Jean PATROUILLEAU1890 - 1945
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3331
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Biographie
[3331] PATROUILLEAU Jean, Gustave, Gérard, naquit le 16 mars 1890 à Cadillac-sur-Garonne, dans le diocèse de Bordeaux (Gironde). Sa vocation missionnaire ne se révéla qu'après sa vingtième année. En effet, conformément à la tradition familiale, il s'engagea dans la profession de voyageur de commerce en vins. Durant la guerre 1914-18, il servit d'abord dans l'armée du Maroc. Envoyé au front comme brancardier, il rapporta la Croix de guerre", mais aussi des blessures et des infirmités, qui, s'aggravant avec les années, lui rendront la marche difficile. À trente et un ans, le 7 septembre 1921, il entra au Séminaire des Missions Étrangères. Tonsuré le 26 mai 1921, il reçoit les ordres mineurs le 20 décembre 1924. Sous diacre le 19 décembre 1925, diacre le 29 mai 1926, il est ordonné prêtre le 18 décembre de cette année. Ayant reçu sa destination pour la mission de Tokyo, il s'embarqua le 24 avril 1927 et arriva dans sa mission le 24 juin 1927.
Le nouvel archevêque, Mgr. Chambon, lui confia la direction du Petit Séminaire, établi à Sekiguchi, au siège même de l'archevêché. Il y resta jusqu'en 1932. Cette année là, à la demande de Mgr. Blois, évêque de Moukden, il accepta de se mettre au service de la communauté catholique japonaise demeurant dans cette ville. Sur les conseils et avec l'approbation de l'évêque, il fit venir des religieuses de la congrégation de l'Enfant Jésus, dite " de Saint Maur", afin qu'elles puissent prendre en charge l'éducation des jeunes filles. En octobre 1937, une nouvelle église fut inaugurée en plein quartier japonais, l'ancienne église servant à la communauté coréenne. Durant la guerre de Mandchourie, son principal ministère se fit parmi les malades. À la fin des hostilités, ce furent les résidents japonais qui se trouvèrent dans une triste situation. Le Père Patrouilleau recueillit les réfugiés, ouvrit une école pour les enfants du voisinage, abrita même dans sa maison une quinzaine d'orphelins. L'un d'eux fut atteint du typhus : il l'installa dans sa chambre, le soigna. C'est alors qu'il fut frappé du même mal. Le 12 décembre 1945, il rendit son âme à Dieu.
Nécrologie
P. PATROUILLEAU
MISSIONNAIRE DE MOUKDEN
P. PATROUILLEAU (Jean-Gustave-Gérard) né le 16 mars 1890 à Cadillac-sur-Garonne, diocèse de Bordeaux (Gironde). Entré laïque au Séminaire des Missions-Étrangères le 7 septembre 1921. Prêtre le 18 décembre 1926. Parti pour Tôkyô le 24 avril 1927. Mort à Moukden le 12 décembre 1945.
En l’espace de quelques semaines, la Mission de Moukden a eu à déplorer la mort de trois de ses missionnaires : le 22 novembre, celle du P. Fou, prêtre indigène, le 28 du même mois, celle du P. Lecouflet et le 12 décembre, celle du P. Patrouilleau. Ce dernier, chargé de la paroisse japonaise de Moukden, nous a été enlevé à l’âge de cinquante-cinq ans, victime du typhus qui allait, hélas ! peu de temps après, frapper cinq Religieuses du Vicariat. Terrible retour d’une épidémie qui nous avait épargnés depuis plusieurs années.
Le P. Jean-Gustave-Gérard Patrouilleau naquit le 16 mars 1890 au diocèse de Bordeaux, à Cadillac, joli pays de vignobles arrosés par la Garonne. La vocation sacerdotale et missionnaire ne se révéla à Jean qu’après sa vingtième année. A la fin de ses études secon-daires, se conformant à la tradition familiale, il s’engagea dans la profession de voyageur de commerce en vins. De cette époque de sa jeunesse, il aimait à rappeler ses voyages en Espagne dont il avait gardé un souvenir enchanté. Quelque vingt ans plus tard, lors de son voyage aux Philippines à l’occasion du Congrès eucharistique de Manille, il fut charmé, disait-il, de se retrouver comme en pays de connaissances. Peu d’années avant sa mort, la langue de Cervantès lui servait à faire les honneurs de son humble logis à une mission espagnole de passage à Moukden.
C’est durant la guerre de 1914-1918, qu’il entendit l’appel divin. Il servit d’abord dans l’armée du Maroc. Sur cette terre d’Afrique où « les voix qui crient dans le désert » venaient de retentir au cœur du célèbre converti Ernest Psichari, il fit, lui aussi, à sa manière, le « voyage du centurion ». Sans doute eut-il l’occasion d’entendre parler bien souvent du P. Charles de Foucauld, le saint ermite du Sahara. Envoyé sur le front comme brancardier, il en rapporta la croix de guerre, des blessures et des infirmités qui, s’aggravant avec les années, lui rendront la marche de plus en plus difficile. Le spectacle quotidien de la souffrance humaine pendant les années de guerre éveilla en lui le don de pitié, de bonté compatissante, un des signes caractéristiques de sa physionomie morale.
Après la guerre, la trentaine bien sonnée, il entra au Séminaire des Missions-Étrangères de Paris. D’emblée, son exquise amabilité, sa serviabilité jointes à une humeur enjouée et à une verve bien méridionale, lui gagnèrent la sympathie de ses jeunes condisciples. Nommé à la charge d’infirmier, il la remplit avec tant de patience et de dévouement, qu’on aimait à l’appeler avec une affectueuse familiarité « Maman Patrouilleau ».
Ordonné prêtre le 18 décembre 1926, il reçut sa destination pour Tôkyô où il débarqua le 24 juin 1927. Jusqu’en 1932, il eut la direction du petit séminaire de la Mission. En 1932, à la demande de Mgr Blois, il accepta de venir consacrer son zèle au service de la communauté japonaise de la Mission de Moukden. Sa venue permit de réaliser le vœu longtemps caressé de Mgr Blois d’ériger une paroisse japonaise. Cette nouvelle paroisse Saint-François-Xavier, à laquelle furent rattachés les catholiques de diverses nationalités étrangères, ne cessa de croître en nombre et en influence sous l’impulsion et par le savoir-faire du pasteur. Dans ce milieu japonais et international, il fut vraiment l’homme de la situation. Bien servi par ses qualités de cordiale urbanité, de distinction naturelle, il se pliait avec une parfaite bonne grâce aux rites minutieux de la politesse japonaise. L’affabilité et la cordialité de l’accueil si précieuses dans la vie sociale de l’homme, surtout du prêtre, tel était le trait qui, au premier abord, frappait chez le P. Patrouilleau. Fût-il importuné de visites — et Dieu sait si elles étaient nombreuses — il recevait toujours avec le radieux sourire de sa figure glabre aux traits fins et émaciés. Charmant causeur, il évoquait les souvenirs de ses nombreux voyages en Espagne, en Italie, aux Pyramides d’Egypte, aux îles du Pacifique... Il se plaisait encore plus à parler de son séjour au Japon et des grands missionnaires qu’il y avait connus : les PP. Drouart de Lezey, apôtre des lépreux ; Cadilhac, évangélisateur au zèle ardent ; Flaujac, fondateur et organisateur de tant d’œuvres charitables. Il ne se contentait pas de parler avec enthousiasme de ces belles figures de missionnaires, lui aussi, il évangélisait, sauvait des âmes, bâtissait, suscitait des œuvres d’apostolat. Son zèle entreprenant et toujours en éveil se manifesta de bien des façons et fut couronné de beaux succès. Sur les conseils et avec l’approbation de Mgr Blois, il fit des démarches pressantes auprès des Congrégations religieuses établies au Japon et, en mars 1936, il avait la joie de voir s’installer non loin de son église, dans de magnifiques bâtiments, une Communauté des Dames de Saint-Maur destinée à l’éducation des jeunes filles et à la direction d’une école enfantine. En octobre 1937, fut inaugurée en plein quartier japonais une belle église de style moderne, dont le blanc campanile surmonté de la croix donnait à ce quartier d’affaires une note de spiritualité et attirait de loin le regard du passant. L’ancienne église devait devenir le centre d’une paroisse coréenne ; le Père la quitta et vint s’installer dans son nouveau presbytère d’une discrète élégance.
La chrétienté prit un essor nouveau et, d’année en année, le nombre des fidèles augmenta. En dehors de la paroisse de Mouk¬den, il visitait régulièrement les divers groupements de catholiques japonais disséminés sur le territoire de la Mission. Quand éclata la guerre du Pacifique, grande fut la douleur du missionnaire de perdre une partie de ses fidèles. Pendant ces tristes années de guerre, une bonne part de son zèle fut consacrée à la visite et à l’instruction des malades dans les hôpitaux, spécialement celui des tuberculeux. Avec le précieux concours des Dames de Saint-Maur, il baptisa de nombreux malades après les avoir consolés dans leurs souffrances.
Malade, il l’était lui-même. Il suffisait de le voir s’avancer de son pas lent et pénible, le corps plié en deux, le visage creusé, pour deviner que la souffrance était la compagne habituelle de ses jours. Il la surmontait avec une rare énergie ; nous en avons été souvent les témoins émus. Chez lui, l’âme restait maîtresse du corps prématurément vieilli qu’elle animait. Il fit preuve de courage surtout au cours des derniers mois de sa vie entièrement vécus au service de son prochain. A la fin des hostilités, les résidants japonais furent plongés dans un affreux dénuement. Profondément sensible à cette grande détresse, le P. Patrouilleau déploya un zèle admirable à secourir ces malheureux, à recueillir des réfugiés, à visiter les malades entassés dans des camps de rassemblement. Il ouvrit une école pour les enfants du voisinage, recruta des maîtres et des maîtresses, donna lui-même des leçons, conduisit ses jeunes élèves en promenade. Il fit davantage encore : il abrita dans sa propre maison une quinzaine d’orphelins abandonnés, l’un d’eux était atteint du typhus ; il l’installa près de sa chambre et le soigna. Le malade guérit, mais hélas ! le Père se sentit frappé du même mal. Son organisme, déjà très affaibli, lutta pendant treize jours. Le dimanche 9 décembre, le Père reçut les derniers sacrements en pleine connaissance, fit le sacrifice de sa vie pour ses chers paroissiens japonais et recommanda instamment à Monseigneur ses petits orphelins. Le 12 décembre, il rendait son âme à Dieu, assisté par le P. Pérès et Sœur Emilia qui, douze jours plus tard, allait, elle aussi, succomber de la même maladie.
Les funérailles furent marquées d’un caractère émouvant. A voir cette foule donner libre cours à ses larmes, on sentait que la communauté japonaise était profondément affectée par la perte d’un pasteur qui lui avait donné le meilleur de soi-même. Aux Japonais chrétiens et païens se joignaient le petit groupe des catholiques européens, les trois Communautés religieuses de Moukden et un groupe d’orphelines chinoises dont le Père avait toujours été un généreux bienfaiteur. Le P. Perès célébra la messe et les chants furent exécutés par les élèves du petit séminaire qui, maintes fois invités par le défunt, avaient été heureux. de prêter leur concours aux fêtes de la paroisse. Après l’absoute donnée par Mgr Blois, plusieurs adresses furent lues devant le cercueil conformément à la coutume japonaise. Ensuite, Son Excellence tira les leçons de cette mort héroïque en des termes impressionnants ; qu’il suffise de citer cette phrase : « Dans notre religion, il y a les martyrs de la foi et les martyrs de la charité. Le P. Patrouilleau est un de ces martyrs de la charité. »
Notre confrère a pleinement réalisé l’idéal évangélique et missionnaire : « Le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis. » «Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux que l’on aime. »
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Références
[3331] PATROUILLEAU Jean (1890-1945)
Références bibliographiques
AME 1926-27 p. 358. 1932 p. 190. 1933 p. 90. CR 1927 p. 167. 1928 p. 4. 1930 p. 2. 257. 1932 p. 63. 1933 p. 47. 53. 1936 p. 37. 1938 p. 35. 1939 p. 30. 1947 p. 365. BME 1927 p. 191. 261. 455. 502. 684. 713. 1928 p. 161. 1930 p. 428. 561. 1931 p. 813. 823. 868. 927. 1932 p. 46. 361. 449. 1933 p. 49. 687. 727. 1936 p. 726. 795. 1936 p. 428. 729. 1939 p. 226. 264. 1940 p. 240. 1948 p. 8. EC1 N° 125. 130. 371. 387. 444.