François DELORT1873 - 1906
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2344
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Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Birmanie
- Région missionnaire :
- 1898 - 1906 (Mandalay)
Biographie
[2344] DELORT, François, né au hameau de Carsac, commune d'Arpajon (Cantal), le 31 décembre 1873, élève du petit et du grand séminaire de son diocèse, entra sous-diacre au Séminaire des M.-E. le 12 janvier 1897, reçut le sacerdoce le 5 mars 1898, et partit le 4 mai suivant pour la Birmanie septentrionale. Il débuta à Mandalay, passa à Maymyo, et commença sa vraie vie de missionnaire à Chantagon.
A la fin de 1900, il fut chargé de la communauté indienne de Mandalay, puis alla évangéliser les Shans-Teroks, dans le district de Bhamo, et fit parmi eux quelques conversions. Il mourut le 20 juin 1906, à Bhamo.
Nécrologie
M. DELORT
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE LA BIRMANIE SEPTENTRIONALE
Né le 31 décembre 1873
Parti le 4 mai 1898
Mort le 20 juin 1906
« M. François Delort naquit le 31 décembre 1873 à Carsac, commune d’Arpajon (Saint-Flour, Cantal). Il était l’avant-dernier de six enfants. Ses parents, sans être riches, jouissaient d’une honnête aisance. Tout en cultivant les champs légués par leurs ancêtres, ils s’appliquaient à faire de leurs enfants de dignes héritiers des habitudes foncièrement chrétiennes en honneur dans la famille. Dieu a béni les efforts et les bons exemples de ces fervents chrétiens, en leur accordant la joie de voir trois de leurs fils appelés à la dignité sacerdotale.
« Sur les premières années de François, rien de particulier à signaler. Son enfance fut, sans doute, celle des enfants de même âge et de même condition, qui, en plein air et au grand soleil, goûtent le bonheur de la vie champêtre. Un trait recueilli jadis de la bouche du vénéré Mgr Usse, son compatriote, montrera mieux que de longues paroles la foi naïve du petit François. Un jour que l’enfant gardait son troupeau dans la campagne, le curé de la paroisse vint à passer, portant le saint viatique à un malade de la montagne. Surpris et attiré par le son de la clochette, François s’approche en curieux, et le bon curé de lui dire : « Mon petit François, mets-toi à genoux et adore le bon Dieu. » François, quittant ses sabots, s’agenouille humblement. Quelle ne fut pas la surprise du digne prêtre quand, à son retour, après un temps assez long, il retrouva à la même place son petit bonhomme encore à genoux et récitant dévotement son chapelet !
« L’enfant fréquenta d’abord l’école de son village, tenue par des Frères. Il étudia ensuite le latin chez son oncle, M. l’abbé Delort, aumônier des Clarisses d’Aurillac. Sous la direction de ce saint prêtre, non seulement il s’initia aux éléments de la langue latine, mais, bienfait autrement appréciable, il reçut la meilleure formation que l’on puisse désirer pour un aspirant au sacerdoce. L’oncle écrit au sujet du neveu qu’il pleure amèrement aujourd’hui : « D’une « nature froide et peu expansive, François était toujours au devoir, et pendant les longues « années qu’il a passées auprès de moi, j’ai eu rarement un reproche à lui faire. Pendant les « leçons, il semblait s’amuser volontiers avec un crayon ou une plume, mais si je « l’interrogeais il avait tout entendu, tout compris. » Néanmoins, sous cet extérieur froid, se cachait un esprit quelque peu malin, mais toujours très fin, qu’il a conservé toute sa vie.
« Sur le séjour de François au petit séminaire de Saint-Flour, voici ce qu’écrit, dans la Semaine Religieuse, un de ses anciens maîtres, qui l’a intimement connu : « Au petit « séminaire où nous l’avons connu et beaucoup aimé, il se désignait à l’estime affectueuse de « ses maîtres par une vertu qui ne connaissait pas de défaillance. Chaque mois, il obtenait une « des mentions spéciales que le règlement réserve aux élèves qui se distinguent par leur piété, « leur conduite, leur travail ferme et soutenu. Cependant, aucune attitude guindée ou « contrainte, mais toujours une humeur avenante. Aussi les élèves chérissaient-ils à qui mieux « mieux ce condisciple, qui avait l’art d’être modèle, tout en demeurant le plus aimable des « compagnons. Une prompte et sérieuse intelligence, ouverte aux lettres, aux sciences, à la « philosophie, s’alliait chez lui à la force et à l’élévation du caractère. Dès la première heure il « avait conquis, et jusqu’à la fin il a gardé une des premières places dans son cours. Il passait « sans aucun échec les deux examens du baccalauréat. Des rêves dorés auraient donc pu « s’élever dans cette âme de vingt ans. Mais F. Delort n’écoutait qu’avec un souriant dédain « les projets d’avenir que caressaient quelquefois, en sa présence, des camarades d’étude. Ses « diplômes conquis, il allait droit au grand séminaire. »
« On peut présumer facilement ce que fut au grand séminaire ce lévite qui déjà, au collège, se faisait remarquer par son esprit travailleur et sérieux. Toutefois, à cause de sa nature froide, l’abbé Delort, dans l’affaire capitale du choix de sa vocation, dut se conduire bien plus par réflexion et conviction d’esprit, que par les doux attraits d’une piété sensible. Cela devait même devenir pour lui une cause d’épreuve : il eut un moment d’hésitation. « Je ne suis sans « doute pas fait pour être prêtre, se disait-il, je ne sens pas en moi l’amour de Dieu et, bien « sûr, je le sentirais si Dieu m’appelait à lui. » Cependant, il suivit les sages avis de son directeur ; il pria et consulta. Le résultat de ces réflexions sous l’œil de Dieu fut catégorique. A quelque temps de là, il partait pour le Séminaire des Missions-¬Étrangères. « L’épreuve fut « rude pour les pauvres parents, nous écrit son oncle vénéré, plus rude peut-être même que la « nouvelle de sa mort, mais ils se soumirent en bons chrétiens. » Si les déchirements furent cruels pour sa famille, le sacrifice fut grand également pour l’élu de Dieu. Dans le ministère, dans le professorat, dans l’administration, le jeune prêtre aurait pu suivre la voie glorieusement tracée par son oncle et ses deux frères. Il eut mission et courage de suivre une voie plus royale, et aux premiers jours de mai 1898, il quittait la France pour aller au secours des âmes idolâtres et consacrer sa vie à notre chère Birmanie septentrionale.
« Arrivé à Mandalay, il fut reçu à bras ouverts, et Dieu sait avec quel cœur, par son évêque, un compatriote, Mgr Usse, de douce et sainte mémoire. Dès les premiers jours, Sa Grandeur, en souvenir d’un tendre ami d’enfance, changea son nom de François en celui de Francis, plus cher à son cœur. Depuis lors, parmi ses intimes, M. Delort ne fut plus connu que sous le nom familier de « Francis ».
« Pendant les huit années que M. Delort passa parmi nous, on peut dire qu’il a rempli une carrière des plus pénibles. Il était à peine depuis quelques mois à Mandalay, s’initiant aux premières difficultés des langues anglaise et birmane, qu’une assez grave attaque de dysenterie le força d’aller chercher un climat plus bénin. A peine remis, il se rendit à Maymyo, auprès d’un confrère atteint de phtisie, M. Moysan, dont l’état réclamait des soins particuliers. M. Delort, à cette époque, souffrait lui-même des yeux, ce qui ne l’empêcha pas de se préparer sérieusement à l’exercice du ministère apostolique. Ici se place une aventure, qui aurait pu avoir pour lui des conséquences tragiques. Revenant un matin à pied de Maymyo à Mandalay, il s’égara seul au milieu des montagnes. Toute la journée, il erra parmi les bois et les ravins, sans rencontrer âme qui vive, mais seulement, de temps à autre, des bandes de singes criards, qui semblaient se rire de son malheur ; et surtout, chose moins rassurante, rencontrant à chaque pas des traces fraîches d’éléphants sauvages. Déjà le pauvre voyageur prenait ses dispositions pour coucher à la belle étoile, lorsque, conduit par son bon ange, il eut la joie de retrouver enfin la route. Il était alors 5 ou 6 heures du soir, et le jeune missionnaire marchait depuis 7 heures du matin. Ses jambes, brisées de fatigue, ne pouvaient plus le porter.
M. Delort fit ses premières armes à Chanthagon, auprès de MM. Pelletier et Bazin. Bien qu’il ne soit guère resté qu’une année dans ce poste, ses rares qualités surent faire naître entre lui et ses deux confrères une de ces amitiés durables que l’éloignement ne saurait diminuer, et que la mort elle-même ne peut briser.
« Notre confrère commençait à pouvoir travailler fructueusement à l’évangélisation des Birmans, quand, à la fin de 1900, il fut transféré à Mandalay, avec charge d’étudier le tamoul pour prendre soin, un peu plus tard, de la communauté indienne assez nombreuse dans la capitale. Laissant donc de côté la langue birmane, il dut apprendre un autre idiome. Il se mit au travail avec courage, mais il regretta beaucoup ses chers Birmans. Son zèle d’apôtre se trouva mal à l’aise dans la nouvelle situation qui lui était faite, et qui ressemblait assez à celle d’un curé de France. Aussi, au bout d’un an, exprima-t-il le désir de rentrer dans la vie active. Malheureusement, aucun missionnaire ne parlant l’indien, M. Delort ne put être remplacé. Une année durant, il se vit obligé de conserver la direction de la paroisse.
« Il désirait retrouver ses Birmans, mais la Providence préparait à son zèle un champ d’action plus éloigné, plus glorieux aussi, et en même temps plus difficile. Tout au nord de la mission, dans l’immense district de Bhamo, une race nouvelle semblait s’ébranler au souffle de l’Évangile. Les Shans-Teroks forment, dans ces parages, une population fort dense. Aussi propres que leurs voisins Katchins sont sales, actifs, à l’encontre de toutes les populations environnantes, les Shans méritent, sous beaucoup de rapports, d’attirer l’attention. M. Accarion venait de poser les premiers jalons de leur évangélisation, mais il ne pouvait réussir tout seul. Le supérieur de la mission jeta alors les yeux sur M. Delort qui, avec son esprit sérieux et positif, son jugement droit et sûr, semblait être l’homme de la situation. Il s’agissait, en effet, non pas précisément de donner un aide à M. Accarion, mais plutôt de lui préparer un remplaçant, capable de prendre la direction de la mission shane. M. Delort parut d’abord effrayé de la charge qu’on lui confiait, car il allait être obligé d’étudier une langue, plus difficile que l’anglais, le birman et le tamoul. Il l’accepta néanmoins. Quelques mois plus tard, M. Accarion, complètement épuisé, le laissait seul et partait pour la France. Dieu bénit les efforts de son remplaçant, qui écrivait, il y a quelques mois à peine : « J’ai eu la joie de « baptiser une cinquantaine de catéchumènes. Presque tout le village où je réside actuellement « est chrétien. J’espère bien que les païens qui restent voudront bientôt être des nôtres... Je « vais entreprendre maintenant la conversion d’un troisième village, et un quatrième demande « à s’instruire. »
« Le bon Dieu bénissait visiblement les travaux de son serviteur. Mais, en Birmanie, ce n’est pas impunément que l’on endure tant de fatigues. Déjà la fièvre était venue plus d’une fois visiter le missionnaire, dont la santé, plutôt délicate, était souvent aux prises avec cette importune. D’un autre côté, son estomac ne fonctionnait plus régulièrement. Cependant, M. Delort prenait son mal en patience : « Je ne vous ai point encore dit comment je me porte, « écrivait-il à sa famille, c’est à l’acoustumado (entendez : pas trop mal). Quand je dis que j’ai « la fièvre de temps en temps, cela vous effraie. Ce n’est pourtant pas terrible, puisque « personne n’y échappe. Si j’appelais cela migraine, cela vous paraîtrait plus bénin ; eh bien, « c’est à peu près la même chose. »
« Au mois de janvier dernier, notre cher confrère avait été atteint d’une fièvre maligne, mais il s’en était débarrassé sans trop de difficulté. Tout à coup, le 19 juin, un télégramme arrive à Mandalay : « Delort dangereusement malade », suivi, le lendemain, de ce coup de foudre : « Delort mort ce matin. » Qu’était-il donc advenu ? Descendu à Bhamo la semaine précédente, M. Delort avait passé deux ou trois jours chez le confrère de ce poste. Il était gai, bien portant, et mangeait avec appétit. S’étant confessé, il était reparti le vendredi 15 juin. Le 16, après une nuit passée dans un poste intermédiaire, il arrivait chez lui vers midi. Le soir à 10 heures, se sentant fatigué, il appela un enfant pour se faire préparer du thé. Le 17 au matin, ses gens ne le voyant pas, comme d’habitude, venir à la chapelle, entrèrent dans sa chambre et le trouvèrent étendu sur une chaise longue. Il était à peu près sans connaissance.
« Les chrétiens le transportèrent en toute hâte à Bhamo. Aussitôt le médecin constata que le cher malade était atteint de la jaunisse et que le cas était très grave. Cependant le mal put être enrayé, grâce à des soins assidus et énergiques. Malheureusement, la faiblesse était si grande chez notre confrère, qu’il fut impossible de le sauver. Le mercredi 20 juin, vers 9 heures du matin, le missionnaire qui le soignait, voyant les yeux se vitrer et la respiration se ralentir, lui administre l’extrême-onction. C’est pendant cette cérémonie que M. Delort rendit, sans secousse, sa belle âme à Dieu.
« Le jeudi eurent lieu les obsèques, avec toute la pompe possible dans une petite ville comme Bhamo. Un piquet de soldats rendit les honneurs à celui qui, pendant quelque temps, avait rempli l’office de chapelain. L’administration militaire mit encore gracieusement à notre disposition un caisson d’artillerie pour transporter le corps de l’église au cimetière, honneur réservé aux seuls officiers. Le cher défunt emporte avec lui dans la tombe les regrets unanimes de ses confrères et de ses chrétiens. »
UN MISSIONNAIRE DE LA BIRMANIE SEPTENTRIONALE
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Références
[2344] DELORT François (1873-1906)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1901, pp. 210, 338 ; 1902, p. 236 ; 1903, p. 243 ; 1904, p. 231 ; 1905, p. 229. - Sem. cath. Saint-Flour, 1902, p. 169 ; 1905, pp. 328, 649 ; 1906, p. 405.
Notice nécrologique. - C.-R., 1906, p. 347.