Arnaud LAFOURCADE1860 - 1888
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1725
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Corée
- Région missionnaire :
- 1887 - 1888
Biographie
[1725]. LAFOURCADE, Arnaud-Jean, naquit le 4 novembre 1860 à Urcuit (Basses-Pyrénées). Il entra laïque au Séminaire des M.-E. le 19 février 1883, reçut le sacerdoce le 26 septembre 1886, et partit le 1er décembre suivant pour la Corée. Il étudia la langue dans la province de Tjyen-la, et, dès l'automne de 1887, fut à même d'administrer le district de Pai-tjai (district civil de Tjyen-tjyou). Il mourut de la fièvre typhoïde, le 11 juillet 1888, à Pai-hteui, province de Tjyen-la. Ses restes ont été transférés en 1896 à Toi-tjai, district civil de Ko-san.
Nécrologie
M. LAFOURCADE
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE CORÉE
Né le 4 novembre 1860.
Parti le 1er décembre 1886.
Mort le 11 juillet 1888.
Le Bulletin catholique du diocèse de Bayonne publiait, le 16 septembre 1888, ces lignes émues:
« Nous apprenons à l’instant une douloureuse nouvelle. Notre compatriote M. l’abbé Lafourcade, des Missions-Étrangères de Paris, est mort en Corée où il était depuis bientôt deux ans. La fièvre typhoïde l’a emporté. Ce n’est pas le martyre comme nous l’eussions rêvé pour l’ardent apôtre, mais elle est belle encore devant les hommes, et elle a dû être agréable à Dieu, cette mort d’un jeune homme de 28 ans, s’éteignant loin des siens et de ses amis, à quatre mille lieues de sa patrie, au milieu des plus rudes travaux apostoliques.
« Né à Urcuit, aux frontières du pays basque et des Landes, M.Lafourcade réunissait en lui les qualités qui semblent le plus oppsées : Physionomie ouverte et fine en même temps, nature réfléchie et esprit prime-sautier, cœur d’or et caractère de fer, intelligence brillante et sens pratique très développé, tel était le jeune missionnaire que nous avons vu partir, il y a deux ans, pour la Corée. La nature lui avait donné un tempérament délicat, mais sa volonté et la Reine des apôtres lui avaient fait des muscles d’acier. Et c’est sans doute une des raisons pour lesquelles ses supérieurs l’avaient envoyé dans cette mission, la plus pénible du monde.
« On comprend qu’avec tant de qualités, M.Lafourcade ait eu partout et vite beaucoup d’amis. Aussi, sa mort va être un véritable deuil, non seulement pour ses chers condisciples, mais pour ceux-là même qui n’ont pu que l’entrevoir, et qui aussitôt l’avaient aimé.Il était sans doute perdu pour eux sur la terre, mais on aimait à penser qu’il était encore debout là-bas, au premier rang en face de l’ennemi, on aimait aussi à entendre quelquefois dans ses lettres l’écho de son bon rire qui se mêlait si bien en lui aux enthousiasmes et aux souffrances de l’apôtre. Maintenant c’est fini. Le jeune soldat est tombé, et sa tombe qui devrait être si glourieuse, est perdue au fond de quelque village de la Corée. Nous, du moins, nous la saluons de loin, nous y déposons avec ce court éloge nos larmes et nos prières, nos larmes pour l’ami mort loin de notre regard et sans notre adieu, des prières non pas pour lui, mais à lui pour nous et pour ceux qui iront prendre sa place:
« Que sa pieuse famille recoive ici l’expression de notre respectueuse et sympathique condoléance. »
Cette famille que le jeune missionnaire avait quittée pour répondre à sa vocation se compose d’un vieux père, d’une vieille mère et de quatre sæurs. Il en était le seul fils, la gloire et l’espoir de tous; mais Dieu l’appela à tout laisser pour son amour, et son cœur généreux n’hésita pas.
Entré au Séminaire des Missions-Étrangères, le 19 février 1883 ,M. Arnaud-Jean Lafourcade fut ordonné prêtre le 26 septembre 1886. Il partit le 1er décembre suivant pour la Corée. « Au mois de janvier 1887, écrivait Mgr Blanc aux parents du missionnaire, lorsque je vis arriver votre cher fils, il était si plein de vie, d’entrain, d’activité, que je remerciai intérieurement le bon Dieu de m’avoir envoyé un ouvrier qui paraissait si capable de rendre à notre mission de Corée de bons et longs services. Je ne savais pas qu’il était déjà mûr pour la couronne, et que Dieu ne voulait que nous le montrer. »
Après quelques semaines passées près de son évêque, le P. Lafourcade fut envoyé, pour étudier la langue, dans la province de Tjyel-la. Il passa l’été à proximité d’un confrère, le P. Doucet, et sut si bien employer son temps, qu’à l’automne, il était déjà capable d’entreprendre l’admministration d’un district. Il visita 34 stations, entendit 1.170 confessions et eut la joie de régénérer 52 adultes. De retour au village de Pai-hteui, sa résidence, il écrivait à son Vicaire Apostolique :
« Je viens de terminer ma première campagne, et le sentiment qui domine en mon cœur est sans contredit la joie d’avoir été appelé, quoique bien indigne, à cultiver une partie de la vigne de Corée, cette terre empourprée du sang de tant de milliers de martyrs. Pour ménager mon inexpérience et ma faiblesse, me faire savourer pleinement les délices de la moisson spirituelle, la divine Providence n’a pas permis qu’aucun accident vînt troubler ma première administration. Naturellement, les souffrances physiques pèsent peu dans la balance du missionnaire.
« Votre Grandeur connaît les obstacles que la nature a su semer dans ce fin fond de Tjyel-la-to. Ces montagnes se dressant majestueusement aux quatre points cardinaux et vous fermant tout horizon ne tentent guère que mon cœur de missionnaire. Au-delà de ces montagnes, j’entrevois des âmes à sauver, et il me semble voyager en plaine ! Néanmoins une course de quatre mois à travers la pluie et la neige, la glace et tous les agréments que nous offre le ciel de Corée en hiver, secoue singulièrement les constitutions les plus robustes. Et si, comme complément, nous ajoutons la table qui nous attend, et contre laquelle regimbe plus ou moins notre estomac: la position est difficile. Mais que sont ces petites misères physiques, quand elles sont endurées en vue d’âmes à sauver, qui sont si chères au Divin crucifié!
« L’affection de nos chrétiens pour le Père est sans bornes; ils savent et comprennent que c’est uniquement pour eux que ce dernier a tout quitté. Aussi la séparation s’effectue-t-elle dans des conditions déchirantes ! Que de fois l’émotion ne m’a-t-elle pas gagné ! Lorsque l’heure de quitter le village a sonné, les pauvres chrétiens fondent tous en larmes, les hommes accompagnent le Père jusqu’à la montagne voisine, les femmes le suivent de leurs regards. Et quel cœur ne serait pas ému à ce moment ? Ces pauvres gens ne voient leur Père qu’une fois par an, et comme à la dérobée ; il ne sera pas là pour leur porter à l’heure suprême les secours de la religion ; les voilà livrés à eux-mêmes jusqu’au retour du missionnaire, au bout de l’an !
«Pauvres chrétiens d’Europe qui avez le prêtre à vos côtés, et qui refusez d’en profiter, que répondrez vous au jugement dernier ? »
Avait-il, le pieux missionnaire , en écrivant ces lignes, le pressentiment de sa fin prochaine ? Lui, si robuste, si vaillant, était maintenant couché sur un lit de douleur. En quelques jours, la fièvre typhoïde l’avait conduit aux portes du tombeau. Les chrétiens redoublaient leurs prières, et suppliaient Dieu de leur conserver leur Père. Mais le mal empirait toujours, et ils se demandaient avec anxiété si le missionnaire voisin, retenu loin de à par son administration, aurait le temps d’arriver pour l’assister au dernier passage. Mais la Providence veillait.
Le 10 juillet au soir, un jeune missionnaire qu’on n’attendait pas arrivait de Séoul. M.Vermorel ignorait l’état de son confrère ; il était envoyé près de lui, pour se former à l’étude de la langue et lui tenir compagnie. En arrivant, il le trouva étendu sur une natte, quasi sans mouvement et dans un délire presque constant. « Le cher malade m’a reconnu, écrit-il, quand je l’ai embrassé et que je lui ai rappelé le nom de son évêque. Voyant que le temps pressait, je lui parlai de confession, et, comme il se trouvait dans l’impossibilité de rassembler deux idées, je lui donnai l’absolution sur un signe affirmatif par lequel il répondit à ma demande ; il fit alors un grand signe de croix. Deux heures après, je lui administrai l’Extrême-Onction, il répondit à plusieurs reprises aux prières et répéta très distinctement ce que je récitais. Je pensais pouvoir lui donner le Saint-Viatique le lendemain, mais il se trouva si faible et si peu conscient de ses mouvements, que je n’ai pas jugé prudent de le faire.
« La nuit du mardi au mercredi s’est passée à peu près comme les précédentes. La journée n’a pas été bonne, le pauvre malade avait le délire, il parlait coréen, francais, basque, espagnol, ect., il voulait tantôt s’en aller voir ses parents, tantôt aller faire une promenade sur la montagne, il voulait dire la sainte Messe, il voulait s’habiller pour aller à la rencontre de Mgr Blanc, son évêque, qui arrivait disait-il, ect.
« Enfin le calme est revenu, et c’est alors qu’il s’est endormi du sommeil des justes, vers les six heures et demie du soir, 11 juillet, un peu après avoir recu l’indulgence apostolique de la Bonne Mort : agonie d’une demi-heure environ, très douce, mort sans secousse et sans beaucoup d’effort. Les chrétiens le pleurent comme un père, ils ont beaucoup prié et continuent de prier pour lui.»
Selon l’usage du pays, les obsèques solennelles ne purent avoir lieu que beaucoup plus tard. Deux missionnaires eurent la consolation d’y assister. Un cortège de plus de 300 chrétiens, venus de tous les points du district, conduisit à sa dernière demeure ce jeune missionnaire, qui avait tout sacrifié pour le salut des âmes, et que Dieu avait rappelé à Lui dès le début de sa carrière apostolique.
Références
[1725] LAFOURCADE Arnaud (1860-1888)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1888, p. 15. - A. M.-E., 1911, p. 213. - Bull. cath. Bayonne, 1886, p. 864 ; 1888, n° du 16 sept.
Notice nécrologique. - C.-R., 1888, p. 263.