Pierre-Marie OSOUF1829 - 1906
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 0684
- Bibliographie : Consulter le catalogue
Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Charges
Missions
- Pays :
- Malaisie - Singapour
- Région missionnaire :
- 1856 - 1862 (Malacca)
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1862 - 1875 (Hong Kong)
- Pays :
- Japon
- Région missionnaire :
- 1876 - 1906 (Tokyo)
Biographie
[0684] Pierre-Marie Osouf naît le 26 mars 1829 à Cérisy-la-Salle (Manche). Il fait ses études au collège de Saint-Lô et au grand séminaire de Coutances ; il reçoit le sacerdoce le 11 juillet 1852. Son état de sa santé ne lui permettant pas de se présenter aux MEP, il reste dans son diocèse, et remplit pendant trois ans les fonctions de secrétaire à l’évêché. Devenu plus robuste, il entre au Séminaire des MEP le 2 août 1855.
Procure de Singapour (1856-1862)
Le 1er juin 1856, il part pour l’Extrême-Orient avec la mission d’installer une procure à Singapour. Il se rend d’abord à Hong Kong, puis le 8 mars 1857 il part à Singapour conduit par le procureur général le P. Libois. Le terrain où devait être bâtie la maison est acheté le 24 mars suivant ; les travaux commencent le 6 avril, et la première messe est célébrée dans la chapelle le 5 janvier 1858. Le P. Osouf dirige pendant cinq ans cette procure dont il est le premier titulaire.
Procure de Hong Kong (1862-1875)
En 1862, il devient sous-procureur à Hong-Kong, et devient en 1866 procureur général. Il exerce ses fonctions avec habileté et prudence. C’est lui qui, plus encore que le P. Patriat, effectue les plans du sanatorium de Béthanie à Hong Kong et de son élégante chapelle.
Directeur à Paris (1875-1876)
En 1875, il est appelé au Séminaire des MEP pour y être directeur ; il y est reçu le 11 juillet ; le lendemain, il est nommé secrétaire du Conseil, et peu après, il est chargé de la direction des Frères.
Japon (1876-1906)
L’année suivante, le 20 juin 1876, par le bref « Pastoris æterni » (Jus Pont. de Prop. Fid., vi, 2e part., p. 302), le Japon ayant été divisé en deux vicariats apostoliques, Osouf est nommé vicaire apostolique du Japon septentrional et évêque d’Arsinoé, par brefs du 19 décembre 1875. Il est sacré à Paris dans l’église du Séminaire des MEP le 11 février 1877, par Mgr Forcade, premier vicaire apostolique du Japon de 1846 à 1852.
La mission qui lui est confiée ne comprend que 1 235 catholiques. Dès le début de son administration, en 1877, il appelle les Marianistes à Tokyo ; ce fut l’origine des établissements florissants que cette Congrégation a fondés au Japon (Collèges de Yokohama, Tôkiô, Osaka, Nagasaki, grav., M. C., xl, 1908, pp. 258, 259, 270, 271).
En 1878, il fait construire, d’après ses propres plans, la cathédrale de Tokyo, dans le quartier Tsukiji.
Sa mission ayant fort peu de ressources, il se décide, en 1884, à aller faire une quête en Amérique ; il est rappelé de ce pays en 1885 par le Pape Léon XIII, qui lui confie une lettre à remettre à l’Empereur du Japon. Dans cette lettre, Etsi magno (Leonis XIII acta, v, p. 59 ; Acta S. Sed., xviii, p. 209) du 12 mai 1885, le Pape adresse au Souverain de solennels remerciements pour la liberté qu’il accorde à la religion catholique. Les années suivantes sont marquées par la fondation de quelques chrétientés, la construction de plusieurs églises et par la création de deux vicariats apostoliques : le Japon central en vertu du bref Quæ rei (Leonis XIII acta, viii, p. 157) du 20 mars 1888, et Hakodate par les Lettres apostoliques Ex officio (Leonis XIII acta, xi, p. 82) du 17 avril 1891 ; elle est aussi marquée par l’institution de la hiérarchie catholique dans l’empire du Soleil levant.
Le Pape donne à Mgr Osouf mission de faire connaître et agréer cette dernière mesure au gouvernement japonais. « Les combinaisons et les démarches multiples et compliquées du prélat dans cette circonstance constituent un vrai chef-d’œuvre de diplomatie. » La hiérarchie est constituée par les Lettres apostoliques Non majus (Leonis XIII acta, xi, p. 174 ; Acta S. Sed., xxiv, p. 257) du 15 juin 1891. Osouf devient archevêque de Tokyo ayant pour suffragants les évêques des trois autres diocèses : Nagasaki, Osaka, Hakodate. La publication de cet acte solennel a lieu les dimanches 27 septembre et 4 octobre 1891. Le diocèse de Tokyo, tel qu’il reste sous le gouvernement de Mgr Osouf, compte 27 missionnaires, 59 religieux et religieuses, 22 catéchistes, 1 séminaire avec 6 élèves, 28 écoles ou orphelinats avec 1 658 enfants, 9 660 catholiques, sur une population de 13 800 000 habitants.
Le mouvement irrésistible qui emporte le Japon vers les progrès matériels ne permet pas au catholicisme d’avancer aussi rapidement qu’espéré. Mgr Osouf tient deux synodes : l’un en 1890 à Nagasaki, et l’autre en 1895 à Tokyo. En 1902, il demande pour la seconde fois un coadjuteur ; le P.X. Mugabure ayant été nommé, il le sacre le 22 juin.
Il meurt le 27 juin 1906 à Tokyo. Il se distinguait par beaucoup de prudence, de bonté, de piété ; malheureusement il ignorait la langue japonaise, et sa carrière de procureur ne l’avait qu’imparfaitement préparé au rôle de chef de mission.
Nécrologie
[0684] OSOUF Pierre-Marie (1829-1906)
Notice nécrologique
Mgr Pierre-Marie Osouf naquit à la Musardière, petit village de la commune de Cérisy-la-Salle (Coutances, Manche). Cette année-là, le 26 mai était le mardi des Rogations. Le matin, M. Osouf père n’était pas à la procession. Les voisins, qui connaissaient tous ses habitudes, le remarquèrent tout de suite, et se dirent entre eux : « Osouf n’y est pas, il doit y avoir du nouveau chez lui. » En effet, ce matin-là même, il lui était né un fils, Pierre-Marie, son aîné, le premier de « ses douze enfants », celui qui devait être pour toute la famille l’occasion de tant de grâces et de tant de joie. Monseigneur le répétait souvent : « Nous avons été douze, et ma mère nous a nourris et élevés elle-¬même, toute seule, tous les douze. D’ailleurs, ajoutait-il, elle n’était pas d’un caractère à se tourmenter beaucoup, elle était très calme. » C’est elle qui gouvernait dans sa maison ; le père intervenait rarement entre elle et son peuple. Quand il élevait quelque peu la voix, ordinairement c’était pour dire : « Est-ce que vous allez bientôt obéir à votre mère ? » et aussitôt la paix se faisait.
Quand Monseigneur parlait de sa famille, il semblait rajeunir, ou plutôt par ce côté il fut toujours jeune. Tout ce qui lui venait de la maison ou du pays le faisait aussitôt revivre en arrière. Le plus petit incident, heureux ou malheureux, arrivé aux siens, le transportait au milieu d’eux. De cœur et d’esprit il y était ; il en fut ainsi jusqu’à la fin.
Pierre-Marie commença ses études latines auprès d’un de ses oncles, curé au diocèse de Coutances. C’est ce vénérable ecclésiastique que Monseigneur, par habitude d’enfance, appelait naïvement son tonton. Puis, du presbytère de l’oncle, il passa au collège de Saint-Lô, en septembre 1841. Il y suivit avec succès, aimé de ses condisciples et de ses maîtres, les cours d’humanités et de philosophie. Dans la fanfare du collège, c’est lui, si doux et si paisible, qui battait du tambour. Durant son année de rhétorique il fut nommé réglementaire, et, détail curieux, chaque jour avant de sonner le dîner, chargé de faire un tour à la cuisine, pour voir si tout était bien préparé.
La philosophie terminée, Pierre-Marie et six autres de ses condisciples, au sortir du collège de Saint-Lô, entrèrent au grand séminaire de Coutances, en septembre 1848, pour y étudier la théologie et devenir prêtres.
En prenant la résolution de se dévouer au service de Dieu par le sacerdoce, Pierre-Marie n’avait pas pensé se donner seulement à demi. Ordonné prêtre en juin 1852, tout de suite il demanda à entrer aux Missions-Étrangères. La vie d’apôtre n’est-elle pas la condition naturelle du prêtre ? Personne ne s’en étonna : les âmes les plus délicates ne sont-elles pas les plus généreuses ?
L’abbé Osouf ne manquait pas de courage : ce sont les humbles qui en ont le plus ; mais sa santé un peu trop frêle fut un obstacle à son départ. Le médecin consulté déclara qu’il était trop faible, que certainement il ne pourrait pas résister aux fatigues du voyage et aux influences meurtrières du climat. Il fallut donc rester à Coutances. Pendant trois ans, M. l’abbé Osouf fut occupé au secrétariat de l’évêché. C’étaient trois années de retard, mais en cela Dieu avait ses desseins ; ce n’était pas un temps perdu. Le jeune secrétaire, mêlé activement à l’administration du diocèse, sans responsabilité personnelle, eut là l’occasion de voir les hommes à l’œuvre, et beaucoup de choses dont la connaissance devait lui servir. Monseigneur ne regretta jamais ses trois années de stage à Coutances. Jusque dans les derniers temps de sa vie, il s’en félicitait, parce qu’il en profitait encore pour l’administration de son propre diocèse.
Au bout de trois ans, il fut suffisamment fortifié pour mettre à exécution son grand dessein. Sans éclat et sans bruit, comme font la plupart des missionnaires, il quitta son pays et sa famille et prit le chemin de Paris, en passant par la Délivrande, afin d’y invoquer une dernière fois, sur terre normande, la Reine des apôtres et des martyrs.
En ce temps-là, on voyageait encore par les pataches ; le chemin de fer n’était fait que jusqu’à Évreux. C’est là que M. Osouf le prit ; c’était la première fois qu’il y montait. Il arriva à la rue du Bac très ému, et heureux comme un homme enfin au comble de ses vœux. Sa première action, car c’était le matin, fut de célébrer la sainte messe ; après laquelle, on lui fit remarquer que les prélats seuls avaient le privilège de laisser traîner la queue de leur soutane pendant la messe. Il fut reçu ensuite par le pieux et spirituel M. Albrand, alors supérieur du séminaire. Il fut accueilli, comme tout le monde sait, avec la charité décidée et joyeuse qui est le caractère propre et la gloire du séminaire des Missions-Étrangères. Quoi de plus joyeux, en effet, et de plus aimant que des hommes qui ont renoncé à tout en ce monde, même à la vie ?
Après dix mois passés au Séminaire des Missions-Étrangères, la cérémonie solennelle du départ eut lieu, le 1erjuin 1856, et, quelques jours après, l’embarquement non moins solennel à Bordeaux, sur un voilier marchand en partance pour l’Extrême-Orient. M. Osouf était envoyé comme sous-procureur à Singapore.
En 1856, le passage par la mer Rouge n’était pas ouvert ; il ne le fut qu’en 1863. Il fallait donc faire le tour de l’Afrique, et doubler le cap de Bonne-Espérance. Dans ces conditions, la vie à bord n’était pas du tout ce qu’elle est à présent. Les passagers étaient peu nombreux, ils étaient ensemble beaucoup plus longtemps ; entre eux et avec l’équipage, la société était plus intime ; ils formaient presque comme une famille, sous le patronage et l’autorité du capitaine. Les impressions qu’une pareille traversée laissait dans l’esprit étaient ineffaçables. Monseigneur retint toute sa vie les cris que les matelots poussaient pour s’exciter eux-mêmes et régler leurs mouvements en tirant leurs cordes ou leurs câbles ; il les répétait quelquefois pour rire, quand il entendait les Japonais, qui crient aussi en travaillant.
M. Osouf demeura six ans à Singapore, jusqu’en 1862. De là, il fut transféré à Hong-kong, à la procure générale, pour y aider le véné¬rable M. Libois, « encore un Normand ».
En 1866, quatre ans après l’arrivée de M. Osouf à Hong-kong, M. Libois fut envoyé à Rome comme procureur de la Société, et M. Osouf lui succéda. La charge de procureur n’est pas toujours facile à remplir ; il a trop de maîtres à servir, et pour satisfaire ses lointains clients il est souvent embarrassé. Ce n’est pas tout que de chercher et de trouver ce qu’ils demandent ; il faut, la moitié du temps, le deviner. Aussi le « pauvre procureur » reçoit-il quelquefois des remerciements et des éloges, mais pas toujours. Pour lui, être intelligent ne suffit pas, il faut qu’il ait bon caractère ; étant au service de tout le monde, il lui faut une patience et une charité à l’épreuve de tout. Ces quelques mots résument à eux seuls la vie de M. Osouf comme procureur. Il avait vraiment l’esprit de son état, et surtout il en avait la vertu. Soit pour exercer l’hospitalité envers les missionnaires ou les étrangers de passage, soit pour recevoir et soigner les malades, pour réjouir doucement, consoler et encourager, rien ne surpassera jamais sa bonté, sa délicatesse et sa discrétion, sa sensibilité profonde, son exquise politesse ; son humble et belle manière de faire toutes choses.
Comme il l’a répété souvent, il n’avait jamais pensé être procureur ; mais, comme tous ceux qui rêvent des missions, il s’était figuré devoir vivre seul dans une île sauvage, et y mourir comme il plairait à Dieu. Devant ses cahiers de chiffres et ses caisses, il se surprenait quelquefois à regretter de ne pas travailler comme les autres. Puis il s’en consolait aussitôt, en se disant qu’au moins il n’avait pas charge d’âmes ; il n’était responsable que des marchandises et de l’argent à lui confiés ; devant Dieu, c’était moins grave que des âmes et moins lourd à porter. D’ailleurs, tous les soldats d’une armée ne peuvent pas combattre en même temps, il en faut aussi qui se dévouent à pourvoir les autres du nécessaire.
La principale raison pour laquelle ce procureur modèle eut tant de succès dans son ministère, c’était l’esprit religieux avec lequel il s’acquittait de son modeste emploi. Par lui-même il ne faisait aucun bien, pensait-il, mais d’autres en faisaient ; il tâchait d’y coopérer comme il pouvait. Il y contribuait, en réalité, pour une large part ; par sa charité intelligente, il entretenait le bon esprit des missionnaires, il les contentait, et par là il ajoutait beaucoup à leur courage.
À Hong-kong, M. Osouf rendait de grands services à la Société ; cependant, MM. les directeurs du séminaire de Paris crurent qu’il serait encore plus utile au séminaire même. Il reçut donc de M. le Supérieur l’ordre de régler ses affaires de procure, et de se disposer à rentrer en France. Il lui en coûtait de quitter Hong-kong, comme il en coûte à tous les hommes de s’éloigner des lieux où ils ont travaillé et souffert. Néanmoins, après avoir « légué sa succession » à un compatriote et condisciple, M. Lemonnier, il partit.
À cause des mérites qu’on lui connaissait, son retour à Paris fut le sujet d’une grande joie. Comment il y fut reçu et fêté, ce n’est pas par lui qu’on l’a su, mais par ceux qui étaient au séminaire à cette époque. Tout ce qu’il en a raconté lui-même, comme la chose la plus naturelle du monde, c’est que, ayant été pressé par M. Delpech d’adresser la parole aux aspirants, il lui arriva ce qu’il avait prédit : il resta court au milieu de sa « harangue ». Mais ce que Monseigneur n’ajoutait pas, c’est que l’humilité avec laquelle il s’excusa, édifia plus son auditoire que tout ce qu’il aurait pu dire de meilleur. En effet, ses dix-neuf ans de travail en procure ne l’avaient guère préparé à l’improvisation en public.
M. Osouf ne fut que deux ans directeur au séminaire de Paris (1875-1877). Il y fit peu de bruit, d’ailleurs comme partout où il passa, mais, comme partout aussi, il y laissa une impression profonde. C’est surtout pendant ces deux ans que se fondèrent l’estime et la vénération que MM. les directeurs de Paris ont toujours professées pour Monseigneur.
Au point de vue religieux, depuis la découverte des anciens chrétiens (17 mars 1865), le Japon se partageait naturellement en deux parties : le sud, avec ses magnifiques chrétientés deux fois séculaires ; le nord, où toute trace de foi chrétienne avait disparu ; dans le sud, Nagasaki, sanctifié par le sang des martyrs, et gardant chèrement la tradition héroïque de ses saints ; dans le nord, Tokio, la nouvelle capitale, immensément agrandie, et le principal centre de la vie intellectuelle et politique de l’empire.
Le partage du Japon en deux missions distinctes s’imposait ainsi de lui-même. Rome le prononça le 22 mai 1876. Mgr Petitjean, qui avait eu le grand bonheur de rencontrer les anciens chrétiens, garda Nagasaki. Il avait partagé avec eux les joies du retour, les douleurs de la persécution ; il n’aurait pas pu s’en séparer. Nagasaki et ses chrétiens, c’était tout son Japon à lui. Il y resta avec le nouveau titre de vicaire apostolique du Japon méridional. Et la mission de Tokio, appelée désormais Japon septentrional, fut invitée à se choisir un chef.
Parmi les missionnaires, les hommes intelligents et dévoués ne manquaient pas ; ceux qui les ont vus au travail peuvent le dire. Néanmoins, à cause des qualités éminentes dont M. Osouf avait fait preuve pendant vingt ans, et des mérites que toute la Société des Missions¬Étrangères lui reconnaissait, ce fut sur lui, chose extraordinaire, que le choix se fixa par la majorité des suffrages. Quand les lettres de Tokio arrivèrent au séminaire de Paris pour la nomination d’un nouvel évêque, M. Osouf était secrétaire du conseil, et, à ce titre, c’était lui qui faisait le dépouillement des votes. A la première lettre qu’il ouvrit, en voyant son nom écrit tout d’abord, il ne put retenir un grand éclat de rire ; il dit même tout haut : « En voilà un qui perd bien son temps. » Cependant ce n’était pas une lettre, mais deux, trois, quatre, qui répétait le même nom. Alors le tremblement le prit ; il sortit de la salle et laissa à un autre confrère le soin d’achever ce fatal dépouillement ; lui n’avait plus la force de continuer.
Par ce choix absolument imprévu, M. Osouf fut comme atterré. Jamais l’idée de devenir évêque ne lui était entrée dans l’esprit ; mais évêque au Japon, à son âge (il avait alors quarante-huit ans), dans un pays si plein de mystères, dont il ignorait la langue et les usages, organiser et gouverner une nouvelle mission, ce n’était pas seulement une difficulté, c’était une impossibilité devant laquelle il était mis. D’autre part, pour ce prêtre si religieux, qui durant toute sa vie n’avait rien cherché autre chose que la volonté de Dieu pour l’accomplir, la manière inouïe dont il avait été élu paraissait un signe certain de la volonté divine ; il ne savait à quoi se résoudre, et, tant que dura cette perplexité, il fut dans des angoisses mortelles. Enfin, malgré le sentiment profond, exagéré même, qu’il avait de son insuffisance, et malgré le grand désir qu’il aurait eu de refuser un pareil honneur, joint à une pareille charge, il n’osa pas le faire, craignant de résister et de manquer de générosité à Dieu.
Pendant ce temps-là, l’homme de sa confiance, M. le Supérieur du Séminaire des Missions-Étrangères, le soutenait de ses encouragements : « Vous avez dix ans de trop, lui « disait-il avec franchise, vous ne saurez jamais bien la langue ; mais, comme vicaire « apostolique, que de nombreux et graves devoirs vous pourrez remplir, pour lesquels une « connaissance complète de la langue n’est pas nécessaire ! Le travail immédiat de « l’évangélisation revient principalement aux missionnaires ; ce que vous ne ferez pas, eux le « feront. »
M. Osouf, nommé, par un décret du 3 décembre, évêque d’Arsinoé in partibus infidelium et vicaire apostolique du Japon septentrional, fut préconisé dans le consistoire du 18 décembre 1876, et sacré à Paris, dans la chapelle du séminaire des Missions, le dimanche de la Quinquagésime, 11 février 1877. Le consécrateur était Mgr Forcade, alors archevêque d’Aix, assisté de Mgr Petitjean et de Mgr Germain, évêque de Coutances. Mgr Forcade, le premier missionnaire et le premier vicaire apostolique du Japon au dix-neuvième siècle, ne se doutait pas que celui qu’il élevait alors au rang des pontifes serait bientôt le premier archevêque de cette Église à peine relevée de ses ruines. (Mgr Forcade, sacré immédiatement par Pie IX, n’avait encore sacré personne avant Mgr Osouf.) S’il eût pu entrevoir l’avenir, comme son cœur, resté invinciblement attaché à ces îles lointaines qui avaient reçu les prémices de son apostolat, aurait tressailli de bonheur à cette pensée !
Le père de Mgr Osouf mourut, le 2 décembre 1876, la veille du jour où Pierre-Marie devait être nomnmé évêque. Le vertueux père n’eut pas la joie d’apprendre sur terre cette heureuse nouvelle. Dieu la lui réservait pour son entrée dans l’éternité.
Avant de gagner sa mission, Mgr Osouf se rendit à Rome. Il y fut reçu, le 2 mai, en audience particulière par le Souverain Pontife, et, dès le 8, il s’embarquait à Naples. Deux mois après, le 8 juillet, la cérémonie de son installation avait lieu solennellement à Yokohama, dans l’église du Sacré-Cœur, en présence de son clergé, du ministre de France, M. de Geofroy, du ministre d’Espagne, et de plusieurs autres représentants des nations catholiques.
L’âge déjà avancé, quand il vint au Japon, et les nombreuses occupations de sa charge, auxquelles il se livra tout entier, ne lui permirent pas d’étudier la langue japonaise comme il l’aurait tant désiré. Ce fut pour Monseigneur une privation pénible et une entrave dont il souffrit jusqu’à la fin. Lui, si discret et si réservé envers les autres quand il croyait les déranger, se figure-t-on combien il dut éprouver de gêne, et combien d’actes de vertu il a pratiqués, étant obligé en toute rencontre de recourir à ses voisins ou à ses compagnons, pour comprendre ce qui lui était dit à lui-même ? Mais quel plaisir c’était de voir comme ses demandes étaient polies, et sa reconnaissance délicate ! Il sentait si vivement cette lacune que, quand il s’agit de lui choisir un coadjuteur, il ne put s’empêcher de dire : « J’espère au moins que celui qui sera choisi saura la langue ; l’expérience est faite, c’est assez d’une fois. »
Cette difficulté de ne pas parler, de ne pas entendre le japonais, tint toujours Monseigneur comme à distance de sa mission. Malgré son application à tout, beaucoup de choses lui. échappaient ; l’œil ne dit pas tout...
D’autre part, pour savoir ce que, comme supérieur, il avait besoin de savoir, les moyens ne lui manquaient pas. Les hommes qui l’avaient choisi l’aimaient assez pour le seconder ; leur concours ne lui fit pas défaut, surtout dans les premières années, où il en avait le plus besoin. De son côté, Monseigneur, qui a toujours été d’une extrême prudence, dans ces temps-là en particulier, ne décidait absolument rien sans avoir pris conseil auparavant. Il ne se contentait pas de consulter, il priait beaucoup. Le matin, quand il prolongeait son action de grâces après la messe plus longtemps que de coutume, c’était le signe qu’une affaire plus grave le préoccupait. Et dans sa chambre, que de fois ne le trouvait-on pas en prière !
À peine arrivé dans sa mission, une des premières œuvres entreprises par Mgr Osouf fut la construction d’une église. Il y avait alors à Tokio trois résidences de missionnaires : à Tsukiji (où la mission possédait un terrain sur la concession étrangère), à Sarugaku-cho, et à Asakusa ; mais nulle part il n’y avait encore d’« églises » ; c’étaient des chapelles provisoires, où les néophytes se réunissaient. Grâce à la munificence d’une riche et noble famille (M. le comte Daru, autrefois ministre de Napoléon III) , le 4 décembre 1877, Monseigneur posa et bénit la première pierre d’une église catholique à Tsukiji. C’était la première fois qu’une cérémonie chrétienne s’accomplissait ainsi en plein air, sous les yeux des Japonais étonnés, au milieu d’une assistance nombreuse et imposante. Pour le pays, ce fut un événement à cette époque, car la liberté religieuse n’était pas encore publiquement reconnue, et, pour Monseigneur, ce fut le sujet d’une des plus grandes joies de sa vue.
Ceux qui voient maintenant cette église ne peuvent s’empêcher de l’admirer, non à cause de ses dimensions, car elle est petite — on l’appela d’abord « la chapelle de Tsukiji » — mais parce que, tout en étant presque sans ornements, elle est d’un style gothique très pur, et d’une justesse de proportions irréprochable. On l’admire encore bien davantage quand on sait comment elle a été construite : d’un côté, par Mgr Osouf qui ne savait pas un mot de la langue dans laquelle il devait se faire comprendre ; d’un autre côté, par un charpentier japonais qui n’avait jamais vu d’église gothique, et qui n’avait pas la première idée de l’ouvrage qu’on lui faisait exécuter. Aussi, le jour de la bénédiction de l’église, 15 août 1878, au milieu de la joie de tous, missionnaires et chrétiens réunis pour cette fête, le plus heureux était le charpentier : son épanouissement était plaisant à voir ; il ne se lassait pas d’admirer le chef-d’œuvre que sa foi aveugle avait produit : chef-d’œuvre d’art, assurément, mais plus encore chef-d’œuvre de docilité et de patience. C’est cette petite église qui est devenue depuis et qui est encore la cathédrale catholique de Tokio et la métropole de tout le Japon. Aujourd’hui, pour ceux qui ont vu Mgr Osouf y prier si saintement tous les jours, elle est plus qu’un monument, c’est presque une relique.
Une belle église parle aux yeux, prêche à sa manière, mais elle ne fait pas tout. Pour convertir les hommes, il faut pouvoir les aborder et les instruire. Or, jusque vers 1880, les missionnaires, confinés dans les ports ouverts, n’avaient pu que très difficilement se mettre en rapport avec les Japonais de l’intérieur. Demeurer hors des Concessions n’était pas permis aux étrangers, à moins qu’ils ne fussent engagés, au moins nominalement, au service de quelques Japonais, à titre de professeur ou autre. Et voyager à l’intérieur n’était possible qu’avec un passeport obtenu du gouvernement japonais, pour raison de santé, ou pour études et observations scientifiques. Même avec un passeport, ces voyages ne se faisaient pas sans peine ; les craintes de la police et les préjugés du peuple contre l’étranger étaient quelquefois fort gênants. Cependant, dès que les missionnaires connurent ce moyen, ils se hâtèrent d’en profiter pour pénétrer dans les provinces, partout où ils purent, pour y « promulguer » l’Évangile.
Alors commença ce magnifique mouvement de travail apostolique et de conversions qui dura à peu près pendant quinze ans, jusque vers 1895. Quelle vie alors, et quelle joie il y avait dans la mission ! Quand ceux qu’on appelait les « ambulants » revenaient de leurs longues tournées, ils avaient de quoi raconter pendant huit jours, jusqu’à leur prochain voyage. Il n’y avait pas de chemins de fer alors ; on voyageait comme on pouvait, d’étape en étape, de village en village, prêchant partout où l’on s’arrêtait. Dans de telles conditions, on conçoit qu’il arrivât chaque jour des incidents et des aventures de toutes sortes. Cependant il faut ajouter qu’en général les missionnaires étaient bien dédommagés de leur peine, par l’empressement des auditeurs à venir les entendre et par les résultats qu’ils obtenaient. Un moment on put croire que les temps de saint François-Xavier allaient revenir. C’est pendant ces quinze ans que furent fondées le plus grand nombre des chrétientés existant aujourd’hui dans le nord du Japon, c’est-à-dire dans les deux diocèses de Tokio et de Hakodaté, et beaucoup d’autres, hélas ! qui avaient commencé de fleurir, et qui ont disparu depuis. Aujourd’hui ce temps est déjà loin de nous, et il est regardé maintenant presque comme un âge héroïque : en effet, ce que quelques hommes ont pu faire, il y a vingt ans, paraît à peine croyable aujourd’hui, tant les choses et les hommes ont changé.
Mais, pour évangéliser une vaste contrée, le travail et le dévouement, si ardents soient-ils, ne suffisent pas seuls ; il faut encore des ressources.
Pour seconder le zèle des missionnaires et avancer autant que possible l’œuvre de Dieu, Mgr le vicaire apostolique et son conseil se trouvaient dans un grand embarras. Depuis que Mgr Osouf était à Tokio, ancien procureur, ancien secrétaire d’évêché, il avait établi dans les finances et dans toute l’administration de sa mission un ordre précis et austère. Néanmoins, dans l’insuffisance de ses moyens, pressé par la nécessité urgente du moment, il avait dû contracter une dette assez lourde et engager ainsi l’avenir. Il n’y avait pas à hésiter, à tout prix il fallait combler cette lacune : Mgr Osouf prit une résolution courageuse, celle d’aller quêter en Amérique pour les besoins de sa mission. Pour ceux qui ont connu son caractère et ses habitudes, il n’y a pas de doute, se faire mendiant en pays étranger fut le plus grand sacrifice de sa vie. Dieu l’en récompensa et le bénit. Combien recueillit-il d’argent en Amérique ? Ses missionnaires ne l’ont jamais su ; mais ce qu’ils n’ont pas ignoré, c’est que la dette fut payée, le travail ne fut pas interrompu, et partout où Monseigneur fut reçu, il laissa le souvenir édifiant d’un homme vraiment apostolique.
Au mois de mars 1885, Mgr Osouf songeait à regagner le Japon, lorsque le Souverain Pontife Léon XIII le manda à Rome. Le grand pape voulait le faire porteur d’une lettre à S. M. l’empereur du Japon. Monseigneur, confus de tant d’honneur, s’inclina humblemnent ; puis, avec une simplicité d’enfant, il demanda au Souverain Pontife si, avant de partir pour Tokio, il pourrait aller jusqu’à Coutances voir sa mère encore une fois. Léon XIII fut profondément touché de cette prière. « Oh ! lui dit-il, votre bonne mère vit encore ; oui, certainement, allez la voir, et dites-lui que je la bénis. » C’est tout ce que Monsei¬gneur a raconté de cette dernière visite à sa mère. Elle avait alors soixante-quinze ans.
Le 16 août, Monseigneur arrivait à Yokohamua. Il s’empressa de faire les démarches nécessaires afin d’obtenir une audience de S. M. le mikado. Grâce au concours très bienveillant de M. Sienkiewicz, alors ministre plénipotentiaire de France, l’audience fut vite obtenue, et, le 12 septembre 1885, la lettre du Souverain Pontife fut remise solennellement à l’empereur. Dans la vie de Mgr Osouf, ce fut un des beaux jours que celui où, représentant de Léon XIII, il fut reçu, avec le cérémonial usité pour la réception des ambassadeurs, par le souverain du Japon. Il ne s’en glorifia jamais ; la seule chose à laquelle il fut sensible, ce fut l’heureux effet qu’il espérait de cet événement. Les chrétiens allaient en être grandement encouragés, et beaucoup d’autres, qui craignaient encore, se rassureraient en voyant l’accueil bienveillant fait par leur empereur à un envoyé du Chef des chrétiens.
D’ailleurs, dans sa réponse, S. M. le mikado fut formel ; après avoir remercié le Souverain Pontife, il affirma « son désir de continuer à marcher dans la voie du progrès, et sa volonté d’accorder à ses sujets chrétiens une protection égale à celle dont il favorisait tous les autres ». C’était quatre ans avant que la Constitution de l’empire fût publiée (elle le fut le 11 février 1889), et que la liberté religieuse fût écrite authentiquement dans la loi. Cette parole officielle du souverain en était comme les prémices et la garantie anticipée.
Longtemps après être revenu de son grand voyage, Monseigneur racontait encore, et toujours avec la même vivacité de sentiment, le bonheur qu’il avait éprouvé à San-Francisco (car il revint de Rome par l’Amérique), lorsque enfin il s’était vu embarqué sûrement sur le bateau qui devait le ramener au Japon. De sa vie, disait-il, il n’avait respiré aussi à l’aise. Après les efforts inouïs qu’il avait dû faire pendant deux ans contre sa nature et son caractère, il n’est pas malaisé de le croire.
Rentré dans sa chère résidence et sa chambre de Tsukiji, il y reprit tout de suite ses habitudes, et avec une application, un soin, une assiduité qui ne se sont jamais démentis, il ne vécut plus que pour sa mission. Les missionnaires parcouraient le pays avec plus de courage et de confiance que jamais, prêchant, baptisant, car alors les baptêmes étaient nombreux, bâtissant des maisons, des églises.
Alors comme aujourd’hui, ceux qui ne voyaient que le côté extérieur de ce travail se demandaient quelquefois à eux-mêmes : « Mais, pendant ce temps-là, l’évêque, que fait-il ? » Autant vaudrait-il demander ce que fait le cœur au milieu du corps. L’action du cœur non plus ne se montre pas au dehors, mais c’est par lui que vit et agit le corps entier.
D’abord, la vie de Monseigneur était réglée comme dans un monastère. A 4 h. ½ du matin, il était debout. Un service qu’il rendait gaiement, d’ailleurs, comme tous ceux qu’il pouvait rendre, avec une exactitude impeccable, c’était de réveiller ses voisins, lorsque ceux-ci le lui demandaient. Après cela, il priait simplement, comme il faisait toutes choses ; longuement, la prière étant le premier devoir de l’homme apostolique. Puis, tout le temps qui lui restait, quoiqu’il n’eût pas fait le vœu de n’en pas perdre une minute, il l’observait parfaitement ; on ne le trouvait jamais désœuvré. Excepté dans quelques rares circonstances où il se fit aider pour ses écritures, il n’avait pas de secrétaire ; il tenait lui-même tous ses registres et ses papiers, et il faut voir dans quel ordre il les a laissés, pour juger une fois de plus de son goût du beau, et de sa conscience.
Malgré tant d’efforts et tant d’industrie, une lacune, peut-être la plus considérable de toutes, restait à combler. Dans un pays qui marchait par l’intelligence, et qui se transformait à vue d’œil par l’enseignement donné dans les écoles, il devenait absolument urgent, en vue de l’avenir, de faire une part aussi grande que possible à l’éducation. Car, pour avoir plus tard des hommes instruits et chrétiens, par lesquels le catholicisme pût être représenté et tenir sa place dans la nouvelle société japonaise, il n’y avait qu’un moyen, c’était d’en élever. Ceux qui auraient été jusqu’à vingt-cinq ans imbus de principes et d’erreurs contraires au catholicisme, ceux-là seraient inévitablement des adversaires, et l’Église n’aurait personne à leur opposer.
Or, les missionnaires alors au Japon étaient trop peu nombreux et trop occupés de leur ministère ordinaire, pour fonder et tenir des écoles autant qu’il en aurait fallu. Force était donc de recourir à d’autres, et de chercher des auxiliaires en dehors de la Société des Missions-Étrangères.
On s’adressa aux Frères Marianites, bien connus par leur célèbre collège Stanislas, qu’ils possédaient et dirigeaient avant la loi de spoliation. C’étaient juste les hommes qu’il fallait au Japon. Arrivés en 1882, ils ont d’abord passé, comme tout le monde, plusieurs années à étudier le pays, à s’y adapter, s’y faire connaître, y obtenir confiance. Aujourd’hui leur œuvre est fondée, et visiblement bénie de Dieu : ils ont de belles écoles à Tokio, à Osaka, à Nagasaki, à Kumamoto, un noviciat et une école apostolique à Nagasaki, en tout près de 2.000 élèves, et de magnifiques projets pour l’avenir.
Pour l’éducation des jeunes filles, les écoles ne faisaient pas défaut. Les Sœurs du Saint-Enfant-Jésus ou Dames de Saint-Maur étaient à Yokohama et à Tokio avant que Monseigneur fût évêque. Les Sœurs de Saint-Paul de Chartres, appelées par lui à la capitale, y arrivaient au commencement de 1881. (Elles étaient depuis plusieurs années déjà à Hakodaté.) Toutes ayant commencé par recevoir d’abord des jeunes filles pauvres, elles s’élevèrent par degrés, peu à peu, jusqu’aux sommets de la société japonaise ; avant de mourir, Monseigneur eut la joie de voir toutes les classes représentées, en petit nombre sans doute, mais enfin représentées dans leurs écoles.
Durant son long épiscopat, de 1877 à 1906, Mgr Osouf a vu de ses yeux s’opérer bien des changements dans l’empire du Japon, ou plutôt il a vu ce pays se transformer presque entièrement. Et, quoiqu’il n’ait pas pris dans ce mouvement toute la part qu’il aurait désiré d’y prendre pour assurer au catholicisme une influence plus considérable, cependant, au milieu de « ses regrets de n’en pouvoir faire davantage », les sujets de joie ne lui ont pas manqué : comme témoin ou comme principal acteur, il a été mêlé à des événements bien conso¬lants.
Le vénéré Mgr Petitjean, tant aimé de ses chrétiens de Nagasaki, ayant quitté ce monde le 7 octobre 1884, son successeur, Mgr Cousin, nommé le 8 janvier suivant, fut sacré, le 21 septembre 1885, par Mgr Osouf, neuf jours seulement après sa réception par l’empereur.
Le 20 mars 1888, afin de multiplier les missionnaires au Japon et d’augmenter leurs ressources, un bref de S. S. Léon XIII créait un troisième vicariat apostolique, comprenant le centre du pays entre Tokio et Nagasaki, et appelé pour cette raison Japon central. La grande ville d’Osaka devait être la résidence du nouveau vicaire apostolique. L’homme choisi pour cette nouvelle dignité fut M. Midon. Arrivé au Japon en 1870, il remplissait les fonctions de provicaire depuis 1873, d’abord sous Mgr Petitjean, puis avec Mgr Osouf. D’un caractère bien différent, Mgr Osouf et M. Midon s’accordaient parfaitement et semblaient faits pour se compléter l’un l’autre. Leurs relations entre eux étaient telles qu’il eût été impossible de dire lequel était le plus dévoué à l’autre. Quand il leur fallut se séparer, des deux côtés la douleur fut égale ; leur courage aussi fut pareil. Ils firent généreusement leur sacrifice, à cause de Dieu, comme l’exprima la devise du nouvel évêque : Propter eum qui dilexit nos. Mgr Midon fut sacré dans son église de Yokohama où il avait tant travaillé, le 11 juin 1888, fête de saint Barnabé, par Mgr Osouf.
Jusqu’en 1889, le Japon, par rapport au christianisme, avait été sous le régime de la tolérance ; les chrétiens n’y étaient plus persécutés ni inquiétés, mais ils n’y étaient pas non plus tout à fait tranquilles. De la part du gouvernement, tout se bornait à fermer les yeux et à ne pas prendre officiellement connaissance de la religion chrétienne. A cause des anciens préjugés qui existaient encore, tolérer était tout ce qui était possible alors, mais ce n’était pas tout à fait assez. La liberté formelle, écrite dans la loi, était désirée et attendue avec impatience ; enfin elle fut accordée. Le 11 février 1889, fut solennel
Références
[0684] OSOUF Pierre-Marie (1829-1906)
Bibliographie. — Extraits des procès-verbaux des réunions générales des missionnaires du Japon septentrional. — Yokohama, 1883, in-8, pp. 94 + tab.
Acta et Decreta primæ Synodi regionalis Japoniæ et Coreæ Nagasaki habitæ. A. D. 1890. Cum mutationibus a S. Cong. de Propaganda Fide inductis. — Typis Societatis Missionum ad Exteros, Hong-kong, 1893, in-8, pp. 125.
Acta et Decreta primæ provincialis Synodi Tokiensis. A. D. 1895. Cum mutationibus a S. Cong. de Propaganda Fide inductis. — Typis Societatis Missionum ad Exteros, Hong-kong, 1896, in-8, pp. 56.
Notes bio-bibliographiques.
C.R., 1874 (déc.), pp. 36, 38¬ ; 1875, p. 54¬ ; 1876, pp. 3, 43¬ ; 1877, pp. 4, 5¬ ; 1878, p. 8¬ ; 1879, p. 10¬ ; 1880, p. 11¬ ; 1881, pp. 13, 17¬ ; 1882, pp. 12, 108¬ ; 1885, pp. 9, 25, 33¬ ; 1886, pp. 27, 33¬ ; 1887, p. 49¬ ; 1888, pp. 33, 46¬ ; 1889, p. 34¬ ; 1891, pp. 2, 25, 74, 261¬ ; 1892, p. 20¬ ; 1893, p. 37¬ ; 1894, p. 41¬ ; 1895, p. 46¬ ; 1896, p. 40¬ ; 1897, pp. 42, 73¬ ; 1898, p. 38¬ ; 1899, p. 9¬ ; 1900, p. 5¬ ; 1901, p. 5¬ ; 1904, pp. 11, 38.
A. P. F., xlix, 1877, p. 147¬ ; l, 1878, Aperçu général sur le Japon septentrional, p. 187¬ ; li, 1879, Fondation de trois résidences et de sept chrétientés, p. 197¬ ; lxvi, 1894, p. 151¬ ; lxxviii, 1906, pp. 398, 476. — A. S.-E., xxviii, 1877, p. 155¬ ; xlviii, 1897, pp. 6, 90¬ ; xlix, 1898, p. 97.
M. C., ii, 1869, Bénédiction de la chapelle de Sancian, p. 205¬ ; iv, 1871-72, Révocation des décrets de persécution au Japon, pp. 311, 352¬ ; v, 1873, Mort de M. Caillet, p. 562¬ ; vii, 1875, pp. 476, 542¬ ; viii, 1876, pp. 303, 616¬ ; ix, 1877, pp. 62, 220¬ ; Ib., Sa réception par le Pape, p. 243¬ ; Ib., Son arrivée à Yokohama, p. 410¬ ; x, 1878, p. 301¬ ; xii, 1880, Incendies à Hakodaté et à Tôkiô, p. 98¬ ; xiii, 1881, p. 257¬ ; xiv, 1882, p. 400¬ ; xvi, 1884, Au concile de Baltimore, p. 548¬ ; xvii, 1885, Reçu en audience par le Mikado, p. 518¬ ; xix, 1887, p. 196¬ ; xxiii, 1891, pp. 28, 542, 567¬ ; xxiv, 1892, p. 548¬ ; xxv, 1893, p. 593¬ ; xxvi, 1894, Tremblement de terre au Japon, p. 413¬ ; xxvii, 1895, pp. 124, 233¬ ; xxviii, 1896, Typhon, p. 506¬ ; xxxiii, 1901, p. 101¬ ; xxxviii, 1906, pp. 323, 431.
A.M.E., 1899, Attaque des protestants contre les catholiques, réplique du R. J. Dooman, p. 26¬ ; 1902, Ses noces d’or, p. 320. — Rev. cath. Coutances, 1872, p. 469¬ ; 1876, p. 197¬ ; 1877, Notice, pp. 278, 323, 355, 380, 397¬ ; 1878, pp. 150, 298, 570¬ ; 1879, pp. 411, 489¬ ; 1881, p. 504¬ ; 1884-85, A Cérisy-la-Salle, p. 655¬ ; 1885-86, Réception par l’empereur du Japon, p. 84¬ ; Ib., p. 153¬ ; 1902, pp. 109, 898¬ ; 1903, p. 326¬ ; 1906, Sa mort, p. 466¬ ; Ib., p. 690¬ ; 1907, Notice, pp. 407, 425, 454, 474. — Voix de N.-D. Chartres, xxi, 1877, p. 116¬ ; xxxv, 1891 (supplém.). pp. 200, 201. — Sem. rel. Vannes, 1873, p. 735. — Echo de N.-D. de la G., 1885, p. 989. — Bull. Assoc. Saint-Lô, 1907, p. 4.
Hist. gén. Soc. M.-E., Tab. alph. — Hist. miss. Kouy-tcheou, Tab. alph. — La Rel. de Jésus, i, p. 571¬ ; ii, pp. 258, 359 et suiv., 375, 379, 410, 509 et suiv., 518, 527, 536, 553 et suiv. — Le culte de N.-D. de Lourd., p. 231. — An anecd. hist., Tab. alph. — L’Evang. au Jap., pp. 19 et suiv., 259. — Rapport du R. P. Vigroux sur l’hôp. des lépr. à Gotemba, p. 1. — Arm. des Prél. franç., p. 265.
Allocution de Mgr Cousin à l’occasion de l’imposition du Pallium à Mgr Osouf, 19 mars 1892.
Collect., 16 juin 1893¬ : n° 1395¬ ; 25 juin 1902¬ : n° 2317.
Notice nécrologique. — C.R., 1906, p. 277.
Biographie. — Notice biographique sur Sa Grandeur Mgr P.-M. Osouf archevêque de Tôkiô [avec portrait] (par M. Ligneul). — Mission catholique, Tôkiô, 1906, in-12, pp. 70.
Portrait. — A. P. F., lxxviii, 1906, p. 404. — M. C., xxxviii, 1906, p. 431. — La Rel. de Jésus, ii, p. 353. — Voir Biographie.