François LEMASLE1874 - 1946
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 2356
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Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Autres informations
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1898 - 1946 (Hué)
Biographie
[2356] François LEMASLE naît le 19 décembre 1874 à Servon, diocèse de Coutances, dans le département de la Manche. Il fait ses études primaires chez les Frères de Ploërmel ; I'abbé Guillard, à Dugey, lui donne ses premières notions de latin. Dirigé vers le petit séminaire de l'Abbaye-Blanche à St Lo, il effectue de solides études secondaires couronnées par le baccalauréat ès lettres le 11 Novembre 1893.
Après une année au grand séminaire de Coutances, il entre laïc au Séminaire des MEP le 2 octobre 1894. Tonsuré le 21 Septembre 1895, il reçoit les ordres mineurs le 29 février 1896. Puis, de la fin de l’année 1896 au mois de septembre 1897, il devient professeur au collège St. Grégoire à Pithiviers, dans le diocèse d'Orléans. C'est dans cette ville qu'il devint sous-diacre le 12 Juin 1897.
Diacre le 5 Mars 1898, il est ordonné prêtre le 26 Juin 1898 avec quarante- trois confrères ; le soir même, il reçoit, avec les P. Morineau et Guichard, sa destination pour le vicariat apostolique de la Cochinchine Septentrionale (Hué) qu'ils partent ensemble rejoindre le 27 Juillet 1898.
Vietnam (1898-1946)
Arrivé en mission, M. Lemasle se met aussitôt à l'étude de la langue viêtnamienne, mais dès la fin de l'année, il doit se rendre à Hong-Kong pour y soigner une dysenterie rebelle. De retour en Juillet 1899, Mgr. Caspar le nomme professeur de rhétorique au petit séminaire de An-Ninh. En Août 1902, au Grand Séminaire de Phu-Xuân, il est chargé de l'enseignement de la philosophie et de la théologie pendant une dizaine d'années.
En Octobre 1911, en raison du trop grand nombre de postes sans titulaires, il est nommé curé de la paroisse de Co-Vuu et de ses annexes, dans la province de QuangTri ; il est également chef du district de Dinh-Cat, supérieur du couvent des religieuses, et chargé du sanctuaire de La-Vang; aidé par un vicaire viêtnamien, il occupe ces responsabilités avec optimisme et jovialité; plein de tact et de savoir-faire, il a de bonnes relations avec tous. ll entreprend quelques constructions nouvelles au couvent, en particulier une chapelle spacieuse et élégante.
En 1921, il prend la direction de la paroisse St. François-Xavier, à Hué, succédant au P.Léculier, son fondateur, rappelé à Paris. Cette paroisse se compose surtout de fonctionnaires et de militaires ; le P.Lemasle organise la vie chrétienne de cette population flottante. il y exerce un ministère parfois difficile et délicat mais fructueux. Les malades des hôpitaux reçoivent sa visite deux fois par jour. ll assure la catéchèse aux élèves de l'lnstitution Ste Jeanne d'Arc, et aux enfants de la paroisse.
En Mars 1930, il est nommé vicaire délégué et provicaire, en remplacement du P. Chabanon, devenu coadjuteur de Mgr. Allys.
.1931-1933 : séjour en Europe
Laissant sa paroisse entre les mains du P.Darbon, il s'embarque pour la France le 1er Juin 1931 en raison de son état de santé. Il arrive le 27 Juin 1931. 0utre le repos en famille, les soins médicaux, et une double intervention chirurgicale, le P. Lemasle cherche, en vain, durant son séjour une congrégation ou des professeurs volontaires pour prendre en main le collège de la Providence à Hué. Lors d'un voyage à Rome, il est reçu en audience privée par le Pape Pie Xl, et le cardinal Préfet de la Propagande.
Ayant retrouvé forces et santé suffisantes, le 5 mars 1933, le P.Lemasle est de retour dans sa Mission; il est nommé supérieur de l'institut de la Providence, « Thiên Huu hoc Duong", avec comme professeurs-prêtres les pères Thuc, Dancette, Massiot, Thich. Le 17 Septembre 1933, Mgr. Chabanon bénit ce nouvel établissement, et Mgr. Ie Délégué Apostolique fait pour cette maison d'éducation les voeux suivants: "Vivat, crescat, floreat, et fructihcet"!
Devenu Evêque, Mgr Lemasle met cet Institut sous le patronage de Ste Thérèse de Lisieux, le 2 Octobre 1938.
Il participe comme théologien, au "premier concile plénier d'lndochine" qui s'ouvre à Hanoï le 18 Novembre 1934. Le 24 Avril 1936, Mgr. Chabanon, épuisé, s'embarque pour la France et le 29 mai suivant arrive à Marseille où il meurt le 4 juin 1936. Le P. Lemasle, provicaire, prend la direction de la Mission.
. Evêque de Teuchyra, vicaire de Hué
Le 4 Février 1937, le Souverain Pontife le nomme évêque titulaire de Teuchyra (aujourd'hui, Tacra, ville de Libye) et vicaire apostolique de Hué. Le 10 Février 1937,1a nouvelle parvient à Hué. Le 27 Mai 1937, sous la présidence du délégué apostolique, il reçoit la consécration épiscopale dans la procathédrale de Phu-Cam des mains de Mgr. Gouin, du Laos, assisté de Mgr Tardieu de Quinhon, et de Mgr Cân de Bui-Chu.
Mgr Lemasle profite des retraites annuelles pour donner à ses prêtres des directives et des conseils pratiques. Il dirige le vicariat d'une manière vigilante et ferme. Il visite fréquemment les séminaires, dirige les examens, et questionne lui-même les grands séminaristes. Il préside les grands pèlerinages à Notre Dame de Lavang. Une lettre pastorale précise les cérémonies pour célébrer, dans tout le vicariat, le centenaire du martyre des Bienheureux Jaccard et Thomas Thiên. L'ouverture des solennités est fixée au 21 Septembre 1938, et la clôture au 21 Septembre 1939.
Sous son épiscopat, le monastère bénédictin de ThiênAn, non loin de Hué, est fondé sous la conduite de Dom Romain. Mgr Lemasle s'intéresse aux communautés religieuses, et à la formation intellectuelle professionnelle et spirituelle de leurs membres. Il favorise l'ouverture d'écoles dans tous les postes de mission, et encourage "L'Association Ste Marie" fondée dans ce but.
L'Action Catholique est l'objet de ses soins. Chaque année, il consacre une quarantaine de jours à des visites pastorales, parfois très pénibles, aimant être reçu avec tout le décorum de cette époque. Ces "missions itinérantes" soigneusement préparées le conduisent, pour plusieurs jours, dans les stations missionnaires où il interroge et prépare les confirmants.
Après huit ans d'épiscopat fécond, de lourdes épreuves s'abattent sur le vicariat.
. Résidence forcée à Hué
Le 9 mars 1945, jour du coup de force japonais, Mgr Lemasle, en visite pastorale à Binh-Tôn, dans la province du Quang-Binh, part en fin de matinée pour Tam-Toâ, près de Dong-Hôi, où il apprend la gravité de la situation. La nuit est calme, mais le lendemain, après la messe, il doit partir précipitamment en barque et fuir devant les japonais qui arrêtent les Européens, et poursuivent l'évêque. La barque s'éloigne au plus vite, et pendant deux jours, il se cache dans les chrétientés, qui lui procurent un pousse-pousse pour gagner le petit séminaire de An-Ninh. Vers huit heures du soir, il part avec le prêtre qui l'accompagne ; il voyage toute la nuit, sans être inquiété, et arrive de grand matin à An-Ninh. Deux jours plus tard, une barque vient le prendre et le conduit à Hué où il reste en résidence forcée.
Tous les ressortissants français sont concentrés dans le quartier résidentiel de la rive droite de la rivière des parfums, comprenant l'Evêché, la Procure, le Collège de la Providence et l'école Jeanne d'Arc. Une vingtaine de missionnaires du Vicariat sont dans l'Evêché ; le 24 Novembre 1945, Mgr Piquet arrive de Quinhon, avec dix de ses missionnaires.
Les premiers mois de réclusion, après le 9 Mars 1945, sont passables ; l'autorité japonaise accorde un laissez-passer à Mgr. Lemasle qui peut se rendre plusieurs fois au Grand Séminaire et dans quelques communautés pour rencontrer des prêtres viêtnamiens. ll en est autrement après la prise du pouvoir par les Viêtminh où il est strictement défendu d'avoir du personnel viêtnamien ; du 18 Août 1945 au mois de mars 1946, les relations avec tout viêtnamien sont officiellement interdites.
Ne pouvant plus administrer son diocèse, Mgr Lemasle demande au chef viêtminh de la Province un permis de circuler qui lui est accordé, puis retiré trois heures après. Ne pouvant plus sortir de la zone de concentration, ni correspondre avec son clergé, il charge un prêtre viêtnamien de s'occuper des relations avec les autorités du moment, et des affaires courantes de la Mission.
Bien qu'il se montre volontairement optimiste et de bonne humeur Mgr Lemasle, fort affecté par ces évènements, tombe malade en juin 1946 ; atteint d'une leucémie incurable, le 4 Août 1946, il rentre à la clinique St. Paul, à Saigon. Sa faiblesse augmentant progressivement, il reçoit les derniers sacrements, et le 26 Septembre 1946 à 20 heures, sans souffrance et avec toute sa lucidité d'esprit, il rend son âme à Dieu.
Mgr Cassaigne, vicaire apostolique de Saïgon, préside ses obsèques.
La dépouille mortelle de Mgr Lemasle est inhumée au cimetière d'Adran, à Saïgon.
Nécrologie
Mgr LEMASLE
VICAIRE APOSTOLIQUE DE HUÉ
Mgr LEMASLE (François-Arsène-Jean-Eugène) né le 19 décembre 1874 à Servon, diocèse de Coutances (Manche). Entré laïque au Séminaire des Missions-Étrangères le 2 octobre 1894. Prêtre le 26 juin 1898. Parti pour la Cochinchine septentrionale le 27 juillet 1898. Evêque de Teuchira et Vicaire apostolique de Hué en 1937. Mort à Saigon le 26 septembre 1946.
Mgr Lemasle naquit à Servon (Manche) le 19 décembre 1874, d’une famille très honorable. Il fit ses études primaires chez les Frères des Ecoles chrétiennes de Ploërmel, et reçut de l’abbé Guillard à Dugey les premières notions de latin, avant d’entrer au petit séminaire de l’Abbaye-Blanche où il laissa une excellente impression à ses maîtres ; toute sa vie il garda de cet établissement le meilleur souvenir. Ses études secondaires furent couronnées par le baccalauréat ès lettres, qu’il obtint devant la Faculté de Rennes le 110 novembre 1893.
François, répondant à la voix de Dieu qui l’appelait à l’état ecclésiastique, entra au grand séminaire de Coutances, ce qui lui permit d’étudier encore sa vocation pendant une année, et, finalement, décidé à se consacrer à l’apostolat lointain des infidèles, il vint, en septembre 1894, au Séminaire des Missions-Étrangères de Paris, Séminaire bien connu dans le diocèse de Coutances, par les Bienheureux Gilles Delamotte et Auguste Chapdelaine qui en étaient originaires, morts pour la foi, le premier à Hué et le second au Kouang-Si, et aussi par de nombreux missionnaires qui évangélisaient alors les régions d’Extrême-Orient, entre autres Mgr Osouf, archevêque de Tôkyô.
Tout allait bien, lorsque soudain, la maladie l’obligea d’interrompre ses études et d’aller au collège Saint-Grégoire à Pithiviers où tout en professant, il pouvait se soigner.
Quand sa santé fut tout à fait rétablie, notre aspirant revint au Séminaire des Missions-Étrangères pour y continuer ses études théologiques, et le 26 juin 1898, il fut ordonné prêtre avec quarante-trois de ses confrères ; le soir même il recevait, avec MM. Morineau et Guichard, sa destination pour la Cochinchine septentrionale, aujourd’hui Mission de Hué. Le 27 juillet suivant eut lieu la cérémonie de départ de vingt-deux missionnaires destinés à différentes Missions des Indes, de l’Indochine et de la Chine.
Ce fut une grande joie pour tous les missionnaires de Hué de recevoir les trois nouveaux ouvriers apostoliques en bonne santé, mais peu de temps après M. Lemasle fut éprouvé par une violente dysenterie qui l’obligea à se rendre au sanatorium des Missions-Étrangères à Hong-Kong où il passe quelques mois. En juillet 1899, il était suffisamment rétabli pour rentrer dans sa Mission. Mgr Caspar le nomma professeur de rhétorique au petit séminaire de An-Ninh. Ce fut pour lui un séjour très profitable et aussi très agréable qui lui permit de s’acclimater et de fortifier sa santé. A peine trois années s’étaient-elles écoulées dans cet établissement, que M. Lemasle devenait professeur au grand séminaire de Hué où il enseigna la philosophie et la théologie pendant dix ans.
Il était bien à sa place au grand séminaire parce qu’il aimait le professorat et parce que sa belle intelligence lui rendait le travail facile. Mais en 1911 il reçut son changement, par suite du trop grand nombre de postes sans titulaires, et fut chargé de la paroisse de Cô-Vuu avec ses annexes, dans la province du Quang-Tri, du district de Dinh-Cat, du couvent des Religieuses, du sanctuaire de Notre-Dame de Lavang et de son pèlerinage, et il n’avait qu’un seul vicaire pour le seconder. La charge était lourde : 15 paroisses, 17 prêtres et 11.031 chrétiens. Mais, si lourde qu’elle fût, elle n’était cependant pas au-dessus de ses forces, car depuis son arrivée en mission, il avait acquis une parfaite connaissance des us et coutumes du pays et de la pratique du ministère apostolique ; aussi pendant une dizaine d’années, en porta-t-il le poids et la responsabilité avec optimisme, jovialité et une activité peu commune, s’occupant avec dévouement de sa paroisse et du district qu’il visitait souvent.
Pendant son long séjour au Quang-Tri, il eut d’excellentes relations avec les Autorités françaises et annamites, traitant avec elles des affaires religieuses parfois bien délicates, mais avec beaucoup de tact et de droiture. Les chrétiens eux-mêmes s’étaient très attachés à lui, aussi regrettèrent-ils vivement de le voir quitter la paroisse de Cô-Vuu pour aller prendre la direction de celle de Saint-François-Xavier, à Hué. Cette paroisse était alors de fondation récente et composée surtout de fonctionnaires qui, après un séjour de quelques années rentraient en France ou changeaient de poste.
En dehors de cette population flottante qu’il fallait organiser en paroisse et former à une vie plus chrétienne, son pasteur devait s’occuper des hôpitaux français et indigènes, de l’Institut Sainte-Jeanne-d’Arc et des soldats français de la garnison ; le travail ne manquait donc pas. Le principal devoir qu’il eut à cœur de bien remplir fut d’instruire sérieusement ses paroissiens des vérités de la religion, en leur expliquant chaque dimanche la doctrine chrétienne avec méthode et clarté : aussi préparait-il soigneusement sermons et instructions sans trop se fier à sa facilité d’élocution, et catéchisait régulièrement les élèves de l’Institut Sainte-Jeanne-d’Arc et les enfants de la paroisse.
Les malades des hôpitaux recevaient sa visite deux fois par jour, et M. Lemasle se tenait toujours prêt à répondre au premier appel, ce qui arrivait souvent de jour et de nuit ; ministère parfois difficile et délicat, mais dont il s’acquittait avec zèle. Il eut la joie de baptiser beaucoup d’infidèles. Avec les soldats, il entretenait toujours de bonnes relations qui facilitaient son ministère. Un tel surmenage dans l’exercice de son apostolat devait fatalement ruiner sa santé. En effet, il dut aller passer quelques bons mois de repos à Dalat qui lui permirent ensuite de reprendre son ministère et de tenir bon pendant plusieurs années.
En 1930, M. Lemasle fut appelé à la charge de Provicaire de la Mission et de Vicaire délégué en remplacement de M. Chabanon devenu coadjuteur de Mgr Allys. Tout le clergé s’y attendait et le désignait pour cette fonction ; mais peu après, la maladie dont il était atteint depuis des années s’aggrava et nécessita son retour en France pour obtenir une guérison qu’il ne pouvait espérer en Annam.
Le 26 mars 1931, il écrivit en ces termes à son évêque : « Monseigneur, comme je vous l’avais fait prévoir, la Faculté tient à ce que j’aille me faire soigner en France. Mon état de santé m’oblige à ce sacrifice qui m’est très pénible surtout dans les circonstances actuelles. J’avais espéré pouvoir rester ici, mais les médecins me disent qu’un séjour en France est absolument nécessaire. » — Il partit donc et arriva à Marseille le 27 juin 1931 après une bonne traversée en compagnie de plusieurs confrères. Quelques jours plus tard, il retrouvait sa vieille maman, sa sœur et autres parents après une absence de trente-trois ans ! « Quelle joie pour tous ! Que d’émotions ! écrivait-il à Mgr Chabanon, ce qui ne m’empêche d’être près de vous par la pensée. « En décembre 1931, il subit à Paris une opération chirurgicale qui lui rendit une santé très satisfaisante.
Durant son séjour en France, M. Lemasle s’occupa beaucoup de la fondation du Collège de la Providence à Hué, cherchant une Congrégation religieuse qui voulût prendre en main cet établissement. Il frappa à plusieurs portes sans pouvoir réussir dans ses démarches : toutes les congrégations manquaient de personnel, c’était loin et difficile à cette époque de crise. Il se mit alors en quête de professeurs volontaires, et ne fut guère plus heureux.
Entre temps, il fit un voyage à Rome où il eut le bonheur d’être reçu en audience privée par Sa Sainteté Pie XI. Pendant vingt minutes, il mit le Souverain Pontife au courant de la situation du Vicariat apostolique de Hué, de son clergé et de ses œuvres. On le devine aisément, il garda de cette audience pontificale un inoubliable et réconfortant souvenir. Il s’entretint aussi avec S. Em. le Cardinal, préfet de la S.C. de la Propagande qui s’intéressa beaucoup à la fondation d’un collège d’enseignement secondaire à Hué.
Ayant retrouvé forces et santé suffisantes pour rentrer dans sa Mission, M. Lemasle écrivit à Mgr Chabanon : « A Paris, on ne mettra sans doute pas obstacle à mon départ au début de 1933, à condition que les médecins me permettent de partir à cette époque. » Dès le mois d’avril, il était de retour à Hué sans avoir trouvé une Congrégation religieuse qui pût accepter la charge du Collège de la Providence. La Mission ne recula pas pour autant devant les diffi-cultés ; elle prit elle-même la chose en main, et M. Lemasle fut nommé Supérieur de l’établissement. Dès le lendemain, secondé par quelques professeurs, le Supérieur y recevait les premiers élèves. On commença les cours par la sixième, et chaque année devait s’ajouter une classe. Les débuts furent encourageants d’abord par le grand nombre des entrées. Encourageants ensuite par le travail et le bon esprit des élèves ; aussi les années suivantes enregistrèrent-elles de beaux succès, dus à l’intelligente direction du Supérieur et au travail consciencieux des professeurs.
En avril 1936, Mgr Chabanon partait pour la France, complètement épuisé. Le Provicaire prit alors la direction de la Mission et à la mort de Son Excellence, le 4 juin, il en devint le Supérieur intérimaire. Le veuvage de l’Eglise de Hué ne fut heureusement pas long ; huit mois plus tard, en effet, le Saint-Siège nommait M. Lemasle évêque titulaire de Teuchira et Vicaire apostolique de Hué. Dans la Mission personne n’en fut surpris. Prêtres et chrétiens s’en réjouirent, et adressèrent à l’élu du Seigneur, leurs félicitations et leurs souhaits de long et fécond apostolat. Des louanges lui arrivèrent aussi nombreuses de partout, surtout de la Normandie, non seulement de sa famille et de sa bonne maman, qui fut heureuse d’apprendre la bonne nouvelle, mais encore de Leurs Excellences Nosseigneurs les Evêques et Vicaires apostoliques, anciens élèves de l’Abbaye-Blanche, des prêtres de son cours, de ses anciens condisciples et de beaucoup d’autres. La Semaine Religieuse de Coutances, annonçant le choix par le Saint-Père de M. Lemasle comme Vicaire apostolique de la Mission de Hué, écrivait : « L’Eglise de Coutances est heureuse d’enrichir encore d’un nom le liste glorieuse de ses prêtres promus eux honneurs de l’épiscopat. » En Normandie, on se réjouissait et on souhaitait de revoir un jour Mgr Lemasle en France ; malheureusement ce pieux désir ne devait pas se réaliser.
Bien que cette nouvelle charge fut pour lui la plus noble et la plus élevée, elle n’en demeura pas moins très laborieuse. Mgr Lemasle avait l’avantage de bien connaître la Mission : missionnaires, clergé, communautés et chrétientés, et d’être au courant de l’administration du Vicariat de Hué qu’il dirigeait déjà depuis un an. Malgré cela, il s’aperçut bientôt qu’il avait accepté un lourd fardeau, mais il était décidé à le porter avec courage et bonne humeur. Son activité pastorale s’exerça dès lors par une direction vigilante et ferme du Vicariat, par une sollicitude particulière pour le clergé. Il profitait des retraites annuelles pour donner à ses prêtres des conseils pratiques et les directives, qu’il jugeait nécessaires pour une bonne et uniforme administration des paroisses. Les séminaires recevaient fréquemment sa visite et il ne manquait jamais de présider aux examens des grands séminaristes et de les interroger.
Son Excellence s’intéressa aussi beaucoup aux communautés religieuses et aux écoles qu’il favorisa de tout son pouvoir pour l’établissement de nombreuses écoles dans les chrétientés. Il voulait que les maîtres fussent bien choisis et instruits. Le concours des très dévouées religieuses indigènes lui permit d’en établir un certain nombre dans les nouvelles chrétientés. Son grand désir était d’en installer dans tous les postes de la Mission, et aussi dans les centres païens ; mais leur nombre était insuffisant et les ressources nécessaires faisaient défaut. Aussi favorisa-t-il la fondation de « l’Association Sainte-Marie » pour accentuer l’instruction des enfants et des jeunes gens. Tout allait pour le mieux dans les trois provinces de la Mission, lorsque les vingt-trois écoles déjà en progrès furent complètement ruinées par les Viêtminh. L’établissement de l’Action catholique dans son Vicariat fut également l’objet de tous les soins du Vicaire apostolique et si les malheurs des temps : guerre et Viêtminh l’empêchèrent d’obtenir les résultats qu’il était en droit d’espérer ; il ne s’efforça pas moins d’entrer pleinement dans les vues du Saint-Siège. Les tournées pastorales, qui duraient une quarantaine de jours chaque année étaient fixées à l’avance, tout était prévu et parfaitement réglé. Mgr Lemasle passait plusieurs jours dans les stations missionnaires selon leur importance, afin de faire passer l’examen aux confirmands. Il interrogeait lui-même enfants et néophytes, et les prêtres qui l’assistaient leur posaient ensuite quelques questions en sa présence. Il estimait ces examens nécessaires pour obliger les confirmands à apprendre la doctrine chrétienne et pour se rendre compte par lui-même de leur instruction. Ces tournées pastorales étaient parfois très pénibles pour Son Excellence. Plusieurs fois Monseigneur indisposé par la chaleur étouffante, par le surmenage et le mauvais état des chemins qui l’obligeait quelquefois à aller pieds nus et à traverser dans l’eau les coupures de diguettes. Pénibles aussi à cause du manque de confort. Malgré son grand âge il ne s’en plaignait pas, et si on s’en excusait devant lui, il répondait simplement : « Ça va bien, j’y suis habitué ! » Sa dernière visite pastorale faillit être tragique. Elle fut interrompue par le Coup d’Etat japonais du 9 mars 1945. Monseigneur qui était alors dans la province de Quang-Binh, entendit au loin des détonations sans se douter de ce qui se passait. Les cérémonies du matin à Binh-Thôn terminées, Son Excellence partait pour Tam-Toâ, près de Dong-Hoi, où dès son arrivée, elle fut renseignée sur la gravité de la situation. La nuit fut calme, mais le lendemain matin immédiatement après la messe, Mgr Lemasle dut descendre précipitamment en barque et fuir devant les Japonais qui arrêtaient les Européens et étaient à la poursuite de l’évêque. La barque s’éloigna au plus vite, et pendant deux jours, Monseigneur se cacha dans les chrétientés qui, finalement lui procurèrent un pousse-pousse pour aller au petit séminaire de An-Ninh. Il partit vers huit heures du soir avec le prêtre qui l’accompagnait, voyagea toute la nuit sans être inquiété et arriva de grand matin à An-Ninh. Deux jours après une barque vint l’y prendre pour le conduire à Hué, où il resta en résidence forcée jusqu’à son départ pour Saigon, le 4 août 1946.
Les premiers mois furent passables ; on ne pouvait sortir de la zone délimitée, mais avec un laissez-passer accordé par l’autorité japonaise, Monseigneur put aller plusieurs fois au grand séminaire et dans quelques communautés recevoir ses prêtres. Lorsque les Viêtminh eurent pris le pouvoir, ce fut tout différent. Il lui était strictement défendu d’avoir des domestiques indigènes et de parler avec les Annamites.
Voyant qu’il ne pouvait plus administrer son Vicariat, Monseigneur Lemasle demanda au chef viêtminh de la province un permis de circulation qui lui fut accordé, puis retiré trois heures après.
Ne pouvant donc plus sortir de la zone de concentration, ni avoir aucune relation avec son clergé, il chargea alors un prêtre annamite des relations avec le Viêtminh et des affaires courantes de la Mission. Pour celles de quelque importance, le prêtre obtint d’aller voir le Vicaire apostolique pour approbation ou décision nécessaire. Une vingtaine de missionnaires de la Société des Missions-Étrangères étaient concentrés à Hué avec Mgr Lemasle, quand le 24 novembre 1945, Mgr Piquet arriva de Quinhon avec dix de ses missionnaires envoyés en concentration par les Viêtminh. La vie commune n’était pas triste, on se consolait mutuellement. Malheureusement le régime n’était pas substantiel, Mgr Lemasle, déjà fatigué ne put le supporter et tomba malade en juin 1946. Le médecin le soigna avec beaucoup de dévouement, mais n’obtint qu’une amélioration passagère. Dans l’impossibilité de lui procurer les médicaments nécessaires, il fut décidé que Monseigneur irait se soigner à Saigon, où un changement de milieu et de climat pourrait petit-être lui rendre la santé. Il fut entouré de tous les soins possibles à la clinique Saint-Paul, mais la faiblesse augmentant insensiblement, on reconnut dès lors qu’il n’y avait plus aucun espoir de guérison. Mgr Lemasle prévenu de la gravité de son état de santé se prépara pieusement au grand passage, et le 26 septembre à huit heures du soir, sans souffrance et avec toute sa lucidité d’esprit, il rendit paisi¬blement son âme à Dieu.
Les obsèques présidées par Monseigneur le Vicaire apostolique de Saigon, furent très simples. La dépouille mortelle de Mgr Lemasle fut inhumée dans le cimetière des missionnaires près du tombeau du grand évêque d’Adran. C’est là que notre très regretté Père en Dieu attend en paix la résurrection glorieuse.
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Références
[2356] LEMASLE François (1874-1946)
Références bibliographiques
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