Jean-Marie MAZÉ1897 - 1964
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 3272
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Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1925 - 1959 (Hung Hoa)
Biographie
[3272] Jean-Marie MAZE est né le 2 octobre 1897, à Henvic, près de Saint Pol de Léon, diocèse de Quimper, département du Finistère. Son père, quartier-maître dans la marine, est mortellement blessé en 1911, lors de l'explosion en rade de Toulon du cuirassé « Liberté ».
Jean-Marie est l'ainé de quatre garçons. Il fait ses études primaires dans son village natal, et les termine en 1910, avec son certificat d'études. Il demande à sa mère, devenue veuve, de lui permettre de continuer ses études. Il prend ses premières leçons de latin auprès du vicaire de sa paroisse, et en janvier 1912, il entre en sixième au Collège du Kreisker, à St. Pol de Léon. L'année suivante, il passe en quatrième, En troisième, il obtient le second prix d'excellence. En novembre 1914, la maladie l'oblige à rentrer chez lui; il étudie seul, tout en assurant les fonctions de secrétaire de mairie. Il se présente au baccalauréat à la session d'octobre 1915, il est reçu avec la mention "assez bien".
Mobilisé le 7 janvier 1916, il est envoyé dans les tranchées de l'Aisne en décembre 1916. Blessé le 16 avril 1917, il obtient sa première citation et ses galons de caporal. Un passage par St.Cyr, en juillet 1917, lui confère le grade d’aspirant en décembre 1917; versé au 72ème R.I., il combat en Champagne. Sur sa demande, en avril 1918, il intègre l'aviation de bombardement, où il est affecté à l'escadrille des "Cygnes" comme observateur mitrailleur. Le 28 août 1918, il ne doit son salut que grâce à l'intervention d'un avion de protection. Il termine la guerre avec deux nouvelles citations et la Croix de guerre. A Landau, en Allemagne, pendant quelques mois d'occupation, il prépare la seconde partie du baccalauréat, qu'il réussit avec mention "assez bien".
Démobilisé le 25 septembre 1919, il entre dans les chemins de fer; affecté à Conlie, dans la Sarthe, il y reste jusqu'en août 1920; après une retraite chez les jésuites de Brest, il prend la décision de s'orienter vers le grand séminaire de Quimper, où il entre en octobre 1920, pour deux ans.
Le 16 septembre 1922, il arrive acolyte au séminaire des MEP. Sous-diacre, le 25 mai 1924, diacre, le 20 décembre 1924, il est ordonné prêtre le 6 juin 1925 ,et reçoit sa destination pour le vicariat apostolique de Hung-Hoa qu'il part rejoindre le 14 septembre 1925.
Vietnam (1925- 1959)
Il s'embarque à Marseille le 18 septembre 1925.
Arrivé à Hung-Hoa, quelques jours avant la Toussaint 1925, et ayant reçu de Mgr. Ramond le nom viêtnamien de "Kim", il se met avec ardeur à l'étude de la langue viêtnamienne, avec l'aide d'un catéchiste; après son premier sermon en viêtnamien, le premier dimanche de mai 1926, il s'occupe des chrétientés nouvelles proches de Hung-Hoa. En septembre 1927, il devient aide-procureur de la Mission. En 1931, il a en charge une douzaine de chrétientés sur la rive gauche de la Rivière Noire, et une dizaine de groupes chrétiens sur les deux rives du Fleuve Rouge, en amont et en aval de Hung-Hoa. Le P.Mazé est souvent leur porte-parole pour régler leurs affaires avec les autorités. En 1934, avec l'aide d'un vicaire viêtnamien, il a en charge le district de Hung-Hoa.
Mgr. Ramond choisit très souvent le P. Mazé comme compagnon lors de ses visites pastorales et de son repos estival à Chapa. A plusieurs reprises, il le délègue pour être son représentant auprès des autorités civiles. En février 1932, il le charge de guider Mgr.de Guébriant à travers la Mission, et de l'accompagner jusqu'à Yunnanfu. En 1935, il espère faire de lui son coadjuteur.
Après un voyage à Shanghai en juin 1936,où il va voir ses frères et cousins, le P. Mazé s'embarque à Hai-Phong pour la France le 27 juillet 1936, pour prendre son congé régulier. Le Supérieur Général des MEP lui demande de faire connaitre les missions dans le diocèse de Quimper. En août 1937, pressenti comme professeur à Beaupréau, Mgr. Ramond exige son retour. Le 3 décembre 1937, le P.Mazé rentre dans sa mission et retrouve ses chrétiens de la région de Hung-Hoa.
A la fin du mois d'août 1938, Mgr. Vandaele accepte de détacher pour un an le P. Mazé comme professeur de latin-grec en classe de première à l'Institut de la Providence à Hué, qui présente ses premiers élèves au baccalauréat. A la mi-août 1939, succédant au P.Quioc, il prend la direction du petit séminaire de Hà-Tach. Le 21 novembre 1943, Mgr. Vandaele meurt à Son-Tây; le 15 août 1944, le délégué apostolique accepte la démission du P.Hue, provicaire, de sa charge d'administrateur apostolique qu'il confie au P.Mazé.
Le 11 janvier 1945, M. Mazé est nommé évêque titulaire de Sauatra, et vicaire apostolique de Hung-Hoa. Malgré les évènements, il continue à diriger le petit séminaire; après le 15 août 1945, il est arrêté, libéré, puis interné à la cure de Phu-Tho, où le P.Quioc est bien malade. Le 28 janvier 1946, après trois jours d'angoisse, en compagnie des P.Guidon et Fleury, il arrive, de nuit, à l'évêché de Hanoï, où il retrouve tous les missionnaires de Hung-Hoà, à l'exception du P.Lanter.
Mgr. Mazé reçoit la consécration épiscopale dans la cathédrale de Hanoï, le 19 mars 1946. Les évènements l'obligent à se fixer à Hanoï. Pendant des mois, il demeure sans nouvelles de sa mission. Une opération militaire à la mi-mai 1947 détruit l'évêché de Hung-Hoà et tous les bâtiments annexes, sauf la cathédrale. Malgré les difficultés, il visite ses communautés chrétiennes. En 1948, la mission de Hung-Hoa est divisée en deux parties: la Haute Région où quelques missionnaires peuvent travailler, et la région du delta aux mains du "Viêtminh". Les grands séminaristes sont accueillis à Phat-Diêm, le petit séminaire continue à fonctionner à Hà-Tach, mais il est bombardé le 20 janvier 1948.
Le 14 mai 1948, Mgr. Mazé arrive à Paris et après un séjour de six mois rentre à Hanoï où il retrouve sa mission dans la souffrance. De là, par avion, il visite les postes où travaillent les missionnaires, et les importantes paroisses du delta. La mission de Hanoï profite de son activité apostolique. En janvier 1950, il entreprend une série de voyages, partout où cela lui est possible de se rendre, afin d'apporter encouragements et réconfort.
Le 19 mai 1950, Mgr Mazé part pour la France où il participe à l'Assemblée Générale des MEP. Le 9 décembre 1950, il s'envole pour Hanoï où il atterrit le 14 décembre 1950. En novembre 1950, Lao-Kay est évacuée, Hung-Hoa abandonnée; c’est le repli sur Son-Tây, qui devient le centre de la mission. C'est dans cette ville que le 21 décembre 1950, Mgr. Mazé s'installe et officie pour Noël. En 1951, se déplaçant souvent en avion, parfois en jeep ou à bicyclette, il visite les postes, les paroisses, les centres de réfugiés où il lui est possible d’aller. En novembre 1951, il assiste à Hanoï à l'Assemblée plénière des Ordinaires du Viêtnam et du Cambodge présidée par Mgr. Dooley, délégué apostolique et au sacre de ce dernier le 21 décembre 1951 à Hanoï.
En 1952, Il envoie ses jeunes missionnaires dans la Haute Région; il continue ses visites de paroisses, et installe son petit séminaire à Tông; alors que l'insécurité gagne le pays Thai, la province de Son-Tây vit en paix. En 1954, Mgr. Mazé visite des centres de réfugiés, bénit trois églises, fait le projet d'agrandir son petit séminaire ; cependant, lors de la bataille de Diên-Bien-Phu les P.Guidon et Guerry sont emmenés en captivité. Les accords de Genève sont signés, le Viêtnam est partagé en deux zones. Le P.Yves Tygréat est tué par une mine le 22 juillet 1954. L'exode des réfugiés marquent la fin d'une époque. Malgré un avenir incertain, Mgr. Mazé et plusieurs missionnaires restent à leur poste.
Durant les derniers mois de 1954, il est encore possible d'aller à Hanoï où se tient en janvier suivant, la retraite annuelle des missionnaires. A Son-Tây, la vie religieuse ne subit pas encore d'entraves, le petit séminaire reprend ses cours. Cependant Mgr. Mazé n'obtient pas de permis de circuler pour visiter les districts de sa mission. En mars 1955, il peut se rendre à Hanoï, à la délégation apostolique pour la retraite des évêques du Tonkin, présidée par Mgr. Dooley en même temps que se tient dans la ville, le congrès des catholiques patriotes. Quelques temps plus tard, tout le clergé de Son-Tây, évêque compris est convoqué pour entendre, pendant quinze jours, les accusations publiques portées contre les missionnaires et les prêtres viêtnamiens.
Au printemps de 1956, le gouvernement impose la réforme agraire. Presque tous les prêtres de la province de Son-Tây subissent des outrages publics. En 1957, craignant une révolte générale, le régime se libéralise; Mgr. Mazé organise des retraites et établit un bilan. Les vieilles chrétientés ont bien tenu, mais d'autres ont presque entièrement sombré. Malgré ses demandes, Mgr. Mazé n'obtient jamais l'autorisation de visiter sa mission; les missionnaires sont ramenés à l'évêché. Le 7 décembre 1959, Mgr. Mazé est invité à se présenter à la Sûreté vers 16 heures. Le lendemain à 7 heures du matin, il quitte Son-Tây, passe quelques jours à Hanoï et arrive à Paris la veille de Noël 1959.
Retour en France : Vichy, Brest (1959-1964)
En mars 1960, il est reçu en audience par le Pape Jean XXIII, participe à l'Assemblée Générale de 1960, et préside de nombreuses manifestations religieuses. A la fin de l'année il apprend la nomination épiscopale de Mgr.Quang, qu'il avait choisi comme supérieur de la Mission. En 1961, il accepte l'aumônerie de l'hôpital civil de Vichy. En août 1962, il devient aumônier du carmel de Brest, et participe aux deux sessions du Concile de Vatican II.
A la fin de janvier 1964, il est hospitalisé à l'hôpital Morvan de Brest pour un infarctus du myocarde. Le dimanche 2 février 1964, à 5 heures, une crise très forte survient, et vers six heures, il rend son âme à Dieu. Ses obsèques présidées par Mgr Fauvel, évêque de Quimper, ont lieu au Carmel. Le P.Quéguiner, Supérieur Général des MEP lut le récit de sa vie.
Mgr Mazé est inhumé dans un caveau, dans l’église de Henvic.
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Mgr. Mazé reçut de nombreuses décorations tout au long de sa vie.
En 1910, il reçoit le d'honneur de la Société Centrale de Sauvetage, pour avoir sauvé de la noyade un camarade, le 19 septembre 1910.
-En 1911, le Ministère de la Marine lui décerne un Témoignage de satisfaction, pour s'être porté à l'aide d'un canot, au secours d'un enfant qui se noyait dans la rivière.
-En 1918, il sauve un soldat qui se noie; en 1939, il arrache à la mer deux élèves qui ont perdu pied.
-En 1932, le 10 mars, sur proposition du Ministre de la Défense nationale, il est nommé dans l'ordre de la Légion d'Honneur, au titre des Réserves, au grade de Chevalier, au titre de services exceptionnels: très beaux services de guerre,1 blessure, 3 citations.
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-Croix de guerre à trois étoiles.
-En 1950, par décret du14 février du Ministre de la France d'Outre-Mer, Mgr. Mazé est promu officier de la Légion d'Honneur.
-En 1962, à la date du 1 mai, il est élevé au grade de Commandeur de la Légion d'Honneur. Il est décoré par Jean Sainteny.
Nécrologie
IN MEMORIAM Juillet 1964
MONSEIGNEUR JEAN-MARIE MAZÉ
1897 - 1964
évêque titulaire de Sauatra
vicaire apostolique de Hung-Hoa (Tonkin)
Enfance et adolescence
Jean-Marie MAZÉ est né le 2 octobre 1897 dans la commune de Henvic, près de Saint-Pol de Léon, au fond d’une anse de la rivière La Penzé, à l’endroit appelé « Pont ar vilin goz » (pont du vieux moulin). Il n’est pas étonnant dans ces conditions qu’il aime la mer et qu’il devienne un habile nageur. En 1907 et en 1908, par deux fois, il arrache à la rivière un camarade de son âge qui s’est aventuré trop loin. En 1910, il s’en va chercher deux frères qui coulent à pic dans La Penzé et les sort de leur fâcheuse position. En récompense, il reçoit la médaille de sauvetage ; et cette médaille, il aura encore l’occasion de l’honorer en 1918, en se portant au secours d’un soldat qui se noie, et en 1939 en arrachant à la mer deux de ses élèves qui ont perdu pied.
A l’école, il se montre très intelligent ; il en sort en 1910 avec son certificat d’études. Fils d’un quartier-maître de la marine, aîné de quatre garçons, lui qui aune tant la mer, il ne peut avoir qu’une idée en tête : entrer à l’école des mousses de Brest. Mais en 1911, c’est le malheur qui entre dans la maison : son père est mortellement blessé lors de l’explosion, en rade de Toulon, du cuirassé « Liberté » dont la cale était bourrée d’explosifs. Sa mère ne peut pas suffire à élever ses quatre enfants avec sa seule pension de veuve. Heureusement la catastrophe a ému la France entière ; et le gouvernement fait parvenir des dons importants aux familles des victimes. La mère de Jean-Marie reçoit une somme assez considérable pour l’époque. En présence de cette situation, Jean-Maire lui demande de l’envoyer au collège, puisqu’elle a désormais le moyen de lui payer des études ; il pense qu’il est de son devoir d’en profiter pour parfaire son instruction. Le vicaire lui donne ses premières leçons de latin, et en janvier 1912 le garçon entre en sixième au collège du Kreisker, à Saint-Pol de Léon ; c’est l’un des plus grands et des plus âgés de son cours. Mais l’année suivante, il passe en quatrième ; un peu désorienté au début, il finit par rejoindre les premiers pendant le second trimestre. En troisième, il obtient le deuxième prix d’excellence. La classe de seconde s’annonce bien, lorsque, fin novembre 1914, une entérite devenue chronique l’obligé à rentrer chez lui ; il continue à étudier seul, demandant à son professeur de corriger ses compositions ; en même temps il se charge du secrétariat de la mairie de Henvic, que le titulaire, malade, a dû quitter. En juin 1915, un professeur du collège l’encourage à se présenter à la première partie du baccalauréat, à la session d’octobre, à condition de suivre les cours de vacances que le supérieur, M. l’abbé FLOC’H, donne aux élèves qui ont échoué en juillet. Ce dernier trouve que la demande de Jean-Marie est prétentieuse : « Vous n’avez fait que commencer la seconde, et vous voulez vous présenter au baccalauréat ! En tout cas, le collège ne vous présentera pas et ne vous donnera pas de livret scolaire ». L’élève réussit néanmoins à obtenir une mention « assez bien », et entre en philosophie.
Mais le 7 janvier 1916, il est appelé sous les drapeaux. Il passe les six premiers mois de service à St-Brieuc et à Quintin, arrive à l’arrière du front en septembre, et dans les tranchées de l’Aisne en décembre. Le 16 avril 1917, à l’offensive « Nivelle », il est blessé à la jambe, obtient sa première citation et les galons de caporal. En juillet il est dirigé sur St-Cyr pour suivre les cours d’aspirant. Il en sort en décembre, est versé au 72e R. I., combat en Champagne et passe en avril 1918, sur sa demande, dans l’aviation de bombardement de jour. Après deux mois à peine d’entraînement, il est affecté à l’escadrille des « Cygnes » comme observateur-mitrailleur. Le 28 août 1918, son avion, voyageant en solitaire, est soudain entouré de trois appareils ennemis. Il les laisse approcher pour mieux les « descendre » ; mais au moment voulu ses mitrailleuses s’enrayent, et son avion devient la proie facile sur laquelle s’acharnent les trois adversaires ; finalement il ne doit son salut qu’à l’intervention d’un avion de protection. De retour à la base, les aviateurs se rendent compte que la carlingue est criblée de trous ; le gouvernail, scié par les balles, reste dans les mains du mécanicien ; jamais ce « Bréguet » de la dernière chance ne remontera dans les cieux. Mais la guerre est bientôt finie et Jean-Marie la termine avec deux nouvelles citations et la croix de guerre. Après quelques mois d’occupation en Allemagne, à Landau, dans le Palatinat, pendant lesquels il prépare la deuxième partie du baccalauréat, qu’il réussit avec la mention « assez bien », il est démobilisé le 25 septembre 1919.
Que va-t-il devenir ? Pendant la guerre, il n’a pas voulu faire de projet d’avenir ; maintenant il faut se décider : au service de Dieu, ou dans le monde ? Indécis, il entre dans les chemins de fer et est affecté à Conlie, dans la Sarthe ; en même temps il est attiré par une amie, sœur d’un camarade d’aviation. Mais en août 1920, il fait une retraite chez les Jésuites de Brest. « J’ai le sentiment qu’après le coup de l’avion, tout ce que je vis c’est du surplus ; et ce surplus, je le dois au Bon Dieu. Alors j’ai pensé que le meilleur moyen de m’acquitter de ma dette, c’est encore de mettre à son service ce surplus qu’il a bien voulu m’accorder ». Alors il rompt la correspondance, quitte les chemins de fer, et entre en octobre au grand séminaire de Quimper.
Un an plus tard, voulant être plus généreux, il demande à aller aux unissions lointaines. Sur le conseil de son directeur, il attend encore un an et, pendant l’été de 1922, il fait sa demande à Mgr de Guébriant, supérieur général des Missions Etrangères de Paris, alors dans sa famille, à Saint-Pol de Léon.
Il passe un an à Bièvres, où il est arrivé acolyte, puis deux ans à la rue du Bac. Le 6 juin 1925, il est ordonné prêtre et affecté à la Mission de Hung-Hoa, au Tonkin, vers laquelle il s’embarque à Marseille le 12 septembre 1925.
Le missionnaire
LA MISSION DE HUNG-HOA
La Mission de Hung-Hoa forme la partie occidentale du Tonkin ; c’est un immense territoire de 60.000 km2, qui s’ouvre en éventail vers l’Ouest à partir de Son-Tay, à une quarantaine de kilomètres de Hanoi. Les trois nervures maîtresses de cet éventail sont le Fleuve Rouge, doublé du chemin de fer de Yunnan, puis son affluent de gauche, la Rivière Claire, et son affluent de droite, la Rivière Noire. A partir de l’endroit où ces trois cours d’eau se rejoignent, c’est le régime du Delta tonkinois, avec ses belles rizières et sa population dense ; sur les 1.200.000 habitants que compte la mission, cette région en possède les deux tiers. En remontant le Fleuve Rouge à partir de Son-Tay, nous trouvons d’abord Vietri au confluent du Fleuve et de la Rivière Claire, puis Hung-Hoa, siège du vicariat apostolique, un peu au-dessus de l’endroit où la Rivière Noire alimente le Fleuve, puis enfin Phu-Tho en haut d’une boucle du Fleuve Rouge. A partir de là c’est le Haut Tonkin qui s’élève à mesure que l’on avance vers l’Ouest, où nous ne trouvons plus de population vietnamienne que concentrée dans certains endroits privilégiés, comme Yen-Bay sur le Fleuve et Tuyên-Quang sur la Rivière Claire. Dans les hautes vallées il n’y a plus que les postes militaires, échelonnés le long de la frontière chinoise, Ha-giang sur la Rivière Claire, Laokay sur le Fleuve Rouge, Lai Châu et Son La dans le bassin de la Rivière Noire. Tout le reste du pays, et c’est une immensité, est clairsemé d’habitants, qui forment des peuplades primitives, différentes les unes des autres et par conséquent du peuple vietnamien, avec lequel elles ne frayent pas.
La Mission est encore relativement jeune en 1925, puisque Mgr RAMOND, qui la dirige, en est le premier vicaire apostolique. Le travail d’évangélisation s’est opéré jusqu’ici presque exclusivement auprès des Vietnamiens du Delta et de la Moyenne Région. Pour les postes militaires de la Haute Région, un missionnaire les visite une fois par an. Les tribus autochtones n’ont pas encore été contactées, sauf dans la région de Nghia Lô, près de Yen Bay.
L’ACTIVITÉ DU MISSIONNAIRE
Le P. MAZÉ arrive dans sa mission quelques jours avant la Toussaint 1925. Mgr RAMOND lui donne le nom vietnamien de KIM, ce qui signifie métal précieux, or, et un catéchiste qui lui enseignera la langue. Le jeune missionnaire s’y met avec ardeur, mais que d’efforts pour éviter les erreurs de tons qui changent le sens des mots ! Le premier dimanche de mai 1926, il débite son premier sermon, sur la Sainte Vierge, mot à mot. Il a déjà commencé à écouter les confessions depuis deux mois, des enfants d’abord, puis des adultes. En juin, c’est le second sermon, sur le Sacré-Cœur ; désormais il est lancé.
Entre temps, il doit sacrifier à la célébrité. A celui qu’on considère comme un héros « sur terre, sur mer et dans les airs », le vieux curé de Hanoi, le P. DRONET, consent à céder sa chaire pour qu’il prononce le panégyrique de sainte Jeanne d’Arc, en présence des autorités civiles et militaires de la capitale du Tonkin.
Il y a, à cette époque, sur la rive gauche de la Rivière Noire, à six kilomètres de Hung-Hoa, une dizaine de villages chrétiens dans un rayon de 3 à 4 km. Le P. VANDAELE, responsable de la région, lui en confie un peu l’administration. Le P. MAZÉ s’y rend d’abord tous les quinze jours, puis tous les dimanches, célébrer la messe dans l’une ou l’autre chapelle et donner son sermon. Bientôt il prend en mains la formation et l’instruction religieuse de ces chrétientés. Il ne ménage ni son temps ni ses forces, toujours en route sur son vélo de course ou sur sa moto rouge-sang. Après les troubles communistes de 1930, plusieurs villages païens des environs sont inquiétés et certains notables ont recours au P. MAZÉ dans leurs difficultés. Dieu sait alors toutes les courses qu’il fait, toute la correspondance qu’il entretient avec les autorités. Les résultats sont tangibles ; dans chacun de ces villages se forme bientôt un groupe de catéchumènes. Bientôt ses chrétientés atteignent la vingtaine et chacune à sa chapelle convenable. En 1931, il enregistre 93 baptêmes d’adultes ; en 1932, 464 ; avec ses huit catéchistes, il ne peut suffire à la tâche. En 1933, aidé de deux prêtres vietnamiens, il en baptise 187. En 1934, il est chargé du district et récolte une belle moisson de 365 baptêmes ; en 1935 il a la joie de compter 300 nouveaux chrétiens et 320 catéchumènes. Le ministère est harassant, mais enthousiasmant.
Ce n’est pas le seul travail du P. MAZÉ. Il est encore chargé d’accompagner Mgr RAMOND dans ses tournées de confirmation et lors du repos estival à Chapa. Il est le compagnon très cher de l’évêque ; et, quand, en 1935, celui-ci demande un coadjuteur à Rome, il espère bien que c’est le P. MAZÉ qui sera élu ; ce sera le P. VANDAELE. En 1932, le P. MAZÉ est encore désigné pour être le guide éclairé de Mgr de GUEBRIANT à travers la Mission, et il l’accompagne jusqu’au Yunnan.
Le 27 avril 1932, le lieutenant d’aviation Jean-Marie MAZÉ est promu au grade de chevalier dans l’ordre de la Légion d’Honneur : 4 campagnes, beaux services de guerre, 1 blessure, 3 citations.
Le 6 juin 1936, il s’embarque à Haiphong à destination de Shang Hai, où il va rendre visite à ses deux frères, membres de la police française de cette ville. Il en revient au début de juillet, mais à la fin de ce même mois, il part pour la France prendre son congé régulier. Il est à peine débarqué qu’il est invité un peu partout et ses premiers mois de congé sont bien remplis. Le T. R. P. ROBERT, supérieur général de la Société, le charge de faire connaître les Missions du Tonkin dans le diocèse de Quimper. En août 1937, on parle même de lui comme professeur au petit séminaire de Beau-préau ; mais son vieil évêque exige son retour immédiat. Aussi le 3 décembre 1937 notre missionnaire rentre-t-il à Hung-Hoa, plein de santé et de gaieté, après un séjour de 18 mois en France. Il retrouve avec joie ses chrétiens ; pendant son absence, ses vicaires ont baptisé 162 adultes et commencé l’instruction de plusieurs groupes de néophytes. La paroisse compte alors 31 chrétientés et 2.598 fidèles.
Le 15 juin 1938, il arrive au réfectoire, rayonnant, la cigarette aux lèvres. Il vient de gagner le commentaire français de la Somme de saint Thomas d’Aquin, que lui ont offert deux confrères, en 1928, à condition qu’il ne fume pas pendant dix ans. Malgré les occasions offertes, il a tenu bon. Mais désormais pipes et cigares, rien ne l’effraie ; on dirait même qu’il veut compenser son abstinence de 10 ans.
A la fin d’août 1938, Mgr VANDAELE, devenu vicaire apostolique de Hung Hoa, cède aux instances de Mgr LEMASLE, qui le supplie de lui prêter le P. MAZÉ, pendant 10 mois, comme professeur de latin-grec à l’institut de la Providence, qui vient de perdre deux professeurs des classes terminales, alors que la première va s’ouvrir pour la première fois en septembre. Le P. MAZÉ fait ainsi son noviciat de professeur ; c’est là aussi qu’il se souvient de ses prouesses de sauveteur breton ; il sauve de la noyade deux de ses élèves, deux frères, qui s’étaient aventurés trop loin en mer et avaient perdu pied.
Rentré à Hung-Hoa, il prend un congé d’un mois auprès de Mgr RAMOND, à Chapa. En août 1939, il est nommé supérieur du petit séminaire de Ha-Thach, près de Phu-Tho, à la place du vieux P. QUIOC, devenu trop indulgent. Il a 130 élèves ; il rétablit la discipline, rénove la liturgie et le chant grégorien. Il a pour collaborateur le P. GUIDON, qui ne tarde pas à être mobilisé. Lui-même fait une période de 3 semaines, en juillet 1940, comme lieutenant d’aviation. Il lui arrive, en 1941, d’accueillir des Bretons, hautes personnalités du Tonkin ; ses élèves ont érigé des arcs de triomphe ornés de maximes bretonnes et chantent, avec le plus pur accent du terroir, des chants bretons.
Bientôt les Japonais envahissent le Tonkin et puis toute l’Indochine, qui se trouve ainsi coupée de la France pendant cinq ans. La vie devient chaque jour plus pénible. Mgr VANDAELE meurt à Son-Tay le 21 novembre 1943, et Mgr RAMOND s’éteint à Chapa le 6 janvier 1944. Le 15 août de la même année, le P. HUE, provicaire, obtient de se retirer. Le P. MAZE est alors nommé administrateur du vicariat apostolique de Hung-Hoa.
L’évêque
TROUBLES ET RÉVOLUTIONS
Le 11 janvier 1945, le P. MAZE est nommé vicaire apostolique de Hung-Hoa. Les temps sont durs ; une terrible famine règne dans le pays. Pour comble de misère, le 9 mars 1945, les Japonais attaquent sans préavis les troupes françaises par tout le territoire de l’Indochine. Ils convoquent le nouveau vicaire apostolique et le P. GUIDON, et leur permettent de continuer à enseigner les petits séminaristes, en leur recommandant de ne pas sortir pour éviter tout accident.
Le 15 août 1945, le Japon capitule. Beaucoup croient alors que la France va pouvoir panser ses blessures de la guerre en Indochine. L’illusion est très courte. Les Japonais ont libéré tous les prisonniers politiques depuis le mois de mars 1945, et ceux-ci brandissent aussitôt le drapeau de l’indépendance. Le vicaire apostolique et le P. GUIDON sont arrêtés au petit séminaire, puis autorisés à revenir avec les élèves, puis, de nouveau, arrêtés, internés dans la cure de Phu-Tho où se trouvait le P. QUIOC, bien malade. En septembre l’armée chinoise envahit tout le nord Vietnam, laissant les partis se battre entre eux. Les missionnaires, concentrés à l’évêché de Hanoi, pressent Mgr MAZE et le P. GUIDON de rejoindre la capitale. Le 25 janvier 1946, un inspecteur de la sûreté vietminh, accompagné d’un prêtre vietnamien du Hung-Hoa, se présente à l’évêque ; il accepte de servir de guide pour gagner Hanoi. C’est un voyage bien risqué à travers un pays livré à l’anarchie. Le 28 janvier, après trois jours d’angoisse, le vicaire apostolique, le P. GUIDON et le P. FLEURY cueilli au passage à Hung-Hoa, pénètrent la nuit à l’évêché de Hanoi, où ils trouvent tous les missionnaires de Hung-Hoa, à l’exception du P. LANTER qui se trouve dans la haute région.
Mgr MAZE n’est pas encore sacré. La cérémonie est fixée au 19 mars. La veille, le général Leclerc fait son entrée à Hanoi, et il faut toute l’énergie du prélat pour ne pas terminer là sa retraite et se mêler à la foule délirante des Français.
L’année 1946 est pleine de soucis. A Fontainebleau, l’accord ne se fait pas entre la France et les Vietnamiens. Le parti vietminh, qui a réussi à évincer tous les autres, multiplie les provocations, les guet-apens, barricade les rues de la ville indigène, et réclame l’indépendance immédiate. Le 19 décembre 1946, à 20 heures, ils font sauter la centrale électrique et attaquent les troupes françaises, massacrant une cinquantaine de civils chez eux et emmenant environ deux cents otages dans la brousse. Les Français se rendent maîtres de la ville en quelques jours, mais le quartier annamite, fortifié depuis des mois, résiste de longues semaines. Les troupes vietminh tiennent les provinces sous leur coupe, tandis que les Français occupent les frontières.
RÉSIDENCE A HANOI : 1946-1950
En 1947, la mission de Hung-Hoa est sous l’emprise vietminh. Au mois de mai, l’évêché et ses dépendances sont détruits par les bombardements français. L’église de Phu-Tho est saccagée et la cure rasée par les Vietminh. En 1948, la Mission se trouve divisée en deux parties : la haute région est aux mains des Français et quelques missionnaires ont quitté Hanoi pour des postes où ils puissent travailler. Le P. DOUSSOUX est à Nghia Lô ; le P. MILLOT, à Son La ; le P. GUIDON, à Laichâu ; le P. SCHMIDT, à Chapa ; le P. GULLLOT, à Laokay. Ils essaient de s’y installer profondément ; et ces postes, autrefois délaissés, deviennent des centres d’influence missionnaire ; du renfort arrive de France, qui ne tardera pas à y être envoyé. La région du Delta est aux mains des Vietminh ; le petit séminaire continue à fonctionner à Ha Thach ; les prêtres peuvent remplir leur ministère et le P. LANTER lui-même, isolé depuis mars 1945, travaille librement dans sa vaste paroisse, comme vicaire d’un curé vietnamien. Mais toutes les œuvres sont mortes ou en sommeil. En 1949, quelques postes importants sont occupés par les Français dans le Delta : Sontay, Tong, Hung-Hoa et Mgr MAZE insiste auprès des autorités militaires pour récupérer les locaux qui ont été réquisitionnés ; le petit séminaire est évacué.
Le vicaire apostolique reste à Hanoi. De là par avion il se rend dans tous les postes occupés par ses missionnaires. Il visite ainsi Chapa, Hoa-Binh, Nghia-Lô, Lai-Chu, Son-La, Lao-Kay. Il visite aussi les importants postes du Delta, spécialement Son-Tay et Hung-Hoa. Son-Tay est même spécialement aménagé pour devenir éventuellement le centre administratif de la Mission.
En juin 1948 Mgr MAZE, épuisé, se rend en France ; il fait une cure à Vichy, puis rentre à Hanoi. En janvier 1950 une retraite prêchée rassemble à Hanoi tous les missionnaires qui, ensuite, rejoignent leur poste respectif. C’est alors une série de voyages pour l’évêque : partout où cela est possible, il va porter encouragement et réconfort. Pour la semaine sainte, il officie à Hanoi. Le 3 mai, il est décoré de la rosette d’officier de la Légion d’Honneur. A la fin de ce mois il s’envole vers la France pour prendre part à l’assemblée générale de la Société. Le diocèse de Quimper en profite pour mettre à contribution son activité apostolique.
En novembre 1950, les Français subissent une défaite sur les frontières. Hung-Hoa est abandonné avec tout ce que la Mission y a accumulé ; c’est le repli sur Son-Tay. On espère que les reculs stratégiques sont ainsi terminés. Dans le Delta, la province de Son-Tay constitue une zone de sécurité ; de même dans la haute région, les territoires de la Fédération Thai. Mgr MAZE rentre de France par avion le 9 décembre 1950.
RÉSIDENCE A SON-TAY : 1951-1959
Le 21 décembre 1950, il s’installe définitivement à Son-Tay, où il officie pour Noël.
Sous la protection française
Aussitôt après son installation à Son-Tay, il reçoit la visite du délégué apostolique, puis du général De Lattre ; lui-même se rend dans tous les postes accessibles du Delta et de la haute région Son-La, Lai-Châu, Nghia-Lô.
En 1951, sur 42 résidences principales, neuf seulement sont en zone libre et groupent 20.000 chrétiens ; les autres, rassemblant 47.000 fidèles, sont sous le contrôle vietminh. Même dans la zone libre, si les missionnaires sont en sécurité, ils ne peuvent se risquer dans les paroisses sans attirer sur les chrétiens des vengeances nocturnes de la part des Vietminh. Cela n’empêche pas Mgr MAZE de se rendre à bicyclette dans les paroisses pour la visite régulière.
En février 1951 Hung-Hoa est bombardé par les Français qui y accumulent les ruines. Monseigneur assure les cérémonies de la semaine sainte à Son-Tay. En mai, il prête ses nouveaux prêtres vietnamiens à Mgr CHI, débordé par les mouvements de conversion dans son vicariat. Au mois de novembre, il assiste à Hanoi à l’assemblée des Ordinaires du Vietnam et du Cambodge ; et en décembre, au sacre du délégué apostolique Mgr DOOLEY. Les fêtes de Noël à Son-Tay sont très joyeuses, en raison de la grande sécurité qui y règne ; elles sont suivies de l’arrivée des missionnaires pour la retraite annuelle.
En février 1952, les jeunes missionnaires sont envoyés dans la haute région. L’évêque visite les chrétientés, bénit des chapelles. Le 30 mai, il est à Nghia-Lô. La province de Son-Tay jouit depuis plus d’un an d’un climat de sécurité que l’on ne retrouve nulle part ailleurs au Tonkin. Aussi Monseigneur n’hésite-t-il pas à faire l’administration des chrétientés de la grosse paroisse de Vinh-Lôc. Il installe provisoirement son petit séminaire à Tong. Malheureusement, en novembre, le poste de Nghia-Lô tombe entre les mains des Vietminh et les missionnaires en sont expulsés.
En 1953, la province de Son-Tay continue à être un havre de paix ; et les demandes de conversion sont nombreuses. L’œuvre d’évangélisation se poursuit donc et Monseigneur, pour être à même de la continuer, achète une superbe moto-confort. Pour le reste, on craint l’abandon par les troupes françaises des territoires de la Fédération Thai. Seul le P. GUIDON se maintient à Lai-Châu.
En 1954, Son-Tay récolte encore une moisson de 1.295 baptêmes d’adultes et compte 3.800 catéchumènes. La vitalité religieuse est intense. Monseigneur bénit trois nouvelles églises et projette l’agrandissement du petit séminaire. Hélas ! c’est la fin. En juin le P. LANTER est expulsé comme ennemi du peuple. En juillet, le P. TYGREAT est tué par une mine française. Dien-Bien-Phu, où se sont réfugiés les PP. GUIDON et GUERRY, a capitulé ; et les accords de Genève mettent fin à la présence française au Tonkin.
Sous la domination vietminh
Quand les troupes françaises se retirent, Mgr MAZE demeure à son poste. Les PP. GAUTHIER, provicaire, FLEURY, procureur, PIERCHON, curé de Tong prennent la même décision. Quatre jeunes missionnaires, les PP. DESROCHES, LAJEUNE, VIEVLLLE et RADELET demandent aussi à l’évêque de rester à leur poste.
Son-Tay vit désormais sous les lois de la République populaire du Vietnam. Durant les derniers mois de 1954, il est encore possible de franchir de temps en temps la ligne de démarcation et de rendre visite à la capitale. La retraite annuelle se fait même à Hanoi, avec les confrères de cette mission. Dans la province de Son-Tay, la circulation est à peu près libre. La vie religieuse ne subit aucune entrave. Le petit séminaire reprend ses cours avec le P. DESROCHES ; le P. PIERCHON est toujours curé de Tong. Cinq ou six prêtres de la province de Phu-Tho sont autorisés à venir faire leur retraite à Son-Tay ; mais il est impossible à l’évêque de passer dans l’ancienne zone vietminh ; il ne réussit pas à obtenir de permis de circuler pour visiter les districts de sa mission, pas même la province voisine de Phu-Tho.
En 1955, a lieu une réunion des évêques du Tonkin pour une retraite sous la présidence de Mgr DOOLEY. Mgr MAZE, accompagné du P. VIEVILLE, peut encore venir une fois à Hanoi pour consulter un médecin. Désormais toute communication avec la capitale sera coupée. Tout le clergé de Son-Tay est convoqué par les autorités civiles à une sorte de retraite ; c’est pour entendre les accusations portées contre les Pères français ou vietnamiens.
Au printemps de 1956, le gouvernement impose la réforme agraire. C’est la terreur, avec ses jugements populaires et ses innombrables victimes. Presque tous les prêtres de la province de Son-Tay sont en butte aux outrages publics ; certains sont condamnés à de longues années de prison dans les camps de concentration. Le P. LAJEUNE, traîné devant le tribunal populaire, sera le premier expulsé du vicariat de Hung-Hoa.
En 1957, craignant une révolte générale, les autorités font cesser les exécutions capitales, et reconnaissent les excès de certains commissaires du peuple. Une détente bienfaisante s’installe ; Monseigneur en profite pour convoquer des retraites et pour établir un bilan ; si les vieilles chrétientés ont bien tenu, d’autres ont sombré presque entièrement. Le P. VIEVILLE, bien malade, rentre en France.
La détente est de courte durée ; et la communication du pays se poursuit inexorablement. La liberté du culte est proclamée ; mais pratiquement on est de moins en moins libre. Plusieurs prêtres ne peuvent obtenir de titre de circulation, absolument indispensable pour s’éloigner de leur résidence. Il est défendu de construire des églises et de réparer les anciennes ; l’assistance à la messe devient. de plus en plus difficile, car le dimanche n’est pas chômé. Le gouvernement fait d’autre part pression sur les prêtres et les fidèles pour les faire entrer dans l’association schismatique des « Catholiques Patriotes » ; il voudrait utiliser les prêtres comme agents de propagande. Le petit séminaire de Tong a bien encore 72 élèves ; son recrutement, ainsi que celui du noviciat des Amantes de la Croix, se maintient ; mais toutes les écoles catholiques sont fermées. Le vicaire apostolique n’a jamais eu l’autorisation de visiter sa mission et il n’a aucun espoir de l’obtenir désormais, car les PP. PIERCHON, DESROCHES et RADELET sont ramenés à l’évêché avec défense d’en sortir.
Au printemps de 1959, sur le conseil des supérieurs, les PP. DESROCHES et RADELET, susceptibles de travailler dans une autre mission, demandent l’autorisation de prendre leur congé régulier en France ; elle leur est accordée sans difficulté ni délai. Reste la « vieille garde ». Déjà le P. GAUTHIER est menacé ; il est convoqué au tribunal à deux reprises, puis à la Sûreté ; on l’expulse sans ménagement, le 3 octobre. Le 7 décembre, Mgr MAZE, à qui on a suggéré vainement depuis quelques temps de faire sa demande pour quitter le Vietnam, est prévenu d’avoir à se présenter à la Sûreté vers 16 heures. « Je fais mes préparatifs ; je dis adieu ; je me présente à la convocation. A 16 h 20, un agent me fait entrer et m’avertit que je ne suis plus autorisé à demeurer au Vietnam ; et que je dois quitter Son-Tay le lendemain à 7 heures du matin. Je puis donc rentrer à l’évêché pour la nuit. Ce sont des adieux déchirants jusqu’à une heure très tardive. La messe du lendemain est une messe de sanglots ; je suis bouleverse ».
Il quitte Son-Tay, laissant sur place les PP. PIERCHON et FLEURY, qui seront expulsés les derniers en février 1960. Les agents qui l’accompagnent jusqu’à Hanoi se montrent très corrects, lui permettent de séjourner à la maison des missionnaires et de se rendre librement à la Délégation de la République française. Puis c’est le départ et il arrive à Paris la veille de Noël.
Dernières années
En mars 1960, Mgr MAZE est reçu en audience par le Pape Jean XXIII. Le reste de l’année, il le passe à circuler en France pour faire connaître la situation douloureuse des chrétientés au Tonkin. Il prend part à l’assemblée générale de la Société. Dans le diocèse de Quimper, il est souvent sollicité pour présider les cérémonies, les pardons ; il s’y rend de bonne grâce, toujours heureux de faire plaisir. Malgré le sillage de légende qu’il laisse après lui, malgré la haute considération qu’il a pour la dignité épiscopale, il se laisse facilement aborder et les gens l’aiment pour la simplicité de ses manières et pour sa disponibilité toujours en éveil. A la fin de l’année, il apprend du cardinal AGAGIANIAN la nomination épiscopale de Mgr QUANG, qu’il a lui-même choisi, avant son expulsion, pour être supérieur de sa Mission.
En 1961, après une tournée de confirmations d’un mois dans son diocèse d’origine, il accepte d’aller aider Mgr BOUGON, évêque de Moulins, qui lui confie l’aumônerie de l’hôpital civil de Vichy. L’ancien missionnaire ne tarde pas à conquérir le respect et l’admiration, non seulement de ses malades, mais encore des plus hautes personnalités de la région, qui les lui témoignent à l’occasion de sa promotion au grade de commandeur de la Légion d’Honneur, le 1er mai 1962. C’est à M. SAINTENY, alors Haut-Commissaire au Tourisme, qu’il a connu comme Délégué Général de France au Nord. Vietnam et à qui il doit tant pour ses missionnaires et pour lui-même, qu’il demande de lui remettre cette décoration..
En août 1962, il revient au pays breton, où Mgr FAUVEL, évêque de Quimper, le nomme aumônier du Carmel de Brest, dont une nièce de Mgr MAZE vient de franchir les grilles. Il y restera jusqu’à sa mort, ne s’absentant que pour les deux sessions du Concile de Vatican II.
A la fin de janvier 1964, Monseigneur se sentant mal consulte un médecin qui le fait immédiatement admettre à l’hôpital Morvan de Brest pour infarctus du myocarde. Un régime très strict lui est prescrit : calme absolu, silence complet, pas de visites. La maladie évolue favorablement et Monseigneur songe déjà à l’ordination qu’on est venu lui demander de faire bientôt. Le dimanche, 2 février, à 4 heures, il repose calmement ; à 5 heures, une crise survient de nouveau, très brutale et vers 6 heures le vénérable malade rend son âme à Dieu.
Il est ramené au Carmel, où les religieuses tiennent à ce que soient célébrées les obsèques. Y assistent, entourant la famille, huit évêques ; NN. SS. FAUVEL, évêque de Quimper, DEROUINEAU, archevêque de Kunming, POIRIER, archevêque de Port-au-Prince, ROBERT, évêque des Gonaïves, LE BELLEC, évêque de Vannes, KERVEADOU, évêque de St-Brieuc, PAILLER, coadjuteur de Rouen, FAVE, auxiliaire de Quimper, le T.R.P. Abbé de Landévennec, de nombreux prêtres, dont le T.R.P. QUEGUINER et plusieurs confrères M.E.P., de hautes personnalités civiles et militaires, dont le représentant de M. SAINTENY, ministre des anciens combattants ; Mgr FAUVEL chante la messe ; le T.R.P. QUEGUINER lit le récit de la vie du défunt, que Mgr MAZE a lui-même écrit, en demandant qu’on ne fasse aucun éloge funèbre le jour de ses obsèques. L’après-midi a lieu l’inhumation à Henvic, dont les habitants, et ceux des paroisses voisines, ont tenu à venir nombreux rendre un dernier hommage à leur illustre compatriote. Mgr PAILLER, entouré d’un nombreux clergé, chante les dernières prières ; on sent dans sa voix, dans son attitude, quelle est son émotion, sou chagrin de perdre celui qui a été pour lui un entraîneur, un modèle d’apôtre au zèle ardent avant d’être son frère aîné dans l’épiscopat. Puis, tandis que les drapeaux s’inclinent, le cercueil est descendu dans la tombe de famille, à l’ombre de la vieille église, dont les ruines rappellent celles de la cathédrale de Hung-Hoa.
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Références
[3272] MAZÉ Jean-Marie (1897-1964)
Références bibliographiques
AME 1925 p. 196. 1928 p. 185 (art). 1932 p. 165. 1933 p. 45. 1937 p. 191. CR 1925 p. 148. 1927 p. 98. 1929 p. 139. 1930 p. 161. 1931 p. 151. 1932 p. 185. 1933 p. 139. 1934 p. 133. 1935 p. 129. 1938 p. 134. 159. 1939 p. 124. 142. 143. 1940 p. 82. 1947 p. 67-70. 1948 p. 81-84. 163. 1949 p. 82-90 p. 180. 192. 201. 202. 209. 210. 1950 p. 70. 71. 184. 1951 p. 39-46. 1958 p. 40. 43. 1952 photo p. 28. 1953 p. 35. 1954 p. 34. 1955 p. 36. 1957 p. 37. 38. 1960 p. 4. 45. 1961 p. 46. 1962 p. 108. 1968 p. 71. BME 1925 p. 712. 714. 775. 1926 p. 383. 1927 p. 571. 1928 p. 499. 1929 p. 247. 634. 691. 1930 p. 243. 1932 p. 293. 1933 p. 294. 1931 p. 529. 678. 838. 1932 p. 622. 211. 212. 290. 293. 464. 861. 1933 p. 61. 207. 208. 294. 452. photo p. 452. 1934 p. 206. 575. 1935 p. 202. 278. 363. 518. 1936 p. 526. 592. 669. 1937 p. 57. 363. 1938 p. 54. 346. 406. 548. 622. 696. 1939 p. 144. 429. 572. 661. 869. 1940 p. 131. 560. 623. 1941 p. 486. 629. 1948 p. 56. 57. 91. 175. 188. 1949 p. 114. 186. 244. 310. 311. 432. 437. 438. 440. 516. 525. 590. 595. 707. 708. 783. photo p. 440. 1950 p. 62. 65. 66. 119. 121. 122. 125. 128. 194. 269. 340. 397. 507. 545. 567. 577. photo p. 194. 268. 583. 1951 p. 62. 74. 126. 127. 183-187. 238. 239. 240. 305. 306. 365. 425. 426. 489. 565. 566. 634. 694. 759. 760. 1952 p. 38. 110. 112. 113. 115. 260. 310. 311. 478. 481. 566. 567. 753-755. 1953 p. 101. 102. 781. 891. 1954 p. 266. 475. 679. 902. 904. 906. 948. 1053. 1955 p. 89. 91. 166. 171. 374. 469. 470. 806. 1027. 1956 p. 659. 1960 p. 186. 309. 731. 1961 p. 696. 872. EPI 1962 p. 297. 699. 1963 p. 129. 1964 p. 432. 555 (notice). 1965 p. 407. ECM 1945 p. 98. 194. 1946 p. 27. 90. MDA 1948 p. 31. 1949 p. 21-26. 90-93. 190. 154-157. 158. 187-190. 1950 p. 159. 1951 p. 95. 126. 1952 p. 191. 1960 p. 15. 16. 115. 116. UMM nov/déc. 1950 p. 45. R.MEP 1964 n° 133 p. 70. 1961 n° 114 p. 4. 5. n° 117 p. 48. 49. n° 118 p. 42. 1962 n° 120 p. 48. n° 123 p. 43. 1963 n° 125 p. 47. La Croix du 2.07.1948 et 17.02.1950.EC1 N° 20. 88. 138. 341. 367. 463. 466. 482. 484. 488. 527. 564. 570. 670. 671. 680. 698. 703. 709. 710. 716. 722. 739. 751.