Emmanuel RIVET1879 - 1906
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2743
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1903 - 1906 (Hanoi)
Biographie
[2743]. RIVET, Emmanuel-Marie, né le 27 octobre 1879 à Saint-M'Hervé (Ille-et-Vilaine), entra laïque au Séminaire des M.-E. le 13 octobre 1899. Prêtre le 21 juin 1903, il partit le 5 août suivant pour le Tonkin occidental. Il étudia la langue et travailla dans le district de Bai-vang, puis fut nommé par Mgr Gendreau vicaire à Hanoï. Il mourut dans cette ville, le 4 juillet 1906.
Nécrologie
M. RIVET
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU TONKIN OCCIDENTAL
Né le 29 octobre 1879
Parti le 5 août 1903
Mort le 4 juillet 1906
M. Rivet naquit au pays des dolmens, des granits et des arbres séculaires, ou à côté ; car je crois que la Bretagne ne bretonne pas chez lui. Elle bretonne tout près, au moins. Enfin, peu importe.
Il était du bois dont on fait les chênes et promettait de durer comme eux. Trois années ont suffi à l’abattre !
Bossuet dit, dans l’oraison funèbre du grand Condé : « … Ce qui prouve qu’une âme « guerrière est maîtresse du corps qu’elle anime » ; n’en déplaise au grand Bossuet, pas toujours !
Pour qu’une âme, fût-elle guerrière, porte son corps, il faut d’abord que son corps la porte. Demandez aux pauvres missionnaires, dont la lame a usé le fourreau et qui soupirent, couchés, après le départ de la fièvre... et de bien d’autres maux !
M. Rivet ne soupirait pas de cette façon. Son âme, bien portée, cou¬rait aux brebis perdues, pendant les années actives de brousse par lesquelles son ministère débuta. Il ne s’arrêtait qu’après qu’il les avait rejointes, n’étant jamais las.
Mallheureusement pour lui, il était doué de deux aptitudes précieuses, qui profitent aux autres et dont souffre celui qui les possède. L’infortuné est désigné pour les emplois calmes, pour les postes de « chande¬lier », pour les solennités et les cérémonies. Il est aspiré par les centres. Mais révélons ses aptitudes. Une voix magnifique d’abord, dont la nature avait fait les premiers frais, et qu’avait cultivée l’exercice. La seconde était encore plus rare : Notre confrère était organiste, mais organiste de talent, d’études, rompu aux secrets de l’harmonie. Je déclare, bien que profane, dans ma carrière de séminaire et d’apostolat, n’avoir pas rencontré son pareil. Avec lui, les voix n’avaient pas à craindre un accompagnement de fortune, aux ressources précaires duquel il faut bien s’accommoder, qui emporte ces pauvres voix au-dessus de leur portée en une crise qui s’étrangle, ou les descend au-dessous de leur registre en une basse qui s’étouffe. Il prenait le ton qui convenait : ce n’est pas dans les moyens de tous. Exécutant remarquable, improvisateur heureux, les âmes qu’il berçait d’émotions religieuses n’avaient pas à redouter le sursaut de réveil d’un accord malvenu. Les siens s’harmonisaient, et ses accords d’attente, qui tenaient l’oreille en suspens, ne l’inquiétaient pas ; elle savait, par une expérience constante, qu’ils se résoudraient à leur honneur et à sa satisfaction.
Hélas ! le bon Père dut à ces qualités d’être enlevé à un apostolat aimé. L’obéissance le crucifia comme d’autres, mais le trouva résigné. On le nomma, à Hanoi, vicaire de la cathédrale. Il y charma nos brillantes assistances, et sut, plus d’une fois, préparer des messes délicieuses, avec les éléments les plus disparates et les moins entraînés. Régulièrement, il formait nos petits Annamites, espoir de la maison de Dieu, et les échos de notre maison, dans ces timbres purs, justes et pleins, ne reconnaissaient plus les voix maigres, fêlées et tôt faussées de nos enfants d’autrefois.
Il utilisait ses loisirs à l’étude de la langue, des caractères, de la théologie, etc…, avec des échappées de zèle qui rêvaient à la brousse. Il l’attendait docilement de l’obéissance qui la lui avait prise.
Il ne la revit pas ! Une maladie s’abattit sur lui à l’improviste. Les chênes sont foudroyés, d’habitude, sans qu’on en ait bien dégagé l’origine. Nos dévoués médecins, nos charitables Sœurs se dépensèrent près de lui ; rien ne lui a manqué en fait de soins. Lui non plus n’a pas manqué à la dernière visite du Seigneur. A la première alerte, il demanda les sacrements. On crut pouvoir alors, c’est-à-dire devoir lui différer les derniers. Sa puissante nature lutta, une dizaine de jours, contre une fièvre presque incessante et d’un degré terrible. Il souffrait le martyre, mais généreusement soumis à la volonté du bon Dieu. Sa dernière nuit fut un chant religieux de départ. Son répertoire de cantiques y passa tout entier, à la grande édification de la Sœur qui le veillait. Entre temps, il disait la messe : ses pauvres mains errant sur les draps en dessinaient les rites. Quelle mort de prêtre !
Le coma le surprit dans ses préparatifs, mais pas toutefois sans qu’il eût fait, de provision et à plein cœur, le sacrifice de sa vie : « Vous savez, mon Dieu, que je ne veux que votre volonté ! »
Il est mort, entouré de tous ses confrères présents à Hanoi, sur une dernière absolution, qui a précédé de quelques secondes son entrée dans l’éternité. Ai-je besoin de dire qu’il avait reçu, et en pleine connaissance, tous les secours de la religion ?
Nos soldats du cercle, qu’il allait voir fréquemment, qu’il préparait aux messes chantées de l’église, qu’il aimait et qui l’aimaient bien, s’étaient réunis dans un silence d’affection, de regrets, de respect, autour de sa mise en bière. Tous ceux qui purent en obtenir la permission, l’accompagnèrent à la tombe. Ils voulaient même y parler. Peut-être avons-nous eu tort de les retenir. Le discours de cœur qu’ils y auraient dit aurait été leur louange et la sienne !
~~~~~~~