Jean GAUTHIER1810 - 1877
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 0417
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Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1835 - 1877 (Vinh)
Biographie
[0417] Jean-Denis GAUTHIER, premier vicaire apostolique du Tonkin méridional, naît à Montaigu (Jura) le 13 novembre 1810. Entré diacre au Séminaire des MEP le 30 août 1833, il reçoit le sacerdoce le 20 décembre 1834, et part pour le Tonkin occidental le 15 mars 1835.
Cette région étant alors bouleversée par la persécution, il connait tout d'abord de bien pénibles moments, mais il est doté d'une rare énergie. En vertu d'un bref du 10 décembre 1839, il est, en 1841, nommé évêque d'Emmaüs et coadjuteur de Mgr Retord, qui le sacre à Ke-non le 6 février 1842. Il administre spécialement la partie méridionale de la mission.
Cette région ayant été séparée de la partie occidentale, et créée vicariat apostolique sous le nom de Tonkin méridional par une bulle du 27 mars 1846, Mgr Gauthier en devient le chef, et prend pour coadjuteur le P.G.-C. Masson qu'il tient en très haute estime.
Le nouveau vicariat compte 66 350 chrétiens répartis en 345 villages et formant 19 districts ; il comprend 220 religieuses, 75 catéchistes, 290 élèves-catéchistes, 35 prêtres indigènes et 4 missionnaires. Les quinze premières années de l'épiscopat de Mgr Gauthier se passent au milieu des persécutions, ce qui ne l'empêche pas de maintenir ses chrétiens dans la pratique des devoirs religieux, et d'essayer de faire évangéliser les sauvages. En 1859, à la demande de l'amiral Rigault de Genouilly, il se rend à bord d'un de nos navires de guerre. Il ne peut rentrer au Tonkin qu'en 1863, après la conclusion de la paix. A ce moment-là, la mission est couverte de ruines ; il se met aussitôt à les relever.
En 1867, le roi Tuduc lui demande d'aller en France chercher les éléments nécessaires à la fondation d'un collège à Hué. Il y consent ; cependant, quand il revient avec le personnel nécessaire, les sentiments du roi ont changé, et la fondation du collège s’avère impossible. L'année suivante, il choisit pour nouveau coadjuteur le P.Y.-M. Croc, son provicaire depuis 1866. En 1868, les ennemis des chrétiens, pour essayer de légitimer le pillage des églises de la province de Ha-tinh, l'accusent de vouloir empoisonner les puits et les rivières. Ils fabriquent un document qu'ils lui attribuent, et dans lequel l'ordre est donné à cinq catholiques de répandre partout l'incendie et le poison. La calomnie avorte.
En 1872, à la suite de l'expédition de Francis Garnier, la haine des lettrés se donne libre cours contre les chrétiens, qu'ils qualifient de soutiens des Français. Tout en déclarant vouloir protéger les victimes, les mandarins encouragent et aident les bourreaux. Les missionnaires jugent que, dans ces conditions, les catholiques peuvent se défendre, et Mgr Gauthier adresse aux autorités tonkinoises une lettre dans laquelle il dit : « Si le but que vous vous proposez est l'extermination des chrétiens, à quoi bon des détours ? Faites-le nous savoir officiellement, et nous irons tous, l'évêque et les missionnaires en tête, nous livrer aux bourreaux. Si tel n'est pas votre dessein, protégez-nous, non par des paroles, mais par des actes, ou bien nous nous défendrons nous-mêmes. ».
La tourmente cesse, et l'évêque commence à réparer les désastres, lorsqu'il meurt le 8 décembre 1877 ; il est inhumé dans le chœur de l'église de Xa-doai. Durant sa longue administration, il ordonne 80 prêtres indigènes, dont 20 ont versé leur sang pour la foi. Ses lettres, généralement très brèves, condensent les faits et les idées d'une manière remarquable. Il jouissait d'une grande influence dans tout son vicariat.
Nécrologie
NÉCROLOGE (1)
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MGR GAUTHIER
« Oh ! qu’il nous vienne donc de France des athlètes robustes, fervents et courageux ; ils trouveront du travail ici et un terrain immense à défricher ; ici , des travaux, des fatigues, des croix, des périls et aussi la mort ; mais qu’est-ce que tout cela, quand il s’agit de gagner des âmes ? » Au moment où celui qui plus tard fut le grand Évêque d’Acanthe adressait cet appel au clergé français , un jeune Missionnaire débarquait sur ces rivages de l’Empire d’Annam qu’arrosait alors le sang des martyrs, et venait prendre sa part des travaux, des fatigues, des croix et des périls des apôtres du Tong-King. Il venait faire l’apprentissage de l’apostolat et de la souffrance à l’école de celui dont , bientôt , il devait partager les sollicitudes pastorales et auquel il devait survivre, pour combattre de nouveaux combats et saluer l’aurore si désirée d’une ère de paix et de tranquillité.
Ce Missionnaire, c’était M. Jean-Denis Gauthier qui fut plus tard Évêque d’Emmaüs, coadjuteur de Mgr Retord et premier Vicaire Apostolique du Tong-King méridional . Né à Montaigu (au diocèse de S. Claude), le 13 novembre 1810. Mgr Gauthier entra au Séminaire des Missions le 30 août 1833 ; il était alors diacre. Ordonné prêtre en 1834, il partit pour le Tong-King occidental le 15 Mars 1835.
La persécution la plus cruelle venait alors d’éclater dans l’empire annamite, Migne-Mang (Minh-Menh) avait juré d’anéantir le christianisme dans son royaume. Plusieurs Missionnaires , plusieurs prêtres et clercs indigènes et un grand nombre de chrétiens avaient déjà cueilli la palme du martyre ou se préparaient dans les prisons au dernier combat. Mais la perspective du sort qui le menaçait n’avait rien d’effrayant pour le nouveau Missionnaire : il était de la race de ces athlètes robustes, fervents et courageux dont parlait Mgr Retord. « Il me semble, écrivait M. Gauthier à un de ses Confrères , que j’entrerais volontiers dans la cage, et que la vue des bourreaux avec toutes leurs tortures serait pour moi un agréable spectacle. Oui ! mon cœur tressaillerait de joie à la vue des haches qui devraient me couper par morceaux ! En vérité, cette promesse du divin Maître Qui perdiderit animam suam propter me, salvam faciet illam, cette promesse est comme un rempart où viennent se briser toutes les forces de l’enfer. »
En 1842, pour assurer dans des conjonctures aussi difficiles sa succession épiscopale, Mgr Retord ayant résolu de se choisir un coadjuteur, son choix se porta sur Mgr Gauthier dont il avait pu, à loisir, apprécier la vertu et les capacités. Il le sacra à Ké-none, sous le titre d’Évêque d’Emmaüs. Quatre ans plus tard le Saint-Siège ayant divisé le Tong-King occidental en deux Vicariats, Mgr Gauthier devint le premier Vicaire Apostolique de la partie méridionale.
Sur ce nouveau théâtre de ses travaux , le prélat réalise bientôt les espérances de Mgr Retord : il organise son Vicariat, commence la mission des sauvages, encourage par ses visites et par son exemple les chrétiens toujours persécutés, travaille avec ardeur et non sans succès à la conversion des païens , et cela au milieu de difficultés de tous genres et de périls continuels.
En 1850, à l’apparition de la flotte espagnole sur les côtes d’Annam, Mgr Gauthier, condescendant au désir de l’amiral Rigault de Genouilly, se rend à bord des navires de guerre , dans sa pensée, il ne devait demeurer éloigné de sa Mission qu’une vingtaine de jours. C’était , hélas ! un exil de cinq ans qui commençait ! Ce n’est qu’en 1863 qu’il peut rentrer au Tong-King, il n’y trouve plus que des ruines : les églises , les séminaires , les écoles, les villages chrétiens , tout avait disparu. Il se remet courageusement à l’œuvre et bientôt, comme par enchantement, l’Église du Tong-King méridional renaît de ses cendres. En 1867, Tu-Duc fait appel à son dévouement , l’envoie en France plaider sa cause et le charge de la fondation d’un collège à Hué. Oubliant le passé, le Prélat condescend aux désirs de celui qui fut son persécuteur, il passe les mers, il cherche et trouve le personnel et les ressources nécessaires à l’entreprise qui lui est confiée, entreprise dont il espère de précieux résultats et qui n’échouera que par le mauvais vouloir des grands mandarins. A son retour dans sa Mission, il la trouva dans la plus grande désolation : malgré les traités, le gouverneur de la province, de connivence avec les lettrés du pays, avait recommencé la persécution .
L’orage passa. Mais , en 1874, un autre plus terrible vint de nouveau fondre sur son Vicariat. A la suite de l’expédition du lieutenant de vaisseau Garnier au Tong-King occidental, les lettrés reprirent les armes. En quelques jours, plus de 200 chrétientés du Tong-King méridional furent incendiées, et environ 2,000 chrétiens furent égorgés. Dans une pareille extrémité, Mgr Gauthier se rappelle que le bon pasteur donne sa vie pour son troupeau, il va se livrer aux mandarins qu’il soupçonne, non sans raison, de connivence avec les lettrés. Les mandarins protestent de leur innocence, tout en se déclarant impuisants à conjurer l’orage. Ne pouvant par sa mort sauver la vie de ses ouailles, l’Évêque n’épargne rien pour soulager, du moins, leur misère, 20,000 chrétiens trouvent auprès de lui asile et consolation. Pour les nourrir, il dépense jusqu’à sa dernière obole, il fait des dettes, et son seul chagrin c’est de ne les pouvoir sauver tous. Et puis, quand la paix est rendue à sa Mission, il s’occupe de relever tant de ruines, de réparer tant de désastres, de faire rendre justice à tant de victimes. Mais ses forces ne tardèrent pas à trahir son courage.
Dès 1875, sa constitution, exceptionnellement robuste et vigoureuse, était à peu près complètement épuisée.
Il vit venir la mort avec ce calme et cette confiance qu’il témoignait au début de son apostolat, dans ses aspirations au martyre. « Atteint d’un rhumatisme rebelle à tous les remèdes, écrivait-il en décembre 1875, j’ai beaucoup de peine à marcher et surtout à faire la génuflexion. Cette infirmité et ma soixante-sixième année , dans laquelle je viens d’entrer, m’avertissent que mon heure approche. Sit nomen Domini benedictum ! »
Cette heure que le Prélat attendait depuis si longtemps, avec tant de résignation, et à laquelle il était si bien préparé, arriva enfin, le 8 décembre 1877. Il avait reçu les derniers sacrements avec les sentiments de la foi la plus vive , et avec la sérénité du bon et fidèle serviteur qui se dispose à entrer en possession de la récompense que lui a promise et réservée son divin Maître. Depuis longtemps il avait témoigné le désir de mourir un samedi, ou bien un jour consacré à Marie. Ses vœux furent doublement exaucés : il mourut un samedi, le jour de l’Immaculée-Conception, à une heure et demie du matin, assisté de son coadjuteur, de plusieurs Missionnaires et d’un grand nombre de prêtres indigènes .
Ses obsèques eurent lieu le 12 décembre, fête de la Translation de la Maison de Lorette, au milieu d’un grand concours de chrétiens . Le corps de Mgr Gauthier repose dans le chœur del’église de Saa-Doaï, du côté de l’épitre, en face du corps de Mgr Masson qui repose du côté de l’évangile.
Durant sa longue administration , Mgr Gauthier a ordonné 80 prêtres indigènes , dont 20 ont versé généreusement leur sang pour Notre-Seigneur.
En 1846, au moment de sa formation, le Tong-King méridional comprenait, comme nous l’avons dit , 19 paroisses desservies par 34 prêtres indigènes , et 66,000 chrétiens . Malgré les persécutions violentes qu’il a eu à essuyer, et dont nous n’avons pu donner qu’un léger aperçu, il compte aujourd’hui 31 paroisses, 54 prêtres indigènes et plus de 71,000 chrétiens.
(1) Plusieurs des notices qui suivent ont déjà paru dans les Missions Catholiques.
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Références
[0417] GAUTHIER Jean (1810-1877)
Notes bio-bibliographiques
C.-R., 1872, p. 23 ; 1875, p. 30 ; 1876, p. 25 ; 1883, p. 14 ; 1885, pp. 155, 157, 158 ; 1899, p. 324. - A. P. F., xii, 1840, p. 505 ; xiv, 1842, Martyre de L. Loan, p. 276 ; xvii, 1845, p. 359 ; xviii, 1846, pp. 187, 470 ; xxi, 1849, p. 166 ; xxv, 1853, Personnel du vicariat du Tonkin méridional, p. 100 ; xxvii, 1855, p. 30 ; xxxi, 1859, pp. 129, 406 ; xxxiii, 1861, p. 333 ; xxxviii, 1866, p. 341 ; xxxix, 1867, p. 59 ; xl, 1868, p. 439 ; xliii, 1871, Impunité des persécuteurs, p. 235 ; Ib., p. 246 ; xlvi, 1874, Le Bouddhisme laotien, p. 336 ; Ib., p. 344 ; xlvii, 1875, p. 334 ; l, 1878, pp. 293 et suiv.
A. S.-E., iv, 1852, pp. 374, 472 ; vii, 1855, Envoi de reliques, p. 143 ; viii, 1856, pp. 465, 467 ; xxii, 1870, pp. 20, 22 ; xxiii, 1872, p. 173 ; xxv, 1874, p. 27 ; xxvi, 1875, pp. 166, 311 ; xxviii, 1877, pp. 45, 317 ; xxix, 1878, p. 215. - M. C., i, 1868, Fondation du collège de Hué, p. 59 ; ii, 1869, p. 77 ; Ib., Persécution, p. 105 ; iv, 1871-72, p. 15 ; v, 1873, p. 619 ; vi, 1874, Situation au Tonkin, p. 197 ; Ib., La persécution, pp. 233 et suiv. ; Ib., Fin de l'insurrection, p. 602 ; vii, 1875, p. 146 ; Ib., Remèdes contre la rage et la lèpre, pp. 216, 240 ; Ib., pp. 318, 517 ; x, 1878, Sa mort, pp. 53, 71 ; Ib., Notice, p. 236.
Sem. rel. Saint-Claude, 1868, pp. 329, 410 ; 1871, p. 499 ; 1872, p. 117 ; 1875, p. 165. - Sem. rel. Lyon, 1868, 2e sem., p. 968. - Sem. rel. Paris, 1866, A Paris avec deux mandarins, p. 679 ; 1867, pp. 106 et suiv., 731 ; 1868, p. 305. - Am. de la Rel., cxxii, 1844, pp. 183, 411.
Hist. de l'int. fr. au Tonk., p. 272. - Le Tonk. de 1872 à 1886, pp. 21, 83, 309. - Nos miss. pat. et sav., p. 57. - Hist. gén. Soc. M.-E., Tab. alph. - La Coch., rel., ii, p. 430. - La Coch. et le Tonk., pp. 373, 401. - La Franc. pont., ii, p. 689. - Arm. des Prél. franç., p. 257.
Collect., 26 nov. 1853 : n° 1032 ; 31 juill. 1870 : nos 504, 1583, 2048 ; 14 mai 1872 : n° 154.
Notice nécrologique. - C.-R., 1878, p. 57.
Biographie
Mgr Gauthier et le vicariat du Tong-king méridional [avec portrait] par E.-C. Lesserteur (Extrait des Missions Catholiques), suivi de Quelques détails intimes sur Mgr Gauthier, par M. Frichot, et d'une lettre du même sur la Famine au Tong-king méridional. - Imprimerie J. Mayet et Cie, 20, rue Saint-Désiré, Lons-le-Saunier, 1879, in-8, pp. 24.
Portrait. - M. C., x, 1878, p. 229. - Voir Biographie.