Pierre GIBARTA1822 - 1886
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 0555
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Thaïlande
- Région missionnaire :
- 1848 - 1871
- 1878 - 1886
Biographie
[555]. GIBARTA, Pierre-Maurice, né le 9 mai 1822 dans la paroisse Saint-Pierre, à Condom (Gers), prêtre le 19 juillet 1846, vicaire à Nogaro le 18 août suivant jusqu'à son entrée au Séminaire des M.-E. le 5 septembre 1847.
Il partit pour le Siam le 29 mars 1848. Il fut du nombre des huit missionnaires qui, cette même année, durent quitter le royaume, à l'occasion des difficultés sur un acte que d'aucuns crurent à tort superstitieux (Voir PALLEGOIX). Il demeura pendant deux ans au Collège général où il laissa un très bon souvenir.
A son retour, il devint professeur de théologie, et en 1853, Mgr Pallegoix lui confia la paroisse annamite de Saint-François-Xavier à Bangkok. Il l'administra pendant dix-sept années avec succès, et y éleva une église qui fut inaugurée en 1867. Très fatigué en 1871, il vint passer plusieurs années en France ; et quand il retourna au Siam, il reçut, en 1878, la direction de la paroisse de Sainte-Croix, à Bangkok. Ce poste était au-dessus de ses forces qui déclinèrent rapidement. Le 10 novembre 1886 il mourut à Bangkok, et fut enterré dans l'église Sainte-Croix. " La commisération pour le pécheur, pour la brebis égarée, a été sa vertu dominante pendant toute sa carrière apostolique. "
Nécrologie
M. GIBARTA
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE SIAM
Né………… le 9 mai……………………1822
Parti……… le 29 mars……………… 1848
Mort……… le 10 novembre…………1886
Né à Condom au diocèse d'Auch, M. Pierre-Maurice Gibarta exerça, pendant deux ans, le ministère sacerdotal dans son diocèse. Son âme ardente convoitant un champ plus vaste, il entra en 1847 au Séminaire des Missions-Étrangères, et l'année suivante il en partit destiné à la mission de Siam. En cinq mois d'heureuse traversée, un voilier le conduisit d'Anvers à Singapore. De là, M. Gibarta s'embarquait pour Bang-Kok, capitale du royaume de Siam, sur
un navire de marchands malabars. Nous sommes heureux de repro¬duire, sur les travaux apostoliques et la mort de notre confrère, les édifiants détails qui nous ont été donnés par Mgr Vey.
« A peine le nouveau missionnaire avait-il consacré quatre mois à l'étude de la langue, écrit ce Prélat, qu'il lui fallut, avec son petit bagage de mots siamois, porter les consolations du saint ministère à de nombreux mourants. Un effroyable choléra s'abattit, au mois de juillet 1849, sur, la capitale de Siam et sur les villes et les villages de la vallée du Mé-Nam. La ville de Bang-Kok seule perdait journelle¬ment plusieurs milliers de ses habitants. Bientôt on n'enterra plus les cadavres, jetés dans la rivière ou dans les canaux, ils flottaient innombrables sur les eaux. Les parents abandonnaient leurs parents moribonds, toutes les communications s'interrompaient.
« Un silence de mort régnait sur le fleuve Mé-Nam, d'ordinaire si mouvementé par son va-et-vient de nacelles, de barques de tout genre. Le fléau promenait la terreur, le désespoir; partout régnait la consternation.
« Les missionnaires de Siam se multipliaient pour soutenir les courages, administrer les chrétiens agonisants, et baptiser à l'article dé la mort les païens qui demandaient à mourir chrétiens: M. Gibarta, quoique tout nouvellement arrivé, eut sa part dans le dévouement et le courage, que tous les missionnaires de Siam déployèrent en cette occasion. Peu expert dans la langue, il ne s'exprimait que difficile ment: « Mais, a-t-il dit lui-même plus tard, quand j'étais au « chevet des mourants, que les paroles me manquaient pour exprimer mes sentiments, d'une « aspiration du cœur, je m'adressais à la sainte Vierge, et les mots pour consoler et exhorter se « présentaient à mes lèvres. »
« Après ce terrible fléau, qui, en près de trois mois, avait emporté un cinquième de la population de Bang-Kok et de plusieurs autres grands centres, M. Gibarta fut mis au séminaire et enseigna la théologie. Il eut le bonheur de voir cinq de ses élèves élevés au sacerdoce. Ces cinq dignes prêtres partagent encore avec les mission¬naires les fatigues du ministère sacerdotal.
« Cinq ans après son arrivée, M. Gibarta remplaçait à l'église Saint-François-Xavier M. Claudot, qu'un abcès au foie avait enlevé à l'amour de ses chrétiens. Le successeur ne fut pas moins aimé, moins respecté que le prédécesseur. Il administra avec zèle et succès, pen¬dant 17 ans, cette chrétienté composée en grande partie d'Annamites cochinchinois.
« Amenés à la suite d'une guerre entre Siam et l'Annam en 1834, ces chrétiens arrivaient à Bang-Kok, dans le plus complet dénue¬ment. Ils étaient 1,400. Il fallut les nourrir, leur trouver un terrain où se fixer, leur construire des cases,: les mettre à même de gagner leur vie. Les missionnaires de Siam, secondés par les chré¬tiens Siamois et aussi par quelques hauts fonctionnaires du gouver¬nement, pourvurent aux premières nécessités de ces intéressants. exilés. M. Claudot fut leur premier pasteur. A sa mort, les grandes. misères étaient conjurées; mais il n'y avait pour toute église qu'une pauvre construction en bois, qui ne méritait guère le nom d'église, dans une ville comme Bang-Kok où le moindre temple bouddhique est une construction en briques, ayant un extérieur passable.
« M. Gibarta, jeune, actif, entreprenant, ne recula pas malgré la pauvreté de ses chers Annamites, devant la tâche d'élever à Notre-Seigneur un sanctuaire digne de lui,. suffisamment spacieux pour sa chrétienté. Demander des secours pécuniaires aux paroissiens de Saint-François-Xavier, c'était impossible. Tout au plus, quelques familles pouvaient prélever sur une petite aisance acquise par leur travail une obole, fruit de leur labeur journalier. Cependant, encou¬ragé par Mgr Pallegoix, qui voyait en lui l'homme d'initiative, disposé à tous les sacrifices, il se décida à conférer du projet avec les notables de sa chrétienté. Ces derniers avaient des objections bien fortes, bien motivées. « Comment ferez-vous, Père? Nous n'avons « guère que nos bras à vous prêter. Ces bras ne vous manqueront pas; mais où prendrons-nous « l'argent suffisant à l'achat des matériaux, suffisant à payer les ouvriers indispensables pour « les travaux que nous ne pouvons ou ne savons faire nous-mêmes ? »
« Après bien des conférences, la confiance en l'assistance de Saint-François-Xavier et en la bénédiction toute spéciale de Dieu, inspira une résolution définitive. On entreprendrait l'œuvre, dut-elle coûter vingt ans de peine pour être conduite à bonne fin. Cette résolution irrévocablement prise, son promoteur ne perdit plus de vue un seul instant la réalisation du projet. Missionnaire actif, enflammé du zèle de la maison de Dieu, M. Gibarta s'était jusque-là dépensé sans mesure aux intérêts spirituels de son cher troupeau. Il continua avec la même sollicitude de travailler à la sanctification des âmes, et désormais il profita des nombreux voyages, que son ministère l'obligeait à faire dans les provinces, pour glaner peu à peu quelques ressources pécu¬niaires qui lui permettraient de commencer l'ouvrage.
« Savait-il qu'un de ses chrétiens avait réalisé quelque bénéfice, il lui disait de faire la part de l'église et cette part était faite de bon gré. Quand il allait au loin porter les secours de la religion à ses chrétiens, dont un grand nombre établissaient des pêcheries le long des cours d'eau, il ne manquait aucune occasion d'obtenir quelque chose, soit des chrétiens, soit même des païens. Ses paroles affables, son agréable conversation, lui gagnaient les sympathies de ceux même qui ne le connaissaient pas. S'il ne réussissait pas, sa bonne humeur, assaisonnée d'un bon mot malgré son échec, faisait regretter de l'avoir rebuté.
« Un jour, passant en barque près d'un navire européen ancré dans la rivière à Bang-Kok, il s'arrête devant l'échelle, monte et salue le capitaine qu'il croyait catholique, espérant trouver là une signature a la souscription qu'il avait ouverte parmi les Européens de Bang-Kok. Le capitaine protestant le reçoit froidement, se mon¬trant tout surpris d'une pareille visite. Cependant la conversation s'engage, mais il n'y eut qu'un refus très formel et assez peu poliment exprimé; M. Gibarta ne se déconcerta pas, il dit adieu à son capitaine, s'excusant de sa méprise, mais le faisant de si bonne grâce que le capitaine regretta d'avoir été aussi dur à l'égard d'un homme d'un tel dévouement. Il alla le lendemain lui présenter ses excuses et lui porter, de la façon la plus cordiale, une belle offrande.
« Les fondements posés, l'église dédiée à Saint-François-Xavier s'éleva peu à peu, selon que les ressources le permettaient. La grande partie du travail fut faite par les chrétiens, et après dix ans de persévérance, le jour de la fête du grand apôtre des Indes, en 1867, une Messe pontificale était célébrée dans ce sanctuaire qui avait coûté tant de soucis, tant de peines,
« La commisération pour, le pécheur, pour la brebis égarée, a été la vertu dominante du P. Gibarta pendant toute sa carrière sacerdo¬tale. Il se dépensait nuit et jour pour le bien spirituel et temporel des chrétiens qui lui étaient confiés. Mais son zèle redoublait encore quand il s'agissait des pécheurs publics à convertir. Lui annonçait on qu'un des siens, infidèle à ses devoirs, s'était engagé dans une mau¬vaise voie, exposant son salut éternel; il le mandait de suite, et si le malheureux n'obéissait pas à la paternelle injonction, le Père courait vers le fils égaré, et rarement le pécheur résistait aux exhortations persuasives de celui qui savait l'aimer plus qu'il ne s'aimait lui ¬même. Fallait-il pour cela entreprendre un long voyage, M Gibarta devançait, s'il le pouvait, l'époque de ses visites d'administration, afin de ramener au plus vite la brebis errante. Tous les chrétiens savaient apprécier son cœur de père; ils lui étaient attachés, dévoués, ils l'ai¬maient et avaient pour lui tous les égards de fils respectueux et obéissants.
« En 1871, l'état de sa santé obligea M. Gibarta à rentrer temporairement en France. De retour à Siam, son Vicaire apostolique ne crut pas pouvoir lui imposer un aussi lourd fardeau qu'autrefois. Par obéissance, le généreux missionnaire fit volontiers le sacrifice du poste qu'il avait doté d'une belle église et administré pendant de longues années. Il accepta avec joie un poste moindre, proportionné à ses moindres forces. Ste-Croix, chrétienté de Bang-Kok, sans autre station dans les provinces, lui fut confiée. Tout son cœur, toute son âme furent dès le premier instant acquis à son nouveau troupeau qu'il a dirigé jusqu'à sa mort d'une direction féconde en bons fruits.
« A la fin de l'année 1885, de fréquentes' indispositions annonçaient une santé dépérissante. Cependant ces malaises n'enlevaient rien à l'affabilité de son caractère toujours gai. Chaque fois qu'un confrère avait l'occasion de le voir, il le trouvait toujours prêt à égayer la conversation de petites anecdotes, de traits agréables que sa mémoire heureuse avait conservés de ses nombreuses et utiles lectures. Malgré son état maladif, il voulut encore mettre la main à un travail de res¬tauration à l'église de Ste-Croix. Ces réparations étaient sur le point d'être terminées, lorsqu'à la mi-octobre 1886, les forces l'abandonnèrent complètement. Tous les soins dont il était entouré et de la part de ses confrères et de la part de ses chrétiens, tous les remèdes des doc¬teurs ne purent conjurer le mal. II fut constaté qu'un cancer rongeait le foie depuis longtemps.
« Il n'y avait donc plus d'espoir de guérison. L'acceptation de la mort, le sacrifice de sa vie, lui parurent tout naturels. Sa foi confiante, sa dévotion à la Ste-Vierge, le soutenaient et l'aidaient à supporter patiemment ses grandes douleurs. A dater du 10e jour qui précéda sa mort, deux missionnaires, ses confrères, furent constamment auprès de lui. « Le P. Gibarta, écrit M. Petit qui « l'a soigné et assisté à sa mort, a souffert beaucoup et avec beaucoup de résignation. Les « derniers jours il ne pouvait plus se remuer. Nous avons tout fait pour tâcher de lui adoucir ses « douleurs. Les chrétiens de Ste-Croix se sont tous bien montrés. Ils étaient là jour et nuit, en bon « nombre, pour nous aider. Le Père a reçu les derniers sacrements et l'in¬dulgence plénière in « articulo mortis, avec une piété bien édifiante. Il est entré en agonie le mardi 9 Novembre, à 9 « heures du soir, et n'est mort que le lendemain à midi. Dans son agonie il ne faisait que réciter « la prière : Regina cœli lœtare. »
« Ses restes mortels reposent dans l'église de Ste-Croix, au milieu de ses bien-aimés chrétiens, qui lui ont donné un dernier témoignage de leur amour filial par leur générosité et leur empressement à lui préparer de dignes funérailles. Ils prient pour le repos de son âme, et lui, de concert avec les autres missionnaires dont le corps repose là aussi, priera pour eux et pour les confrères qu'il a laissés en ce monde. »
Et mortui resurgent incorrupti.
(I. Cor., xv, 52.)
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Références
[0555] GIBARTA Pierre (1822-1886)
Notes bio-bibliographiques. - A. M.-E., 1913, p. 93.
Le sec. Emp. en Indo-Ch., p. 463.
Notice nécrologique. - C.-R., 1886, p. 231.