Louis LOETSCHER1870 - 1952
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2150
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Thaïlande
- Région missionnaire :
- 1895 - 1900
Biographie
[2150] LOETSCHER Louis, est né le 30 octobre 1870 à Wünheim (Haut-Rhin), au diocèse de Strasbourg. Il entre laïc au Séminaire des Missions Etrangères le 3 décembre 1890. Ordonné prêtre le 9 mars 1895, il part le 24 avril suivant pour la Mission du Siam. Son frère Eugène était déjà à l'oeuvre là-bas.
Il apprend la langue à Bangxang où il est aussi vicaire. En 1896, il est nommé vicaire du Père Guillou à Nakhon Chaisi, visitant les postes le long du fleuve. En 1899, il est nommé curé de la paroisse Sainte-Croix (Santa Cruz) de Bangkok en attendant l'arrivée du Père Guillaume Kinh da Cruz en 1900. Le Père Loetscher est alors nommé à Phanat et Bangphasoi. En 1905, il se retire de Phanat et bâtit l'église de Bangphasoi : vaste et solide, cette église est terminée en 1906. Le Père s'y installe comme curé et y restera jusqu'en 1930. Mais son caractère lasse les paroissiens et le Père Loetscher se retire hors de la ville sur un terrain qu'il a acheté et sur lequel il se bâtit une maison, une chapelle et des dépendances ; il y vit en ermite jusqu'à la fin de ses jours, sans pour autant oublier le catéchisme des enfants chrétiens, catéchisme qu'il faisait à heure précise que les enfants soient présents ou non. Son frère Eugène, à Nakhon Chaisi, venait le voir régulièrement. En 1939, le Père Louis se fait naturaliser suisse. En 1940, c'est la persécution religieuse : il est exilé à Bangkok pour six mois ; il se rend chez son frère Eugène. Le Père Louis Loetscher rend son âme à Dieu entre les mains de son frère, le 27 avril 1952. Il était âgé de 82 ans. Il fut enterré dans la tombe qu'il s'était préparée sous la petite chapelle.
Nécrologie
Louis LOETSCHER
Louis est né le 30 Octobre 1870 a Wüheim (Strasbourg, Haut-Rhin). Entré au Séminaire des M. E. P., il fut ordonné Prêtre le 9 Mars 1895, et partit le 24 Avril 1895 pour le Siam.
Dès son arrivée a Bangkok, Mgr. Vey l’envoie étudier la langue et le nomme vicaire à Bangxang.
En 1896, il est nommé Vicaire du P. Guillou a Nakhonxaisi. Il sera également vicaire du P. Piau. Marchant sur les pas du P. Guillou, il sera pour ainsi dire Missionnaire ambulant, visitant les nouvelles chrétientés laotiennes fondées par le P. Guillou. Il remonte le fleuve de Nakhonxaisi, va administrer la chrétienté de Bandon, passe par la chrétienté annamite de Songphinong qui n’a pas encore de curé à poste fixe, et est confiée aux bons soins du Curé de Nakhonxaisi. Il va jusqu’à Uthong administrer les chrétiens laotiens de Mot Dëng, annoncent la Bonne Nouvelle le long du fleuve et des canaux.
En, 1899, il est nommé Curé de la Paroisse Sainte-Croix de Bangkok, en remplacement du P. Perreaux décédé. Louis le remplace en attendant que le P. Guillaume Kinh da Cruz, vicaire au Calvaire, puisse être détaché. Finalement, en 1900 le Père Guillaume peut être libéré et est nommé curé de Ste-Croix.
En 1900, le P. louis Loetscher est nomme a Phanat et Bangplasoi. Dans les C.R. de 1901 et 1904, il est question de ces 2 chrétientés en disant qu’elles sont administrées par le P. Guillou. Caesar pontem fecit. En théorie, Phanat et Bangplasoi remontaient a Huaphai, mais le P. Guillou avait assez à faire à Huaphai avec tous les procès et contestations avec les païens qui, soutenus par les Autorités, essayaient de s’emparer des champs de l’Eglise, récoltant la moisson semée par les chrétiens. De fait, Phanat et Bangplasoi avaient leur Curé indépendant. Le P. Louis Loetscher était chargé de ces deux paroisses. Mais, en 1905, il se retira de Phanat, voulant bâtir a Bangplasoi une nouvelle église, en remplacement de l’ancienne bâtie en bambou recouvert d’une mince couche de chaux par le P. Daniel, en 1860. Cette nouvelle église, vaste et solide, fut terminée en 1906 . Le P. Louis s’y installe alors comme Curé et ne s’occupe que de cette paroisse. Il y restera Curé jusqu’en 1930. Cf. An. MEP 1913 p.l97.
Cependant, les chrétiens chinois de Bangplasoi ne l’aimaient guère à cause de son caractère et de son intransigeance, et s’il était resté plus longtemps à la tête de la paroisse, il n’aurait plus eu grand monde à l’église. Il s’en rendit compte, et décida donc de se retirer ; il s’acheta un grand terrain près de la ville, sur la Route qui va à Phanat, s’y construisit une maison, une chapelle et des dépendances, et il y vivra en ermite jusqu’à la fin de ses jours, passant son temps dans la prière, la méditation, le silence, mais faisant tous les jours le catéchisme aux enfants chrétiens.
En 1932, le P Louis Chorin, nomme Procureur de la Mission en 1925, avait terminé la construction de “sa Procure, la plus belle de toutes les Procures d’Extrême-Orient et le plus beau bâtiment de Bangkok” de ce temps là. Le père Louis Loetscher ou Père Amato comme on l’appelait ne voulut jamais y mettre les pieds. Quand il lui fallait aller à Bangkok acheter du vin de messe, il s’arrêtait devant la port de la Procure, appelait le P. Chorin qui devait aller chercher une bouteille de vin et la lui portait jusque sur le trottoir. Il nous dira plus tard : “Il a construit la Procure avec le sang des Missionnaires”.
En 1935, après que le Séminaire ait été transporté de Bangxang à Siracha, nous, les Professeurs du Séminaire, eûmes très souvent l’occasion d’aller rendre visite au Père Amato ; en ce temps-là il n’y avait pas de route, pas de pont sur le fleuve de Bangpakong, on allait jusqu’à Petriu par le train, pas de pont sur le fleuve de Petriu, on allait en barque tantôt jusqu’à Huaphai, tantôt jusqu’à Phanat : nous passions chez lui, parfois nous y passions la nuit avant de continuer . Il était très content de ces visites, mais il nous fallait respecter ses horaires. S’il était en méditation, il fallait attendre qu’il ait fini. Si nous insistions en l’appelant, il sortait de la chapelle, et sans rien dire, il nous montrait un petit trou dans une tôle ondulée laissent passer un rayon de soleil qui aboutissait sur des lignes tracées sur le sol cimenté, nous indiquait la ligna où devait passer le rayon de soleil, repartait sans rien dire, puis à l’heure indiquée il venait nous recevoir, c’était l’heure de la conversation. Et il était très gentil avec nous.
Un jour, nous arrivons chez lui , il était en train de faire le catéchisme dans la chapelle. Nous avançons tout doucement, jetons un coup d’œil par une fenêtre , pas un seul enfant dans la chapelle. Etonnés, nous allons nous promener un peu dans son terrain en attendant la fin. Puis, il vient nous accueillir. Comme nous lui posons quelques questions, il nous répond tout simplement « “c’était l’heure du catéchisme, si les enfants ne font pas leur devoir, moi, je fais le mien”. Homme de devoir !
De Nakhonxaisi, son frère Eugène venait le voir régulièrement, et restait chez lui quelques jours. Eugène me disait parfois : je vais chez mon frère pour 8 jours. Mais, des fois, il revenait à Nakhonxaisi au bout de deux trois jours, parfois même dès le lendemain. Mais il y revenait quand même régulièrement.
En 1939, après la déclaration de guerre, il change de nationalité ; lui qui était Allemand se fit naturaliser Suisse.
En 1940, fin de l’année, commence la persécution religieuse. Je me permets de recopier ici le récit de cette persécution par lui-même, à l’occasion d’une statue de St. Joseph.
“ Histoire d’une Statue de St. Josef avec l’Enfant Jésus”
“Au point culminant du terrain où je passe le soir de ma vie en retraite, j’avais élevé une chapelle dédiée a St. Josef, en y installant sa Statue gardant l’Enfant Jésus. Sous cette chapelle, j’ai préparé le lieu de ma sépulture.
Le bon St. Josef était là avec l’Enfant Jésus nous protégeant déjà plusieurs années, quand sous le régime et connivence d’un orgueilleux chef de Gouvernement, une persécution contre tout ce qui est chrétien a pu éclater.
En 1940 ce “Premier” profitant de la faiblesse de la France réclame des rectifications de la frontière à l’Est, et fait envahir les provinces convoitées. Dans la nuit du 8 Novembre il donne ordre que tous les Français dans la partie de Siam doivent quitter le Pays dans 48 H.. Mais la Police s’est précipitée aussitôt pour arrêter les Français dont certains ont été maltraités par la police. Cette nuit-là, 4-5 policiers en armes (viennent) me sommer de quitter le Siam dans les 48 heures. De mon côté j’ai demandé si on expulse aussi les Suisses ? Après que le chef avait constaté que je n’étais pas Français, on m’a laissé en paix.
Vers la fin de Janvier 1941 une coterie du “Premier” sous le nom Lu’et thaï a commencé ouvertement la persécution contre les chrétiens indigènes. On donnait ordre de se déclarer bouddhiste, et des Eglises furent saccagées. Comme on avait menacé de démolir l’Eglise à Bangplasoi, j’ai fait demander la protection par la police. Il y avait des policiers en face de l’Eglise et la canaille a pu y entrer pour voler quelques objets (les choses de valeur ont été en sûreté chez moi). Vu cette négligence ou connivence de la part des gardiens de l’ordre d’avec les malfaiteurs, je suis allé trouver le Gouverneur pour lui demander pour quoi il n’agit pas contre ces brigands (il était lui-même de leur bord) et lui dire qu’ayant moi-même construit cette église, je réclamerai des dommages intérêts. Cette protestation et mes encouragements aux chrétiens de ne pas apostasier comme ce valet de “Premier” les poussait, m’ont fait gagner l’honneur d’un exile de 6 mois. — Vers minuit le “Premier” avait publié un ordre qu’on ne doit pas molester les chrétiens a cause de leur religion, mais les menaces contre les chrétiens continuaient. D’après le journal, à Bangkok, il y eut 390 apostats et dans tout Siam 5.600 ; au Laos & Religieuses ont été fusillées a cause du refus d’apostasier. Ici à Bangplasoi il y a eu quelques branches plus ou moins saines que la tempête a fait tomber, mais presque tous se sont relevées après l’orage, comme dans les autres postes aussi.
Mais arrivons aux méfaits et sacrilèges contre la Statue de St. Josef avec l’Enfant Jésus. Le 13 Mars au soir en faisant ma visite habituelle à la chapelle de St. Josef, j’ai remarqué qu’un voleur avait coupé une partie du zinc laminé de la coupole, et le 29 la police est venue me signifier l’ordre de quitter la Province pour 6 mois, sans me dire pourquoi. Je me suis rendu a Bangkok chez mon frère comme lieu d’exile. Quatre fois je me suis présenté au quartier de la Gendarmerie pour savoir à cause de quel crime on me chasse de ma maison ? Le Préfet de la Police était chaque fois “invisible”, et le Consuls Suisse, chef d’une maison commerciale, m’a conseillé de ne pas demander justice parce que je serais expulsé .Pendant mon exile à Bangkok, les porte-voix du Gouvernement ont hautement proclamé que Thailand aime la paix et ont affirmé que le Pays défendra sa neutralité contre n’importe qui.... Le “Premier” a fait sa profession publique comme bouddhiste et le 29 Juillet il a permis aux Français de revenir.
Le 6 Octobre 1941 le terme de mon exile étant expiré, je suis revenu à Bangplasoi chez moi ; le 18 la police m’a demandé quand a eu lieu mon retour. Au 8 Décembre le Japon déclare la guerre à l’Amérique et la Bretaine, et sous peu le Siam fait cause commune avec les Japonais
Le 12 Mars 1942 un sagripant a fracassé la tête de St. Josef. J’ai fait ramasser les fragments pour les recoller et j’ai mis la tête à sa place. Le 17 Octobre l943 des mécréants ont fracassé cette tête pour la seconde fois et volé tout le zinc de la toiture. De mon côté j’ai réparé cette tête encore une fois remplissant le creux de ciment et toute la Statue de même. Une 3e fois des mains sacrilèges ont attaque cette paisible Statue. Ne pouvant plus réduire cette tête en pièces, on a arraché et décapité St. Josef pour la 3e fois, cassant une mâchoire et replaçant la tête à rebours. Faisant ma visite le soir du 20 Mai 1944 j’ai remis la tête dans sa position naturelle ; quelques jours après j’ai retrouvé la tête de nouveau a rebours. Pour mettre fin à ce jeu sacrilège, j’ai cris cette tête maltraitée pour la garder chez moi en attendant.
La haine diabolique contre St. Josef semblant satisfaite, et les mécréants n’ayant pas reçu visiblement le châtiment, qui leur reste assuré, les soppots du diable se sont enhardis de mutiler aussi l’Enfant Jésus qu’on avait respecté jusqu’à présent. Le ( Janvier 1945 j’ai trouvé sa main droite par terre. Le 7 Mars, le bras droit élevé comme pour bénir a été abattu et mis en morceaux, et puis le 11 Septembre de la même année, un misérable a décapité cet Enfant innocent. Enfin le 13 Juin, des soldats, en volant du bois comme déjà bien souvent, ont encore abattu un morceau du manteau de St. Josef.
Voilà donc un spécimen du niveau moral d’une population qui aime à passer comme paisible et tolérante, pratiquant les 14 qualités ou vertus nationales. A vrai dire, une grande majorité semble entaché des péchés capitaux en double.—
P.S. Le 28 Juillet 1946 des voleurs ont emporté 2 plaques de ciment qui servaient de siège devant les Statues.”
Le P. Louis Loetscher rendit son âme à Dieu entre les mains de son frère Eugène le 27 Avril l952, âgé de 82 ans. Il fut enterré dans la tombe qu’il s’était préparée.
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Références
[2150] LOETSCHER Louis (1870-1952)
Références biographiques
AME 1895 p. 387. CR 1895 p. 331. 1907 p. 414. 1915 p. 118. 1929 p. 270. 1952 p. 99. BME 1931 p. 78. 1952 p. 433. 1956 p. 668. Echos. Miss. octobre 1941 p. 25.