Louis GARROT1915 - 1961
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3820
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Birmanie
- Région missionnaire :
- 1948 - 1961 (Mandalay)
Biographie
[3820] GARROT Louis, Jean, André, est né le 30 novembre 1915 à Labatmale par Pontacq, dans le diocèse de Bayonne. Il fit ses études secondaires au Petit Séminaire de Nay, puis il entra au Grand Séminaire de Bayonne. La guerre de 1939 est là; l'abbé Garrot est sous les drapeaux. En 1940, chef de section, il est blessé sur le champ de bataille; découvert deux jours après par une patrouille allemande, il est recueilli et soigné en Allemagne où il restera prisonnier juqu'en 1945.
Il entre alors au Séminaire de la rue du Bac, le 1er octobre 1945. Il sera ordonné prêtre le 20 décembre 1947, agrégé de la société le 1er avril 1948. Destiné pour la mission de Mandalay en Birmanie, ce n'est que le 27 juillet qu'il partira pour sa mission où il arrivera le 9 octobre. Il est déjà âgé de 33 ans.
Comme tout jeune missionnaire, le Père Garrot se met tout d'abord à l'étude des langues : l'anglais en premier lieu, puis chez le Père Mandin à Shwebo, il apprend le birman. Mgr. Falière lui confie un vieux village birman à Nabet. De là, il est appelé pour remplacer le Père Mercoeur, malade, à Zawgyi. Partout il se faisait des amis. Au retour du Père Mercoeur, le Père Garrot est envoyé pour les montagnes Chins. Tout d'abord c'est Tiddim, puis seul il est envoyé dans le poste de Kyankan; de très nombreux baptisés mais presque sans instruction. Le Père est heureux d'être parmi ces braves gens. Et le Père de faire de nombreux voyages pour visiter ces villages. Il était suivi d'un groupe de jeunes tout joyeux. On chantait, on priait, etc. Le résultat ? Un fait est certain : les anciens compagnons de route du Père Garrot sont devenus aujourd'hui les catéchistes les mieux formés des montagnes, ils savent et ils prient, car la prière a été la vie du Père Garrot.
Le Père est heureux à Kyankan et l'évangélisation de cette partie de la montagne chin avançait sûrement.
En 1956, en partie à cause de sa manière de vivre, le Père tombait malade et on fut obligé de le ramener à Mandalay. Remis sur pied, Mgr. Falière l'envoyait prendre la place du Père Jordan, curé de Lukshe, parti se reposer en France. A 42 ans, le Père Garrot se mettait à l'étude de la langue parlée à Lukshe. Ensuite, le Père pensait pouvoir retourner à Kyankan. Mais au retour du Père Jordan, il est muté à Hleikhiam, poste voisin de Lukshe, poste tenu il y a quelques années par le Père Nédélec. Les débuts furent difficiles, mais le Père avait le don de gagner la sympathie des gens. Bientôt, il se trouvait entouré par de nombreux enfants païens qui lui servaient la messe. Il visitait ses villages. Lui-même avait retrouvé sa belle santé, l'avenir était plein de promesses... et nous voici en 1961.
La retraite annuelle a lieu en janvier chaque année à Mandalay. 1961, la retraite terminée, le Père se prépare pour le retour à Hleikhiam. Il prend le bateau de Mandalay à Pakkoku. A Pakkoku, les choses ne sont pas faciles. Le Steamer ne vient pas à quai, il reste au milieu du fleuve, et ce n'est que le matin que l'on atteind la rive en empruntant une vedette à fond plat. Le Père transfert ses bagages sur la vedette, il y prépare son sac de couchage. Il retourne sur le bateau. Mais que se passera-t-il ? On ne le sait pas. En allant du bateau à la vedette, le Père Garrot est tombé à l'eau. Il fait nuit noire, aussi personne ne l'a vu tomber, deux femmes ont entendu le bruit de sa chute. Les gens du bateau en sont avertis, la police arrive mais les recherches n'ont rien donné et ce n'est que trois jours après que son corps est retrouvé. Il se trouvait sous le barge de débarquement où certainement les tourbillons l'avaient entrainé. C'était le 20 janvier 1961.
Nécrologie
In memoriam
Le Père Louis Garrot*
“Père Garrot noyé hier soir”, ce télégramme adressé à Monseigneur U Win archevêque de Mandalay, le 21 janvier dernier, jetait la consternation parmi le clergé et les communautés de la ville. Le P. Garrot avait quitté Mandalay l’avant-veille 19 janvier pour s’installer sur le steamer Mandalay - Pakkoku, à l’issue de la retraite annuelle. Il s’y était montré en pleine forme, joyeux de revoir ses confrères, de retrouver le P. F. Collard, qui avait rendu quelques mois plus tôt visite à sa vieille maman au pays béarnais. La retraite terminée, le P. Garrot avait couru les boutiques de Mandalay pour y faire ses provisions annuelles, et, ses caisses une fois remplies, il était parti : bateau jusqu’à Pakkoku, avion de Pakkoku à Kyauktu, de là par camion il devait monter à Mindat, ensuite, en deux ou trois jours, par les sentiers de montagne, rejoindre avec ses chevaux son poste de Leikkiam ; mais ce programme ne devait jamais se réaliser. Le bateau de Mandalay à Pakkoku arrive à la nuit devant cette dernière ville ; Pakkoku bâtie autrefois sur le bord du fleuve, se trouve maintenant à deux bons kilomètres de l’eau, le cours ayant dévié. Pour compliquer les choses, un îlot de sable empoche le steamer d’approcher la rive ; devant cet îlot il y a une barge où passagers et marchandises sont débarqués, et de là transférés sur une vedette à fond plat capable d’atteindre le rivage. Tous ces transferts se font dans la soirée ou le bonne heure le matin, et c’est seulement dans la matinée, au jour, que la vedette gagne Pakkoku. Le P. Garrot était seul, il a porté son bagage sur la vedette, y a même installé son sac de couchage, puis plusieurs fois on l’a vu passer de la vedette à la barge sur les planches qui réunissaient les deux, peut-être disant un dernier chapelet ? Personne ne l’a vu tomber, deux femmes ont entendu le bruit de sa chute dans l’eau ; inquiètes, elles ont remarqué la disparition du Père et alerté les gens du bateau, et plus tard la police ; les recherches n’ont rien donné, et seulement au troisième jour, comme on déplaçait la barge de débarquement, le corps est remonté à la surface.
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* GARROT André-Jean-Louis, né le 30 novembre 1915 à Labatmale par Pontacq, diocèse de Bayonne. Etudes secondaires au petit séminaire de Nay ; grand séminaire, à Bayonne. Entré aux Missions - Etrangères le 1er octobre 1945. Sous-diacre le 28 juin, diacre le 19 décembre, prêtre le 20 décembre 1947. Parti pour la mission de Mandalay le 27 juillet 1948. Décédé accidentellement par noyade le 20 janvier 1961 dans sa mission.
C’est seulement à l’âge de 33 ans que le P. Garrot était ordonné et recevait sa destination pour la mission de Mandalay ; il avait en effet fait la campagne de 1940, et, chef de section, était tombé blessé sur le champ de bataille ; découvert après deux jours seulement par une patrouille allemande, le blessé était recueilli, soigné en Allemagne, et devait y rester prisonnier aux environs de Berlin jusqu’en 1945. Ses compagnons de captivité ont gardé le souvenir de son dévouement infatigable, de son humeur toujours égale.
Arrivé en Birmanie avec le P. Burck, le P. Garrot dut, comme tous les jeunes, étudier les langues : l’anglais d’abord, puis chez le P. Mandin à Shwebo le birman ; Mgr Falière lui confiait alors un village de vieux chrétiens birmans, Nabet ; de là le P. Garrot était appelé à remplacer le P. Merceur, malade, à Zawgyi. Partout il se faisait des amis, il avait le don de gagner la sympathie de ses ouailles. Au retour du P. Merceur commençait la grande aventure missionnaire : le P. Garrot partait enfin pour les montagnes chin, et c’était une nouvelle langue à apprendre, le dialecte de Tiddim ; aussitôt débrouillé, le Père recevait son poste, Kyankan, la pointe extrême du groupe nord ; il y avait dans les villages d’assez nombreux baptisés, mais presque sans instruction, et le P. Garrot, premier résidant de l’endroit, devait se charger de retrouver ces chrétiens, assez nomades, de les instruire et d’augmenter le troupeau. Ces premières années ont été les années heureuses de sa vie missionnaire ; le P. Garrot était toujours en voyage, voyages longs et pénibles : cette partie des montagnes est moins peuplée que le centre, les villages éloignés les uns des autres parfois par toute une journée de marche ; dans la brousse le tigre est roi, et le Père ne possédait pas de cheval. Il allait, suivi d’un groupe de jeunes, chacun portait une part du mince bagage, et c’était là à défaut d’autre chose la fameuse école ambulante du P. Garrot ; il allait, et comme la route était longue, il arrêtait son groupe pour la pause, apprenait alors quelque chant aux gamins, “Frère Jacques” ou autre ritournelle puis passait à quelque point de catéchisme ; reposé, chacun reprenait gaiement la marche. Un fait reste certain : les anciens compagnons de route du P. Garrot sont aujourd’hui les catéchistes les mieux formés des montagnes, ils savent et ils prient. La prière a été la vie du P. Garrot ; s’il avait en voyage quelque confrère avec lui, il lui tenait compagnie un temps, puis laissait le confrère prendre de l’avance, le P. Garrot sortait alors de son sac quelque brochure, ordinairement une publication carmélitaine, et seul il priait ou encore chantait sa prière. Un certain jour deux visiteurs avaient ainsi pris de l’avance sur lui et l’attendaient au rendez-vous, une source en montagne où on devait prendre le repas ; arrivés au point d’eau, les confrères s’installent, impossible de commencer le repas sans le P. Garrot : les provisions sont dans le sac de ce dernier ; l’attente se prolonge ; on s’inquiète, c’est un coin où on peut rencontrer tout, les tigres, les ours abondent. Les confrères reviennent sur leurs pas, et bientôt découvrent le Père, à genoux, au pied d’un arbre, perdu dans le Bon Dieu... Il priait le jour, il priait la nuit, se levant sans bruit pour ne pas gêner ses visiteurs... A Kyankan même le P. Garrot avait une église dont la sacristie lui servait de presbytère ; il y reposait dans une caisse étroite ; une table, et d’innombrables caisses formaient le reste du mobilier. Le contenu de ces caisses était mystérieux, il en écartait les curieux, tout comme à Mandalay il aimait faire ses achats seul, et préparer son bagage sans témoins. En fait il dépensait tout ce qu’il pouvait avoir pour ses gens ; médecines, habits pour les enfants ; pour ces derniers encore : friandises, sucre de palme, savon, et autres bricoles inconnues des gosses de la grande jungle. L’église du P. Garrot était comme un musée, il aimait les images, on en trouvait sur tous les murs, il les expliquait à ses gens, et il prenait lui - même grand plaisir à ces décorations. Plus tard, le Père bâtit son presbytère. Là encore il voulut se contenter d’une maison chin, sans fenêtres, il répugnait à vivre à niveau de vie plus élevé que celui de ses chrétiens ; la maison servait au Père et aux enfants de l’école qu’il pouvait grouper autour de lui. Pour les repas il eut la même indifférence, satisfait de n’importe quoi, pauvre parmi les pauvres de ce pays de misère et de famine. Le P. Garrot avait aussi quelques villages le long de la route de Tamu qui mène en Inde, au pied des montagnes ; un jour, dans un camion qu’il avait pris avec son groupe d’enfants et deux confrères pour atteindre un hameau plus au sud, un des confrères remarque un Indien, lépreux, mangeant dans la gamelle du Père le riz de ce dernier. “Eh, P. Garrot, c’est aussi l’un de vos suiveurs ? — Non, je ne le connais pas, c’est un pauvre qui vient de l’Inde, et qui n’a pas d’argent.” Il se liait ainsi de confiance avec le premier venu. Plus loin sur cette même route, à un des arrêts du camion, le P. Garrot et les enfants partageaient dans cette même gamelle certainement pas lavée les restes du lépreux. Bien que rappelé souvent à la prudence, le P. Garrot restait le même : il écoutait, approuvait, promettait mais ne changeait pas. En 1956, en partie à cause de ses imprudences, il tombait malade, et sous les pluies de la mousson son voisin, le P. Jourdain, partait de Mualpi, au prix de difficultés inouïes réussissait à faire transporter le malade inconscient jusqu’à la route de Tamu, et y trouvait heureusement sans trop de retard un camion en direction de Kalemyo ; de là par avion le P. Garrot était amené à l’hôpital de Mandalay : il était squelettique. Les bons soins des docteurs, sa forte constitution, et bientôt le régime préparé par les Franciscaines de la léproserie St-Jean eurent raison du mal. Le rêve du Père était de remonter bien vite retrouver ses enfants de Kyankan, mais Mgr Falière décidait autrement : le P. Jordan était absent, en congé en France, et son poste de Lukshe sans prêtre. Il y avait là un couvent de Franciscaines, qui assureraient au Père un régime convenable, et celui-ci partait pour Lukshe ; or Lukshe, c’est le sud des montagnes Chin, la langue y est totalement différente de celle du nord ; à 42 ans, sans se décourager le P. Garrot se mettait à l’étude, aidé par les livres du P. Jordan, auteur d’un dictionnaire anglo-birman-chin, chin du secteur s’entend, puisqu’il y a sur ces montagnes 144 dialectes différents. A Lukshe, le. P. Garrot gardait la nostalgie de Kyankan, il espérait pouvoir y retourner quand le P. Jordan serait de retour, cet espoir devait être déçu ; au retour du P. Jordan, le P. Garrot était muté à Leikkiam, poste voisin de Lukshe, laissé sans titulaire depuis la mort du P. Nédélec en 1955. Les débuts furent durs, mais le Père avait le don de gagner la sympathie des gens, bientôt il groupait des enfants autour de lui, bâtissait avec l’aide et sous la direction du P. Jordan un presbytère convenable. Leikkiam avait encore un gros avantage sur la plupart des postes de montagnes : de la bonne terre et de l’eau à proximité, et tant pour les enfants que pour lui-même, le P. Garrot avait bientôt un jardin magnifique où il cultivait tous les légumes d’Europe. Il avait aussi des chevaux, et dans les longues tournées c’est un secours appréciable, tant pour le bagage que pour les jambes dans les rudes montées des montagnes. Le sacrifice de son premier poste fait, le P. Garrot s’était attaché à Leikkiam, ses enfants non encore baptisés servaient la messe en soutane rouge et cotta avec plus de recueillement que beaucoup de leurs “confrères” d’Europe sans doute... Le P. Garrot avait entrepris la visite des villages de son secteur, inscrit plusieurs familles comme catéchumènes, baptisé de nombreux mourants, enfants ou adultes. Lui-même avait retrouvé sa belle santé, il avait appris à dormir et à manger raisonnablement... l’avenir semblait plein de promesses... et Dieu l’a pris pour Lui… ses voies ne sont pas les nôtres... Deux jeunes sont morts missionnaires de Leikkiam : en 1955 le P. Nédélec, en 1961 le P. Garrot. Puissent-ils nous obtenir de là-haut que la route de Birmanie ne se ferme pas, et que d’autres puissent bientôt venir renforcer les rangs trop maigres de nos missionnaires, pour que le Règne arrive sur les montagnes et dans la plaine de Birmanie.
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Références
[3820] GARROT Louis (1915-1961)
Références biographiques
CR 1948 p. 149. 1951 p. 100. 1952 p. 79. 1953 p. 68. 1958 p. 73. 74. 75. 1959 p. 94. 1960 p. 79. 1961 p. 78. BME 1948 p. 375. 1949 p. 57. 60. 1950 p. 465. 1951 p. 307. 1953 p. 54. 592. 1954 p. 547. 553. 554. 1955 p. 656. 916. 1001. 1956 p. 792. 1957 p. 375. 882. 1958 p. 81. 1959 p. 364. 1018. 1022. 1023. 1960 p. 375. 638. 838. 839. 1961 p. 240. 389. 407 : notice. EPI 1969 p. 425. 605 sq. EC1 N° 439. 460. 464. 466. 692. NS. 2P59.