Joseph GIRAUD1874 - 1914
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2263
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Inde
- Région missionnaire :
- 1897 - 1914 (Pondichéry)
Biographie
[2263] GIRAUD Joseph, Constant naît le 20 mars 1874 à Mouzeuil, dans le diocèse de Luçon en Vendée. Il étudie les premiers éléments du latin avec M. Chevalier, archiprêtre de Fontenay le Comte. Il est envoyé au Petit séminaire des Sables-d'Olonne et entre au Grand séminaire de Luçon où il est minoré le 29 juin 1894. Voulant se destiner aux Missions, il entre au Séminaire des Missions Étrangères le 17 septembre 1894. Il y est ordonné prêtre le 27 septembre 1896 et part pour Pondichéry le 18 novembre 1896.
Charité et dévouement au service de l’apostolat
Son évêque, Mgr Gandy, le nomme vicaire à Karikal (1). Il étudie le tamoul et s'initie peu à peu au ministère des âmes. En 1897, il est appelé à Pondichéry où, pendant un an, il a la charge d'assistant procureur. Il est vraiment heureux quand il reçoit sa nomination pour la paroisse de Pudur (2). On est en 1898 et depuis deux ans les Indiens se voient réduits à la plus extrême misère. La grande famine amène aux pieds du P. Giraud des centaines de pauvres Parias (3) qui demandent l'aumône. Le jeune missionnaire profite de la circonstance pour leur parler de Jésus. Il se voit bientôt entouré de plusieurs centaines de catéchumènes. Installé à l'ombre d'un tamarinier, il passe sa journée au milieu de ces pauvres gens, s'efforçant de leur apprendre les prières et de leur expliquer la doctrine chrétienne. Le diocèse envoie provisions et ressources qu'il distribue aux affamés. Quand, faute de ressources, la Procure de Pondichéry ne peut plus rien envoyer, le P. Giraud se tourne vers son prédécesseur, le P. Gabillet, et demande de l'aide en France par l'intermédiaire des ‘‘Missions Catholiques’’. Il peut ainsi continuer son œuvre et baptiser des milliers d'hindous. Il réunit ensuite ses néophytes et leur bâtit une église à Valayapattur.
Le P. Giraud s'occupe également du bien-être spirituel des anciens chrétiens de sa paroisse. Monté sur son petit cheval, il parcoure, chaque mois, les principaux centres de son district, pour instruire ses chrétiens et leur permettre de communier souvent. Il remercie Dieu de toutes ces consolations, quoiqu’il connaisse des difficultés et doive surtout se confronter aux activités intempestives des Protestants, qui essaient, à prix d'argent, de faire apostasier les catholiques. Il a alors recours à la Vierge Marie, et Dieu merci, les défections sont peu nombreuses. L'œcuménisme est décidément un concept nouveau !
Après la perte d’un œil, sa vue se détériore, ce qui lui interdit l'étude. Alors, il réunit ses chrétiens autour de lui et cause avec eux, surtout le soir après les travaux des champs. Il aime ses néophytes et en est aimé.
Avec ses confrères, il est toujours aimable et charitable. Sachant que les voyages fatiguent son plus proche voisin, il fait régulièrement chaque mois, pendant treize ans, une course de 30 km pour le confesser.
Il contracte les germes de la violente épidémie de petite vérole qui sévit dans la région. Un jour, il veut monter à l'autel mais, à l'offertoire, ses forces le trahissent et il tombe. On le transporte au presbytère et on avertit le P. Grandjanny, un de ses voisins. Voyant que la respiration du Père devient de plus en plus difficile, il lui donne une dernière absolution. Le 3 janvier 1914, le P. Giraud expire à 10 h du soir après avoir reçu l'Extrême Onction des mains du P. Marie-Ignace. Le lendemain, les obsèques ont lieu en présence de sept confrères. Il est inhumé près de l'église de Pudur au milieu des chrétiens qu'il a tant aimés.
1 – L’un des cinq comptoirs français en Inde, sur la côte de Coromandel au sud de Pondichéry.
2 – Au nord-ouest de Pondichéry, proche de Vellore.
3 – Intouchables, aujourd’hui appelés dalits.
Nécrologie
M. GIRAUD
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE PONDICHÉRY
Né le 20 mars 1874
Parti le 18 novembre 1896
Mort le 3 janvier 1914
M. Joseph-Constant Giraud, proche parent de M. le chanoine Giraud, vicaire général de Luçon, naquit à Mouzeuil (Luçon, Vendée), le 20 mars 1874. Son père, Joseph Giraud, était remarquable par son ardeur inlassable au travail. Sa mère avait une foi très éclairée et une grande charité pour le prochain. Elle faisait souvent la sainte communion.
C’est à M. Chevalier, aujourd’hui archiprêtre de Fontenay-le-Comte, que revient le mérite d’avoir su discerner la vocation sacerdotale de Joseph. C’est lui aussi qui initia l’enfant aux premiers éléments du latin.
Au petit séminaire des Sables, Joseph, sans être ce qu’on appelle un brillant élève, fit preuve d’un excellent esprit et d’une grande charité pour ses camarades. Ce fut dès son année de quatrième ou de troisième, après une fervente communion, qu’il se sentit appelé à l’apostolat dans les missions.
Quand arriva le moment de dire adieu à sa famille et de partir pour la rue du Bac, il se trouva en face d’une situation très délicate, qui rendit son sacrifice particulièrement pénible. Son père, dont il était l’unique enfant, venait de se casser un membre, et l’on ignorait encore s’il n’en resterait pas estropié pour le reste de ses jours. Le futur missionnaire voulut avoir l’assurance que la guérison de son père deviendrait complète ; après quoi, il fit à pied le trajet de Mouzeuil à Luçon, aller et retour, et eut une dernière entrevue avec son directeur. Au retour de ce voyage, il annonça à ses parents son prochain départ pour Paris. Au Séminaire des Missions-Étrangères, le nouvel aspirant éprouva une grande paix intérieure. Pendant tout le temps qu’il y passa, il ne douta pas un seul instant qu’il ne fût entré dans la voie où Dieu le voulait. D’autre part, son courage, son esprit pratique, sa piété à la fois tendre et forte, son admirable entrain et sa franche gaieté le firent grandement apprécier de ses maîtres et de ses confrères. Le 27 septembre 1896, il reçut la prêtrise et fut destiné, le jour même, à la mission de Pondichéry.
Il partit le 18 novembre suivant et, à son arrivée dans l’Inde, Mgr Gandy le nomma vicaire à Karikal. C’est là que notre cher confrère fit ses premières armes et s’exerça au saint ministère. Il se donna tout entier à l’étude du tamoul, sous la direction de M. Delaune, et, au bout de quelques mois, il put confesser, voire même faire de petits sermons à l’église.
Au moment où le jeune missionnaire se trouvait capable de marcher seul, il se vit rappelé à Pondichéry en qualité de sous-procureur. Dans l’exercice de cette charge délicate, il donna à ses confrères mille témoignages de sa charité ; mais le travail de bureau lui fatigua la vue, et il perdit bientôt un œil. Alors, à sa grande joie, l’archevêque le chargea du beau district de Pudur. Le nouveau titulaire avait toutes les qualités nécessaires pour continuer l’œuvre de MM. Mignery et Gabillet, ses prédécesseurs à Pudur. Son activité trouva là un vaste champ à cultiver et du travail en abondance. On était en 1898. Depuis deux ans, les Indiens se voyaient réduits à la plus extrême misère. La famine, « le plus grand prédicateur de l’Inde », a-t-on dit, amena aux pieds de M. Giraud des centaines de pauvres parias qui lui demandaient l’aumône. Le jeune missionnaire profita de la circonstance pour leur prêcher Jésus-Christ ; et il se vit bientôt entouré de plusieurs centaines de catéchumènes. Installé à l’ombre d’un tamarinier, il passait sa journée au milieu de ses pauvres païens, s’efforçant de leur apprendre les prières et de leur expliquer les principales vérités de la religion. Hélas ! son bonheur ne fut pas sans mélange. La famine, qui sévissait dans tous les districts du nord de la mission, avait épuisé les ressources de la procure ; et, le 15 octo¬bre 1898, Mgr Gandy envoya une circulaire à ses missionnaires pour leur dire : « J’ai le regret de vous faire connaître que nous sommes, « cette année, dans l’impossibilité d’accorder des allocations pour les affamés. » Cette circulaire remplit de tristesse l’âme de M. Giraud. Lui, qui aimait passionnément les âmes, il se voyait réduit à fermer sa porte à des centaines d’infidèles. Que faire ? Devait-il renvoyer tous ces miséreux et leur refuser le baptême qu’ils demandaient ? Il ne pouvait se résoudre à cette extrémité, et il se fit mendiant pour ses catéchumènes. Grèce aux secours que lui envoyèrent M. Gabillet et les Missions Catholiques, il put continuer son œuvre et baptiser un millier de païens. Il réunit ensuite ses néophytes et leur bâtit une église à Valayapattur. Dieu seul connaît les sacrifices et les privations qu’il s’imposa pour mener cette œuvre à bonne fin.
L’apôtre, en travaillant ainsi au salut des infidèles, n’oubliait pas le bien spirituel des anciens chrétiens. La communion fréquente fut le moyen dont il se servit pour transformer les âmes, qui jusque-là se contentaient d’observer le devoir pascal. Le nombre des communions s’accrut rapidement. En 1898, il n’y en avait guère que 2.000 dans le district ; or, en 1913, il y en eut plus de 9.000. Ce chiffre est éloquent, et montre le travail qu’à dû fournir M. Giraud pour arriver à un tel résultat. Monté sur son petit cheval, il parcourait, chaque mois, les principaux centres de son district, pour instruire ses chrétiens et leur permettre de communier souvent. Le bon Dieu devait être content de lui.
Le vaillant missionnaire n’eut pas que des consolations ; il trouva bien des croix le long de son chemin. Les protestants de Madurantakam, toujours à la recherche d’âmes à pervertir, offrirent de l’argent, des terres, des bœufs aux néophytes en échange de l’apostasie. Avoir faim, et refuser le secours qui sauve la vie ; avoir des dettes et refuser l’argent qui doit vous libérer : quelle tentation !
M. Giraud frémit à la vue du danger que couraient ses enfants. Il les visita et les encouragea à ne pas vendre leur âme à prix d’argent ; il eut surtout recours à Marie et lui confia ses chrétiens. Marie entendit sa prière, et les défections furent peu nombreuses.
Jusqu’ici nous avons vu M. Giraud à l’œuvre dans l’administration de son district ; il nous reste à dire quelques mots de ses vertus sacerdotales.
Il était vraiment prêtre et missionnaire ; en tout temps et de toutes manières, il était l’homme de Dieu et des âmes. D’une fidélité scrupuleuse à ses exercices de piété, il se levait à quatre heures du matin. Un livre à la main, il passait trois quarts d’heure en oraison dans sa chambre ; et, à cinq heures, il se rendait à l’église pour se préparer à la sainte messe qu’il disait à cinq heures et demie.
La visite au Saint-Sacrement tenait aussi une large place dans son règlement. Mais ce qui caractérisait M. Giraud était un zèle immense pour les âmes, zèle qu’il puisait dans un grand amour de Dieu.
« Je me souviens, dit M. Grandjanny, de ce qu’il écrivait à sa mère lorsqu’il perdit un œil, « vers la fin de 1897 : « Ma chère mère, j’ai perdu un œil ; on me parle d’un retour en « France ; cela, jamais ! Il me reste un œil pour lire les prières de la messe, et des forces pour « travailler au salut des âmes. Cela me suffit, je veux mourir en mission... »
M. Giraud aimait ses chrétiens, et savait le leur montrer par un dévouement, qui était sans bornes et de tous les instants. D’une générosité extraordinaire, il donnait sans compter ; son bon cœur ne lui permettait pas de songer qu’il pouvait parfois être trompé. Il aurait voulu voir tous ses chrétiens, non pas riches mais dans l’aisance. Souvent même il empruntait, afin de pouvoir leur avancer l’argent dont ils avaient besoin. Il était toujours prêt à leur rendre service et à régler les petits différends qui survenaient entre eux. Il savait les réprimander lorsqu’ils le méritaient. On souriait bien un peu lorsqu’on le voyait relever ses manches et dire : « Ah ! en voilà un que je ne lâcherai pas ; il aura de mes nouvelles. » Hé ! oui, il ne le lâchait pas ; mais la réprimande était toujours accompagnée de quelques bonnes paroles.
La demi-cécité dont il était affligé, lui interdisant l’étude, son bonheur était de voir des chrétiens réunis autour de lui et de causer avec eux, surtout le soir, après les travaux des champs. Il aimait ses néophytes et en était aimé : « Voilà notre Père, disaient-ils avec fierté. Où pourrait-on trouver son pareil ? »
Avec ses confrères, il était toujours aimable et savait se gêner pour eux. Voici un fait qui prouve jusqu’où allait sa charité : sachant que les voyages fatiguaient son plus proche voisin, il fit régulièrement, chaque mois, pendant treize ans, une course de 30 kilomètres pour le confesser.
M. Giraud semblait taillé pour vivre longtemps, mais le bon Dieu devait bientôt l’enlever à notre affection. Au commencement de décembre 1913, il fut appelé à Rovattanalur près de son voisin, M. Gabillet, malade de la petite vérole. Il le soigna avec beaucoup de dévouement pendant quelques jours, administra les chrétiens du village atteints du même mal, et rentra à Pudur, l’avant-veille de Noël, avec les germes de la terrible épidémie. Il confessa plusieurs centaines de chrétiens, et célébra sans trop de peine la fête de Noël. Le lendemain, la réaction se fit, et le missionnaire fut obligé de passer la journée étendu sur son lit. Le 27 décembre, malgré sa grande faiblesse, il voulut encore monter à l’autel ; mais, à l’offertoire, ses forces le trahirent et il tomba. Les chrétiens le transportèrent au presbytère, où il s’alita.
Le 29 décembre, son vicaire, le P. Marianader, envoya à Cheyur un courrier pour prévenir M. Grandjanny, qui accourut en toute hâte et trouva le malade en proie à une fièvre de 40o, 5, le visage enflé, avec tous les symptômes de la variole. Un docteur de Madras vint lui donner ses soins et prescrivit quelques remèdes qui le soulagèrent, mais une angine varioleuse vint rendre la respiration excessivement pénible. Le malade souffrait horriblement. A chaque instant, on l’entendait murmurer : « Oh ! mon Dieu que je souffre, que je souffre ! Mon Dieu, « je vous l’offre ; mon Dieu que votre volonté soit faite !... »
Le samedi 3 janvier dans la soirée, M. Grandjanny proposa à M. Giraud de le confesser, mais le malade ne se rendant pas compte de la gravité de son état, lui répondit : « Je crois que « je vais mieux ; d’ailleurs, voilà dix jours seulement que je me suis confessé, j’ai la « conscience en paix, je n’ai rien à dire. Néanmoins, comme il est bon de recevoir le pardon « de ses péchés, je vais me préparer et je me confesserai demain matin. » M. Grandjanny ne crut pas devoir insister. Mais, dans la nuit, voyant que la respiration du malade devenait très pénible, il s’empressa de lui donner l’absolution. Il appela ensuite le P. Marie-Ignace, qui administra l’extrême-onction et donna l’indulgence in articulo mortis. L’âme de notre cher confrère ne tarda pas à s’envoler au ciel ; il était 10 heures du soir.
Revêtu des ornements sacerdotaux, le corps fut porté à l’église, où il resta exposé jusqu’au lendemain à midi. Par prudence, on dut prendre les mesures d’ordre énergiques, pour écarter la foule des chrétiens, qui se lamentaient, pleuraient et voulaient faire toucher leurs chapelets au mort.
A 3 heures de l’après-midi, en présence de sept confrères qui, prévenus par le télégraphe, avaient eu le temps d’arriver, eut lieu le service funèbre. La tristesse des chrétiens ne put se contenir, et ce fut au milieu de leurs lamentations que nous descendîmes dans le tombeau les restes mortels du cher M. Giraud. Il repose près de l’église de Pudur, au milieu des chrétiens qu’il a tant aimés !
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Références
[2263] GIRAUD Joseph (1874-1914)
Références bibliographiques
AME 1896 p. 623. 1911 p. 315. 1914 p. 102. CR 1896 p. 332. 1900 p. 221. 1901 p. 229sq. 1902 p. 267. 1904 p. 250. 1905 p. 258. 1906 p. 233. 234. 1908 p.242. 1909 p. 229. 1911 p. 234. 1912 p. 285. 1914 p. 121. 163. 1922 p. 146. 1923 p. 160. MC 1900 p. 470. 568. 1901 p. 123. 458. 484. 1902 p. 172. 1905 p. 147. 496.