Jean-Baptiste PERRET1852 - 1907
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1531
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Birmanie
- Région missionnaire :
- 1882 - 1907 (Yangon [Rangoun])
Biographie
[1531]. PERRET, Jean-Baptiste, né le 30 décembre 1852 à Beaune (Savoie), reçut le sacerdoce le 15 juin 1878, et exerça le ministère en qualité de vicaire à Fontcouverte, et à Montaimont.
Il entra au Séminaire des M.-E. le 16 septembre 1881, et passa son année presque entière de noviciat à Bolognano (Tyrol). Le 2 août 1882, il partit pour la Birmanie méridionale. Il apprit les langues anglaise et birmane à Rangoon, et fit ses premiers travaux apostoliques à Talaïndat.
En 1884, il s'installa à Yebouk ; de 1886 à 1887 il fut chargé de Kambai. Nommé procureur de la mission en 1887, il résida à Rangoon, s'occupa de la paroisse Saint-Jean-Baptiste dont il devint curé en 1894, reconstruisit le presbytère immédiatement, et l'église en 1900 ; il rendit très prospères l'orphelinat des jeunes filles birmanes et l'externat des Eurasiennes.
En 1905, il commença à être éprouvé par un cancer, et regagna la France en février 1907. Il succomba le 24 juin suivant au Séminaire des M.-E. à Paris, et fut enterré au cimetière Montparnasse.
Nécrologie
M. PERRET
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE LA BIRMANIE MÉRIDIONALE
Né le 31 décembre 1852
Parti le 2 août 1882
Mort le 24 juin 1907
« Originaire des montagnes de Savoie, fort et bien bâti, M. Perret semble taillé pour endurer les plus grandes fatigues. Il paraît avoir une énergie et une force de volonté à toute épreuve. »
Tel est le portrait tracé par Mgr Bigandet dans son Histoire de la Birmanie.
Né à Beaune, canton de Saint-Michel, au diocèse de Saint-Jean de Maurienne (Savoie), le 31 décembre 1852, de parents foncièrement chrétiens, comme on en trouvait beaucoup alors dans cette paroisse, M. Jean-Baptiste Perret fut ordonné prêtre le 15 juin 1878.
Après avoir exercé quelques années les fonctions de vicaire d’abord à Fontcouverte, ensuite à Montaimont, il sentit naître en lui la vocation apostolique et demanda à être admis au séminaire des Missions-Étrangèrres.
Il y arrivait en septembre 1881, accompagné d’un jeune séminariste, savoyard lui aussi, et d’une taille de géant, M. Guillot, missionnaire au Cambodge, décédé après quelques années de mission.
La communauté était alors à Meudon — « Tiens, s’écria-t-on en les voyant descendre l’escalier d’entrée, voici un curé qui nous amène un nouvel aspirant, son élève évidemment ! » Quelle ne fut pas la joie de tous d’apprendre qu’il n’en était rien, que tous deux étaient bel et bien de nouveaux confrères venus ensemble comme par hasard.
M. Perret eut à peine le temps de connaître le Séminaire de Paris. Au bout d’un mois ou deux, il était envoyé à Bolognano (Tyrol autri¬chien), où le Séminaire des Missions-Étrangères venait de se ménager un pied-à-terre. Il n’en revint guère que pour recevoir sa destination et se préparer à partir. La mission de la Birmanie méridionale lui était échue un partage.
Dès son arrivée à Rangoon, septembre 1882, il fut dirigé sur Bassein, afin d’y apprendre les langues anglaise et birmane.
Une étude de ce genre est dure à trente ans. L’énergie de notre confrère sut triompher des difficultés, au point de pouvoir être transféré, peu après, à Talaïne-dat, première étape du district, aujourd’hui considé¬rable, de Rangoon.
« Par Suite de complications, écrit Mgr Bigandet, je fus moralement obligé d’abandonner le poste de Talaïne-dat. MM. Sadoux et Perret sont allés planter leur tente plus au nord, en un magnifique endroit sur le bord de l’Irrawaddy, presque vis-à-vis de Danubyoo. M. Perret a démoli l’église de Talaïne-dat, pour en transporter les matériaux à sa nouvelle résidence.
« Il y a déjà obtenu un certain nombre de conversions, parmi les Birmans et les Carians. Que le Dieu tout-puissant vienne en aide à notre confrère, dans la tâche difficile et ardue qu’il vient d’entre¬prendre ! »
La prière et la bénédiction de l’évêque en faveur de son jeune mission¬naire allaient produire leurs fruits
« La première partie de cet exercice 1885-86, écrivait M. Perret, alors seul chargé du « nouveau poste de Yébouk, fut consolante. Les nouveaux chrétiens s’amélioraient de jour en « jour, en même temps que les païens accouraient en foule à ma résidence. Je tâchai « d’instruire de mon mieux tout ce monde, non sans quelque succès, puisque, grâce à Dieu, « j’ai le bonheur de compter 33 baptêmes d’adultes. Mais avec l’arrivée des « dacoïts », tout « changea de face. Le bruit court qu’ils vont trancher la tête à tous les chrétiens. La crainte « suffit, en effet, pour la leur faire perdre, un instant du moins. Ceux du village de Yébouk ou « cessent de venir à l’église, ou s’enfuient au loin. Quant aux chrétiens des environs, je ne les « revis plus. Il y eut pourtant d’heureuses exceptions ; trois familles me restèrent fidèles « pendant tout le temps que dura le danger. Les hommes valides vinrent chaque nuit se mettre « à ma disposition en cas d’attaque.
« Sur ces entrefaites on apprend mon prochain départ de Yébouk. Comme par « enchantement, voici nos chrétiens accourant en nombre pour me voir et me saluer. Ils « avouent que la crainte seule les avait tenus à distance, mais qu’ils n’avaient nullement « renoncé au christianisme, et qu’ils n’y renonceraient jamais. En somme, il y eut beau¬coup « plus de saint Pierre que de Judas, et je suis persuadé qu’après les troubles politiques actuels, « on pourra encore travailler avec succès dans cette chrétienté naissante. »
A son grand regret, M. Perret dut, sur l’ordre de son évêque, quitter sa chère mission de Yébouk, pour prendre la lourde succession de M. Schmitt à Cambay. Il n’y passa qu’une année. — « Je n’ai pas, écrit-il, réussi selon mes désirs, niais j’ai eu la bonne volonté et fait de « mon mieux. »
Au cours des visites fréquentes que le titulaire de Cambay fit alors à la capitale, ses supérieurs eurent vite fait de découvrir en lui de précieuses qualités, disons le mot : une vertu plus qu’ordinaire.
L’évêque de Ramatha sentait ses forces l’abandonner, en même temps que l’administration financière du vicariat devenait de plus en plus lourde et compliquée.
Il était temps que la mission eût un procureur en titre. M. Perret fut nommé.
Voici dans quels termes il accepta cette charge :
« Je remercie Votre Grandeur de m’avoir appelé auprès d’Elle. Je ne puis vous promettre, « Monseigneur, beaucoup de succès, mais je vous promets de travailler dans la mesuredu « talent que Dieu m’a donné. »
« Faire de son mieux, avec le calme persévérant d’une énergie et d’une volonté à toute épreuve, travailler dans la mesure du talent que Dieu lui a donné, voilà bien, en deux mots, et dépeinte par lui-même, toute la vie apostolique de notre regretté confrère.
« Ce fut là le secret de l’influence considérable qu’il exerça à Rangoon, pendant les vingt années qu’il devait y passer. Procureur sérieux et dévoué, il était tout à tous ; non seulement aux confrères qui s’adres¬saient à lui, mais aux communautés religieuses de la capitale et à nombre de laïques qui lui confièrent leurs intérêts. On savait que, grâce à sa prudence et à sa sagesse, on n’avait rien à risquer, encore moins à perdre avec lui. S’il n’a pas remporté de succès financiers remarquables, il n’a non plus fait tort d’un centime à ses nombreux clients.
Il était l’homme intègre par excellence ; ce qui lui valut, plus d’une fois, d’être nommé exécuteur testamentaire de successions aussi importantes que compliquées.
Il sut toujours s’en tirer habilement et à la satisfaction des parties intéressées ; non pas sans mal, certes, mais à force de patience et de bons procédés.
Toutes ces qualités le rendaient homme de bon conseil.
« Impossible de dire ici le bien qu’il fit à la mission dont il fut tou¬jours le consulteur autorisé, aux confrères qui allaient à lui pour la direction de leur conscience, aux communautés qui l’avaient pour confesseur, enfin à tous sans exception, et cela au spirituel comme au temporel.
« Toutes ces différentes fonctions ne l’empêcheront jamais de faire face aux obligations du ministère paroissial à Saint-Jean (Rangoon). S’il fut bon procureur, il fut un excellent curé, il en était le type achevé. Au milieu de ses multiples occupations, il sut trouver le temps et les moyens de construire un beau presbytère en briques, d’agrandir ou plutôt de refaire à neuf son église, la meubler et l’orner de son mieux, former vraiment une paroisse modèle.
Chez M. Perret, le zèle des âmes marchait de pair avec celui de la maison de Dieu. « Pendant vingt ans, il disait deux messes chaque dimanche et prêchait trois sermons : une première fois en anglais, les deux autres en birman. L’un de ces sermons était traduit en chinois par un interprète, à l’usage des fils du Céleste Empire qui habitent Rangoon. » (Echo de la Maurienne.)
« Qui dira le soin tout paternel qu’il ne cessa de prendre de l’orphe¬linat des jeunes filles birmanes et de l’externat pour jeunes Eurasien¬nes ? Ces établissements attachés à l’église Saint-Jean n’ont fait que prospérer sous sa sage et prudente direction ; mais au prix de quels sacrifices ! Dieu seul les connaît, car M. Perret ne fut jamais homme à parler de lui-même ni de ses œuvres . Il allait son train de chaque jour tranquillement et sans bruit, abattant la besogne sans en avoir l’air, sans paraître s’en douter.
« C’est qu’à un jugement sûr, à une expérience peu commune des hommes et des choses, notre confrère joignait une régularité de sémi¬nariste, j’allais dire de moine. Chaque chose avait son heure déter¬minée.
« Ainsi, nul d’entre nous n’eût osé l’aller voir à 2 heures de l’après-¬midi. On savait que c’était le moment où il commençait son bréviaire pour le lendemain. Il était économe de son temps, au point de quitter rarement sa résidence ; et les postes voisins de Rangoon, acces-sibles par chemin de fer, lui étaient inconnus. Ce n’était pas certes misanthropie : nul plus que lui n’aimait la compagnie de ses confrères. Il lui arriva même de se plaindre qu’on n’allât pas le visiter plus souvent.
« C’est pour affaire, ce n’est pas pour moi que vous venez », disait-il quelquefois à l’un ou à l’autre de ses visiteurs intéressés. Et pour¬tant, lui aussi ne sortait que pour affaire, c’est-à-dire le moins souvent possible. On eût dit qu’à l’exemple de saint François de Sales, son modèle de prédilection, il avait fait vœu de ne perdre point une seule minute du temps précieux qui nous est donné en vue de préparer l’éternité. S’il n’en fit pas le vœu , du moins le pratiqua-t-il pendant ses vingt-cinq années de mission.
« C’est en plein exercice de ses nombreuses charges de procureur, de curé, d’aumônier de couvent, qu’un bacille ou microbe quelconque vint attaquer et abattre impitoyablement le fort et vaillant apôtre. Tel cet imperceptible rougeur qui depuis plusieurs années est venu, nul ne sait d’où, se fixer à la cime de nos palmiers et de nos cocotiers. L’arbre commence à dépérir par le sommet, ses branches pendent lamenta¬blement à mesure que les feuilles se fendent, s’effilent et finissent par tomber : Vraie décomposition d’autant plus sûre qu’elle est plus lente. L’arbre reste encore debout, mais il est mort ; et n’offre plus à l’œil qu’un tronc sec et dénudé. — Au cours de ses vingt-cinq années de mission, M. Perret n’eut pas de maladie sérieuse, à part peut-être un accès de fièvre plutôt bénigne, mais tenace, qu’il contracta par l’usage d’eau contaminée. Depuis lors, on peut dire que notre confrère commença à perdre quelque peu de ses forces.
« Du moins parut-il plus facilement sujet au rhume et à toutes ces épidémies d’influenza, de dengue (sorte de fièvre rhumatismale), etc., qui visitent de temps à autre les tropiques.
«Si le cancer était un mal contagieux, on pourrait soupçonner qu’il le contracta au chevet d’un Français de ses amis, qui l’eut à la gorge et en mourut après une cruelle agonie de plusieurs mois.
« Dès l’année 1905, notre procureur sentait bien son oreille droite plus dure que de coutume, mais n’y prit pas garde. Plus tard, survint une douleur sourde. Il crut qu’une de ses dents en était la cause et la fit arracher, mais sans que l’oreille s’en trouvât mieux. En novembre 1906, elle commença à couler. Le médecin consulté recommanda l’usage de remèdes qui eurent peu ou point d’effet. D’autres docteurs appelés furent d’avis que mieux valait brûler l’intérieur de l’oreille à l’aide de la pierre infernale.
« Le soulagement produit ne dura pas. Deux de ces messieurs commen¬cèrent à craindre qu’il y eût cancer et recommandaient une opération. Deux autres s’y opposaient. Enfin au commencement de février dernier, tous consentirent à ce que le chirurgien de l’hôpital civil coupât un lambeau de chair, afin de l’analyser. Le résultat, hélas ! fut que le mal en question était sûrement de la famille des cancers, et même d’une forme des plus malignes. Notre confrère était condamné sans rémission ; à moins pourtant qu’il ne partit au plus tôt pour l’Europe.
« A l’aide du radium et grâce aux progrès actuels de la chirurgie, peut-être arriverait-on encore à temps pour conjurer tout danger. Déci¬der le pauvre condamné à s’embarquer pour la France ne fut pas chose aisée. Il résistait de toutes ses forces. Il ne fallut rien moins que l’avis unanime de ses supérieurs et de ses confrères, pour lui arracher son consentement. « Vous venez me chasser », dit-il en voyant arriver le provicaire et un membre du conseil de la mission.
« En même temps, une grosse larme, la seule qu’il n’ait pu retenir, coula rapidement sur ce visage austère, d’un sang-froid impertur¬bable.
« Le fiat coûta gros, mais, une fois prononcé, notre confrère fait ses préparatifs de départ fixé à cette même semaine, 14 février 1907.
« Ce fut un départ inoubliablement triste et pour M. Perret et pour ceux d’entre nous venus le saluer au quai d’embarquement.
« Le moment de la séparation arrivé, nous n’eûmes plus un regard, plus un signe quelconque du cher malade. Debout à quelques pas de nous, les yeux baissés, il regardait la manœuvre , jusqu’à ce que nous ne pûmes plus l’apercevoir. Se sentait-il vraiment condamné à mort et à ne plus revoir la Birmanie ? Il en avait l’air ; et, hélas ! ce devait être la réalité, puisque, après trois mois de souffrances plutôt morales que physiques, supportées avec une résignation qui ne se démentit pas un instant, il succombait doucement dans une des chambres du Sémi¬naire de Paris, entouré de MM. les Directeurs accourus en hâte pour les prières des agonisants. C’était le lundi 24 juin, fête de saint Jean-Baptiste, son patron, et celui de sa chère paroisse de Rangoon. Du cher défunt comme du saint précurseur nous pouvions dire : Ipse prœivit ante illum in spiritu et virtute Eliœ parare Domino ple¬bem perfetam.
« Et voilà pourquoi, à l’heure actuelle, les paroissiens de Saint-Jean se cotisent en vue d’élever un nouveau clocher en mémoire de notre cher défunt, qui pendant vingt ans fut leur bien-aimé pasteur. »
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Références
[1531] PERRET Jean-Baptiste (1852-1907)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1886, p. 171 ; 1894, p. 243 ; 1895, p. 272 ; 1896, p. 271 ; 1897, p. 225 ; 1898, p. 216 ; 1899, p. 245 ; 1902, p. 235. - A. M.-E., 1912, pp. 145, 208, 209. - The cath. Her. of. Ind., 1907, p. 431.
Notice nécrologique. - C.-R., 1907, p. 387.