Février 2024 : célébration des 400 ans de la naissance de Mgr Lambert de la Motte
IRFA, archives, cote AMEP2201 (2) p. 129-135
A l’occasion de cet anniversaire, nous poursuivons la découverte des écrits spirituels de Mgr Lambert de la Motte.
Le texte ci-dessous est extrait d’un long récit de voyage intitulé « Brève relation du voyage des missionnaires apostoliques envoyés immédiatement du Saint-Siège pour les royaumes de la Chine, Tonquin, Cochinchine, Laos, Ile d’Hainan », témoignage extraordinaire du premier voyage des fondateurs des MEP vers l’Asie, en 1660-1661.
Ce passage consiste à la fois en une exhortation de Mgr Lambert pour ses compagnons de voyages, qui tous se préparent à évangéliser l’Asie, et en un récit d’une résolution prise par ce petit groupe de missionnaires au cours de leur voyage. Mgr Lambert y relate en effet les dispositions, très concrètes, prises pour préparer leurs âmes à l’œuvre apostolique qui les attendait quelques mois plus tard au Siam.
Effets du pur amour dans l’âme d’un véritable missionnaire apostolique
La maladie ou la santé ne diminuent rien de l’amour qu’un homme se porte, et celui qui est un parfait ami aimera également son ami dans l’adversité comme dans la prospérité, voire même il s’exposera aussitôt à souffrir la mort qu’à manquer aux lois de l’amitié. Il semble que le Saint-Esprit ne nous donne cette comparaison que pour nous instruire que, comme la mort anéantit tous les hommes, de quelque qualité́ qu’ils soient, et les rend égaux entre eux, ainsi l’amour vient à bout de toutes les difficultés qui s’opposent à ses inclinations et surmonte aussi bien les plus petites que les plus grandes. Cependant, si l’on vient à comparer la force de l’amour et de la mort, il est hors de doute que l’amour est plus fort que la mort, ainsi que nous le voyons dans les saints martyrs, et dans le chef des martyrs, Jésus-Christ, dont l’amour a triomphé de la mort. […]
Un des effets principaux que cette réflexion a produit dans l’esprit des missionnaires a été de s’engager à l’observance des règles de la vie parfaite, après en avoir considéré la nécessité, soit pour leur salut, soit pour satisfaire à l’obligation de leur vocation. Suivant donc cette résolution, ils arrêtèrent de garder une abstinence et un jeûne continuel, à la réserve des jours de Noël, Pâques et Pentecôte et lorsqu’ils seraient en voyage, de ne boire que de l’eau en leur ordinaire, de coucher sur la dure et s’abandonner, lorsqu’ils seraient malades, entre les mains de la divine Providence, ou au plus de ne se servir que des sacramentaux de la Sainte Église. Et quant à ce qui regarde l’intérieur qui est le principal, ils se sont obligés aux trois vœux de pauvreté, de chasteté et d’obéissance intérieure, et à trois heures d’oraison mentale par jour.
Cette sainte entreprise n’ayant été exécutée qu’après un temps d’épreuve considérable, a eu toute la bénédiction qu’on pouvait espérer, en ce que l’expérience a fait connaître qu’ayant fait ce sacrifice, on s’est fort bien trouvé pour la santé du corps et beaucoup mieux de celle de l’âme, de sorte qu’on est plus en état, moyennant la grâce de Notre-Seigneur, de travailler plus avantageusement à la conversion du prochain. Il sera difficile de persuader cette vérité à ceux qui n’ont pas la pratique de cette belle vie, soit parce qu’ils n’en ont pas l’expérience, soit parce qu’ils n’y sont pas appelés. Mais cependant, le témoignage que les missionnaires en rendent ne laisse pas de subsister. Cette sorte de vie est si nécessaire en tous ces quartiers pour se conserver dans la vocation apostolique, et si conforme à celle que mènent les prêtres des idoles, qu’il faut des raisons fort particulières pour ne pas les embrasser. La principale cause de la chute des ministres de l’Evangile en tous ces quartiers et du peu de profit qu’ils ont fait aux missions ne vient que d’avoir mené une vie large ou commune dans un état extraordinaire.
C’est le motif qui leur a fait entreprendre de vivre de cette sorte, étant fort assuré qu’ils ne pratiquent rien qui ne soit encore au-dessus de la perfection que requiert la vie des véritables missionnaires apostoliques. Depuis que le Bon Dieu a fait la miséricorde d’agréer les vœux qu’ils en ont fait, ils en ressentent d’admirables effets et grandes espérances qu’entrant dans les lieux de leur mission avec ces dispositions, ils recevront beaucoup de grâces de Notre Seigneur pour ensuite les communiquer aux peuples qui leur ont commis ».
Pour lire l’intégralité du texte :
Pierre Lambert de la Motte, Relation Spirituelle, texte établi par P. Gérard Moussay, B. Appavou, D. Fahrner, J. Boury, PDF disponible sur demande à l’IRFA.
Le premier article à l’occasion de cet anniversaire, paru en janvier 2024, est disponible sur le site de l’IRFA.