Émile COLOMBET1849 - 1933
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1104
- Bibliographie : Consulter le catalogue
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Thaïlande
- Région missionnaire :
- 1872 - 1933
Biographie
[1104]. COLOMBET Emile, est né le 26 mai 1849 à Gap (Hautes-Alpes), au diocèse de Gap. Après ses études à la maîtrise de Gap et au Petit Séminaire, il entre laïc aux Missions Etrangères le 31 juillet 1867. Ordonné prêtre le 23 décembre 1871, il part pour la Mission du Siam le 31 janvier 1872 et arrive à Bangkok le 5 avril suivant.
Après deux ans de séjour au Séminaire de Bangxang, on le retrouve à Bangkok où il est nommé en 1875, curé de la Cathédrale : il le restera jusqu'à sa mort. L'honneur du Père Colombet est d'avoir compris l'importance de l'instruction dans le développement du pays. Il crée donc une école paroissiale et l'installe dans les locaux de l'ancien séminaire dont les élèves sont allés à Bangxang : c'etait en 1877. En 1879, il adjoint une section anglaise à la section française. En 1885, son école est ouverte à tous les enfants de Bangkok : le nombre des élèves augmente régulièrement et le Collège de l'Assomption reçoit bientôt les Frères de Saint Gabriel.
Après le Collège qu'il agrandit avec les contributions de la famille royale et des fonctionnaires haut placés, ce sera la Cathédrale qui attirera son attention : les fondations sont jetées en 1905 ; la première pierre est bénite en 1910 par Mgr. Bouchut. L'édifice est livré au culte en 1918. En 1925, le Père Colombet élit domicile à l'hôpital de la Mission où il s'éteint le 23 août 1933.
Provicaire de 1907 à 1932, conseiller de deux évêques, estimé des princes, aimé des jeunes et de ses confrères, le Père Colombet était chevalier de la Légion d'Honneur et fut aussi décoré de l'ordre de l'Eléphant Blanc.
Nécrologie
M. COLOMBET
MISSIONNAIRE DE SIAM
M. COLOMBET (Emile-Auguste) né le 26 mai 1871 à Gap (Gap, Hautes-Alpes). Entré laïque au Séminaire des Missions-Étrangères le 31 juillet 1867. Prêtre le 23 décembre 1871. Parti le 31 janvier 1872 pour la Mission de Siam. Mort à Bangkok le 23 août 1933.
Un journal de Marseille a publié sur M. Colombet un article élogieux sous ce titre : « Un grand Français est mort au Siam ». L’auteur de cet article s’attache à nous faire admirer ce missionnaire comme un initiateur dans un pays qui en 1870 n’avait pas encore abandonné ses vieilles méthodes de gouvernement, mais cherchait déjà la voie qui le conduirait vers le progrès matériel que les nations occidentales cherchaient à réaliser chez ses plus proches voisins.
« Ce provençal clairvoyant, dit-il, comprit que le Siam, pays libre, avide de progrès, « gouverné par un roi éclairé, allait bientôt sortir de son apathie. Il voulut non point suivre le « mouvement, mais le guider. Il y parvint en procurant l’instruction à l’élite de la société « siamoise. Il n’y avait encore aucune école à Bangkok ; il en fondera une, et les élèves « formés par lui seront les premiers capables de parler les langues étrangères. Ardent comme « un méridional, tenace comme un breton, M. Colombet, malgré bien des obstacles, dont le « plus grand fut la difficulté de recruter son personnel enseignant, put mener à bien cette « œuvre, qui est maintenant l’une des plus belles parmi celles créées par les Pères des « Missions-Étrangères de Paris en Extrême-Orient ».
Les missionnaires, ses confrères, savent où le P. Colombet puisa ce courage persévérant, vivifié par un grand zèle pour la gloire de Dieu, une soumission entière à ses supérieurs, qui jamais d’ailleurs ne cessèrent de lui prodiguer leurs encouragements, une confiance illimitée en la Providence, et une sainteté de vie qui ne pouvait que lui attirer les bénédictions du Ciel sur toutes ses entreprises.
Et cependant les talents, dont le divin Maître l’avait gratifié, n’étaient ni plus brillants ni plus nombreux que ceux accordés à la plupart de ses confrères, mais il sut les faire valoir et en tirer le meilleur parti.
Emile Colombet naquit, à Gap, dans la paroisse de l’Assomption, le 26 mai 1849 d’une famille patriarcale où se transmettaient, de génération en génération, l’esprit de foi et la fidélité au devoir. Dans cette famille de dix enfants, Dieu se choisit deux prêtres : Jean-Baptiste, qui deviendra plus tard l’organiste distingué de la cathédrale de Gap, et Emile notre futur missionnaire. Emile, d’une santé plutôt délicate, causa dès son enfance bien des inquiétudes à sa pieuse mère, qui le conduisit au curé d’Ars. Elle revint de son pèlerinage grandement consolée : le bon saint ayant promis 80 ans de vie à son cher enfant.
A 9 ans il fréquenta l’asile Saint-Lazare à Marseille, puis, de retour à Gap, ses parents le confièrent à la Maîtrise de la cathédrale, tout en lui faisant suivre, comme externe, les cours du collège de la ville. A la maîtrise il s’initia à la musique sacrée, qu’il aima et pratiqua toute sa vie, comme d’ailleurs son frère aîné.
Après ses études au petit Séminaire, Emile entre le 31 juillet 1867 au Séminaire de la rue du Bac, mais en 1870 la guerre est déclarée, le Séminaire licencié et, s’il est dispensé de répondre à l’appel des armes, c’est parce qu’il a déjà reçu le sous-diaconat. L’aspirant-missionnaire rentra à Paris dès que le Séminaire put rouvrir ses portes, fut ordonné prêtre le 23 décembre 1871 et partit pour la Mission du Siam le 31 janvier 1872. Il eut comme com-pagnons de route MM. Brillet, Bertho, Chaumet, Letort, Vissac et Petit. Leur relation de voyage nous montre ces jeunes gens allant gaiement à la conquête des âmes. Pendant les longues heures de la traversée, ils traduisent leur enthousiasme par des chants qui, s’ils n’étaient pas animés d’un souffle poétique puissant, s’adaptaient fort bien aux personnes ou aux circonstances. Accompagnés des accords du fameux cornet à piston de M. Colombet, ils charmaient les loisirs des autres passagers.
M. Colombet arriva à Bangkok le 5 avril suivant. Après deux ans de séjour au Séminaire de Bangxang, nous le retrouvons à Bangkok où, en 1875, il est nommé curé de la cathédrale, fonction qu’il conservera jusqu’à sa mort.
Lorsque le jeune missionnaire devint curé de l’église de l’Assomption, cette soi-disant cathédrale n’était qu’une modeste bâ¬tisse, construite en 1809 sur le modèle des pagodes siamoises de l’intérieur du pays ; les paroissiens étaient pauvres et peu nombreux, 300 à peine.
L’horizon dut alors lui paraître bien borné, et le ministère plutôt restreint de cette petite paroisse n’était pas de nature à satisfaire son activité débordante. Il comprit d’ailleurs tout de suite que, pour la renouveler et la développer sérieusement, il fallait travailler à l’instruction et à l’éducation chrétienne des enfants, estimant que c’était par l’école qu’il arriverait à ce résultat.
Il n’y avait pas encore d’école paroissiale, il en créera une ; sans doute songeait-il déjà à en faire profiter tous les orphelins, fils d’Européens qui dans la ville se trouvaient en grand péril d’âme et de corps. Quoiqu’il en soit les anciens locaux du Séminaire dont les élèves venaient d’être envoyés à Bangxang se trouvaient inoccupés ; M. Colombet les demanda à Mgr Vey et y installa son école ; c’était en 1877.
Les débuts furent peu encourageants, et tout autre que M. Colombet eut peut-être renoncé à une entreprise qui semblait prématurée à quelques-uns. Au lieu de reculer, en 1879 il adjoint à la section française une section anglaise. Entre temps il élabore un plan complet d’études, déclare en 1885 que l’école paroissiale va faire place à un Collège ouvert à tous les enfants de Bangkok. Le jour de la rentrée 33 élèves se présentèrent : c’était peu. M. Ganton qui, jusqu’à sa mort fut le bras droit de M. Colombet, et M. Donovan, professeur d’anglais, qu’il avait fait venir de Londres, en furent quelque peu déconcertés. M. Colombet, lui, ne se troubla point ; il attendit l’heure de la Providence et eut raison ; à la fin de l’année le Collège comptait 80 élèves, et l’année suivante il en accueillait 130, répartis en 6 classes anglaises et 3 françaises.
Cet accroissement rapide allait fournir une autre source d’anxiété à M. Colombet, car il fallait nécessairement songer à bâtir. Mgr Vey ne lui ménagea pas ses paternels encouragements, mais la caisse de la Mission était vide. Eh bien ! notre vaillant missionnaire ira quêter. Le 6 janvier 1887 il présente les plans de son futur collège au prince Dewavongse qui les approuve ; le roi Chulalongkorn souscrit 4.000 francs, la reine 2.000 francs, les princes et mandarins suivent l’exemple du roi. Le Bangkok Times lui facilite l’accès auprès des Européens par un article des plus élogieux sur son œuvre ; il va pouvoir construire son collège. La première pierre est posée le 15 août 1887 par le prince héritier, et, au début de 1889, le nouveau collège est ouvert. En 1891 il ne compte encore, il est vrai, que 4000 élèves ; mais les princes, les mandarins et l’élite de la société de la capitale lui confient leurs enfants.
M. Colombet dont l’abnégation n’a pas de limite, décide alors de faire appel à une Congrégation enseignante ; il vient en France s’entendre avec les Frères de Saint-Gabriel, qui acceptent ses propositions et envoient des professeurs. En 1900 le collège compte 1.000 élèves ; en 1920, 1.800, et aujourd’hui plus de 2.000. Dans toutes les branches de l’adminis-tration, dans tous les domaines de l’activité, on rencontre au Siam des hommes qui ont fréquenté le collège de l’Assomption et s’en montrent fiers.
Après l’arrivée des Religieux, M. Colombet continua à diriger l’Association des Anciens élèves, qu’il venait d’établir, et à s’occuper plus activement des œuvres paroissiales de la cathédrale, dont il était toujours chargé. La vieille église ne suffisait aux besoins du culte, car la population chrétienne indigène s’était accrue, et les Européens catholiques étaient devenus, eux aussi, plus nombreux.
Cette fois ce fut le curé qui reprit l’escarcelle pour aller quêter. Grâce à la générosité publique, il put jeter les fondements de la nouvelle cathédrale en 1906, et Mgr Bouchut, venu pour assister au sacre de Mgr Perros, en bénissait solennellement en 1910 la première pierre. Huit ans après l’édifice était terminé et livré au culte, en 1918.
Comment notre confrère réussit-il à mener à bonne fin toutes ces entreprises, et à vaincre toutes les difficultés rencontrées sur sa route avant de réaliser ses projets ? En puisant largement aux sources où le prêtre trouve la force et le courage, et aussi le ré¬confort dans les moments les plus pénibles. Malgré le nombre et la diversité de ses occupations, M. Colombet sut toujours conserver toute sa vie la régularité d’un séminariste ; il consacrait un temps bien déterminé à tous ses exercices de piété et n’omettait jamais sa visite au Saint-Sacrement. Son union constante et intime avec Dieu fut le principe de toutes les vertus que nous admirions en lui, en particulier de sa patience et de sa grande charité à l’égard de ses chrétiens. Toujours d’une humeur égale, on le voyait rarement se mêler aux discussions ; il savait accepter en silence, et souvent même le sourire aux lèvres, les blâmes et les critiques qui lui étaient parfois adressées.
Sa grande expérience des affaires, son jugement sûr, sa discrétion, en firent le conseiller et le confident, non seulement des chrétiens indigènes, mais aussi de beaucoup d’européens. Ceux qui ne l’ont connu que dans les dernières années de sa vie, ignorent peut-être que ce travailleur acharné fut aussi un gai compagnon : mais les vieux missionnaires n’ont point oublié les excursions, les joyeuses randonnées que faisaient quelquefois les confrères de Bangkok, quand il leur était possible de prendre quelques jours de vacances.
Pour ces voyages, M. Martin, curé de l’Immaculée-Conception, avait acheté une vieille embarcation, qu’il baptisa du nom gracieux de « Roule-ta-Bosse ». On ne s’ennuyait guère à bord de ce bateau, car M. Martin, avec sa belle voix de ténor, faisait retentir le rivage de ses cantiques et de ses chansons, tandis que M. Colombet, armé de son vieux cornet à piston, l’accompagnait d’airs de circonstances. On se ravitaillait en route et, aux endroits bien ombragés, on faisait le pique-nique.
Souvent le but de l’excursion était un poste de l’intérieur. Quand la barque arrivait à l’endroit fixé d’avance, les cloches se mettaient en branle, les tambours battaient, les gongs résonnaient, les missionnaires de la station accouraient joyeux, alors nos confrères de Bangkok leur racontaient les nouvelles de la Mission, de la douce France, et bien souvent M. Colombet leur ménageait quelque heureuse surprise ou leur apportait quelques douceurs toujours appréciées par ces chevaliers de la brousse.
Depuis 1926, M. Colombet, condamné au repos par ses infirmités, avait élu domicile à l’hôpital de la Mission. En 1933, quelques jours avant la fête de l’Assomption, ayant manifesté le désir d’assister à la procession qui se faisait chaque année autour de sa chère cathédrale à l’occasion de cette solennité, il dut y renoncer par suite d’un accès de fièvre intense.
A partir de cette époque ses forces allèrent en déclinant, et le 23 août 1933 notre confrère s’éteignit doucement, assisté de M. Ferley et des Sœurs de l’hôpital. La veille encore il avait reçu la sainte communion et, Mgr Perros étant venu lui rendre visite, il s’était joint aux pieuses invocations que Son Excellence lui sug¬gérait.
Sa dépouille mortelle fut aussitôt exposée dans le salon de l’évêché, où les chrétiens vinrent en foule prier pour leur pasteur et de nombreux païens saluer une dernière fois celui qu’ils véné¬raient.
La cérémonie des obsèques eut lieu le 26 août et fut des plus émouvantes : 2.000 personnes au moins se pressèrent dans la cathédrale ; Mgr Perros chanta la Messe de Requiem et donna l’absoute, puis le cercueil fut porté autour de la cathédrale et dans la cour du Collège : procession grandiose et recueillie, j’allais dire véritable triomphe pour l’humble missionnaire. Tout le corps diplomatique était présent ainsi que le chef du gouvernement Siamois, Phaya Phahôn, et de nombreuses personnalités officielles. Lorsque le cercueil eut été descendu dans la crypte, toute l’assistance défila respectueusement devant le tombeau, où repose maintenant et pour toujours, aux côtés de Mgr Vey et de M. Fauque, son compatriote, le grand missionnaire que fut M. Colombet.
Cher confrère, pendant votre longue carrière apostolique vous fûtes curé de la Cathédrale, provicaire, conseiller de deux évêques, estimé des princes aimé des Européens, Directeur de la Jeunesse, chevalier de la Légion d’Honneur, décoré de l’Ordre de l’Eléphant blanc, etc, Tous ces titres vous en étiez digne, tous ces honneurs vous les méritiez grandement, mais je demeure intimement persuadé que si le Divin Maître vous avait demandé, comme il le fit à un grand Saint, ce que vous préfériez comme récompense de tous vos labeurs et de tous vos travaux, vous eussiez répondu comme lui : « Vous, Vous seul, ô mon Dieu. » Vous le possédez maintenant le Dieu de votre cœur, vous Le voyez face à face, priez-Le de protéger votre chère Mission du Siam et de bénir ceux qui essayent de suivre vos beaux exemples et de continuer votre lourde tâche.
~~~~~~~
Références
[1104] COLOMBET Émile (1849-1922)
Références biographiques
AME 1904 p. 147. 1913 p. 91. 1922 p. 188. 1932 p. 139. 1933 p. 236. CR 1872 p. 52. 1885 p. 105. 1886 p. 112. 1888 p. 152. 153. 1895 p. 249. 1898 p. 194. 1901 p. 190. 1903 p. 224. 1904 p. 426. 1905 p. 200. 1906 p. 359. 360. 1907 p. 41. 64. 1909 p. 197. 201. 268 sq. 1910 p. 210. 219. 1915 p. 193. 1917 p. 113. 1919 p. 189. 1920 p. 151. 1923 p. 132. 1926 p. 187. 221. 1927 p. 122. 1929 p. 161. 1933 p. 181. 256. 368. 1935 p. 180. 1937 p. 270. BME 1922 p. 246. 247. 313. 511. 577. 639. 1923 p. 130. 483. 520. 1924 p. 401. 1926 p. 223. 515. 1929 p. 505. 1932 p. 301. 1931 p. 306. 1933 p. 795. photo p. 774. 1935 p. 287. 1937 p. 216. 1948 p. 112. 1949 p. 721. 1955 p. 198. 1956 p. 79. 546 sq. EC RBac N° 23. 273. APP juin 1960 p. 5. janvier 1964 p. 9.
Notice nécrologique
CR 1933 p. 368-373.