Léon JUGE1877 - 1911
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2494
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Laos
- Région missionnaire :
- 1900 - 1911
Biographie
[2494]. JUGE, Léon-Louis, vit le jour le 24 novembre 1877 à Auberives-en-Royans (Isère). Il étudia au petit séminaire de l’Argentière (Rhône), et appartint au diocèse de Lyon. Il se présenta laïque, le 23 septembre 1895, au Séminaire des M.-E. L’onction sacerdotale lui fut donnée le 24 juin 1900, et le 25 juillet suivant, il partit pour le Laos qui avait été érigé en vicariat apostolique le 4 mai 1899, par le bref In principis Apostolorum (Analecta Ecclesiæ, 1900, viii, p. 396). Après s’être familiarisé avec la langue à Nong-seng, il acheva sa formation de missionnaire dans le district de Bassac, où il releva la chrétienté de Tha-tëng. Mgr Cuaz lui confia ensuite le poste de Ban-uet où il éleva un presbytère.
Après un court séjour à Sieng-vang, il alla diriger l’importante chrétienté de Done-dône. Il y triompha des difficultés que suscitent les différentes races réunies en ce lieu, et devint bientôt assez influent pour être choisi par les chrétiens et les païens comme arbitre dans leurs conflits. Il répara l’église de sa résidence, rendit l’école prospère, et construisit une chapelle dans un des villages voisins. Malade à la suite d’une expédition dans les montagnes, il mourut quelques semaines plus tard, le 16 septembre 1911, à Nong-seng où il fut inhumé.
Nécrologie
M. JUGE
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU LAOS
Né le 24 novembre 1877
Parti le 25 juillet 1900
Mort le 16 septembre 1911
Le 17 septembre dernier, un télégramme annonçait au Séminaire des Missions-Etrangères la mort inattendue de M. Juge. Il était enlevé à l’affection de ses Confrères, au moment où il donnait les espérances les mieux fondées d’une carrière longue et fructueuse. « Que les jugements de Dieu sont incompréhensibles ! écrivait, le jour même du décès, M. Prodhomme, provicaire du Laos. Plus que jamais nous avons besoin d’ouvriers pour travailler le champ du Seigneur : et sa Providence nous impose le plus douloureux des sacrifices, en appelant à la récompense un missionnaire jeune, fort, intelligent, zélé, plein d’avenir. La perte est bien grande pour notre Mission. »
Louis-Léon Juge naquit à Auberive-en-Royans, diocèse de Grenoble (Isère), le 24 novembre 1877, au sein d’une pieuse famille qui a donné un autre prêtre à l’Eglise.
Il fit ses études classiques au Petit Séminaire de L’Argentière où il se distingua parmi ses condisciples par son intelligence vive et pénétrante, un caractère enjoué, un tempérament énergique et généreux. Il conquit sans effort l’amitié de tous ; il mérita tout spécialement l’estime de ses maîtres, avec lesquels il entretint longtemps une correspondance suivie.
En 1895, après sa rhétorique, il entrait au Séminaire des Missions-Etrangères, où le portaient depuis son plus jeune âge toutes ses aspirations. Il y passa quatre années et fit de solides études, interrompues, il est vrai, par les obligations du service militaire. De son séjour à Bièvres et à la rue du Bac, il garda toujours le plus doux et le plus agréable souvenir. Tel il avait été à L’Argentière, tel il se montra aspirant-missionnaire gai, plein de vie et d’entrain, de nature exubérante. Tout en restant fidèle à ses devoirs, il trouva le temps de relire ses auteurs littéraires dont il ne voulut jamais se séparer, même en mission.
Le 24 juin 1900, il reçut la prêtrise et fut destiné le même jour à la nouvelle Mission du Laos. Il était au comble de ses vœux ; car il avait rêvé à une vie très active et il était assuré de la trouver telle, dans le champ que la divine Providence l’appelait à cultiver.
Au mois d’août suivant, il arrivait à Nong Sëng après un long et pénible voyage dont il ressentit quelque temps les fatigues. Comme tout jeune missionnaire, il se mit avec ardeur à l’étude de la langue, pour laquelle il avait une grande facilité.
A l’époque de la retraite annuelle, en novembre de la même année, Mgr Cuaz le nommait vicaire de M. Couasnon, chargé du district de Bassac. C’est là que notre Confrère fit ses premières armes et s’exerça, pendant près de quatre ans, aux travaux du saint ministère. Il se donna tout entier à l’étude du laotien : il réussit à le parler avec une rare perfection et fut considéré à bon droit comme l’un de ceux qui en possédaient le mieux les nuances. Nous ne devons pas omettre de dire que durant son séjour à Bassac, grâce à son zèle, la petite chrétienté de Thà-Tëng se retrempa dans la foi et connut des jours de prospérité.
Mgr Cuaz lui confia ensuite le poste de Bàn Uet, dans la région d’Oubon. Il ne fit guère qu’y passer le temps nécessaire pour construire un nouveau presbytère, qui est fort convenable pour cette chrétienté. Ainsi qu’il arrive souvent en mission, le presbytère achevé, il dut l’abandonner. Il fut choisi, cette fois, pour aller prêter main-forte, à Sieng Vang, à l’un des vétérans de la Mission, M. Xavier Guégo dont l’âge et les travaux avaient affaibli la santé.
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A Sieng Vang, comme à Bassac et à Bàn Uet, M. Juge conquit rapidement l’estime des chrétiens avec l’affection du bon M. Guégo qui n’eût certes pas demandé mieux que de le garder près de lui pour continuer son œuvre. Mais, ici encore, il ne devait faire qu’un court stage. Un poste important étant devenu vacant, il fut appelé à le diriger.
La chrétienté de Done Dône qui lui fut confiée, est située à quelques kilomètres au Nord de Nong Sëng, dans une île du Mékong ; elle ressort, au point de vue administratif, de Pakhinbun, chef-lieu de la Province du Cammon.
Cette station est une des premières fondées dans la Mission du Laos. Sa population, composée de chrétiens de deux races différentes, compte environ six cents âmes, dont l’administration offre des difficultés spéciales. La diversité de race est souvent une cause de conflit dans le village ; le moindre incident suffit à exciter des rivalités. Le Missionnaire, tout en usant de fermeté pour maintenir les droits de tous, doit employer plus ordinairement la douceur pour toucher et persuader ceux qu’aveugle la passion.
M. Juge réussit à merveille sur ce nouveau terrain. Par son zèle et sa charité, par son énergie et son dévouement sans borne, il s’imposa à l’affection de ses chrétiens et acquit sur eux, en fort peu de temps, une influence considérable. Sa prudente réserve dans les questions d’ordre administratif lui concilia du même coup l’estime et les sympathies de tous les fonctionnaires français de la Province.
L’instruction des enfants fut le principal objet de ses sollicitudes. Par ses soins, l’école du village devint florissante : les élèves étaient heureux sous la paternelle férule de leur pasteur et subissaient volontiers son influence. Chrétiens et païens, touchés de son dévouement, venaient lui soumettre leurs peines et leurs différends ; aux uns comme aux autres il prodiguait indistinctement ses conseils et ses secours. Sa charité, en effet, s’étendait à tous : n’allait-il pas jusqu’à entreprendre, à la demande du Commissaire de la Province, des tournées fatigantes dans les villages païens, auxquels il distribuait le vaccin qui devait les préserver d’une épidémie trop fréquente dans ces régions. C’était, pour lui, l’occasion d’ouvrir les portes du Ciel à quelques âmes.
Au milieu des occupations de son ministère, le cher Missionnaire trouva le temps et les ressources nécessaires pour réparer l’église de Done Dône, et pour élever une solide et coquette chapelle dans un des petits villages chrétiens dont il avait la charge. Sa joie était de se dépenser et de donner sans compter sa peine, son argent et ses forces.
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« M. juge était un aimable et charmant Confrère, écrit un de ses amis : nous portions parfois envie à sa franche gaieté et à sa bonne humeur. Chaque semaine, il faisait une courte apparition à Nong Sëng, et son séjour nous procurait le plaisir de passer quelques heures délicieuses. Quand une petite fête réunissait les Missionnaires voisins, il aimait à nous donner à la fin du repas la surprise de quelque poésie de circonstance, dédiée tantôt aux vétérans de la Mission, tantôt à un nouveau venu. C’était toujours délicat, charitable et bien dit : il aimait d’ailleurs la littérature, et, en plus de la richesse de ses souvenirs, il possédait une élocution facile. La poésie lui était assez familière ; le peu qu’il a confié au papier montre assez que son talent n’eût demandé qu’à être cultivé pour donner des productions de réelle valeur. »
M. Juge vivait ainsi heureux au milieu de ses chrétiens, répandant partout la joie autour de lui, quand, au cours d’une expédition dans les montagnes, il contracta subitement les germes de la maladie qui l’a emporté en quelques jours.
Il crut d’abord à une attaque passagère de fièvre et ne se préoccupa guère du malaise qu’il éprouvait. Le dimanche 3 septembre, il arrivait à l’Evêché de Nong Sëng ; comme toujours, il nous apporta une exubérance de vie et de gaieté. Ne se croyant nullement en danger, il rentra le lendemain à Done Dône. Dès son arrivée, il consentit pourtant à se laisser soigner. Le mal était déjà trop avancé : les remèdes indiqués pour arrêter la fièvre ne donnèrent aucun résultat.
Averti de l’état inquiétant du malade, le Procureur de la Mission s’empressa de prendre des mesures pour le ramener à Nong Sëng, où il devait trouver des soins plus assidus. Malgré le dévouement de ses Confrères, malgré les maternelles attentions des bonnes Religieuses de Saint-Paul de Chartres, malgré les efforts du docteur de Vientiane, M. Juge succombait, le samedi matin 16 septembre, presque sans agonie. Il avait reçu la veille, avec une grande piété et une parfaite résignation, les derniers sacrements des mains de M. Prodhomme.
Le corps de notre regretté Confrère repose dans le petit cime¬tière de Nong Sëng, à côté des premiers Missionnaires qui ont ter¬miné leur vie au Laos.
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Références
[2494] JUGE Léon (1877-1911)
Notes bio-bibliographiques
C.R., 1906, p. 221¬ ; 1910, p. 252¬ ; 1911, p. 227.