se trouve à l’aise et épaulé dans ce milieu où il continue à aider ceux qu’on exploite. Il partage beaucoup avec les prêtres locaux qui vont dans la même ligne.
Le centre de Geyland : 1980-1987
Sur sa demande, l’archevêque Mgr Yong le nomme aumônier des prisons et l’autorise à fonder un centre social « le Geyland Catholic Center » dans un quartier populaire bien connu pour ses dourians et ses maisons de prostitution. Les paroisses aident pour le financement et l’encouragent. Il se dépense à plein dans ce monde de prisonniers, de drogués et de travailleurs étrangers. Entouré de laïcs dévoués et compétents, spécialement des avocats qui aident à démêler des situations frisant l’illégalité. Son centre est pour beaucoup un lieu d’accueil et de sécurité. Sans le dire les autorités acceptent ce refuge qui n’est pas selon les normes, car cela répond à un besoin. D’un autre côté la police se méfie de ce groupe qui s’occupe des problèmes sociaux et soutient les droits des travailleurs étrangers. De temps à autre, une visite qui se veut discrète, quelques questions et recommandations rappellent que l’on est surveillé. Guillaume et ses amis le savent, mais ils continuent leur mission et acceptent de prendre des risques.
En 1986, à l’occasion de la courte visite du Pape Jean-Paul II, après l’entrevue avec le président de la République, le premier ministre commente à haute voix : « Nous n’avons pas de problème avec l’Église catholique, excepté avec quelques prêtres qui sont trop radicaux. » À bon entendeur… La commission diocésaine justice et paix, animé par un secrétaire bien formé, il a terminé tout son cursus de séminaire à Penang en un temps où fleurissait Vatican II, essaie de faire connaître la doctrine sociale de l’Église comme partie intégrale de l’Évangélisation. Le journal catholique se situe dans la même ligne. Bientôt, c’en est trop.
Guillaume est un « communiquant ». Ce qu’il connaît et analyse, il tient à le partager. En 1985, il publie un livre, The Maid Tangle, la saga des employées de maison, dans lequel il fait connaître la réalité des conditions de travail auxquelles beaucoup d’entre-elles ont à faire face. Il a assemblé une abondante documentation et ce qu’il révèle n’est pas du goût des autorités. Il devient quelqu’un qui dérange.
Les confrères des Missions Étrangères apprécient et soutiennent son apostolat, même si d’aucuns ne le comprennent pas toujours et lui de son côté est au service du groupe acceptant de devenir conseiller du Supérieur Régional en 1985.
Oui, mais le gouvernement veut avoir la responsabilité exclusive de ce qui regarde le social et la politique. Il n’entend recevoir des leçons de personne. Il faut remettre tous ces gens à leur place. Ils n’ont pas tenu compte des avertissements qu’on leur donnait. Le premier ministre, M. Lee Kuan Yew, prend les choses en main.
Le bras de fer : mai 1987
Le 21 mai 1987, dès les premières heures du matin, usant des pouvoirs donnés par « l’Internal Security Act », la police arrête seize personnes. Dix font partie de divers groupes catholiques, quatre sont des salariés de l’archevêque, les autres des volontaires.
L’Église réagit avec diverses manifestations mais est bientôt muselée, l’archevêque lui-même est intimidé, la presse catholique arrête de paraître. Le 26 mai le ministre de l’Intérieur dit que « le gouvernement a découvert une conspiration marxiste qui entend renverser le gouvernement et établir à Singapour un état communiste »… Les communiqués se multiplient, la télévision donne les « confessions » de certains détenus, et il y a des conférences de presse bien orchestrées avec le premier ministre qui y fait assister l’archevêque. Le gouvernement ne permettra pas de mener des activités subversives sous le couvert de religion… Il devenait clair que les quatre prêtres concernés par la situation pourraient être arrêté sous la loi d’urgence. Guillaume, dont le centre était désormais fermé, préféra rentrer en France pour un temps. L’Église se sentait blessée et humiliée. Il fallait faire connaître les faits tels qu’ils étaient. Deux personnes resteront arrêtées sans jugement pour plus de deux ans, et notre confrère parle à la presse et va jusqu’à Rome rencontrer le cardinal R. Etchegaray alors président de Justice et Paix et Cor Unum.
De retour pour un temps : 1988-1989
Son permis de séjour permanent étant encore valable, l’archevêque accepte le retour de Guillaume pour un travail pastoral en paroisse. Il revient dans une communauté qu’il connaît bien, le Christ Ressuscité à Toa Payoh. Le curé, le P. Francis Lee l’accueille volontiers. Il s’occupe des enfants de chœur, du groupe charismatique et lance le catéchuménat d’adultes. Les catéchumènes sont nombreux. La police le surveille et l’interroge : comment a-t-il-pu rencontrer le cardinal R. Etchegaray. La réponse est simple : « Il est basque et je suis basque. »
À Paris on a besoin d’un « communicant » pour s’occuper du bulletin d’information missionnaire Église d’Asie. D’aucuns le trouvent sous employé à Singapour. Aussi le P. Jean-Paul Bayzelon, supérieur général, le rappelle en 1989.
En France : 1989-2015
En 1989, le P. Arotçarena a 45 ans et seconde le P. Albert de Biesme, qui dirige alors la publication du bulletin d’information missionnaire Églises d’Asie. Les deux confrères échangent leurs rôles le 1er juillet 1990 et leur équipe accueille alors le P. Jean Maïs, qui travaille jusqu’à aujourd’hui pour Églises d’Asie.
Églises d’Asie est à l’époque un bulletin bimensuel d'information sur l'actualité religieuse en Asie augmenté d’un supplément mensuel qui fournit des dossiers ou des documents en relation avec les événements. Une publication similaire, BEMOI, joue le même rôle pour Madagascar et l’océan Indien. BEMOI a disparu, tandis qu’Églises d’Asie est devenue une agence d’information des Missions Étrangères publiant exclusivement par messagerie électronique.
Pendant 16 ans, de 1990 à 2006, le P. Arotçarena dirige Églises d’Asie. Il est élu par l’Assemblée générale réunie en 1992 troisième assistant du supérieur général, le P. Raymond Rossignol, pour un mandat de six ans. Cette responsabilité prenante au service du bien commun de la Société l’amène à visiter les confrères en plusieurs pays.
En 2000, il ouvre sur la rue du Bac la nouvelle librairie des Missions Étrangères, la librairie de l’Asie culturelle et religieuse, et en 2002 le Centre François Pallu, destiné à la formation des cadres en relation professionnelle avec l’Asie. De septembre 1990 à juin 1997 il coopère à tiers temps avec l’équipe des prêtres de la paroisse de Montigny-le-Bretonneux, dans la ville nouvelle de Saint-Quentin-en-Yvelines.
En août 2004 le supérieur général, le P. Jean-Baptiste Etcharren, le nomme responsable du « service information » nouvellement créé, qui comprend, outre les services qu’il dirigeait déjà (publications Églises d’Asie et BEMOI, le Centre François Pallu et la librairie), l’internet, l’audio-visuel, et la revue Missions Étrangères, qui est une publication mensuelle parlant des missionnaires MEP et des pays où ils servent. Le P. Arotçarena apporte à celle-ci des modifications en 2005 et il fait embaucher un salarié pour la confectionner. Il développe la communication des Missions Étrangères au moyen de commandes de bandes dessinées, de films et d’émission de radio.
Il y fera un travail considérable, déployant de grandes capacités de création, d'idées, stimulé par l'idée que les Missions Étrangères risquaient de disparaître à brève échéance en tant qu'envoyeur de missionnaires, si bien qu'il fallait investir tout azimut dans des projets qui permettraient de faire connaître l'Asie sous un autre angle que celui des médias français.
En décembre 2006, le supérieur général, le P. Jean-Baptiste Etcharren, décide de réunir en une seule entité le service d’information et le service d’animation et il en confie la responsabilité au P. Gilles Reithinger. Le P. Arotçarena le seconde jusqu’à la fin de son mandat initial au « service information », en août 2007.
Guillaume Arotçarena se retire alors à Saint Girons pour se consacrer à des recherches en vue de publier sur l’histoire récente des pays et des Églises d’Asie, dont il fut un observateur quotidien pendant une vingtaine d’années. En collaboration avec d’autres auteurs (Paul Jobin, Jean-François Sabouret ) il publie en 2009 Démocratie, modernité et christianisme en Asie, puis en mars 2014 une relecture des 9 dernières années de son ministère à Singapour intitulée Singapour vu d'en bas : Chronique d'un Basque en Asie (1980-1989).
Ce sera le dernier ouvrage du P. Guillaume Arotçarena, car le cancer contre lequel il lutte courageusement depuis plusieurs années vient à bout de ses forces. Le 3 septembre 2015, il décède à son domicile. Conformément à son désir, son corps fut inhumé dans le cimetière des confrères à Montbeton, le 7 septembre 2015.
Guillaume, le Vivant
Guillaume est quelqu’un qui s’intéresse aux personnes, à ceux qu’il rencontre dans la vie de tous les jours, à leur mode de vie, à leurs besoins, à leurs droits qui doivent être respectés, avec un soin spécial des petits, des paumés, de ceux qu’on exploite. Pour eux, il n’hésite pas à parler et à approcher ceux en autorité.
Avec les confrères, il rayonne la joie. Il est bien informé, a un bon sens de l’humour, sait taquiner et faire plaisir. De temps en temps il nous régale en faisant cuire un gigot d’agneau. La cuisinière chinoise n’en revient pas : « ce Père Yang, il est terrible ! » Mais elle avertit que l’agneau est une viande échauffante et pas très indiquée pour des célibataires !! Sagesse chinoise.
Toutes les quatre à six semaines, il amène Mgr Desperben, un basque, père de Picpus, ancien préfet apostolique de Hainan, en Malaisie visiter notre P. Jégo, curé de Pontian. Ils se sont connus en Chine. Tandis que les deux anciens se rappellent et bavardent, Guillaume se détend, et lit les derniers journaux français. Ça fait trois heures de route aller-retour et il le fait pendant des années.
Il nous pose des questions sur le futur de la Société qui vieillit et diminue en nombre. Il est et reste le plus jeune du groupe et l’Église de Singapour lui paraît par trop traditionnelle. Il sent des besoins nouveaux qui commencent à s’exprimer. Bien que minoritaire (5% de la population) les catholiques sont très présents dans le monde de la culture, de l’éducation, de la fonction publique, des professions libérales - Un monde classe moyenne/supérieure, d’éducation et de culture anglaise. Tout cela, il l’exprime après son retour en France dans divers articles. Dans un dernier livre, « A priest in Geyland », traduction de « Singapour vu d’en bas », il raconte et analyse ses années au service des employées de maison et des prisonniers.
Il est basque et fier de l’être. Très attaché à la culture ancestrale et parlant la langue avec élégance, il vit près de sa famille. Un neveu viendra le visiter. Il n’est pas pour autant un fanatique et manie fort bien le français. Ce qui se passe dans le diocèse de Bayonne lui tient à cœur et il essaie d’analyser les différents courants de pensée qui s’y expriment.
Autant Guillaume est clair dans ses idées et ses choix autant il a besoin de se sentir compris et affermis par les confrères. Après une longue journée au service du Centre, il aime le soir passer un moment avec le P. Dufay à la maison régionale. Il parle, il réfléchit à haute voix, son hôte l’écoute en fumant sa pipe, grognant de temps en temps quelques mots de sagesse. Il se détend et part avec une boutade : « Allez, comme d’habitude, tu n’as rien compris, mais ton whisky est bon. Je reviendrai ».
Oui, Guillaume vivant, qui a voulu et su partager sa vie. Guillaume d’Hasquette, Guillaume de Geyland. Merci. Adieu.
Michel Arro
Références
[4208] AROTCARENA Guillaume (1944-2015)
Bibliographie
1977 : « Singapour : les problèmes de la succession », dossier « Echange France-Asie », sous le pseudonyme de Gilles Asquet
1985 : « The Maid Tangle », au sujet de la situation des employées de maison étrangères à Singapour ; Editions Katong Catholic Book Centre
1991 : « Christianisme et politique en Asie orientale » in Documentation Française
1992 : « Christianisme et politique en Asie » in Ramsés, Editions Dunod, Revue annuelle de lIFRI
1997 : « Faut-il avoir peur des communautarismes » in Economie et humanisme, N° 343, Sociétés dAsie du sud, comment vivre ensemble
2003 : « Communautés en réseau, Eglises en réseau », in Mission de lEglise, « Mission et médias » OPM, N° 140
2004 : « Recrudescence des conflits religieux en Inde », in Mission de lEglise « Conflits à justification religieuse », OPM, N° 142
2004 : « Etre missionnaire aujourdhui » in Revue de médiologie N° 17, sous la direction de Régis Debray et Catherine Bertho Lavenir, éditions Fayard.
2007 : « Christianisme, modernité et démocratie à Singapour » in «Christianisme, modernité et démocratie en Asie), ouvrage collectif Editions Indes Savantes (à paraître en octobre 2007), sous la direction de Paul Jobin, Jean-François Sabouret et G. Arotçarena