Charles GONIN1868 - 1895
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2083
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1893 - 1895 (Vinh)
Biographie
[2082] PALLAGET Augustin est né le jour le 10 février 1871 à Culhat (Puy-de-Dôme), entra au Séminaire des M.-E. le 8 septembre 1890, fut ordonné prêtre le 15 octobre 1893 et partit le 6 décembre suivant pour le Tonkin méridional. Il se consacra d’abord à l’évangélisation des villages de Thuong-Ich et de Phuc-Luc. Il fut ensuite chargé du district de Dinh-Cau, dans le Ha-tinh. En 1915, il quitta sa mission et la Société des M.-E. pour devenir trappiste au monastère de Notre-Dame-de-Consolation à Yang-Kia-Pin. Il mourut à la Trappe de N.-D. de Liesse à Chang-Ting-Fu, le 27 janvier 1951.
Nécrologie
M. GONIN
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU TONKIN MÉRIDIONAL
Né le 10 octobre 1868.
Parti le 6 décembre 1893.
Mort le 8 juin 1895.
« Charles-François Gonin, écrit Mgr Pineau, naquit à Viéthorey (Doubs), le 10 octobre 1868, d’une famille très chrétienne : ses parents étaient d’honnêtes cultivateurs. Son grand-oncle paternel, religieux bénédictin, mourut supérieur du monastère de la Pierre-Qui-Vire ; un de ses oncles, curé de Flammerans (Côte-d’Or), trouva la mort au chevet des varioleux. Enfin ses deux tantes, religieuses ursulines, sont toutes deux supérieures, l’une du pensionnat de Montbar (Côte-d’Or), l’autre de celui de Montigny, dans le même département.
« Charles était le quatrième garçon de cette heureuse famille. En 1877, il suivit ses parents dans leur nouvelle habitation, à Cubry-les-¬Rougemont, où ils exploitent une ferme considérable.
« Après avoir fait sa première communion et conquis son certificat d’études primaires, Charles se livra avec ses frères aux travaux des champs pour lesquels il avait beaucoup de goût et d’aptitude. Mais, en 1883, M. Bulliard, qui venait d’être nommé curé de Cubry-les-Rougemont, remarqua la solide piété, la franche docilité et l’énergie du caractère de cet adolescent de quatorze ans : aussi conçut-il le dessein de l’envoyer au séminaire. Les bons et religieux parents le lui permirent avec joie. Une pieuse dame voulut bien se charger des frais de pension, à condition que M. le curé de Cubry conduirait l’enfant jusqu’en troisième. Charles se mit donc à l’étude avec un entrain et une persévérance qui ne se démentirent jamais, et, au mois d’octobre 1885, il entrait en troisième, au petit séminaire de Luxeuil (Haute-Saône), le plus florissant des établissements du diocèse.
« Pendant les trois années qu’il y passa, il fut un séminariste modèle, aimé de ses maîtres et de ses condisciples. Chez lui, tout était plus solide que brillant ; il obtint en rhétorique le premier prix de sagesse, décerné par le suffrage des professeurs et des élèves. Il avait en outre un accessit d’instruction religieuse, de diligence, de géomé¬trie, de discours français, de vers latins et de débit oratoire.
« En 1888, nous retrouvons Charles au séminaire de Philosophie de Vesoul. Là, pendant deux ans, il fut heureux d’exercer, tout en s’appliquant sérieusement à l’étude, les fonctions de sacristain qui le rapprochaient déjà de l’autel.
C’est alors qu’il manifesta sa résolution de se consacrer à l’apostolat dans les Missions. Ceux qui le connaissaient et l’aimaient, comprirent que sa détermination était irrévocable. Aussi le laissèrent.ils, avec une sainte résignation, répondre à l’appel de Dieu.
« Il partit donc au mois d’octobre 1890, pour le Séminaire des Mis¬sions-Etrangères. Après un noviciat de trois ans, il revint à Cubry-les-Rougemont pour célébrer sa première messe. Mgr Touchet, vicaire général de Besançon, maintenant évêque d’Orléans, prononça un éloquent discours dans cette solennelle circonstance.
« Après quelques jours de repos au milieu des siens, le jeune prêtre quitta ses parents et ses amis, en leur donnant à tous rendez-vous au ciel. Ses compatriotes sont unanimes à proclamer qu’il fut toujours pour eux un sujet d’édification. Ses parents attestent hautement, de leur côté, que son départ fut le premier chagrin qu’il leur causa. Ils ajoutent qu’il les aimait tendrement, leur écrivant à tous séparément ; et qu’il évita toujours de leur être à charge pour ses dépenses. Son digne père eut la suprême consolation d’assister à Paris, avec l’insigne bienfaitrice de son fils, à la cérémonie des adieux. Le jeune mis¬sionnaire pressa son père une dernière fois sur son cœur ; il ne devait jamais le revoir.
« M. Gonin s’embarqua sur « l’Océanien » avec sept de ses con¬frères, et arriva le 3 janvier 1894 à Singapore. C’est là que M. Page, son compatriote, missionnaire de Malaisie, était venu l’attendre, après avoir fait plusieurs jours de marche pour le saluer à son passage. Les deux apôtres restèrent ensemble une nuit et un jour. « A huit heures trois quarts du soir, écrivait-il à « l’un de ses amis intimes, nous sommes sur le bateau. A neuf heures, « l’Océanien » « s’éloigne. M. Page est encore sur le quai ; nous échangeons un dernier adieu, et c’est tout. « Nous nous sommes peu vus sur la terre, mais nous saurons nous retrouver au ciel avec tous « les parents, bienfaiteurs et amis. Fiat. »
Quelques jours plus tard, le 28 janvier, il arrivait à Xa-doai, chef-lieu de la Mission du Tonkin méridional, plein de zèle et de dévoue¬ment pour la gloire de Dieu et le salut des âmes.
« Reçu au son des cloches qui envoyaient dans les airs leurs joyeuses volées, pendant que, debout au pied de l’autel, il chantait le Te Deum pour remercier Dieu de son heureuse arrivée, son cœur débordait de joie : ses désirs étaient enfin réalisés. Superabundo gaudio, écrivait-il, le jour même, à l’un de ses amis. Hélas ! sa joie, comme la nôtre, devait être bien courte. Le bon Dieu qui avait décidé de nous le ravir si tôt, voulait purifier son âme par la souffrance avant de l’appeler à Lui. Une maladie d’intestins, dont il avait contracté le germe au Séminaire de Paris, disait-il, l’obligea à partir pour le sanatorium de Hong-kong, le 1er avril. J’eus l’occasion de le voir vers la fin du mois de juin, et, à cette époque, sa santé semblait s’être notablement améliorée. Malheureusement ce mieux, comme on le vit bientôt, était plus apparent que réel. Au mois de septembre, une rechute le remit à peu près dans l’état où il était quand il quitta la Mission. Il dut donc reprendre le régime du lait et ne manger que du riz au lieu de pain. Grâce à ce changement de nourriture, les douleurs se calmèrent ; mais le Père devint pâle, faible et languissant. Depuis lors, il n’éprouva jamais d’amélioration sensible, et les médi¬caments ne produisirent pas les résultats qu’on espérait. Malgré cela le 20 décembre 1894, il quittait le sanatorium pour rentrer au Tonkin. Sa pensée se tournait continuellement vers sa chère mission ; il était impatient d’y retourner. « Il était peiné, disait-il, de n’avoir « encore rien fait, tandis que son compagnon de voyage. M. Pallaget, avait déjà baptisé des « centaines de païens. » Ce sentiment se dégage encore davantage de la lettre suivante, écrite à son départ de Hong-kong : « La maladie ne m’a pas permis de retourner plus tôt au Tonkin. « Ma mission, que j’ai à peine entrevue, occupe toutes mes pensées. Hong-kong, où je suis « depuis huit mois, très agréable comme climat, n’a rien de bien attrayant pour les « missionnaires. Vous en devinez la raison : ils ne viennent ici que pour cause de maladie, et « leur cœur ne saurait s’y attacher. Je partirai demain avec le plus grand plaisir. Daigne Dieu « m’accorder une bonne santé pour travailler avec ardeur au salut des âmes ; mais, avant tout, « que sa sainte volonté soit faite ! »
« La volonté de Dieu avant tout : telle était la pensée qui animait et réglait toutes ses actions. Elle ne devait pas tarder à se manifester à son égard d’une manière inattendue pour lui et pour nous.
« Rentré au Tonkin, il nous quittait tout joyeux, le 17 janvier, pour se rendre à Tan-loc, gros village chrétien, situé sur les bords de la mer. Il devait y continuer l’étude de la langue annamite qu’il parlait déjà assez correctement, bien que la maladie ne lui eût laissé que peu de temps pour l’apprendre. A une demi-heure de là, se trouvait un autre confrère un peu plus jeune que lui, également occupé à l’étude de la langue. Ils se voyaient toutes les semaines et quelquefois plus souvent. Persuadé que l’air de la mer serait très salutaire au cher malade, j’avais l’intention de le laisser quelque temps à Tan-loc ; mais la maladie d’un prêtre indigène m’obligea d’envoyer M. Gonin le remplacer. Je lui annonçai donc sa nouvelle destination : c’était le 11 mars. Le lendemain, je recevais cette réponse : « Monseigneur, je viens de lire la « lettre de Votre Grandeur. Je vais me rendre à Qui-chinh le plus promptement possible. »
« Le 18 mars, il visitait la partie haute de son nouveau district et donnait la confirmation dans plusieurs postes. Cette tournée le fa¬tigua, et il dut prendre quinze jours de repos.
« Vers la fin de mai, il vint nous voir à Xa-doai. Je l’engageai à rester quelques jours avec nous ; il refusa parce qu’il tenait à rentrer dans le lieu de sa résidence pour la clôture du mois de Marie. Rien alors ne pouvait faire soupçonner sa fin prochaine. Le 3 juin, il descendit en barque chez M. Pallaget, son ancien compagnon de voyage, afin de se confesser. Par malheur, ce jour-là, M. Pallaget était absent. Il avait été appelé d’urgence dans un village nouvellement converti, dont les rebelles venaient de massacrer le chef.
« Le mercredi 5 juin. M. Gonin revint chez lui à cheval. Le 6, il m’écrivait qu’il se portait comme d’habitude. Le 7, il se sentit plus fatigué et ne put dire la sainte messe. Néanmoins, dans la soirée, il fit encore une petite promenade, de sorte que ni lui ni personne ne songeait au brusque dénouement du lendemain.
« Le samedi matin, il prit un vomitif qui ne lui procura qu’un soulagement passager. L’après-midi, son catéchiste remarqua qu’il respirait avec beaucoup de peine et ne pouvait presque plus rien avaler ; il comprit que l’état du malade était grave, et envoya cher¬cher le prêtre indigène le plus voisin. Ce dernier arriva vers quatre heures du soir : « Père, dit-il à M. « Gonin, vous êtes gravement at¬teint, je crois que vous feriez bien de vous confesser. » Le malade qui n’avait pas bien compris répondit : « Il n’y a que trois jours que tu t’es confessé, et « tu veux encore te confesser maintenant. — Non, Père, répondit le prêtre indigène, je viens « vous voir et vous demander si vous ne voudriez point vous confesser vous-même, parce que « vous me paraissez bien fatigué. — Oh ! oui, dit-il, je me confesserai volontiers » ; ce qu’il fit après quelques instants de recueil¬lement. Il n’avait pas encore achevé qu’on vint demander le prêtre indigène pour administrer un malade. La confession terminée, le prêtre courut bien vite auprès de la personne pour laquelle on l’ap-pelait, en promettant à notre confrère de revenir le voir. M. Gonin, qui ne croyait pas encore à la gravité de son état, l’engagea lui-même à partir promptement, ajoutant que pour lui rien ne pressait.
« Vers 7 heures du soir, il perdit l’usage de la parole ; néanmoins, il garda sa connaissance jusqu’au dernier moment. A 9 heures moins quelques minutes le catéchiste voyant les yeux du moribond se voiler, commença les prières des agonisants. Notre confrère lui fit comprendre par un signe qu’il s’unissait d’esprit et de cœur aux prières que les chrétiens récitaient. A 9 heures et demie, il rendit son âme à Dieu. Le prêtre indigène ne revint que deux heures après la mort.
« Je venais d’apprendre que M. Gonin était malade quand m’arriva la nouvelle de son trépas. Je crus d’abord à un accès pernicieux ; mais j’ai depuis lors acquis la certitude que notre cher confrère a été emporté par une angine couenneuse.
« J’ai fait rapporter son corps à Xa-Doai, où il a été déposé dans le cimetière de la Mission, à côté des missionnaires qui l’ont précédé dans la tombe.
« M. Charles Gonin nous a été ravi dès le début de sa carrière apostolique. Il a passé parmi nous, pour ainsi dire sans s’arrêter, comme un voyageur qui a hâte d’arriver au terme de sa course ; mais chacun de nous a pu remarquer en lui les qualités morales et intel-lectuelles qui caractérisent un missionnaire de choix. Il était sincè¬rement pieux, sans affectation. Que de fois ne m’a-t-il pas édifié pendant que nous étions ensemble au sanatorium, lorsqu’il faisait sa visite au Saint-Sacrement ! Il n’était pas de ceux qui me lancent dans les aventures sans se préoccuper de la manière d’en sortir. Quand il se trouvait en face d’une difficulté, il ne manquait jamais de consulter avant d’agir. Sa haute stature imposait aux Annamites ; mais sa dou¬ceur et son affabilité les attiraient tous à lui.
« Dieu, dont les desseins sont impénétrables, lui a épargné les fatigues et les responsabilités d’un long apostolat. Il s’est contenté de sa bonne volonté, sans lui permettre de mettre en évidence les heu¬reuses qualités dont il l’avait enrichi. Que Dieu soit béni. La mort de M. Gonin, qui a suivi de si près celle du regretté M. Vieu, est une bien cruelle épreuve pour notre Mission. Daigne le divin Maître, dans sa miséricorde, avoir pitié de nous, et nous envoyer un grand nombre d’ouvriers apostoliques semblables à ceux que nous pleurons en ce moment. »
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