Claude BASTID1924 - 2002
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3789
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Identité
Naissance
Décès
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Biographie
[3789] BASTID Claude est né le 29 janvier 1924 à Chaville (Hauts-de-Seine),
Il est ordonné prêtre le 29 juin 1947 et part le 15 décembre 1948 pour la mission de Kweiyang (Chine). Après l’étude de la langue, il est vicaire à Kweiyang.
Expulsé de Chine en 1952, il est affecté à la mission de Fukuoka au Japon. De 1953 à 1967, il est chargé de la paroisse de Tobata. Il fait ensuite un court passage à Hachôji (1967-1968), revient à Tobata (1968-1974), puis devient curé de Kokura (1975-1990).
De 1990 à 2002, il réside à la maison locale des MEP de Hachôji. Il meurt le 1er janvier 2002 à Shindenbaru.
Nécrologie
[3789]. BASTID Claude (1924-2002)
Notice nécrologique
Claude, Marie, Joseph, François BASTID, fils de Louis, Adrien, Joseph, Raymond et de Suzanne, Marie-Madeleine LESAGE, demeurant 11 avenue de Ville d'Avray, à Chaville, naquit le 29 janvier 1924, en cette ville , alors située dans le département de Seine et Oise, et présentement dans celui des Hauts de Seine (92370), Baptisé le 10 février 1924, en la paroisse Notre-Dame de Chaville, alors dans le diocèse de Versailles, actuellement dans celui de Nanterre, il fut confirmé le 10 juin 1934, en la paroisse Saint Paul de Viroflay (Yvelines), diocèse de Versailles. Son père travaillait dans les Assurances, la famille comptait cinq enfants, dont quatre garçons et une fille.
Ses études primaires achevées, Claude commença ses études secondaires au Collège St. Jean de Béthunes, à Versailles, en octobre 1935 ; il les y poursuivit et les termina en juin 1942. En octobre 1942, il se dirigea vers le grand séminaire de Versailles, où il passa deux années scolaires.
Le 2 juillet 1944, alors qu'il se préparait à rendre service pour quelques semaines, dans une colonie de vacances dans la région de Montgeron, M. Claude Bastid présentait au Supérieur Général de la Société des Missions Etrangères sa demande d'admission comme aspirant, au séminaire de la Société. Il écrivait : .."Je viens de terminer ma seconde année de philosophie au grand séminaire de Versailles. Quoique j'ai trouvé là des professeurs et des confrères auxquels je reste très attaché, je ne pouvais m'empêcher de souhaiter un centre de formation plus conforme à mes rêves d'apostolat. J'avais toujours songé à la rue du bac, et m'empresse de solliciter mon admission parmi vos séminaristes, mon directeur …ayant jugé inutile de m'imposer une plus longue attente….".
Le débarquement des Alliés en Normandie, le 6 juin 1944, la libération de Paris le 25 août 1944, la poursuite de la guerre en territoire français avec son lot de difficultés diverses, ainsi qu'une possible mobilisation des jeunes retardèrent les rentrées scolaires. Enfin, le 15 novembre 1944, M. Claude Bastid entrait laïque, au séminaire des Missions Etrangères, pour y continuer ses études théologiques et sa formation sacerdotale. Comme tous les jeunes français de la classe 1944, il ne fut pas appelé sous les drapeaux. Tonsuré le 8 juillet 1945, il reçut les premiers ordres mineurs (portier-lecteur) le 22 décembre 1945, puis les seconds ordres mineurs (exorciste-acolyte), le 14 mars 1946. Sous-diacre le 29 juin 1946, diacre le 21 décembre 1946, il fut ordonné prêtre le 29 juin 1947, et, le soir de son ordination sacerdotale, il reçut sa première destination pour le service du diocèse de Kweiyang, en Chine. Agrégé temporaire à la Société des Missions Etrangères, le 14 novembre 1947, il fut envoyé à l'Université Grégorienne, à Rome, où il continua ses études de théologie couronnées, en juin 1948, par le diplôme de la licence.
Quelques mois plus tard, M. Claude Bastid s'embarquait à Marseille, en compagnie de son confrère M. Henri Malin, destiné à la même mission. Laissons la parole à ce dernier : .." Nous sommes partis le 15 déc. 1948, par le Champollion. Nous étions à Saïgon pour l'Epiphanie. Arrivés à Hongkong au début de janvier. Dès le lendemain, en bateau nous avons remonté la rivière de Canton. Nous sommes restés à Canton pendant un mois, à l'Evêché, avec Mgr.Deswazières. Le 1er mois, pénible pour s'adapter à la nourriture. Le P. Collet vient, achète une camionnette américaine et part avec nos bagages. Le P. Bastid avait au moins 3 malles.. Le P. Bastid et moi, un peu par le train, ensuite par camions, allons à Kweiyang, guidés par un chrétien chinois, Mr. Ju qui avait passé plusieurs années en Belgique et parlait très bien français. Trois semaines de route. Les camions attendent pour passer les rivières en bac, parfois plusieurs jours. Arrivant à Kweiyang, pas de nouvelles de nos bagages. Le P. Collet avait manqué un virage en montagne. Arrivée de nos bagages avec un char traîné par de petits chevaux. Bon accueil de Mgr. Larrart et des Pères…"
Le chroniqueur de la mission de Anlung nous donne quelques détails sur l'arrivée des jeunes missionnaires à Kweiyang et sur l'accident relaté plus haut : " ..Le 17 février [1949], arrivaient à Kweiyang notre jeune confrère, le Père Fédéli [destiné à Anlung], Mr. Ying et les Pères Malin et Bastid. Les Pères Collet et Auffret [de la mission de Kangting] avaient pris la camionnette de la mission de Kweiyang, à partir de Henyang et atteignirent l'archevêché le 20 –un peu après le P.Thiry- . Mais, à Gankiang (Hunan) cette camionnette dérapa dans un tournant et fit un double saut périlleux. Dès le premier tour, hommes et bagages furent "éjectés", en même temps que la carrosserie se détachait du châssis ; puis, continuant sa trajectoire, elle fit un nouveau tour sur elle-même, et retomba sur ses roues. Par bonheur, les deux Pères, le chauffeur et un autre passager s'en tirèrent avec de simples contusions. Grâce à l'aide d'un camion de secours et aux muscles du Père Auffret, la carcasse put être replacée sur la route dans un état lamentable. Et le voyage continua ..."
Apprendre la langue est le premier travail des missionnaires dès leur arrivée dans le diocèse. Une école de langue pour les jeunes missionnaires fut ouverte à Kweiyang, en juillet 1946, au moment où des nouveaux pères assez nombreux arrivaient de France. A un certain moment, placée sous la direction du P. Etcheverry, elle comptait 12 étudiants, d'où le nom qui lui fut donné "Ecole des Maréchaux", en souvenir des 12 Maréchaux de l'Empire. En 1949, les effectifs avaient bien diminué, mais apprendre la langue restait une priorité . M.Henri Malin écrit : "Le P. Etcheverry nous prend en charge pour l'étude du chinois. Nous avons des professeurs et des répétiteurs chinois. Le dimanche, on pouvait aider dans les paroisses, la messe étant dite en latin. .." Ainsi, nos deux jeunes confrères furent occupés, pendant de nombreux mois, à plier leur larynx aux subtilités des tons de la langue mandarine et leur mémoire à l'enregistrement de nombreux caractères chinois.
À la fin de l'année 1949, M. Jean Guettier, curé de la paroisse Saint Louis de Kweiyang (Lantang) où, depuis le 17 février 1944, il avait succédé à M. Alexandre Derouineau, devenu évêque de Kunming, accueillit un nouveau vicaire en la personne de M. Claude Bastid. Celui-ci y retrouva son jeune confrère, M. Denys Cuénot , lui aussi déjà vicaire en cette paroisse et avec lequel il "fit équipe".
Dans ce poste, M. Claude Bastid perfectionna sa connaissance de la langue chinoise, et très vite, il fut à même de prendre en charge les préparations au mariage, l'organisation des catéchismes, et diverses autres activités paroissiales. En 1950, alors que l'armée de Mao-tsé-Tong se faisait menaçante dans la région, la fête de Noël fut minutieusement préparée. Une pièce, ayant pour thème le "Mystère de Noël" fut même représentée. La salle des fêtes se révéla trop petite pour contenir la foule des spectateurs, chrétiens ou non. Il fallut donc la rejouer deux fois dans les huit jours, M. Claude Bastid fut impressionné par ce succès. C'était son second Noël en Chine. A l'église, deux prêtres distribuèrent la communion pendant une demi-heure, et une dizaine de baptêmes furent célébrés ce jour là.
En 1951, le régime communiste se mettait rapidement en place. A Kweiyang, les étrangers étaient souvent convoqués à la police pour interrogatoire. Les missionnaires catholiques et protestants connurent l'internement ; quelques uns conduits devant les tribunaux, étaient jetés en prison. La mission fut mise en demeure de payer des impôts très lourds. Quant au. clergé autochtone, lui aussi se vit pratiquement neutralisé ; quelques prêtres chinois furent incarcérés, et les religieuses dispersées. Quant aux "biens écclésiastiques : disparus ainsi que les bâtiments", note le Compte-Rendu de la mission en 1951.
Expulsé de Chine vraisemblablement dans les premiers jours de janvier 1952, M.Claude Bastid prit le bâteau à Chungking, descendit le Fleuve bleu en une dizaine de jours, et arriva à Hongkong le 28 janvier 1952. Après un temps de repos, il reçut de ses supérieurs une nouvelle destination. Envoyé au Japon pour le service du diocèse de Fukuoka, il quitta Hongkong le 15 avril 1952 pour rejoindre la communauté missionnaire de Kitakyushu où il arriva le 1er mai 1952.
Commencer l'étude de la langue japonaise fut le premier travail de M. Claude Bastid. Voici le témoignage de l'un de ses confrères, M.Manuel Labarta qui fut son vicaire : …"Arrivé dans sa nouvelle mission, diocèse de Fukuoka, il trouva à la maison commune du Kitakyushu, 4 jeunes Pères arrivés directement du séminaire Mep de Paris et 3 autres expulsés comme lui de Chine. A ce groupe vinrent se joindre de nouveaux envoyés, à un moment nous nous trouvions 10. Tout ce monde s'appliquait à l'étude du japonais, mais les "Chinois" avaient sur les Pères arrivés directement de Paris l'avantage de connaître les caractères chinois, ce qui les avantageait, dans l'étude de la langue. Le R.P. Bastid non seulement les lisait, mais même les écrivait avec une certaine aisance…."
En 1953, alors que le 27 juillet était signée en Corée l'armistice de Pan-mun-jom, qu'au Japon, au mois d'avril, des élections avaient fait faire un pas de plus au marxisme principalement dans les milieux cultivés et intellectuels, que les criminels de guerre étaient graciés, et qu'était établi un plan quinquennal de réarmement, dans la mission du Nord-Kyushu, de nouvelles "équipes de travail " étaient constituées pour que l'Eglise continue sa mission. Ainsi :…"Après deux ans d'étude de langue, les Pères reçurent leur nomination dans leurs nouvelles paroisses. Le R. P. Bastid fut envoyé à la paroisse de Tobata avec le P. Labarta comme vicaire pour remplacer un brillant confrère le P. Aïnciart nommé au Hokkaido, pour la mission de Hakodaté…"
Suivant les traces de son prédécesseur, à Tobata, ville d'environ 100.000 habitants, M. Claude Bastid continua à assurer des cours d'enseignement religieux à un certain nombre de mamans dont les enfants fréquentaient son école et son jardin d'enfant. Dès avril 1954, il prit la même initiative à l'intention des papas. Il réussit à former deux groupes : l'un à l'école secondaire des Sœurs Canadiennes de Notre-Dame comptant un millier d'élèves, l'autre à son jardin d'enfant, le plus estimé dans toute la ville. Ainsi il voulait montrer par là que, si les femmes avaient leur place dans l'Eglise catholique au Japon, les hommes n'en étaient nullement exclus.
Le 2 août 1954, recevant à Tobata la visite de Mgr. Lemaire, Supérieur Général de la Société des Missions Etrangères, M. Claude Bastid était tout heureux de lui présenter sa paroisse avec ses activités, mais il profitait de cette occasion pour attirer l'attention de Mgr. sur l'exiguïté de son église, car, disait il, le grain de sénevé semé par ses prédécesseurs commençait à grandir. L'année suivante, Claude Bastid commençait les fondations d'une nouvelle église de style moderne qu'il voulait être la plus grande et la plus spacieuse du Nord Kyushu. Le 4 décembre 1955, son Evêque, Mgr. Fukahori venait à Tobata pour procéder à la bénédiction solennelle de ce nouvel édifice, puis, pour baptiser, ce même jour, 48 adultes en présence d'une nombreuse assistance accourue pour la fête.
Assurer fidèlement des cours de catéchèse aux enfants et aux divers groupes de catéchumènes, donner régulièrement des conférences spirituelles aux religieuses qui travaillaient sur sa paroisse, assurer la direction d'un important jardin d'enfant qu'il avait agrandi en construisant en dur de nouveaux bâtiments modernes et fonctionels, tel était le travail quotidien de M. le curé de Tobata.. L'un de ses vicaires témoigne: .."Non seulement curé de la paroisse, mais aussi directeur d'un gros jardin d'enfant, il donnait au début de l'année scolaire aux parents des cours de pédagogie enfantine appréciés par les mamans. Les cours assez vite tournaient en des cours de religion, que les mamans continuaient à écouter. Parfois le Père demandait il à une catéchiste ou aux professeurs, de les encourager dans la persévérance à poursuivre ses cours. Après quelques mois, le Père prétendait avoir parmi elles, un certain nombre de catéchumènes, et il y eut des années où à la veillée pascale, il administrait une centaine de baptêmes…"
Mais, témoigne encore ce même vicaire :.."Ces efforts incessants provoquaient assez souvent chez lui des migraines ce dont il était affligé, parait il, depuis sa naissance. Il essayait d'y remédier en absorbant –par dizaine- des cachets d'aspirine, …mais quel que fut le degré d'acuité de ces migraines, il ne voulut jamais abandonner de donner son cours de religion.."
Dix ans s'étaient écoulés, depuis son premier départ en mission. Le 14 avril 1958, M. Claude Bastid quittait le Kyushu, et, à Kobé, il s'embarquait à bord du paquebot "Viêtnam", à destination de la France où il arriva le 24 mai 1958. Il prenait son premier congé, et un peu de repos. Le 8 janvier 1959, il repartait pour le Japon où il retrouvait sa paroisse de Tobata..
Au plan pastoral, l' une de ses préoccupations était d'adapter son enseignement religieux à ses catéchumènes japonais adultes. Il lui paraissait nécessaire de prendre en compte leur sensibilité particulière et leur culture propre. En effet, dans la mentalité de très nombreux japonais, le christianisme restait une religion étrangère. Au cours d'un congrès sacerdotal qui se tint à Tokyo au cours de l'été 1959, il faisait remarquer que le catéchisme que l'on enseignait ne s'insérait pas dans quelque chose d'existant déjà dans l'esprit japonais, car il introduisait les catéchumènes tout de suite et sans grande préparation dans un monde surnaturel, à travers un vocabulaire religieux difficile à saisir. Il paraissait meilleur d'ouvrir d'abord l'âme de ces derniers à la richesse de la vie chrétienne par des rencontres et grâce à l'aide de la liturgie, faisant cas de la spécificité japonaise. Il était donc important d'organiser des réunions de quartier auxquelles fidèles, catéchumènes et nouveaux chrétiens pourraient prendre part. Dans une atrmosphère conviviale et détendue chacun pourrait s'exprimer librement sur les problèmes religieux, et serait à même de préparer son insertion active dans sa paroisse.
En janvier 1960, M. Claude Bastid accepta d'organiser à l'intention des catéchistes et autres personnes intéressées, des rencontres mensuelles avec conférence sur divers sujets d'Ecriture Sainte. Cette même année, il se fit bâtisseur, n'ignorant pas les soucis financiers liés à cette activité. Les bâtiments en bois de son école maternelle étaient vétustes. Il les remplaça par une nouvelle construction en ciment armé. C'était la réalisation de la première tranche d'un projet important, étalé sur les années suivantes, et qu'il mena à son terme. Quand tout fut achevé en 1961, son centre scolaire avait l'aspect d'un moderne et solide bullding en béton. La paroisse de Tobata pouvait alors s'enorgueillir de posséder un jardin d'enfant, le plus beau, le plus grand et le plus moderne de toute la région. Avant de bâtir, il avait commencé par démolir. Des décombres, il récupéra charpente et autres matériaux encore utilisables ; il en profita pour remplacer sa résidence qui tombait en ruine, par un presbytère en ciment armé.
Malgré ces activités matérielles, le travail apostolique n'était pas négligé pour autant. En 1961, pendant la Vigile pascale, il baptisa 40 catéchumènes.; ils étaient 77 l'année suivante. Il assurait toujours régulièrement ses cours d'initiation biblique, organisait des journées d'études pour professeurs et catéchistes, sans oublier les conférences sur l'éducation des enfants destinées aux mamans non chrétiennes. Ses activités dépassaient même le cadre paroissial pour s'étendre à tout le district. En 1964, à son travail ordinaire, il ajoutait la charge de vicaire forain et la responsabilité de supérieur local de la communauté missionnaire Mep de Kitakyushu., services qu'il assurera jusqu'en 1973.
Il continuait l'animation des groupes de catéchistes, religieuses et prêtres désirant perfectionner leurs méthodes catéchétiques et leurs connaissances bibliques, liturgiques et théologiques. C'était le temps de Vatican II, La Constitution conciliaire sur la Sainte Liturgie du 4 décembre 1963 venait d'être publiée. Ne se proposait elle pas de faire progresser et approfondir la vie chrétienne chez les fidèles de ce temps ? Travaillant en équipe avec ses deux vicaires, sa paroisse très vivante comptait alors plus d'un millier de catholiques, ainsi que de nombreux néophytes, catéchumènes, et "auditeurs de la doctrine", c'est-à-dire des sympathisants plus ou moins "en recherche", n'ayant pas encore exprimé le désir de devenir chrétien.
Le 1er mai 1967, M. Claude Bastid arrivait en France pour prendre quelques mois de congé. Le 28 décembre 1967, il était de retour au Japon. Tout en résidant à la maison de communauté, à Hachioji, il essaya de grouper les parents de plusieurs jardins d'enfants de la ville.
En 1968, il retrouva sa paroisse de Tobata, reprit sa charge pastorale de curé, et continua ses multiples activités apostoliques. Mgr.Fukahori , évêque du diocèse de Fukuoka, ayant donné sa démission, Rome lui donna comme successeur en 1969, Mgr. Pierre Hirata, antérieurement évêque d'Oïta, diocèse voisin. La première tâche du nouvel évêque fut de mettre en application les directives du Concile. En premier lieu, il créa un conseil presbytéral de 17 membres dans lequel le supérieur local Mep, M. Claude Bastid et un autre confrère élu représentaient la communauté missionnaire Mep travaillant dans le diocèse.
Au lendemain de l'Assemblée Générale des Missions Etrangères de 1968, et dans l'esprit du Concile, le district Mep de Kitakyushu procéda lui aussi à son "aggiornamento". Pour cela, du 9 au 11 novembre 1969, fut organisé un petit synode dans lequel on discuta de la vie et du travail des confrères. Il en sortit deux conclusions importantes : Le "Conseil de la Mission" se composerait désormais de 6 membres : à part le supérieur local, et son assistant, les autres membres seraient élus par tous les prêtres du district. Ensuite, fut mis sur pied un comité de l'apostolat des laïcs.
Mgr.Hirata désirait une plus grande fusion entre le clergé japonais et les missionnaires. Deux paroisses nouvelles du district Mep furent confiées au clergé local. En 1970, au total sept prêtres japonais travaillaient avec les missionnaires dans ce district. En novembre 1973, un nouveau contrat était signé. Il remplaçait l'ancien qui avait régi les rapports entre évêque diocésain et groupe missionnaire Mep pendant vingt cinq ans. Cette convention soulignait le rôle important d'animateurs que les missionnaires avaient à tenir dans le presbyterium. Auparavant, ceux-ci travaillaient pour les japonais, désormais, ils travailleraient avec les japonais.
Le 15 décembre 1973, M. François Toqueboeuf était nommé responsable du groupe missionnaire Mep travaillant dans le diocèse de Fukuoka. Il succédait à M. Claude Bastid dont le mandat avait débuté en 1964. Quant aux confrères, ils témoignèrent de la confiance qu'ils mettaient en ce dernier, en l'élisant pour être leur délégué à l'Assemblée Générale de la Société des Missions Etrangères, qui se tint à Bièvres, du 15 juillet au 17 août 1974.
Après l'Assemblée Générale, et quelques mois de congé, M. Claude Bastid reprit la route du Japon. Il remit sa cure de Tobata entre les mains d'un prêtre japonais. Quant à lui, doué de talents d'organisateur et d'animateur, il fut nommé à la tête de la paroisse de Kokura, la plus importante du diocèse. Là, il fit équipe avec deux de ses confrères, M. Louis Bellion, puis M.Léon Dechamboux, et deux prêtres japonais, témoignant ainsi qu'il était possible pour les missionnaires et le clergé local de travailler ensemble. Dans sa nouvelle paroisse, outre son travail pastoral ordinaire, il avait sur les bras deux écoles maternelles, il conduisait de nombreux catéchumènes vers le baptême, et donnait de nombreuses conférences fort appréciées dans différents milieux de la ville.
Après un congé en France, du 8 juin 1985 au 12 novembre 1985, il reprit sa charge de curé de la paroisse de Kokura et le ministère pastoral qui était le sien. Puis, en 1990, il quitta cette paroisse et choisit comme pied à terre la maison locale Mep, à Hachiôji, tout en continuant à rendre service à l'extérieur. Ainsi, en 1991, il prêta main forte au curé japonais de Tobata pour la catéchèse des adultes, catéchumènes ou baptisés. En 1994, la maladie l'obligea à rentrer en France. A son retour, à partir de janvier 1995, il aida M. Louis Bellion dans sa paroisse de Kurosaki.
Le 1er janvier 2002, en faisant part du décès de M. Claude Bastid, son supérieur régional écrivait ::.." Un ancien "Chinois" nous quitte en ce jour de l'An, après quelques jours d'hospitalisation à l'hôpital Shindenbaru, où le médecin-chef qu'il a baptisé autrefois et les Religieuses de la Visitation lui manifestaient leur sympathie et dont il put apprécier le dévouement jusqu'à sa fin. Il est décédé vers midi.
La semaine dernière, j'ai pu passer quelques jours à la Maison locale Mep de Yahata où il résidait. Très amaigri et ne mangeant que très peu, chaque jour ses forces diminuaient, et même si son hospitalisation laissait quelque espoir de léger rétablissement, il est certain que sa leucémie découverte ces derniers mois, ferait rapidement des ravages. Par moments, il perdait le sens des réalités, mais son attitude de soumission totale aux directives pratiques données par le P. Labarta – qui s'est occupé de lui, jour et nuit, à la Maison locale de Yahata, au cours de ces dernières semaines,- montrait bien que ce n'était plus le Bastid enseignant et exigeant des années de Tobata ou Kokura. Au cours de la retraite de Susono, il avait senti que sa vue baissait. La semaine dernière il ne pouvait que distinguer vaguement les objets….En bon Mep, sa préoccupation principale, malgré son état de grande faiblesse était de pouvoir reprendre les catéchisme le plus rapidement possible, alors qu'il ne pouvait rien lire…
.En ce jour de l'An 2002, que la Vierge, Mère de Dieu et Mère de l'Eglise, que nous avons honorée dans la liturgie d'aujourd'hui, accueille notre fumeur de pipe et catéchète pour le présenter à son Fils, et donne à tous les confrères du Kyushu le dynamisme dont ils ont besoin pour continuer la Mission…"
Mais en conclusion, il convient de citer le témoignage de M.Manuel Labarta. Pendant une décennie, à Tobata, il fut vicaire de M. Claude Bastid et l'accompagna jusqu'au bout de la route.
Regard d'un confrère qui fut dix ans son vicaire.
Début juillet 1961, tout frais émoulu de l'école de langue, je débarquai à la paroisse de Tobata. Claude Bastid y était curé depuis dix ans, après son expulsion de Chine. Ce fut donc lui qui dirigea mes premiers pas dans le ministère. Pendant près de dix ans, j'eus donc tout le loisir de le voir vivre et travailler – et il travaillait beaucoup. Même les fréquentes et grosses migraines dont il souffrait depuis son enfance ne parvenaient pas à le faire dételer. Seul Dieu sait le nombre de cachets d'aspirine qu'il a absorbé pour calmer ses crises. Une fois même, je l'ai entendu se cogner la tête contre un mur de sa chambre pour apaiser une crise, avant de sortir donner une conférence.
Enseigner était son talent principal, pour ne pas dire son charisme, et, en même temps, son occupation majeure. Sans doute, tenait il de son père, ancien avocat, cette passion de parler et de convaincre. Son enseignement très orthodoxe occupait la plus grande partie de son temps. Onze séances hebdomadaires d'environ une heure trente, étaient le rythme qu'il s'imposait ordinairement. Une semaine de vacances au jour de l'an, six semaines pendant l'été, interrompaient seules ce rythme. Grâce à cette passion pour la catéchèse, il parvenait à baptiser entre quatre vingt et cent adultes par an : phénomène unique dans les annales du diocèse. L'évêque s'en disait stupéfait. Quant au "suivi" de ces nombreux néophytes, il était assuré par ses vicaires, jugés par lui incapables d'instruire des non-chrétiens. Claude en avait toujours au moins deux sous la main. Réunions de quartier et cercles bibliques étaient les lieux où ceux-ci s'efforçaient de faire croître les grains semés par leur curé. Ce n'était pas une sinécure. Souvent les oiseaux du ciel se montraient plus habiles qu'eux, mais le semeur ne se décourageait pas pour autant.
Quelle était la source qui alimentait ce flux incessant d'auditeurs-catéchumènes. C'était, bien sûr, le jardin d'enfants rattaché à la paroisse, l'un des plus prospère du secteur. Claude était le directeur actif et fervent. Il avait l'art de se faire aider par les maîtresses du jardin. Celles-ci s'occupaient des enfants, mais devaient aussi encourager et stimuler les parents à suivre les séances de catéchèse du directeur. Claude avait l'habileté d'aborder les problèmes d'éducation. Surtout au début de l'année, nombreuses étaient les mamans attirées par ces causeries. Les maîtresses, soutenues par une catéchiste professionnelle, étaient donc des auxiliaires indispensables, sans l'aide desquelles le courant des auditeurs se fut vite tari.
Ce don de la parole ne se bornait pas à la catéchèse. J'ai toujours été frappé par le soin que Claude accordait à la prédication. Certes, il était fort capable d'improviser son sermon dominical, mais il s'astreignait à la préparer méticuleusement, avec l'aide d'une catéchiste. Il consacrait une bonne partie du samedi matin à la composition et à la rédaction du sermon du lendemain. Lu en chaire, avec application, ce sermon gagnait en précision ce qu'il perdait en vivacité. Sur nous, jeunes vicaires, qui faisions nos premières armes, cette méthode eut une influence indéniable. On a dit que ces sermons, soigneusement conservés, ressortirent des tiroirs lorsque l'âge et la maladie ne permirent plus à Claude de se renouveler. Publiés par ses admirateurs, ils trouvent encore des lecteurs intéressés, mais je ne fais pas partie de ces privilégiés.
Catéchèse, prédication ne suffisaient pas à épuiser l'énergie oratoire de Claude. Souvent sollicité de faire une conférence, il ne savait pas refuser. Il y excellait, et n'en doutait pas. ..Son bureau était presque toujours chargé de livres et de revues (L'ami du Clergé avait toutes ses faveurs) qui signalaient la préparation d'une conférence demandée par une école, un couvent ou quelque autre groupe. La richesse de sa bibliothèque en ouvrages de théologie et d'exégèse attestait le sérieux de ses préparations. Ses dernières années, le diabète affaiblissant sa vue, il ne put plus lire autant qu'il le voulait. Il en souffrait et s'en plaignait. On le comprend si l'on sait que, pour lui, la lecture était à la base de l'écriture, laquelle était au service de sa parole. Un mot de Saint Paul résumerait bien le travail missionnaire de Claude: " Quiconque invoquera le nom du Seigneur sera sauvé. Et comment l'invoqueront ils (juifs et grecs) sans avoir cru en Lui ? Et comment croiraient ils en Lui sans l'avoir entendu ? Et comment l'entendraient ils, si personne ne le proclame... Ainsi la foi vient de la prédication, c'est l'annonce de la parole du Christ. (Rom.10,13 et sq..)
Mon regard s'est arrêté sciemment sur un Claude Bastid "annonceur de la parole du Christ" . D'autres regards seraient nécessaires pour camper un personnage aux facettes multiples. Il faudrait parler du fumeur de pipe invétéré que seule la maladie assagit, du marcheur en montagne, du bridgeur aux annonces imprévisibles, du conteur d'histoires et d'aventures vécues ou imaginées, de son porte-monnaie trop souvent vide au moment de régler la note, de ses interminables quintes de toux….bref, il faudrait mille plumes pour esquisser les mille facettes d'une personnalité originale. Son dernier tour joué à notre communauté fut de la quitter le 1er janvier à midi, juste à l'heure où sortait du frigidaire le champagne pour fêter la nouvelle année. Pour lui, ce fut aussi le plus beau jour de sa nouvelle vie : le jour de sa rencontre avec Celui qu'il annonça inlassablement pendant un demi siècle.."