Élisée DÉLOUETTE1848 - 1897
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1128
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Malaisie - Singapour
- Région missionnaire :
- 1872 - 1897 (Malacca)
Biographie
[1128]. DÉLOUETTE, Elisée-Ferdinand, né dans la paroisse de Landres, commune de Landres-et-Saint-Georges (Ardennes), le 3 août 1848, entré minoré au Séminaire des M.-E. le 11 octobre 1869, prêtre le 25 mai 1872, partit le 3 juillet suivant pour la mission de la Presqu'île de Malacca. Il commença son apostolat à Bukit Timah, devint en 1876 vicaire à la paroisse de l'Assomption à Pinang, et en 1880 curé de Malacca. Il acheta l'ancienne maison des Sœurs en face de l'église, y installa l'école des garçons qu'il dirigea lui-même fort bien. Il s'occupait en même temps de la paroisse mantra-chinoise d'Ayer Salak.
En 1888, il fut nommé curé de la cathédrale à Singapore, et vicaire général. Il gouverna la mission pendant la maladie et après la mort de Mgr Gasnier, jusqu'à la nomination de Mgr Fée, 8 avril-21 juillet 1896. Il succomba à une maladie de cœur le 29 mars 1897, à Singapore, et fut enterré dans l'église de Bukit Timah.
Nécrologie
M. DÉLOUETTE
VICAIRE GÉNÉRAL DE MALACCA
Né le 3 août 1848.
Parti le 3 juillet 1872.
Mort le 29 mars 1897.
Né au diocèse de Reims, à Landres, le 3 août 1848, M. Elysée¬-Ferdinand Délouette arriva à Singapore en 1872. Il avait donc 25 ans de mission quand la mort vint nous l’enlever, le 29 mars 1897, vingt jours après M. Leymet. C’est dans l’église de Bucket-timah, où repose maintenant son corps, qu’il fit ses premières armes comme missionnaire. Il apprit le chinois dans ce poste et en resta chargé pendant deux ans. Appelé ensuite à Pinang comme assistant de M. Manissol, il apprit l’anglais et le malais et consacra ses loisirs à l’étude du Droit canon et de questions théologiques. Son jugement sûr et son érudition profonde faisaient déjà de lui une autorité.
Il fut nommé, en 1880, curé de Malacca où il passa huit ans, par¬tageant son temps entre ses devoirs de pasteur et ceux de maître d’école. Dieu sait si dans les temps où nous vivons l’instruction de la jeunesse est un point vital. Or, M. Délouette en arrivant à Malacca, trouva l’école catholique sur un pied très peu brillant. Les enfants n’y recevant pas l’instruction suffisante désertaient pour aller chez les protestants au grand péril de leur âme. Il eût fallu des maîtres mieux payés et pour les payer il eût fallu de l’argent ; or, Malacca, l’ancienne reine de l’Orient, est plus riche de souvenirs que d’écus. M. Délouette trouva la solution de cette difficulté ; il se fit lui-même instituteur. Enseigner des choses arides dans une langue étrangère est en soi une besogne assez peu plaisante ; dans notre climat équa¬torial, c’est écrasant. Et pourtant, c’est à cette tâche de forçat que M. Délouette, avec ses infirmités, s’assujettit durant huit ans, et ses six heures de classe par jour ne l’empêchaient ni de confesser ni de prêcher tous les dimanches, ni de visiter au moins une fois le mois une petite chrétienté de sauvages, située à neuf milles et alors privée de missionnaire. Dieu bénit son zèle et quand il quitta Malacca, il eut la joie de laisser l’école dans une situation prospère et bien supérieure à celle des écoles du gouvernement.
Ce fut en 1888 que Sa Grandeur Mgr Gasnier l’appela à Singapore comme curé de la cathédrale et vicaire général. Il dirigea pendant neuf ans cette importante paroisse de manière à s’acquérir l’estime et la confiance générale. Ses infirmités ne lui permettaient pas de sortir autant qu’il eût désiré, mais les paroissiens connaissaient le chemin de la cure et savaient trouver là conseils prudents et pra¬tiques dans leurs difficultés, sympathie et consolations dans leurs peines, assistance dans leurs besoins. Il était rare qu’on le rencontrât seul chez lui.
L’administration du diocèse pendant la longue maladie et après la mort de Mgr Gasnier lui donna un surcroît de travail, lequel acheva de ruiner sa santé déjà depuis longtemps bien ébranlée. En 1892, il avait fait en France un trop court voyage ; le bénéfice qu’il en retira ne fut ni solide ni durable. Aussi dès qu’il put remettre à un autre l’administration, il sollicita un congé jugé par tout le monde absolu¬ment nécessaire. Mais fidèle au devoir jusqu’au bout et craignant de mettre son nouvel évêque dans l’embarras, il voulut rester six mois encore.
Cependant, sans qu’il en parût rien extérieurement, la maladie de cœur dont il souffrait s’aggrava beaucoup et se compliqua d’une affection des reins. Un soir, après une longue séance au confessionnal, il se sentit fatigué et pria un jeune confrère de le remplacer le lende¬main pour la messe. J’allai le voir dès le matin et le trouvai levé, mais très abattu ; il avait eu la fièvre toute la nuit et n’avait pu repo¬ser. Nous jugeâmes prudent d’appeler un médecin. Celui-ci déclara aussitôt le cas très sérieux et ordonna de conduire le malade à l’hôpital où, seules, nos bonnes sœurs pouvaient lui donner les soins réclamés par son état. Il se soumit docilement, malgré une grande ré¬pugnance, et entra à l’hôpital le jour même. C’était le mercredi 24 mars.
Je pense que les docteurs qui l’examinèrent, reconnurent du pre¬mier coup qu’il n’y avait plus d’espoir. Toutefois ils n’en dirent rien et nous, voyant une certaine amélioration se produire, nous conser¬vions l’espérance de le sauver. Lui, moins que tout autre, se croyait en danger. Il continuait à parler de tout, à s’intéresser à tout. Sa place sur le paquebot était retenue et il s’inquiétait de ses prépara¬tifs de départ. C’était pour un monde meilleur qu’il devait partir.
Un confrère qui le visita dans la matinée du lundi 29 mars, le trouva changé et plus abattu, et quand j’arrivai près de lui vers deux heures, il était évident que la fin approchait. Il s’était déjà confessé ; je lui dis qu’à sa place je recevrais l’extrême-onction. « Je ne crois pas, me répondit-il, être si mal que cela ; mais vous êtes juge ! » Il reçut d’abord le saint Viatique avec grande dévotion. Lorsque j’étais allé à la chapelle prendre le Saint-Sacrement, quelqu’un lui ayant adressé la parole, il ne répondit pas et fit signe de ne pas le déranger dans sa préparation. Pendant qu’il faisait son action de grâces, je lui administrai l’extrême-onction. Il commençait à divaguer.
J’envoyai prévenir les confrères et restai près de lui avec M. Cou¬vreur. Nous récitâmes les prières des agonisants ; il répétait encore les actes de foi qui lui étaient suggérés. A un moment donné, il commença de réciter très vite et à demi-voix des prières que nous pouvions à peine distinguer. Il nous tendit la main plusieurs fois en répétant. « Bonsoir ! je vais me reposer. » — Il eut peut-être un quart d’heure d’agitation, puis il retomba dans le calme jusqu’à cinq heures. Il mourut sans effort ni secousse. Les confrères arrivaient juste à ce moment. Nous transportâmes immédiatement le corps à la cure où clergé et chrétiens vinrent lui dire un dernier adieu. Bon nombre passèrent la nuit en prières près de leur pasteur.
Je chantai la messe le lendemain ; puis le soir, après les vêpres des Morts à l’église, nous conduisîmes le cher Père à Bucket-timah. Une grande partie de la population tint à l’accompagner jusque-là (9 milles), prouvant ainsi combien il avait su gagner l’affection.
Tous, on peut le dire, confrères et chrétiens, gardent son souvenir comme celui d’un bon et dévoué missionnaire, et nous avons con¬fiance que Dieu aura ratifié ce jugement, en lui donnant la récom¬pense promise au fidèle serviteur.
† R. FÉE,
Évêque de Malacca.
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Références
[1128] DÉLOUETTE Élisée (1848-1897)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1883, p. 97 ; 1884, p. 126 ; 1885, p. 110 ; 1886, p. 115 ; 1890, p. 153 ; 1896, p. 256. - M. C., xiv, 1882, Une page de l'histoire de Malacca, p. 558 ; xvi, 1884, Notes sur la péninsule malaise, p. 345 ; Ib., p. 358. - A. M.-E., 1914, pp. 73 et suiv.
An anecd. hist., Tab. alph.
Notice nécrologique. - C.-R., 1897, p. 301.