Émile DEVISE1871 - 1933
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2118
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Corée
- Région missionnaire :
- 1894 - 1932
Biographie
[2118] DEVISE Émile, Pierre, est né à Lemps, canton de Tournon, diocèse de Viviers (Ardèche), le 14 juillet 1871, fils de Romain Devise et de Marie Lubac. Ses qualités exceptionnelles et les signes de vocation sacerdotale qu'il montre dès son enfance font qu'il est envoyé à l'école apostolique de Lons-le-Saunier, dans le Jura, où les Pères Jésuites sont ses éducateurs.
Entré laïque au Séminaire des Missions Étrangères de Paris le 30 juillet 1890, il y est ordonné prêtre le 1er juillet 1894 et, destiné à la Corée, part de Paris le 29 août, passe par Nagasaki le 16 octobre, arrive à In-chon le 23, puis finalement à Séoul le 25 octobre 1894, à l'époque de la révolte des insurgés Tonghak, et de la guerre sino-japonaise qui s'en suit en Corée et dont ont été victimes le Père Jozeau et bon nombre de chrétiens. Selon le souhait exprimé par Mgr. Mutel, plusieurs missionnaires sont venus chercher refuge à Séoul et s'y trouvent encore quand arrive le jeune Père Devise.
À l'évêché de Séoul jusqu'en fin janvier 1895, celui-ci étudie quelques rudiments de la langue, puis s'en va au village chrétien de Ha-ou-hyen, à une vingtaine de kilomètres au sud de Séoul. Il y a là 30 familles chrétiennes qui vont l'aider à se perfectionner sur le tas.
Puis au printemps de 1895, il est chargé de fonder un nouveau poste, détaché de celui de Hap-tok, dans l'arrondissement d'A-san, qui se trouve dans le nord de la province du Choung-chong Sud. Mais le Père Curlier, responsable du district de Hap-tok, est retenu à Séoul par une fièvre typhoïde. Le Père Devise attend son rétablissement et attend jusqu'au 10 juin 1895 que le Père Curlier soit à même de le conduire au village de Kong-sé-ri, qui a été choisi pour être le centre du nouveau poste, où ils arrivent le lendemain. Le Père Curlier laisse le Père Devise à Kong-sé-ri et poursuit la visite de ses chrétientés.
Un an plus tard, Mgr. Mutel rappelle le Père Devise à Séoul pour remplir les fonctions de procureur de la mission à la suite du Père Coste qui est décédé le 28 janvier 1896. Et pour remplacer le Père Devise, il envoie à Kong-sé-ri le jeune Père Guinand qui est arrivé en Corée en octobre 1895.
Après avoir passé l'année 1896-1897 à Séoul, le Père Devise peut retourner à Kong-sé-ri, ses premières amours", et comme il va y rester 33 ans, il va pouvoir établir les plans et les travaux qu'il avait entrevus lors de son premier séjour dans ce village. Ayant réussi à acquérir la colline qu'il convoitait et sur laquelle se trouve un magasin d'État qui ne sert plus, il démolit l'ancien magasin et se met à construire une église et un presbytère avec en outre les dépendances nécessaires. Cependant, ces travaux faits à la hâte ne satisfont pas l'ambition du Père Devise qui, sans tarder, se met à faire des économies en vue de tout refaire en mieux plus tard. Entre-temps, il voit l'étendue de son district se réduire considérablement avec l'établissement d'un nouveau poste, confié au Père Antoine Gombert à An-song, au nord, en 1901, faisant suite à celui qui a été établi à Kong-ju, au sud, et confié au Père Guinand en 1897.
Après avoir fait des économies pendant plus de 20 ans, le Père Devise, avec le concours d'ouvriers chinois qu'il va diriger lui-même, se met en 1921 à reconstruire le presbytère et une belle église. Et comme l'emplacement dont il dispose est vaste, il y aménage un bosquet et un jardin qui recevront la visite de beaucoup de promeneurs.
Atteint d'une surdité qui gêne gravement son ministère, le Père Devise demande à être relevé de ses responsabilités de chef de district et, en 1930, devient à Séoul chargé de la gestion des biens immeubles de la mission et de surveiller les nouvelles constructions, notamment l'église de Ponk-sou-dong que bâtit le Père Polly à Su-won, le clocher de l'église de Hyé-hwa-dong près du Petit Séminaire de Séoul, les bâtiments ajoutés à ce Séminaire, la chapelle des religieuses de St Paul de Chartres, près de la cathédrale de Séoul, ainsi que l'aménagement du cimetière de la mission dans le quartier de Yong-san à Séoul, etc.
Devenu très malade à la fin de 1932, il lui est conseillé d'aller se faire soigner à Shanghai ou à Hongkong, mais le Père Devise demande à rentrer en France. Il reste assez longtemps à l'hôpital, sans grand profit à vrai dire, puis se rend à la station thermale de St Nectaire, dans le Puy-de-Dôme. De là il rentre dans sa famille le 14 juillet 1933 et décède chez son jeune frère à Lemps, le 31 août 1933, d'une tumeur inguérissable qui le fait beaucoup souffrir, mais il garde sa connaissance jusqu'au dernier moment. Inhumé à Lemps, il repose dans le caveau réservé aux curés de cette paroisse.
Nécrologie
M. DEVISE
MISSIONNAIRE DE SÉOUL
M. DEVISE (Emile-Pierre), né le 14 juillet 1871 à Lemps (Viviers, Ardèche). Entré laïque au Séminaire des Missions-Etrangères, le 30 juillet 1890. Prêtre le 1er juillet 1894. Parti pour la Corée, le 29 août 1894. Mort à Lemps, le 31 août 1933.
M. Devise naquit à Lemps dans les montagnes de l’Ardèche le 14 juillet 1871. Il avait reçu des dons naturels au-dessus de la moyenne, et il ne fallait pas avoir un long commerce avec lui pour se rendre compte qu’on avait à faire à un homme bien doué. Par un insigne bienfait de la Providence, il ne lui manqua pas non plus l’éducation chrétienne au sein de la famille. Aussi de bonne heure on distingua chez cet enfant des qualités exception¬nelles, des signes certains de vocation, et à l’âge de 12 ans il fut envoyé à l’école apostolique de Lons-le-Saunier.
M. Devise garda toute sa vie un souvenir plein d’affection et de reconnaissance pour les Pères de la Compagnie de Jésus qui furent là ses maîtres éducateurs ; il se plaisait à parler de ses années de collège dans le Jura, des méthodes pédagogiques, des soins surtout qui étaient donnés à la formation morale des élè¬ves. On peut penser que ces souvenirs lui étaient particulièrement doux, parce qu’il y avait senti là naître et s’affermir son désir de se consacrer au service des Missions. Et pour réaliser à coup sûr son dessein, il demanda son admission au Séminaire de la rue du Bac dont tous les sujets partent pour les Missions. Il avait 19 ans ; son cœur était animé d’une franche bonne volonté. Sans avoir de données précises, on peut se figurer quelle fut sa vie d’aspirant régulière sans aucune rigueur, pieuse sans affectation, studieuse sans ces efforts qui font pâlir sur les livres. Après quatre ans pas-sés au Séminaire, il fut jugé digne d’être appelé au départ et reçut sa destination pour la Corée.
Parti de Paris le 29 août 1894, il arriva à Nagasaki le 16 octo¬bre, à Chemulpo le 23 et enfin à Séoul le 25. C’était à une période troublée par la guerre sino-japonaise. Ces troubles avaient une origine politique ; mais, comme toujours, la religion avait été la première à en souffrir : M. Jozeau avait été tué le 29 juillet, beaucoup de chrétiens massacrés, un grand nombre s’étaient enfuis et les missionnaires traqués les premiers avaient dû fuir eux aussi. Sur l’ordre de leur évêque plusieurs étaient allés chercher un refuge à Séoul et ils s’y trouvaient encore quand M. Devise y arriva.
Resté à l’évêché jusqu’au 28 janvier 1895, il avait déjà acquis une certaine connaissance de la langue et il lui tardait de s’en servir. Mgr Mutel le laissa donc partir pour Haoukokai, à 20 kilo¬mètres de Séoul, où vivaient groupées une trentaine de familles de vieux chrétiens. Il devait y demeurer jusqu’à la retraite, qui traditionnellement commençait le lundi du deuxième dimanche après Pâques. Il profita de ce temps passé au milieu des chrétiens pour se familiariser avec la langue et les mœurs du pays, et par¬ler coréen très correctement. A la retraite, son Supérieur lui con¬fia le district d’Asan ; mais pour en prendre possession il dut attendre que M. Curlier, qui lui cédait une partie de son vaste ter¬ritoire, fut en état d’aller l’installer, car M. Curlier était soigné pour une fièvre typhoïde à Séoul. Enfin, ils purent partir le 10 juin et arrivèrent le lendemain à Kongseiri, gros village du district d’Asan, choisi pour être le centre du nouveau poste. M. Curlier continua la visite de ses chrétientés, que la maladie l’avait empêché de faire, et laissa M. Devise en cette région.
Sauf la seconde et les trois dernières années, il devait passer là toute sa vie de missionnaire. En effet, un an s’était écoulé quand le Procureur de la Mission mourait et Mgr Mutel appelait M. Devise à Séoul pour remplir cette charge importante. L’année suivante, il reprit le chemin de sa chère province d’Asan, mais cette fois pour longtemps. Il put commencer à réaliser plans et travaux entrevus la première année. Pour cela il fallait entrer en possession d’un terrain qu’il avait en vue, une petite colline à côté du village, au sommet de laquelle il y avait eu autrefois un grenier public, entouré de solides murailles lui donnant l’aspect d’une forteresse. L’endroit avait servi aussi à faire des sacrifices au ciel. M. Devise pensa ne pas pouvoir trouver mieux pour bâtir une église où il offrirait au vrai Dieu le véritable sacrifice. Géné¬ralement ces terres ne se vendent pas parce qu’elles appartiennent à l’Etat. Toutefois, il peut arriver qu’un mandarin en mal de sapè¬ques cède ces sortes de propriétés à un particulier ; ce fut le cas pour cette colline convoitée. L’important pour le moment était de décider le propriétaire à vendre ; M. Devise y réussit et en devint possesseur. Les difficultés ne vinrent que plus tard. Il fal¬lut à notre confrère une parfaite connaissance de la mentalité coréenne, un grand esprit de persévérance, voire une attitude courageuse pour se maintenir en place et défendre ses droits. M. Devise n’entendait pas être responsable de la faute d’un man¬darin et en être dupe. Il défendit si bien sa cause qu’il finit par la gagner. On lui permit de garder un terrain qu’il avait payé ! M. Devise se mit à l’œuvre sans tarder et installa sur cette colline une résidence très convenable : église, presbytère, dépendances ; le tout était parfaitement ordonné, si bien, qu’en province, dit-¬on, on ne pouvait pas trouver mieux.
Cependant, ces premières constructions, faites à la hâte et dont les fondements étaient insuffisants, ne satisfaisaient pas l’ambition du missionnaire qui comptait bien pouvoir un jour offrir à Dieu un édifice plus imposant. Il fit des économies pen¬dant vingt-cinq ans dans ce but, puis il commença à construire. La première église était devenue trop petite pour les chrétiens dont le nombre avait notablement augmenté. Sur un terrain pré¬paré pendant plusieurs années, il éleva en 1921 un magnifique sanctuaire avec le concours d’ouvriers chinois qu’il dirigea lui-même. Kongseiri est devenu un lieu célèbre dans le district : on vient de loin visiter l’église et la mission ; les maîtres d’école même païens, en font un but de promenade pour leurs élèves. Tout y est bien arrangé, jardin et bosquet avec des fleurs et des arbres, un vrai jardin public. On aurait pu croire que M. Devise se fût attaché à ces lieux si bien aménagés par lui ; mais en tous ses travaux, il avait surtout en vue l’avantage de la Mission et le prestige de la religion ; il pensait qu’une belle église, une rési¬dence complète et assez confortable seraient d’une grande utilité dans la suite, tout en demeurant une constante prédication pour la population païenne. Il fit bien voir que ses entreprises étaient tout à fait désintéressées, le jour où il quitta tout avec la plus grande simplicité. Affligé en effet de surdité assez grave, le minis¬tère du confessional lui devint si pénible qu’il supplia ses supé¬rieurs de la décharger de cette responsabilité. On fit droit à sa demande, et en 1930, il abandonna le district où il avait si bien travaillé, n’emportant avec lui qu’un peu de linge et quelques livres, laissant tout en parfait état pour son successeur dans ce poste où lui-même avait travaillé pendant trente-cinq ans. Jamais personne n’a pu savoir si ce départ avait été pour lui un dur sacrifice : il se réjouissait à la pensée qu’un autre confrère allait faire à ces âmes qu’il avait tant aimées le bien qu’il ne pouvait plus leur procurer lui-même.
A Séoul, M. Devise se mit humblement à la disposition de son Supérieur, parfaitement disposé à rendre les services qui pour¬raient lui être demandés. Pendant les trois années qu’il vécut encore, il fut chargé de la gestion des biens immeubles de la Mis¬sion, des constructions nouvelles, etc. Il fit le plan et surveilla la bâtisse de la chapelle des Sœurs à Séoul, de l’église de Sou-ouen, de la nouvelle crèche pour l’orphelinat ; il fit ajouter un clocher à l’église Saint-Benoît, surveilla les travaux de la construction du petit séminaire ; il transforma le cimetière de la Mission à Ryong-san, sans compter une foule de menus travaux d’aménage¬ment où il allait si bien le sens du goût avec l’esprit pratique. En vérité, M. Devise rendit de grands services à la Mission, et on s’en aperçut surtout lorsque la maladie l’empêcha de travailler.
A Noël en effet, notre confrère fut pris d’un malaise dont on ne vit pas tout de suite la gravité. Etait-ce la conséquence d’une ancienne maladie de foie qui en 1925 avait nécessité une opéra¬tion ? Le fait est que depuis Noël, il fut obligé de garder le lit, et, ne prenant presque plus de nourriture, il s’affaiblit très vite. Dans l’espoir qu’un changement d’air lui serait favorable, on lui proposa d’aller à Shanghai ou à Hongkong ; mais se sentant très malade, il demanda son retour en France, seul moyen de guéri¬son, pensait-il. Le voyage fut très pénible. Il fit d’abord un assez long séjour à l’hôpital sans grand profit apparent, et de là passa ensuite à la station de Saint-Nectaire. Enfin, craignant de mourir sans revoir sa famille, il se décida à aller au pays natal où il arriva le 14 juillet.
A la descente du train, écrit son frère, nous constatâmes qu’il était très éprouvé par la terrible maladie qui le terrassait. Dès qu’il fut parmi nous, il se crut guéri ; mais cela ne devait pas durer : le mal suivait son cours. Le médecin nous avertit que le cher malade était atteint d’une tumeur qui ne laisse aucun espoir de guérison. Mon frère, lui, pensait toujours revenir à la santé, supportant ses souffrances avec calme, courage et son gra¬cieux sourire, pour calmer notre peine ; il nous parlait longue¬ment de ses confrères, de ses Coréens, content de nous montrer les quelques photographies de ses amis et des bâtiments qu’il avait construits. Les huit derniers jours, où les souffrances furent terribles, il ne nous parla plus de sa Mission qu’il avait toujours compté revoir. Il garda sa connaissance jusqu’au dernier moment, nous demanda pardon de toutes les peines qu’il nous donnait, nous recommandant de nous aimer en famille, nous souhaitant bonheur et prospérité en ce monde, et dans ses ferventes prières il répétait : « Mon Dieu, guérissez-moi ». C’est en prononçant ces paroles qu’il rendit son âme à Dieu le 31 août à 3 h. 10 entouré de sa famille. »
M. Devise avait été très charitablement visité en sa maladie par le curé de la paroisse, M. l’abbé Mounier, ancien aspi¬rant au Séminaire des Missions-Etrangères, qui n’hésita pas à faire quotidiennement cinq kilomètres à pied pour consoler notre confrère, et sut lui donner à temps tous les secours spirituels désirés. M. Gérard averti par télégramme partit aussitôt pour représenter la Société aux funérailles. « J’arrivai, écrit-il, au moment où le convoi allait atteindre l’église paroissiale. M. le Curé fit la levée du corps à l’entrée de l’église, entouré de cinq curés des environs, et célébra la Sainte Messe au milieu de la fa¬mille et d’une belle assistance d’amis ou de fidèles. Après l’ab¬soute, je fis la conduite au cimetière où le cercueil, par une déli¬catesse bien touchante de M. le Curé, fut descendu dans le ca¬veau réservé aux curés de la paroisse. »
M. Devise avait donc préparé inutilement son tombeau en Corée ; mais ses autres travaux suffisent à assurer ici le souvenir de son nom. Dieu s’en sera souvenu pour lui en octroyer la récom¬pense.
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Références
[2118] DEVISE Émile (1871-1933)
Références bio-bibliographiques
AME 1894 p. 196. 1911 p. 211. 277. 1933 p. 236. CR 1894 p. 305. 1896 p. 32. 1899 p. 63. 1900 p. 58. 1903 p. 54. 1908 p. 47. 1909 p. 51. 1910 p. 54. 1911 p. 44. 1913 p. 58. 1916 p. 41. 1919 p. 22. 1922 p. 26. 1923 p. 30. 1928 p. 26. 1933 p. 29. 256. 382. 1936 p. 259. BME 1923 p. 665. 793. 1924 photo p. 481. 1925 p. 230. 1930 p. 565. 1931 p. 55. 136. 282. 667. 668. 1933 p. 44. 119. 366. 525. 685. 769. 1934 p. 15. 262. 1938 p. 826. 1949 p. 399. 575. 1950 p. 55. 1951 p. 753. 1955 p. 34. EC1 N° 34. 35. 36. 46. 267. 273.