Jean CRINQUAND1936 - 2004
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 4143
- Bibliographie : Consulter le catalogue
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Corée
- Région missionnaire :
- 1964 - 2004
Biographie
[4143] CRINQUAND Jean est né le 3 août 1936 à Saint-Claude (Jura).
Ordonné prêtre le 21 décembre 1963, il part le 10 mars 1964 pour le diocèse de Taejon (Corée).
Après avoir étudié le coréen, il est vicaire à Seong Nam (1966), à Yu Gu (1968-1977), à Kyu Am (1977-1982), à Yu Seong (1982-1985) et à Jeon Eui (1985-1987). Il est ensuite aumônier d'hôpital à Sainte-Marie de Taejon, (1988-1993), curé d’Ung Bong (1994-2000) et à partir de 2000 prêtre attaché au sanctuaire de Kal Mae Mot.
Il meurt le 11 mars 2004 à Taejon.
Nécrologie
[4143] CRINQUAND Jean (1936-2004)
Notice nécrologique
Jean CRINQUAND
1936-2004
Jean, Claude, Marie Alix Crinquand, fils de Georges et de Jeanne Marie-Marguerite, Esther Ranfer, naquit le 3 août 1936, à Saint-Claude, département du Jura; il fut baptisé le 5 dans la cathédrale de cette ville par l’abbé Jean Ranfer, cousin germain de la maman du baptisé et curé de Ney, paroisse située à quelques km de Champagnole, chef-lieu de canton de l’arrondissement de Lons-le-Saunier. Cette excellente famille chrétienne était apparentée à saint Simon Marie Antoine Just Ranfer de Bretenières martyrisé le 6 mars 1866, en Corée, et canonisé le 6 mai 1984. Elle comptait quatre enfants: trois filles et un garçon, Jean, le petit dernier. Une tante était religieuse. Celui-ci devenu missionnaire restera toujours très attaché aux siens; plus tard, en Corée, il aimera rappeler combien il avait été choyé par ses parents et gâté par ses sœurs. A la fin de chaque année, il écrira fidèlement à ses parents et amis. Ses 31 lettres-circulaires constituent un témoignage précieux sur sa vie missionnaire, son itinéraire spirituel et le climat social et politique de la Corée du Sud.
Ses études primaires achevées à Saint Claude, Jean entra, en octobre 1949 au petit séminaire ND de Vaux sur Poligny. Il obtint les diplômes universitaires du BEPC et le baccalauréat. Au terme de la classe de philosophie, en 1955-1956, il laissa le souvenir d’un élève très appliqué dans son travail, à la conduite « excellente, très charitable et très dévoué, très bonne influence », ayant des aptitudes « moyennes, très doué en musique ». Le 1er octobre 1956, il entrait au grand séminaire ND de Montciel à Lons- le-Saunier, où il passa deux ans; il y acheva son cycle de philosophie, et fit « avec l’apologétique, la morale fondamentale et le traité de l’Eglise ».
Ce séjour de deux ans au séminaire diocésain lui permit de réfléchir sérieusement à son avenir et de mûrir sa vocation sacerdotale qu’il désirait mettre au service des missions. Il s’en ouvrit à son directeur spirituel qui écrivit, le 9 mars 1958, au supérieur des Missions Etrangères. « Un de mes pénitents, écrivait il, qui achève actuellement sa seconde année de grand séminaire, m’exprime, depuis un an environ, son désir d’entrer dans votre Société. Sa famille est un peu apparentée à celle de Just de Bretenières, ce qui m’invite à considérer son cas avec respect et sympathie. C’est d’ailleurs un bon séminariste. Il partira pour le service militaire en septembre prochain. Je suppose qu’à la fin de ses deux ans d’armée, le moment sera venu pour lui de continuer ses études chez vous. »
Appelé sous les drapeaux le 2 septembre 1958, Jean fut affecté au 1er régiment de tirailleurs marocains, en garnison à Lons-le-Saunier. Ses classes terminées, ce fut le départ pour l’Algérie dans les tout premiers jours de janvier 1959. Le 5 janvier, en effet, il était envoyé à Cherchel, appelée maintenant El-Asnam; c’était une ville portuaire du département d’Orléans ville, sur la côte méditerranéenne du massif de Miliana. Après la Seconde Guerre mondiale, une école de formation d’élèves officiers de réserve y avait remplacé l’école spéciale militaire de Saint Cyr qui y avait été créée en 1943. Son stage de formation de sous-officier prit fin en juin 1959. Après quoi, il obtint une permission en France, au cours de laquelle il se mit en rapport direct avec les Missions Etrangères. Il fera allusion à cette première rencontre lorsque plus tard, depuis Redjas (Algérie) où il était en poste, il adressera au supérieur des Missions Etrangères, une lettre datée du 18 septembre 1960, et dans laquelle il demandait officiellement son admission au séminaire, et parlait de sa vie de soldat : « Je serai libéré à la fin de l’année, j’espère. Au cours de ma dernière permission, j’ai été voir le Père du Noyer. Toute une après-midi , nous avons parlé de mon futur établissement, des conditions de ma rentrée. De toute façon, dès que je serai libéré, je compte aller vous voir à Paris pour avoir un premier contact avec vous et avec la maison. »
Les jours de permission écoulés, de retour en Algérie, au début du mois de juillet 1959, avec le grade de sergent, il rejoignait le 4ème bataillon d’infanterie, implanté dans le secteur de Mila, département de Constantine. Dans cette longue lettre du 18 septembre 1960, il nous raconte le quotidien de sa vie militaire : « Pour ce qui est de ma vie militaire ; je suis à Redjas, à 60 km à l’ouest de Constantine, dans un petit village au pied des derniers contreforts de la Petite Kabylie. Nous avons vraiment de la chance d’avoir sur place une église et un curé à Redjas. Mes activités militaires se réduisent dans un travail de magasinier un peu monotone, mais qui permet de faire la connaissance de tous les gars. Pour le moment, je passe le magasin en compte à un sergent-chef, car un sergent appelé ne doit plus être à la tête d’un magasin de CCAS. Vous voyez donc que mon service militaire prend peu à peu fin. A côté de mes activités militaires, je m’occupe bien sûr, des offices du dimanche. D’autre part, les jeunes recrues qui viennent d’arriver grossiront notre groupe d’amitié qui tombe un peu ces temps. En ce moment, je suis en train de préparer un gars à la communion. »
Dans cette lettre, Jean Crinquand présentait bien simplement sa demande officielle d’admission au séminaire, espérant, disait-il, « qu’il n’est pas besoin d’une formule déterminée pour ma demande d’entrée aux MEP ». Suite à des informations élogieuses prises auprès du supérieur du séminaire de ND de Montciel attestant que c’était un « élève sérieux, pieux, travailleur, bien élevé, de commerce agréable, dévoué, apostolique », le conseil des Missions Etrangères, le 12 octobre 1960, donnait « un avis favorable à la demande d’admission présentée par l’abbé Jean Crinquand, du diocèse de Saint-Claude ».
Libéré de ses obligations militaires vers le mois de décembre 1960, Jean Crinquand était tout heureux de retrouver sa famille; dans une lettre du 30 décembre, il présentait ses vœux de nouvel an, au supérieur du séminaire: « Mes vœux vont à vous, à toute votre famille, et à toute la communauté de Bièvres avec laquelle je vais bientôt prendre un premier contact, ce dont je me réjouis, vous pouvez le penser ». Il annonçait ensuite son arrivée probable à Bièvres pour le 10 janvier 1961, « ne pouvant quitter Saint-Claude avant le référendum » il s’agissait de la consultation sur l’autodétermination de l’Algérie mais « pour le moment, écrit-il, je profite des vacances de ma sœur de Dijon. Depuis quelques jours également, mon oncle curé de Ney, dans le Jura est parmi nous. Ma tante religieuse doit passer à Dijon. Peut être la verrai-je ? »
Entré laïc au séminaire de Bièvres, le 16 février 1961, agrégé temporairement aux Missions Etrangères le 20 décembre 1961, Jean fut tonsuré le lendemain. Il reçut les premiers ordres mineurs, le 17 mars 1962, et les seconds, le 29 juin. Agrégé définitivement le 20 décembre, il fut ordonné sous-diacre le lendemain. Diacre le 29 juin 1963, il reçut, le 20 novembre 1963, sa destination pour le diocèse de Taejon (Corée du Sud) où la hiérarchie ecclésiastique avait été officiellement établie le 25 mars 1962. Il était envoyé dans le pays où avait été affecté, en 1864, saint Just de Bretenières. Entré clandestinement en Corée le 27 mai 1865, celui-ci avait été arrêté le 26 février 1866, décapité pour la foi le 8 mars et canonisé à Séoul le 6 mai 1984 par le pape Jean-Paul II. Comme il en avait exprimé le désir dans sa lettre du 6 novembre 1963, demandant à être admis au sacerdoce, Jean fut ordonné dans son diocèse d’origine, à Dole (Jura), le dimanche 22 décembre 1963. Le 10 mars 1964, il partait pour la Corée du Sud et rejoignait Taejon, ville située à 170 km au sud de Séoul, plaque tournante de toute la Corée du Sud et siège d’un évêché.
Dans une lettre circulaire qu’il adressait à sa famille et à ses amis, depuis Taejon, à Noël 1964, Jean Crinquand leur racontait ses premières impressions. « A Taejon, centre du diocèse où j’ai été destiné, nous sommes au cœur d’une ville de 300 000 habitants. Il n’y a pratiquement qu’une paroisse, la cathédrale. Le moindre village en Corée regroupe souvent, avec toutes ses dépendances 10, 20 quelquefois 30 000 habitants. Mais de toute façon, toute agglomération ne comptant pas 50 000 habitants conserve son appellation de village Or il arrive quelquefois que ces villages n’ont de paroisse que le nom, parce que le curé qui les dessert est dans un centre plus important. Mais ce qui est admirable par contre, c’est de trouver dans un village perdu en montagne, quelques chrétiens, lointains descendants de ces potiers, dont les ancêtres chrétiens furent pourchassés il y a un siècle par les persécuteurs. »
Comme tout jeune missionnaire, Jean Crinquand s’efforça de s’adapter au style de vie, à la culture, et au mode de pensée de son pays d’accueil. « Quand je suis arrivé ici, écrit il dans la même circulaire, inutile de vous parler du dépaysement que j’ai ressenti. Il faut s’adapter: adaptation physiologique d’abord, nourriture, climat, habitude de vie (nourriture très forte, au point que la moutarde vous paraît de la confiture), climat humide, l’été – froid rigoureux, l’hiver – nuits sur le sol; adaptation psychologique plus difficile celle- là: se faire à la logique de la pensée coréenne; en commençant à apprendre la langue, on s’aperçoit vite que le Coréen n’est pas un cartésien, mais un homme qui saisit les choses avec des images et plus avec le cœur qu’avec les raisonnements de l’intelligence. »
Pour chaque missionnaire, le premier travail fondamental est de se plonger dans l’étude de la langue, de l’histoire de sa mission, de la culture du pays d’adoption. Jean Crinquand qui rédigeait sa lettre-circulaire de 1964, et ne voulait pas « être obligé de rester un missionnaire sourd et muet », nous raconte ses débuts : « Pour l’instant, je suis à Séoul, à l’école de langue pour un an et demi, après avoir dégrossi avec un Père de chez nous, les premiers rudiments de cette langue coréenne réputée pour être l’une des plus dures: la prononciation est plus difficile que celle du japonais, la construction des phrases et la grammaire, vraiment déroutante pour nous, Occidentaux. Enfin, je pense qu’après bien des efforts et des exercices, j’arriverai à faire des progrès. » Pour marquer cette insertion, il reçut alors un nom coréen ; il s’appellerait Kang Chin Sou Shinbunim.
En 1963, Mgr Adrien Larribeau, évêque de Taejon, sentant le poids de l’âge, donna sa démission. Emile Beaudevin devint administrateur apostolique du diocèse. Le Saint Siège confia à un évêque coréen la direction du diocèse. Le 31 mai 1965, dans la cathédrale de Taejon, Mgr Pierre Hoang Min-Syeng, était ordonné Mgr Antoine Del Giudice, internonce, assisté de Paul Ro, archevêque de Séoul, et Pierre Han, évêque de Chonju. Le nouvel évêque né le 1er août 1923, avait fait une partie de ses études théologiques à Paris, au séminaire de Saint Sulpice puis au séminaire des Carmes. Pour se préparer et se former à la future tâche de directeur de grand séminaire, il avait fait une année de solitude à Issy-les-Moulineaux . Licencié en théologie, docteur en philosophie avec une thèse sur « la vérité selon Saint Thomas d’Aquin », il avait été nommé, à son retour en Corée, professeur puis supérieur du grand séminaire de Séoul et enfin curé de la cathédrale de cette ville. A présent, il était le pasteur du diocèse de Taejon.
Les étudiants en langue profitaient de leur temps de vacances pour compléter leur formation missionnaire. Ainsi, en 1965, durant deux mois, Jean Crinquand s’en alla assurer une permanence dans la paroisse de Yongdok, dans l’archidiocèse de Taegu, le titulaire de ce poste, Jean Bideau, se trouvant en congé en France. En avril 1966, le temps d’étude en école de la langue coréenne à Séoul achevé, il fut envoyé prêter main forte à François Haller, supérieur régional, administrateur puis curé chargé d’organiser la nouvelle paroisse de Song-Nam-Dong, dans le nord de la ville de Taejon. Ce territoire venait d’être détaché de celui de la cathédrale en vue de son érection en nouvelle paroisse. Tandis que son curé construisait la nouvelle église paroissiale, lui, Jean Crinquand, tout en assurant ses responsabilités de vicaire paroissial, était nommé directeur diocésain des groupes d’étudiants. Le 29 décembre 1968, il était placé à la tête de la nouvelle paroisse de Yougou qui comptait cinq postes secondaires. Il était le premier curé de cette ville de plus de 40 000 habitants qui auparavant, n’était qu’une simple station missionnaire. Une église et une résidence venaient d’y être construites et à cette occasion, de nombreuses bonnes volontés s’y étaient manifestées. La communauté catholique était évaluée à quelque 600 fidèles. Le nouveau pasteur fit porter ses efforts et donna priorité à la visite et à l’instruction des catéchumènes et des baptisés. Pour cela, avec les autorisations nécessaires, il profita de tout un réseau de haut- parleurs installés par la municipalité dans la majorité des maisons de son district pour faire une causerie hebdomadaire sur des problèmes d’éducation générale.
Le 18 septembre 1977, Jean Crinquand était nommé curé de la paroisse de Kyu- am qui comptait 1142 chrétiens. Il y travailla jusqu’au 21 septembre 1982. Puis, tout en assurant l’enseignement de la langue française à l’université, il fut curé de Yu Seong, station thermale très fréquentée, à quelques km de Taejon. Le 26 août 1985, il était déplacé et envoyé comme curé à Jeon Eui (Ch’on Ui), petite paroisse d’une cinquantaine de chrétiens fondée depuis cinq ans où il bénéficia de la collaboration de religieuses. Après une année sabbatique à Paris en 1987-1988, il repartait pour la Corée; nommé aumônier de l’hôpital sainte Marie de Taejon, il s’y dévoua depuis août 1988 jusqu’en 1994, donnant généreusement son sang pour les transfusions, son temps et son cœur pour le réconfort moral et spirituel de tous les malades. Il s’efforça de mettre un véritable esprit chrétien dans cet établissement. Chacun reconnaissait qu’il y faisait merveille. Il était connu de beaucoup de monde, bien au-delà des limites des paroisses où il avait travaillé et du diocèse de Taejon. Invité par les grandes chaînes de télévision nationale, son nom était aussi cité dans les journaux et les média, car il était champion national du don du sang. Entre 1964 et 1999, il avait fait 200 dons de sang. Il avait reçu un certain nombre de décorations officielles de la Croix Rouge coréenne, dont l’une fut accrochée sur sa poitrine par l’un des derniers présidents de la République de Corée.
Du 15 février au 12 août 1994, Jean Crinquand assura un court interim de remplacement au sanctuaire de Sol- Moe, puis, le 13 août 1994, il était nommé curé à Ung-Bong, bourgade de 4 100 habitants. Mgr René Dupont qui le visita dans son poste vers novembre 1994, fait le compte rendu suivant : « Dans l’après midi [du 7 novembre 1994], je pars pour la prochaine étape. Je suis chez Jean Crinquand (59 ans) Crinquebille pour les intimes - c’était aussi son adresse « courriel » - Ici aussi, le milieu change. Autrefois et maintenant encore, c’est la campagne: en dehors des cultures traditionnelles, il y a des vergers de pommiers et de poiriers, un peu d’élevage. Mais une immense usine vient d’être construite et fabrique des pièces de voiture: elle est tellement automatisée que, pour la faire tourner, 150 ouvriers suffisent dont quelques Chinois et Népalais pour les sales boulots. Et puis, le tourisme : un important lac artificiel, destiné originellement à l’irrigation, attire les amateurs de pêche. La paroisse a 10 ans d’existence. Jean en est le troisième curé.
L’église qui était autrefois une chapelle de desserte peut contenir une centaine de personnes. Cela suffit pour l’instant puisque la messe du samedi soir et les 2 messes du dimanche ne rassemblent pas plus de 180 personnes en tout. Mais Crinquebille est manifestement très heureux d’être ici : les chrétiens sont des gens simples et étonnamment fervents. Certes les catéchumènes ne se pressent pas au portillon, mais, pensez donc, 5 praesidia de Légion de Marie, des associations d’hommes et de femmes, et quoique la majorité des jeunes soient partis en ville, même un petit groupe de jeunes qui se réunissent le dimanche. Et puis d’authentiques communautés de base qui se réunissent de ci de là, toutes les semaines, le jeudi soir, pour la prière, un partage d’Evangile, une petite révision de vie, l’étude d’un point de doctrine, puis bien sûr, ce qu’ils appellent discrètement une agapè, c’est-à-dire manger et boire ; le curé y assiste à tour de rôle. »
En février 2000, Jean Crinquand quitta sa paroisse de Ung- Bong pour assurer le service d’aumônerie à Kal-Mae-Mot, au sanctuaire des Martyrs pour lesquels il avait une profonde vénération. Il desservit ce poste jusqu’en octobre 2000. Alors, après un diagnostic de leucémie chronique, espérant une amélioration de sa santé, il prit un congé anticipé en France, où il arriva le 22 novembre. De retour en Corée en 2001, il accepta de se mettre en semi-retraite, à Il-San-Ku, Ko-Yang-Shi, dans un appartement proche de l’hôpital sainte- Marie de Taejon. N’ayant plus de charge pastorale directe, il mit à profit ce temps de repos relatif pour faire paraître, en 2002, son ouvrage « Les sources et la santé ». En 2003, il prit un dernier congé en France, regagna la Corée en octobre de la même année, et publia un « Guide de la radiesthésie pratique » en coréen et en français. En effet, il était connu au pays du Matin Calme, pour son art de manier la baguette ou le pendule. Les paysans faisaient appel à ses services afin de trouver des points d’eau pour irriguer leurs rizières, et les grands hôtels pour détecter des sources d’eau chaude. En 1988, le chef de province lui avait remis une plaquette de remerciement pour les nombreux forages effectués à Taejon et dans la région. En 1999, il avait effectué un séjour en Mongolie pour des recherches d’eau.
En 2003, en remettant au goût du jour pour un lecteur de ce temps, le livre de Mgr d’Hulst, recteur de l’Institut catholique de Paris, paru en 1888, « Vie de Just de Bretenières, missionnaire apostolique, martyrisé en Corée en 1866 », Jean Crinquand entreprit, enfin, la rédaction en français et en coréen d’un livre sur son arrière-grand- oncle, saint Just de Bretenières. Il voulait ainsi préparer la célébration prochaine du 140ème anniversaire du martyre de ce dernier, le 8 mars 1866. Il désirait ainsi faire connaître aux chrétiens de Corée la figure originale de ce missionnaire et de ses compagnons qui, après un voyage de plus de 10 mois, avaient débarqué en Corée, le 27 mai 1865, et moins d’un an plus tard, avaient versé leur sang pour la foi.
En mars 2004, son état de santé se dégradant, Jean Crinquand dut être hospitalisé. Après une longue maladie, le 11 mars 2004, à six heures, Dieu le rappelait à Lui, à Taejon. Ses obsèques furent célébrées le 13 à la cathédrale de Taejon. Elles furent présidées par Mgr Joseph Kyeong Kap Ryong, évêque du diocèse de Taejon, accompagné de son coadjuteur et de Mgr René Dupont, entouré de nombreux prêtres concélébrant, en présence d’une très grande foule de fidèles et de non-chrétiens.
Evoquant la belle figure missionnaire de Jean Crinquand, Mgr René Dupont témoigna :
« Le dimanche précédant le décès de Jean, je lui ai porté la communion et en tenant l’hostie dans sa main, il a dit d’une voix forte et assurée : « Amen, Alleluia, Alleluia ! » Tout Jean Crinquand est là, dans sa foi et sa sensibilité. »
Sa foi était un roc : il tenait cela de sa famille. Comme celle de son grand oncle, Just de Bretenières dont dernièrement il a traduit la vie en coréen. Just, comme Mgr Berneux, avait revêtu les ornements sacerdotaux au moment de son arrestation, parce qu’il allait « célébrer l’eucharistie » : on ne l’a pas attaché ; il est parti les mains libres.
La sensibilité, la candeur de Jean, tous ceux qui l’ont contacté la connaissent. Il était brave, gentil, dévoué, simple, agréable, riant bien. Il racontait des histoires de ses erreurs en coréen, et chantait bien. Cette candeur lui a aussi posé des problèmes car c’était un homme de cœur: il ne pesait pas bien les choses avant de les faire, il ne demandait guère l’avis des autres, et il a commis des bévues, mais comme il avait agi de bon cœur, il était très gêné ensuite.
Jean était un missionnaire au service de tout le monde. En Corée, il était connu de la Croix-Rouge comme le plus grand donneur de sang de tout le pays ; cela lui a valu de passer souvent à la télévision, dans les journaux et revues, à la radio et son exemple a été étonnement efficace: il a été suivi de milliers d’autres donneurs. Il était doué aussi comme sourcier: à la campagne, quand c’était la sécheresse, combien de centaines de points d’eau n’a-t-il pas détectés pour qu’on y creuse des puits? Il détectait aussi des eaux chaudes en profondeur mais parfois le forage n’était pas bien fait et le pauvre était bien embarrassé ! Souvent, il a trouvé que les gens de telle ou telle maison étaient malades à cause des courants d’eau ou d’ondes telluriques sous leurs maisons. Il savait aussi indiquer comment faire pour s’en protéger. Il a rendu ainsi service à des milliers de gens, bien sûr en ne tenant aucun compte de leur religion.
Et le compte rendu de 1998-2003, faisant brièvement mémoire de lui, de conclure:
« Question présence au monde non chrétien, parmi les confrères, il a battu tous les records ».
Marius Boutary