François LABRUNIE1882 - 1920
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3126
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1912 - 1920 (Yibin [Suifu])
Biographie
[3126] LABRUNIE François, Joseph, est né le 29 janvier 1882 à Noaillac, au diocèse de Tulle (Corrèze). Il fait ses études secondaires au Petit Séminaire, après quoi il entre au Grand Séminaire de Tulle. Ordonné prêtre le 29 juin 1907, il est nommé vicaire à Lubersac : il y reste de 1907 à 1911. Après le feu vert de son évêque, il entre au Séminaire des Missions Étrangères, le 16 février 1911 et part pour le Kientchang le 17 avril 1912.
Au bout de quatre mois de langue, il est nommé curé de Hosi, à cinq heures de marche de Ningyuanfu. Il y remet tout en état : résidence, chapelle, et visite les chrétiens dispersés. En janvier 1915, il est nommé à Yentsin où il fait le même travail de renouvellement. Son désintéressement y fait des merveilles, même si les désillusions ne manquent pas. Mgr. de Guébriant le présentait comme un bon conseiller et ouvrier apostolique de premier ordre. Mgr. Bourgain en fait son Provicaire : il sera en même temps curé de Ningyuanfu, économe de la maison et du Petit Séminaire, directeur et administrateur d'un couvent de religieuses.
Une première maladie sera vite soignée, mais une rechute sera irrémédiable et le 4 août 1920, le Père Labrunie rendait son âme à Dieu. Il est enterré au cimetière catholique du Péchan.
Nécrologie
M. LABRUNIE
PROVICAIRE DU KIENTCHANG
M. LABRUNIE (François-Joseph), né à Noailhac (Tulle, Corrèze), le 29 janvier 1882. Prêtre le 29 juin 1907. Entré au Séminaire des Missions-Etrangères le 16 février 1911. Parti pour le Kientchang le 17 avril 1912. Provicaire en 1918. Mort à Ningyuanfou le 4 août 1920.
M. François Labrunie appartenait à une famille aisée et foncièrement chrétienne. De bonne heure, très dévot à la Sainte Vierge ; respectueux de l’autorité, surtout de l’autorité paternelle, il n’était tranquille qu’à l’église et à la maison. Ailleurs, fi de la contrainte ; il lui fallait le grand air, du mouvement, du bruit. Un vicaire de la paroisse sut discerner dans la piété de cet enfant des marques peu communes de vocation, et le dirigea vers le Séminaire.
Obtint-il dans les luttes scolaires quelques-unes de ces victoires dont le souvenir agréable résiste au temps ? Nous n’en savons rien. De parti pris il taisait ce qui eut pu donner de lui quelque idée avantageuse.
Au Petit Séminaire, on lisait les « Annales de la Propagation de la Foi » : les souffrances des ouvriers apostoliques à la conquête des âmes avaient fait sur lui comme sur tant d’autres enfants, une impression très forte mais vite évanouie. Au Grand Séminaire, des conférences données par des missionnaires de passage réveillèrent enfin le feu qui couvait sous la cendre. Il sera lui aussi missionnaire et.... jésuite. Hélas ! il comptait sans son directeur, homme d’une prudence achevée : « Il faut mûrir, lui dit-il, cette vocation-là. »
A la veille de la prêtrise, le directeur constate, à la vérité, que le jeune abbé garde entier son désir des missions ; mais est-il un seul bon prêtre qui n’ait eu, au moins une fois dans sa vie, l’impression d’être appelé à la vie apostolique ? Aussi envoie-il son dirigé à Mgr de Tulle qui, après un long entretien, remet à plus tard sa réponse. En attendant, dès le lendemain de l’ordination, arrive pour le futur « héraut de la bonne nouvelle » sa destination pour Lubersac avec le titre de second vicaire. C’était péremptoire.
Ah ! les beaux jours de Lubersac ! jours pleins de vie et d’exubérance ! Patronages, conférences, avec ou sans projections mais où ne maquaient jamais clairons ni tambours, chants sacrés et profanes exécutés à pleine voix dans les églises, dans les réunions, sur les routes.... comment aurait-on ignoré les œuvres du nouveau vicaire ? Grâce à son activité, la vie chrétienne se développa dans la petite ville. Mais ce n’était pas assez pour son zèle. L’idée des Missions le poursuivant toujours, M. Labrunie s’en alla faire, sans rien dire, une retraite chez les Jésuites ; et les bons Pères lui indiquèrent la rue du Bac.
Mgr l’évêque de Tulle accorda cette fois toutes les permissions nécessaires et M. Labrunie entra tout joyeux au Séminaire des Missions-Etrangères le 16 février 1911. Le 17 avril 1912 le Conseil des Directeurs l’envoyait au Kientchang en le signalant à Mgr de Guébriant comme un excellent sujet. Il se mit sans tarder à l’étude de la langue et ne négligea rien de ce qui pouvait l’initier à la vie apostolique.
Notre confrère n’avait guère plus de 4 mois de Chine lorsqu’il fut nommé curé de Hosi, petite ville à 5 heures de marche de Ningyuanfou. L’oratoire, bâti seulement depuis quelques années, avait beaucoup souffert de la révolte des Taiianghoui. La résidence sans titulaire depuis l’échauffourée, présentait le plus lamentable aspect ; il n’y avait plus ni portes ni fenêtres et les cloisons étaient brisées. Et, ce qui était pire, les chrétiens dispersés, de toutes parts, n’osaient plus revenir au ch¬ef-lieu. Mais, à peine arrivé, M. Labrunie change tout cela. La maison remise en état, il donne tous ses soins à la chapelle. Les murs du sanctuaire se couvrent de papiers-tentures, les carreaux de papiers-vitres aux couleurs variées ; il orne de fleurs abondantes les gradins de l’autel, il veille à ce que les linges sacrés soient toujours irréprochables ; partout règne la plus grande propreté. Ces résultats obtenus, il s’occupe du spirituel.
Tout d’abord il installe dans un tabernacle paré de soieries neuves celui qu’il appelait « son meilleur ami » ; puis il court à la recherche des brebis errantes et l’on ne saura jamais quels trésors de charité et de dévouement il dépensa alors. Bientôt les enfants remplissent son école de leur vacarme. Presque tous sont pauvres, leurs habits en témoignent ; quelques-uns portent des vêtements du missionnaire à peine modifié pour la circonstance. Aux grandes personnes, quelle que fut leur condition, il faisait le meilleur accueil. A tous et toujours il donnait : à celui-ci une aumône, à celui-là une promesse, à un troisième une bonne parole ; et chacun s’en allait content. Enfin il les réunit un beau jour et inaugure, au Kientchang, les processions du Saint Sacrement. Bref, aux sept ou huit chrétiens qu’il avait récupérés à son arrivée viennent s’ajouter des néophytes ; et leur nombre augmente si bien qu’à son départ, en janvier 1915, ils étaient plus de cent.
La même œuvre de renouvellement s’imposait à Yentsin, pays de salines à quatre jours au sud-ouest de Ningyuanfou. La population y étant flottante, les mœurs sont naturellement assez relâchées. Notre confrère ne s’effraya pas pour si peu. Déchargé de Hosi, il emporte dans son nouveau poste une belle statue de Notre Dame de Lourdes. « La bonne Mère m’aidera, dit-il ; si ça réussit, je l’y laisse. » Et Elle y est restée. A force de prières et de dévouements, le pays s’ouvre comme naguère Hosi, mais avec plus d’ampleur. Chrétiens, païens, riches et pauvres trouvent en lui l’homme qui ne vit que pour les autres : il leur prodigue son temps, sa peine et même — à la vive admiration ¬de tous — son argent, tout son argent. Ne voulait-il pas créer une œuvre de « fourneaux économiques », une de « logements ouvriers à bon marché », etc. ? Le désintéressement attire la confiance ; ces Chinois que l’on dit avares ou du moins très peu portés à la dépense lui ouvrent généreusement leur bourse…. Il y puise avec une liberté toute apostolique et ses fêtes y gagnent en splendeur, bien que la plus grosse part revienne encore aux miséreux.
Il ne faudrait cependant pas croire que, les premières difficultés vaincues, M. Labrunie vit se réaliser successivement tous ses désirs ; il eut, au contraire, à Yentsin, de grosses désillusions. Il s’en plaignait peu toutefois ; surtout il ne se décourageait jamais. Après un échec, il savait se replier et attendre un moment plus propice. Ses efforts restaient-ils vains ? Sans obstination, il se tournait ailleurs et entreprenait une tâche nouvelle avec le même entrain, la même confiance. Dans un pays où les routes côtoient à chaque instant des préci-pices, où les torrents suscitent de distance en distance des obstacles parfois infranchissables, souvent dangereux, où abondent les brigands chinois et lolos, il n’hésitait jamais à se mettre en route dès qu’on l’appelait. Toute occasion lui était bonne pour faire connaître le nom chrétien ; et si elle tardait trop à se présenter, il la créait. C’est ainsi qu’il visita sous le soleil ou la pluie, on ne sait combien de villages de son district. Il partait alors à grande allure « tambour battant », selon son expression et s’efforçait d’effectuer un maximum de besogne dans un minimum de temps. Ce qu’il ne disait pas, c’est qu’en ces randonnées il ne mangeait souvent que juste de quoi tromper sa faim, pourtant si bien aiguisée par la longueur du voyage et l’air vif des montagnes.
Aucune constitution, si robuste qu’on la suppose, n’eut résisté à un tel surmenage. Servum inclinant operationes assiduae, dit l’Ecriture. Des maux d’estomac et des accès de fièvre l’avertissaient de temps en temps que les forces humaines ont des limites ; mais tout à fait détaché à son propre sujet, il attribuait ses plus grandes fatigues à des causes passagères. A peine l’accès passé, il se remettait en campagne
Un homme de cette trempe devait attirer l’attention des supérieurs. Déjà Mgr de Guébriant aimait à le présenter comme un bon conseiller, un ouvrier apostolique de premier ordre. Dès que Mgr Bourgain eut reçu la consécration épiscopale, il appela M. Labrunie auprès de lui et en fit son Provicaire.
Mais, au Kientchang, les confrères sont trop peu nombreux et, tous étant pris par les districts, le Provicaire doit cumuler diverses charges, réparties d’ordinaire entre plusieurs. M. Labrunie fut donc à la fois curé du poste de Ningyuanfou, Procureur de la Mission, économe de la maison, du Petit Séminaire, etc., en attendant qu’il ajoutât à toutes ses attributions celles de directeur et d’administrateur du couvent qu’il devait fonder. Une telle tâche était si complexe, qu’il se demanda s’il pourrait y suffire. Néanmoins, il essaya de mener tout de front, en traitant les affaires importantes et les petits détails avec la même conscience et la même application. Nous ne disons pas : avec le même succès, car il savait moins bien aligner les chiffres que diriger une paroisse. Et cette partie de la besogne administrative lui causait une grande répugnance. Il l’appela « l’insupportable croix ». Néanmoins il y mettait toute l’application dont il était capable, nouvelle preuve, et non la moindre, de sa haute vertu.
Au milieu de tous ces soucis, il trouva le temps de réaliser à Ningyuanfou, son projet de couvent pour les religieuses indigènes. La nécessité s’en imposait ; il en obtint donc aisément, la permission et les confrère s’empressèrent de lui envoyer des sujets. Le règlement provisoire restait largement ouvert aux modifications dont l’expérience démontreraient les avantages. Malheureusement M. Labrunie n’eut pas de temps d’y mettre la dernière main. Quoi qu’il en soit, l’institution existe et progresse ; puisse-t-elle se développer encore et donner à la Mission tout ce qu’en attendait son fondateur.
Enfin comme on allait le décharger du poids le plus lourd de son fardeau, la Procure, le cher M. Labrunie tomba soudainement malade. On crut d’abord à une typhoïde, et les soins assidus de Monseigneur le remirent sur pied assez vite.
Hélas ! une rechute devait nous l’enlever en 5 jours. Bientôt, en effet, il n’y eut plus d’espoir de le sauver. Le cher malade demanda alors et reçut des mains de Mgr Bourgain les derniers sacrements, renouvela dans des sentiments admirables de foi l’entier sacrifice de sa vie, et, sans secousse, doucement, remit son âme au Maître qu’il avait si fidèlement servi.
Durant les deux jours que notre cher défunt resta exposé, séminaristes, vierges, chrétiens et chrétiennes prièrent à tour de rôle près du cercueil. Le 6 août, premier vendredi du mois, Monseigneur chanta un service solennel ; puis, en procession, le corps fut conduit au cimetière catholique du Pechan. Il y repose en paix maintenant ; et, selon sa promesse, il n’oubliera pas cette pauvre Mission du Kientchang, pour laquelle il s’est dévoué, on peut l’affirmer bien haut, jusqu’à la mort.
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Références
[3126] LABRUNIE François (1882-1920)
Références biographiques
AME 1912 p. 163. 1913 p. 52. 53. 206. 1919-20 p. 223. 528. CR 1912 p. 314. 1913 p. 129. 1914 p. 54. 55. 1916 p. 79. 1920 p. 29. 31. 152. 156-159 (notice) 1922 p. 58. 1928 p. 215. BME 1936 p. 320. 321. 323. 1938 p. 330.