Ange-Marie GOUIN1877 - 1945
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 2639
- À savoir : Mort violente
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Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Missions
- Pays :
- Laos
- Région missionnaire :
- 1902 - 1945
Biographie
[2639] Ange-Marie GOUIN est né le 7 décembre 1877 à Maxent, dans le diocèse de Rennes (Ille et Vilaine). Il est issu d’une famille aisée, très chrétienne. Il fait ses études au Petit Séminaire de Saint Méen. Entré laïc aux MEP, il est ordonné prêtre le 22 juin 1902.
Laos (1902-1946)
Il part pour le Laos le 23 juillet 1902.
Son évêque, Mgr. Cuaz, le confie au P. Guégo, à Siengvang ; il y reste trois ans pour étudier la langue, et occupe la fonction de vicaire. Au début de l’année 1906, il est nommé adjoint au P. Combourieuc à Thaeré, où il dessert les postes annexes. En 1922, il passe sur la rive française du Mékong pour devenir curé de Kengsadok, au Sud de Paksane.
Peu après son arrivée, le 27 avril 1922, il est nommé vicaire apostolique, évêque d'Orcisto, succédant au défunt Mgr. Prodhomme , puis il est sacré le 1er octobre 1922 à Nongseng par Mgr. Perros, assisté de Mgrs. Bouchut et Quinton.
De nature très gaie, avec un tempérament actif et une vie spirituelle profonde, il donne une forte impulsion au développement de sa mission qui passe de 10.000 à 22.000 chrétiens avec une augmentation du nombre des prêtres laotiens.
Il revient deux fois en France: d'abord pour l'Assemblée générale des MEP de 1930, puis en 1938 pour un congé de santé.
De retour au Laos, début 1939, il se trouve immédiatement mêlé aux troubles graves consécutifs à l'état de guerre où est plongée la France. Le Siam en profite pour ouvrir les hostilités et les missionnaires, avec leur évêque, sont chassés de la rive siamoise de la mission. Mis en cage de fer avec quelques confrères, Mgr. Gouin a vécu la ruine de sa mission avant d'être expulsé sur la rive française : cathédrale, évêché, séminaire, tous les bâtiments sont détruits, les églises expropriées et incendiées, de nombreux chrétiens sont massacrés.
De 1940 à 1943, Mgr. Gouin continue son apostolat à Thakhek, sur la rive partie Est de la Mission du Laos (alors française) ; cependant, vaincu par la fatigue et la maladie, il donne sa démission qui est acceptée par Rome le 1er juillet 1943. Il se met alors à la disposition du nouveau vicaire apostolique, Mgr. Thomine, qui le charge de la Procure, d'une aumônerie et du cathéchisme.
Le 9 mars 1945, les Japonais, après avoir envahi le Laos, renversent l'administration en place et internent tous les Français dans des camps de concentration. Mgr. Gouin est arrêté avec Mgr. Thomine, le P. Thibaud, ainsi que plusieurs fonctionnaires français.
Attachés les uns aux autres, ils sont emmenés à Nakay, à environ 80 kms de Thakhek, où ils sont sauvagement fusillés par les Japonais, le 21 mars.
Les corps, laissés cinq jours à découvert sont inhumés sur place, puis ramenés à Takhek où des funérailles solennelles ont lieu en mai 1946.
Nécrologie
Mgr GOUIN
VICAIRE APOSTOLIQUE DU LAOS
Mgr GOUIN (Ange-Marie-Joseph) né le 7 décembre 1877 à Maxent, diocèse de Rennes (Ille-et-Vilaine). Entré laïque au Séminaire des Missions-Étrangères le 14 septembre 1897. Prêtre le 22 juin 1902. Parti pour le Laos le 23 juillet 1902. Evêque d’Orcisto et Vicaire apostolique du Laos en 1922. Mort tué par les Japonais le 21 mars 1945.
Mgr Ange-Marie-Joseph Gouin naquit le 7 décembre 1877 à Maxent (Ille-et-Vilaine) dans une famille aisée et très chrétienne. Nous n’avons aucune donnée sur ses jeunes années. Vif, primesautier, gai, il dut être un enfant agréable. Sa piété, imprégnée de foi bretonne, tenace et délicate, ne se démentit pas ; mais elle laissait bien un peu de place à la turbulence d’un âge qui entraînait Ange-Marie à jouer de bons tours à ses camarades d’enfance et à participer à leurs exploits. Il n’avait qu’une sœur, Léocadie, son aînée, qu’il aimait beaucoup. Celle-ci, devenue Mme Prioul, fut une mère de famille admirable et eut 13 enfants, dont 2, croyons-nous, moururent en bas-âge, 5 filles religieuses et un fils prêtre. C’est dire en quel milieu de foi ardente se développèrent les qualités d’Ange-Marie.
Il fut élève au séminaire de Saint-Méen. Intelligent et travailleur, il couronna ses études par le baccalauréat. Joyeux camarade, il n’était pas le dernier à mettre en action sa vivacité, sa franchise, son allant. En quittant le petit séminaire, il entra directement au Séminaire des Missions-Étrangères à Bel-Air, puis continua à Paris le cycle de ses études, interrompues par son service militaire à Rennes. Excellent aspirant sous tous les rapports, il gravit un à un tous les degrés du sanctuaire. Ordonné prêtre le 22 juin 1902, il reçut sa destination pour la Mission du Laos. A son arrivée, Mgr Cuaz le confia à notre inoubliable M. Guégo, breton comme lui ; il ne pouvait être à meilleure école pour s’imprégner de zèle apostolique, de bonté, de connaissance de la langue et des coutumes laotiennes. Pendant trois ans il resta avec M. Guégo, allant en barque ou à cheval, sur les deux rives du Mékhong, dans la région de Siengvang. Avec une ardeur juvénile et apostolique, il se plia au régime culinaire très simplifié de son curé. Tous deux, à temps perdu, défrichèrent des terrains encore incultes pour les transformer en rizières. Il devait travailler dur, car le curé disait à celui qui prit la place de M. Gouin : « Vous ne valez pas M. Gouin au travail des rizières. Lui, abattait son arbre en trois coups de hache...bretonne ! » A quoi, un peu dépité, l’autre répondait : « C’est que, moi, je n’ai pas de hache... bretonne. »
Au début de 1906 il quittait Siengvang pour le vaste poste de Tharë sur la rive siamoise. Poste modèle, établi et tenu pendant plus de 50 ans par M. Combourieu. Avec un tel maître, M. Gouin s’attacha avec enthousiasme à son idéal de missionnaire. Et plus tard il reviendra souvent, dans les conversations, sur les annexes de Tharë dont il avait eu à s’occuper. De Tharë, il repassa comme curé sur la rive française, à Kengsadok, au sud de Paksane. Kengsadok est un grand village composé en majeure partie d’une race quelque peu différente des Laotiens, et venue de la province du Tranninh (Annam). Il dut y éprouver plus d’une émotion, car ces gens, au caractère décidé, n’étaient pas tendres pour les voleurs et les batteurs d’estrade. Là, comme ailleurs, il sut se faire aimer, car il était la bonté même, mais pas aveugle, loin de là. Son esprit enjoué, sse manières vives et franches lui conquéraient facilement tous les cœurs. Et c’est là, en 1922, qu’il reçut sa nomination de Vicaire apostolique, succédant à Mgr Prodhomme, décédé. La décision du Saint-Siège lui causa de poignantes angoisses et lui fit éprouver beaucoup d’hésitation. Finalement, grâce à son grand esprit de foi, il accepta la lourde charge qui lui était imposée, au contentement de ses confrères. Il fut sacré en novembre 1922, par Mgr Perros, de Bangkok, assisté de Mgr Bouchut, de Phnom-penh et de Mgr Quinton, de Saïgon.
De charmant confrère, le voilà devenu Supérieur de ses Missionnaires ; son affection pour eux ne se démentit jamais. Parfois elle se traduisait en vivacités à fleur de peau qui plaisaient plutôt qu’elles ne rebutaient. Et plus tard, Mgr Dreyer, Délégué apostolique, en quittant la Mission du Laos, put dire : « J’emporte du Laos deux excellentes impressions : l’assiduité des chrétiens à la réception de l’Eucharistie et l’affection réciproque de l’évêque pour ses missionnaires et des missionnaires pour leur évêque. » Très gai de nature, Mgr Gouin le resta toujours. Sa piété était à la base de son activité. Combien de méditations commencées tôt et prolongées tard ! Combien de chapelets et de lectures pieuses ! Souvent il quittait la compagnie de ses confrères pour s’isoler et se recueillir !
Evêque, il ne ménagea pas sa peine. Parcourant à cheval sa vaste Mission arrivant chez ses missionnaires en coup de vent, se soumettant gaiement aux restrictions de la brousse ; le premier au confessionnal, aimable et gai avec les chrétiens, il passait partout en faisant du bien à tous. Il savait d’un mot tout simple, plein de foi, générateur d’espérance, relever un courage défaillant. Il est resté missionnaire tout en étant devenu leur Père. Tous les ans on était heureux de le retrouver à l’évêché de Nong-Seng, à l’occasion de la retraite annuelle. Il veillait au respect du règlement, surtout au silence prescrit. Et ce silence gênait bien un peu les « broussards » qui, ne s’étant pas vus depuis un an, avaient tant de choses à se dire, sans malice, bien sûr, ils le transgressaient avec une simplicité d’enfant qui s’ignore, et on entendait alors la voix de Monseigneur s’élever, un peu criarde, mais impérative. Tout rentrait dans l’ordre : « Que voulez-vous, Monseigneur, on n’est pas habitué à cela dans notre brousse. » Pitoyable excuse qu’il écoutait en souriant et en hochant la tête. Ses conseils, à la fin de la retraite, portaient surtout sur les moyens surnaturels d’apostolat : l’oraison surtout ; il y revenait sans cesse. Il voulait toujours plus et toujours mieux. Sous son impulsion, le nombre des chrétiens augmenta. De 10.000 qu’ils étaient au début de son épiscopat, ils sont maintenant plus de 22.000. Il s’occupa très activement du clergé indigène et des vocations. Aussi était-il heureux de pouvoir ordonner un prêtre et même trois en une seule fois !
En 1930, il se rendit à Paris pour prendre part à l’Assemblée décennale des Supérieurs des Missions-Étrangères ; sa grande simplicité et sa cordialité avenante conquirent et édifièrent les aspirants. Rentré au Laos, il continua sa vie laborieuse, ses tournées de confirmation. Mais sa santé commençait à fléchir. Sur les conseils des médecins, il dut en 1938, reprendre le chemin de la France pour demander au climat natal le rétablissement de ses forces. Au début de 1939, il nous revenait complètement rétabli. Mais bientôt les jours sombres survinrent. Les relations franco-siamoises qui n’avaient jamais été bonnes n’existaient plus. Il y eut la guerre : Siamois contre Français. Les missionnaires furent expulsés. Les bonzes venaient prendre possession des presbytères et des églises. Les apostasies furent sollicitées, les martyrs fusillés. L’Evêque lui-même fut arraché brutalement de son évêché sans pouvoir emporter quoi que ce soit. Mis en cage de fer, avec quelques missionnaires, ils furent ensuite tous expulsés en rive française. Cathédrale, évêché, séminaire, tous les bâtiments furent démolis, les briques emportées : la ruine- partout ! Quel deuil et quelles souffrances ! Comme notre pauvre évêque dut souffrir en pensant à tant de travaux rendus apparemment inutiles ! Mais jamais chez lui on ne put surprendre un geste de découragement. La S.C. de la Propagande lui envoya une lettre d’encouragement, de félicitations et d’espoir. Il la fit lire à la retraite devant ses missionnaires pour que tous continuassent à travailler au salut des âmes, plus et mieux que jamais.
Plus de 40 ans de Laos, dont plus de 20 d’épiscopat, lui avaient valu de nombreuses infirmités gênantes. Une opération avait été subie, mais sans résultat appréciable. Grandes étaient les distances et les voyages difficiles. Il ne pouvait donc guère se déplacer sans souffrances incessantes et sans fatigue excessive. Il donna sa démission qui fut acceptée en 1943. Il assista au sacre de son successeur, Mgr Thomine, en novembre 1944, mais ne voulut pas quitter le Laos qu’il aimait tant. Il se mit tout simplement à la disposition du nouveau Vicaire apostolique qui le chargea de la procure, d’une aumônerie et de catéchismes. « Et ce n’est pas fini ! » disait en riant Mgr Thomine.
De voir nos deux évêques unis si intimement faisait notre joie. « Notre clocher, nous le rebâtirons ! » avait dit lors de son sacre Mgr Thomine. Et on envisageait l’avenir avec confiance...
Hélas ! Quatre mois seulement après le sacre c’était l’irrémédiable désastre : le 9 mars 1945, les Japonais renversaient le Gouvernement français, s’emparant du pays, internant tous les Français dans des camps de concentration.
A Thakhek, devenu centre de la Mission depuis l’expulsion du Siam, les vainqueurs du moment se montrèrent particulièrement féroces, sous les ordres d’un criminel de guerre avéré. Arrestation des deux Evêques et de M. Thibaud, curé de Thakhek. Arrestation de tous les Français, emmenés à Nakay à quelque 80 kilomètres de cette ville, liés les uns aux autres ; les deux Evêques, M. Thibaud et plusieurs fonctionnaires français furent sauvagement fusillés par les Japonais le 21 mars. La tuerie continuait à Thakhek : une soixantaine de victimes en tout. Cinq jours après les corps des victimes furent retrouvés là où ils étaient tombés, par M. Cavaillier et le lieutenant Tavernier, qui leur donnèrent une sépulture provisoire. Jamais on ne connaîtra les détails de cette fin tragique. Ce n’est qu’au mois de mai 1946 qu’on exhuma les corps pour les ramener à Thakhek, où furent faites des funérailles solennelles.
Peu de temps après c’était M. Fraix qui tombait aux mains des Japonais, et qui, après des semaines de tortures, fut férocement assassiné par eux. Décapitée, la Mission eut encore à subir des avanies, des pillages, de la part des Annamites révoltés et du groupe du « Laos libre ». Les épreuves pour le Laos étaient on ne peut plus angoissantes.
L’exemple de nos Evêques, de toutes nos victimes, missionnaires et chrétiens, sera pour tous un soutien précieux. Mgr Gouin disait : « Le Laos ? C’est le tremplin d’où nous prendrons notre élan vers le ciel ! » Son élan, il l’a pris, et dans de telles conditions qui nous permettent de croire à son entrée au ciel par la grande porte.
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Références
[2639] GOUIN Ange Marie (1877-1945)
Références biographiques
AME 1902 p. 326. 1906 p. 353. 1921 p. 95. articles : 1925 p. 21. 86. 191. 192. 215. 216. 1928 p. 38. 126. 1930 p. 203. photo p. 202. 1932 p. 139. 1933 p. 94. 1935 p. 52. 234. 1936 p. 92. 237. 1937 p. 106. 1938 p. 105. 106. photo p. 188. 221. 1939 p. 43. CR 1902 p. 301. 1905 p. 237. 1906 p. 223. 1910 p. 252. 1914 p. 117. 1915 p. 138. 1916 p. 159. 1917 p. 130. 1922 p. 121. 138-141. 1923 p. 150-156. 1924 p. 117. 121. 1925 p. 128-131. 1926 p. 115. 143-146. 226. 227. 1927 p. 142-146. 1928 p. 121. 145-148. 1929 p. 191-197. 302. 303. 1930 p. 214. 219. 220. 244. 1931 p. 233-240. 1932 p. 260-267. 1933 p. 221-223. 1934 p. 198-204. 257. 1935 p. 156. 204-210. 1936 p. 195-200. 249. 1937 p. 199-202. 236. 237. 1938 p. 200. 203. 204. 1939 p. 140. 186-191. 1940 p. 102-105. 138. 139. 1947 p. 88. 149 notice. 229. 282. 283. 285. 1948 p. 127. 171. 172. 173. 175. 1952 p. 57. 1954 p. 56. BME 1922 p. 316. 381. 447. 576. 699. 1923 p. 61. 1925 p. 245. 246. 507. 1926 p. 258. 320. 777. photo p. 298. 1927 p. 389. 517. 576. 645. 1928 p. 124. 377. 416. 439. 695. photo p. 257. 384. 641. 1929 p. 566. 637. 697. 763. photo p. 720. 1930 p. 250. 274. 379. 383. photo p. 748. 1931 p. 76. 233. 385. 914. photo p. 235. 1933 p. 272. 621. 634. 718. 942. 957. photo p. 452. 1934 p. 135. 841. 1935 p. 899. photo p. 57. 1936 p. 73. 394. 1937 p. 524. 528. photo p. 244. 461. 1938 p. 411. 482. 553. 1939 p. 222. 366. 587. 595. 806. 874. photo p. 804. 1941 p. 53. 60. 199. 1948 p. 359. 361. 362. 363. 365. 1950 p. 467. 1951 p. 765. 1952 p. 575. 1953 p. 674. 1954 p. 806. 1956 p. 283. 661. 1095. 1096. 1958 p. 785. R. MEP. 1961 N° 116 p. 7. 8. EC RBac N° 13. 22. 193. 195. 202. 208. 382. 393. 394. 397. 404. 405. 427. 428. 435. 436. 437. 439. 441. 671.