Francis MOREL1907 - 1981
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3467
- Bibliographie : Consulter le catalogue
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1932 - 1940 (Guangzhou [Canton])
- 1940 - 1946 (Hong Kong)
- 1961 - 1968 (Hong Kong)
Biographie
[3467] MOREL Francis, Louis, sixième enfant d'une famille de neuf, naquit le 7 mars 1907, à Loudun, paroisse St Pierre, diocèse de Poitiers (Vienne). Son père était gérant d'un magasin de grains en gros dans cette ville. En 1916, la famille s'installa à St Lambert-des-Levées près de Saumur, puis en 1919, elle s'établit à Angers.
Francis commença ses études primaires à Loudun, les continua à Saumur, puis à l'école St Maurice à Angers où il fit partie de la maîtrise de la cathédrale et dont le prêtre directeur lui donna les premières leçons de latin. En 1922, il entra au Petit Séminaire de Montgazon, et en 1926 au Grand Séminaire d'Angers. Il fit alors la connaissance de M. Ferrand, missionnaire à Swatow. Après son service militaire, il revint au Grand Séminaire diocésain où il avait reçu la tonsure le 17 décembre 1927.
Le 30 mai 1929, il présenta sa demande d'admission aux Missions Étrangères. Accepté le 7 juin 1929, il entra au Séminaire de la rue du Bac, le 14 septembre 1929, pour y terminer sa formation sacerdotale. Il reçut les premiers ordres mineurs le 19 juin 1930, et les seconds ordres mineurs, le 20 décembre 1930. Sous-diacre le 29 juin 1931, diacre le 19 décembre 1931, ordonné prêtre le 29 juin 1932, il reçut sa destination pour le vicariat apostolique de Canton, qu'il partit rejoindre le 18 septembre 1932, et s'embarqua à Marseille à bord du Général Metzinger.
M. Morel arriva à Canton le 28 octobre 1932. Après la retraite annuelle des missionnaires, à la mi-novembre 1932, il fut envoyé auprès de M. Seznec, dans le district de Ho-Yun où il apprit la langue chinoise, et fit sa formation pastorale. Huit heures suffisaient à cette époque, pour franchir en voiture le trajet de Canton à Ho-Yun, qui autrefois exigeait 20 ou 25 jours de voyage en barque. Le district de Ho-Yun étant très vaste et comptant plusieurs chrétientés, un peu plus tard, il établit sa résidence à Fong-Yun. Après avoir fait une retraite annuelle à Nazareth, du 8 au 14 juillet 1935, rentré dans son poste, il bénit, le 10 octobre 1935, la chapelle qu'il avait construite pour cette nouvelle chrétienté.
Opéré du foie, en juillet 1937, et assez bien rétabli, il se rendit à Hongkong pour accueillir M. Fleury, nouveau confrère. En juillet 1937, se déclencha aussi le conflit sino-japonais; la région où résidait M. Morel n'étant pas occupée, il put continuer son travail missionnaire sans trop de problèmes, et à la fin de 1939, gagner Hongkong pour prendre part à la retraite prêchée par le Père Valensin, s.j. Cependant, sa santé se dégradant, et son estomac refusant la nourriture locale, il fut obligé, vers septembre 1940, d'aller se reposer à Béthanie.
À Canton, la situation devenait de plus en plus critique, en raison de la guerre sino-japonaise. Il est probable que Mgr. Fourquet consentit à ce que M. Morel prolongeât son séjour à Hongkong. Celui-ci, toujours gai et refusant l'inactivité, proposa ses services au supérieur de la maison de Nazareth. Très habile de ses mains, il rendit de grands services à l'imprimerie. Ainsi de fait, il se fixa à Nazareth, au titre d'adjoint au supérieur de la maison, sans nomination officielle. Il connut la terrible occupation japonaise à Hongkong, et le grand pillage de Nazareth, au soir du 26 décembre 1941. Au printemps de 1942, alors que les confrères étaient obligés d'aller chercher refuge ailleurs, tant il devenait difficile de vivre à Hongkong, M. Morel resta seul avec M. Biotteau à Nazareth. Effectuer des réparations diverses, entretenir le matériel d'imprimerie et occupations domestiques diverses prirent une bonne partie de son temps.
Au cours de 1946, la communauté de Nazareth étant reconstituée, M. Morel prit son premier congé, en octobre 1946. Mais en 1947, au moment de regagner Hongkong, il tomba malade; atteint de tuberculose pulmonaire, il rejoignit le sanatorium du clergé de Thorenc, le 29 décembre 1947. Il fit partie des conseillers spirituels du sana en raison de ses dons d'accueil, et de ses qualités spirituelles. Après une rechute et une opération en 1949, il sortit du sana en 1951, et partit en repos pendant quelque temps. Il accepta ensuite le poste d'aumônier de la prison d'Angers où il se dévoua pendant 6 ans.
En 1957, Mgr. Rhodain lui confia l'organisation et la direction de la Cité-Secours à Lourdes. Il resta dans cette charge jusqu'en 1961. Ses supérieurs lui demandèrent alors d'aller à Hongkong, comme vice-supérieur de la maison de Béthanie où il arriva le 6 septembre 1961. Il se remit à l'étude du cantonnais, et de l'anglais. Avec une disponibilité entière, il s'occupa de l'accueil des confrères venant se reposer à Hongkong. Chaque dimanche, il assura la messe pour les familles françaises de la Société des Dragages qui construisait un barrage dans l'île de Lantao à Shek-Peak. Fatigué, il quitta Hongkong le 1er juillet 1968.
Après des soins et un repos de quelques mois, en février 1969, il accepta la responsabilité du Service Accueil" à la maison de Paris. Comme à Hongkong, et avec le même dévouement, il se mit au service des confrères, surtout de ceux qui arrivaient en congé. Dans ses moments libres, il aimait réparer, bricoler ceci ou cela, aider les résidents de la maison. Ayant eu quelques petites attaques cardiaques, il quitta ce service à la fin de 1977.
Il prit alors un poste d'aumônier à l'hôpital rural de Candé, dans le Maine-et-Loire, au diocèse d'Angers. Dans les derniers jours de mars 1981, une attaque cardiaque nécessita son évacuation sur le Centre Hospitalier d'Angers. C'est là que le dimanche 5 avril 1981, dans l'après-midi, il eût une attaque soudaine, et il expira sous les yeux du curé de Candé venu lui rendre visite.
Ses obsèques, présidées par son neveu, l'abbé Richou, eurent lieu en l'église Saint-Laud à Angers, le 8 avril 1981. À la fin de la cérémonie, son compatriote et "bâteau", M. Audiau résuma la vie sacerdotale et missionnaire de M. Morel, et fit ressortir son caractère gai, et son entière disponibilité.
Nécrologie
Le Père Francis MOREL
Missionnaire de CANTON et de l’Administration générale
1907 - 1981
MOREL Francis
Né le 7 mars 1907 à Loudun, Vienne, diocèse de Poitiers
Entré tonsuré aux Missions Etrangères le 14 septembre 1929
Prêtre le 29 juin 1932
Destination pour Canton
Parti le 18 septembre 1932
En Mission : 1932 à 1946 et de 1961 à 1968
En France : Malade et ministère : 1947 à 1961 et 1968 à 1981
Décédé à l’hôpital d’Angers le 5 avril 1981
Voir Cartes nos 4 et 5
Enfance et jeunesse
Francis Morel naquit à Loudun, paroisse St-Pierre, le 7 mars 1907. Son père était gérant d’un magasin de grains en gros dans cette ville. Francis Morel était sixième d’une famille qui devait compter neuf enfants, trois garçons et six filles. Tous furent élevés très chrétiennement par une mère d’une grande foi. En 1916, la famille quitta Loudun pour St-Lambert-des-Levées près de Saumur. C’est à Saumur que Francis Morel continua ses études primaires. En 1919, la famille vint s’établir à Angers. Le jeune Francis Morel fréquente alors l’école St-Maurice et chante à la maîtrise de la cathédrale. C’est à l’Abbé directeur de cette maîtrise qu’il confie son désir d’être prêtre et c’est aussi ce prêtre qui lui donna ses premières leçons de latin jusqu’à son entrée au petit séminaire de Montgazon, en 1922.
Ses études terminées. Francis Morel entra au grand séminaire d’Angers en 1926 pour deux années scolaires (1926-1928). C’est à un certain moment, pendant ces deux années de grand séminaire que Francis Morel fit la connaissance du P. Ferrand des Missions Etrangères, originaire du diocèse d’Angers et missionnaire à Swatow, en Chine du sud. Au dire de sa sœur, c’est de là que serait venu son désir d’être missionnaire. Son service militaire terminé. Francis Morel rentra au grand séminaire. C’est alors qu’il présenta sa demande d’admission aux Missions Etrangères le 30 mai 1929, après avoir obtenu la permission de l’évêque d’Angers, car il était clerc tonsuré. Le supérieur du grand séminaire donna d’excellentes notes, signalant entre autres points que sa vocation avait été bien étudiée et présentait toutes les garanties que l’on pouvait souhaiter. Francis Morel fut donc admis le 7 juin 1929 et entra au séminaire de Paris le 14 septembre pour y terminer sa préparation au sacerdoce. Ordonné prêtre le 29 juin 1932, il reçut sa destination pour la Mission de Canton. Il s’embarqua le 18 septembre pour rejoindre son poste.
En mission
Son arrivée en mission était particulièrement désirée, car l’évêque, Mgr Fourquet manquait de personnel, par suite de décès et de maladie de plusieurs missionnaires et prêtres chinois. Ce n’était pas moins de sept vides qu’il fallait combler. Arrivé à Canton le 28 octobre, le P. Morel fut envoyé, après la retraite annuelle, dans le district de Ho-Yun avec le P. Seznec. Naturellement, il lui fallut d’abord apprendre la langue et s’initier à l’aspostolat. Mais il était à bonne école avec le P. Seznec. Tous les deux travaillaient avec joie et ardeur, car il y avait d’assez nombreuses conversions dans leur district. Le compte rendu de 1933 note 65 baptêmes d’adultes au compte du P. Seznec. En 1934 la progression continue et le compte rendu porte que le P. Seznec a fait 115 baptêmes et a l’espoir d’avoir d’autres conversions pour les années suivantes. En tout cela il est aidé évidemment par le jeune P. Morel suivant ses moyens... A son sujet, Mgr Fourquet écrit : « Notre benjamin, celui qui est toujours gai et sait trouver la manière de dérider les vieux, aide le P. Seznec dans ses réalisations. Tous leurs espoirs ont tant au district dont ils ont la charge et tous leurs espoirs ont pour but la conservation et la propagation de la foi dans cette région. » Le district de Ho-Yun était très vaste et comptait plusieurs chrétientés. Aussi le P. Morel, tout en restant encore au moins un certain temps sous la direction du P. Seznec, établit-il sa résidence à Fong-Yun. Le compte rendu de 1935 signale que le P. Morel a fait 16 baptêmes d’adultes. Cette même année, le « Bulletin des Missions Etrangères » donne de très intéressants détails sur l’apostolat du P. Morel. Le chroniqueur de la Mission de Canton écrit : « La bénédiction de la chapelle de la nouvelle chrétienté de Fong-Yun a donné lieu à une très belle manifestation de foi catholique. Notre jeune confrère, le P. Morel, s’est révélé un excellent architecte et un bon réalisateur. Il a travaillé sans bruit et a réussi à former un très important groupement de bons chrétiens. Les païens le tiennent en haute estime et les chrétiens de Fong-Yun l’aiment très sincèrement. Dans ces conditions nul doute qu’ils deviendront de zélés collaborateurs d’action catholique et qu’à côté de Fong-Yun surgiront d’autres chrétientés. » Texte très suggestif qui montre le zèle du P. Morel, sa méthode, sa réussite, les qualités qui le font estimer des païens et aimer des chrétiens et son sens pratique.
A juste titre, on vante beaucoup la cuisine chinoise des grands restaurants. Mais celle que l’on trouve à la campagne est bien différente et tout le monde ne la supporte pas. C’est ce qui arriva au P. Morel. La chronique de Canton du 15 juillet porte cette phrase laconique : « Le P. Morel, opéré du foie, va aussi bien que possible. » C’est sans doute à l’hôpital catholique de Canton que le Père subit cette intervention. Au mois de septembre 1937, il est assez rétabli pour aller accueillir à Hong-Kong le jeune P. Fleury. Mais la situation politique est loin d’être calme. Depuis le mois d’août 1937 la guerre sino-japonaise déroule ses péripéties et les Japonais bombardent Can¬ton et autres centres importants. Les « Fi-Ki » (avions) apparaissent
souvent et il faut se réfugier dans les abris. Cependant la région dans laquelle travaillaient le P. Mord et quelques autres confrères n’était pas occupée. Ils pouvaient donc vaquer à leurs occupations en paix. En 1940, il en était encore de même et trois des missionnaires de cette région purent gagner Hongkong et prendre part à la retraite prêchée par le Père Valensin, S.J.
Si la situation était à peu près calme et le travail missionnaire possible, la santé du P. Mord, par contre, se dégradait. La chronique de Canton du mois d’octobre 1940 signale que le Père a dû se rendre à Hongkong, au sanatorium de Béthanie. « Son estomac ne supporte pas la nourriture que l’on trouve dans les montagnes de Fong-Yun. » L’évêque, Mgr Fourquet, espère qu’il va bientôt se rétablir. C’est pourquoi il a prévu pour lui un poste dans la ville de Canton ; là il lui sera plus facile de se soigner. En réalité, le P. Morel ne retourna jamais à Canton, du moins pour y exercer son ministère. Les circonstances en décidèrent autrement.... et son état de santé aussi.
Comme la situation à Canton devenait de plus en plus critique en raison de la guerre sino-japonaise, il est vraisemblable que Mgr Fourquet consentit à ce que le P. Morel prolongeât son séjour à Hongkong. Sans doute y était-il pour soigner son estomac délabré. Mais le P. Morel n’était pas l’homme à rester inactif. Il proposa ses services au supérieur de Nazareth, maison située de l’autre côté de la route. En fait, c’est là qu’il s’établit. Comme il était très habile de ses mains, il rendit de grands services à l’imprimerie. Ainsi le P. Morel se trouva de fait à Nazareth comme collaborateur, admis par le supérieur de la maison, sans nomination officielle. Cette situation devait durer jusqu’à son congé en 1946. Mais de graves événements se déroulèrent pendant ces années qu’il faut rappeler brièvement. La relation en a été faite dans le « Bulletin des Missions Etrangères » (1948, p. 366-373). Les Japonais attaquèrent Hongkong. Kowloon tomba le 19 décembre 1941. L’île de Victoria capitula le 25. Dès le 26, arrivèrent les premières troupes. Nazareth et Béthanie furent envahies, les Pères pillés de tout ce qu’ils avaient sur eux. Le soir, le grand pillage organisé commença, chambre par chambre et tout fut enlevé. Pendant ce temps, les Pères furent relégués dans un coin de véranda où ils passèrent la nuit. Le 27, on leur donna une chambre où ils s’entassèrent tous les 9, sans eau ni nourriture. Le 28, ils obtinrent l’autorisation d’aller dans le village de Tai-kou-Lao situé non loin de là et habité par les ouvriers de l’imprimerie. Le 30, les soldats quittèrent le secteur de Pokfulum et les Pères purent rentrer à Nazareth dont le nettoyage demanda huit jours. Heureusement l’imprimerie n’avait subi aucun dommage.
Au printemps de 1942, étant donné la difficulté de plus en plus grande de vivre à Hongkong, plusieurs Instituts religieux quittèrent pour se rendre soit à Macau, soit en Indochine. Il fut donc décidé que les Pères de Nazareth partiraient eux aussi pour Hanoi, en attendant des jours meilleurs. Au sanatorium de Béthanie restèrent le P. Bos et le P. Ghaye et à Nazareth le P. Biotteau et le P. Morel. Pendant ces 4 années, celui-ci s’occupa de son mieux à divers travaux dans la maison, car il aimait le travail manuel : réparations diverses et mesures conservatoires pour l’imprimerie. Il ne semble pas qu’il ait fait du ministère à Tai-kou-Lao ou ailleurs, car il valait mieux ne pas trop sortir de peur d’attirer les soupçons de la police japonaise. Il en fut ainsi jusqu’à l’évacuation de Hongkong par les Japonais en décembre 1945. Peu à peu les Pères « exilés » en Indochine regagnèrent Nazareth et la maison reprit sa vie à peu près normalement...
Sanatorium
Une fois la communauté de Nazareth rétablie au cours de l’année 1946, mais avant que ne reprît à plein le travail de l’imprimerie qui nécessitait sa présence, le P. Morel prit son premier congé. Après les années pénibles de la guerre, il en avait d’ailleurs grandement besoin. Il partit donc de Nazareth en octobre 1946, bien décidé à y revenir, son congé terminé. Il ne se sentait pas malade ; il était en fait beaucoup plus débilité qu’il n’en avait conscience. A Canton il avait souffert du foie puis de l’estomac. A cela s’ajoutaient toutes les privations pendant les quatre années de l’occupation japonaise. Un mal plus grave le menaçait qui se déclara au moment même où le Père achevait ses préparatifs pour revenir à Nazareth : il était atteint de tuberculose pulmonaire. Et le mal se révéla si grave dès le début qu’il fallut envoyer le P. Morel au sanatorium du clergé à Thorenc. Il y passa environ 4 ans, de 1947 à 1951. Ses dons d’accueil, ses qualités spirituelles furent vite remarqués. Aussi fut-il choisi comme directeur pour faire partie de l’équipe des conseillers spirituels du sana où étaient en traitement une centaine de prêtres et de séminaristes de divers diocèses de France et d’ailleurs. Durant ce temps de sana, il connut des hauts et des bas. C’est ainsi qu’en 1949, le P. Morel fit une rechute ; il dut abandonner ses fonctions de conseiller spirituel et subir une grave opération. Peu à peu cependant sa santé se rétablit et il put sortir du sana.
Aumônier des prisons (1951-1957)
Après sa sortie du sana en 1951 et une période de convalescence dans sa famille, le P. Morel fut nommé Aumônier de la prison d’Angers. Dans cette délicate fonction, il remplit son rôle à la satisfaction de tous : beaucoup de charité pour les détenus, patience dans l’écoute, prudence et discrétion dans les conversations. Il gagna ainsi et conserva la confiance de tous, aussi bien du directeur, des gardiens que des prisonniers. Cette période de 6 ans fut comme un « test » pour voir si sa santé était vraiment bien rétablie. Le « test » fut positif.
Secours catholique à Lourdes (1957-1961)
Le P. Morel si estimé dans ses fonctions d’aumônier de la prison à Angers aurait sans doute continué encore pendant un certain temps ce ministère. Mais en 1957, Mgr Rodhain qui venait de fonder à Lourdes la Cité-Secours pour les pèlerins dépourvus de ressources s’adressa à la Société pour avoir quelqu’un sur qui il puisse compter pour organiser ce foyer et en assumer la direction. C’est au P. Morel que l’on s’adressa et il accepta de grand cœur. Les années qu’il passa à Lourdes furent pour le P. Morel lourdes de travail et de soucis pour organiser la maison. Mgr Rodhain se reposait sur lui. Il n’eut pas à s’en repentir, car le P. Morel était un homme « pratique » et habile de ses mains. Il avait le sens de l’organisation et un don d’accueil et de bienveillance remarquable pour les hôtes mais aussi une grande fermeté pour l’observance des règles fixées par Mgr Rodhain. Le P. Morel se consacra à cet apostolat pendant 4 ans de 1957 à 1961.
Béthanie (1961-1968)
En 1961, la Société fut obligée de demander au P. Morel de quitter Lourdes pour aller à Béthanie (Hongkong) comme vice-supérieur de la maison. Il y avait à cela plusieurs raisons : le rappel à Paris du P. Sylvestre, ancien supérieur, remplacé par Mgr Lemaire, l’ignorance de la langue cantonaise par Mgr Lemaire nouveau supérieur, la perspective d’absences répétées de celui-ci dans les années suivantes pour assister au Concile qui se préparait. Le départ de Lourdes du P. Morel fut un grand sacrifice tant pour Mgr Rodhain que pour le Père. Cependant le P. Morel ne s’est jamais plaint d’avoir été enlevé à la Cité-Secours qu’il avait beaucoup aimée et il ne manquait jamais les occasions de dire son admiration, son amitié pour Mgr Rodhain et sa fierté d’avoir travaillé à Lourdes sous sa direction.
Pour cette période de la vie du P. Morel, ces 7 années passées à Béthanie, laissons la parole à Mgr Lemaire: «Le P. Morel arriva à Béthanie le 6 septembre 1961 ; dès son arrivée, sans s’accorder le moindre repos, il se remit à l’étude du cantonais ; il perfectionna sa connaissance des caractères chinois tout en améliorant sa pratique de la langue anglaise. Il put s’adonner à ces études sans être beaucoup distrait, car les confrères furent peu nombreux, en 1961, à profiter des facilités de séjour à Béthanie créées par l’Assemblée générale de 1960. Ils devaient être nombreux dès l’année suivante : une quarantaine en 1962.
Pour leur service, le P. Morel avait accepté de s’occuper de leur accueil. On mit donc à sa disposition une voiture. Il l’entretint avec soin et la conduisait avec une maîtrise que l’on admirait.
Le Père était d’une disponibilité sans faille, qu’il s’agît d’aller accueillir les confrères à l’aéroport, de les y conduire ou de les intéresser ou distraire par des excursions en voiture. Il allait souvent au devant de leurs désirs en leur proposant une randonnée par exemple dans les Nouveaux Territoires. Si les confrères étaient malades, il les visitait à l’hôpital ; il facilitait leurs démarches en les conduisant où ils voulaient : consulat, agences de voyages, boutiques. Il était vraiment tout à tous et cela en dépit d’accrocs de santé assez fréquents. Il ne prenait que le minimum de repos et de soins quand le foie ou l’estomac le faisaient souffrir. Pendant les années qu’il passa à Béthanie, de 1961 à 1968, le P. Morel fut pour les hôtes de la Maison d’accueil un modèle de charité fraternelle, toujours sur le « qui vive », toujours prêt au service !
Très sensible, il sursautait parfois devant une réflexion de nature à le blesser, mais il se reprenait vite et faisait oublier par un sourire un moment de vivacité. Je ne crois pas m’avancer trop en me disant sûr que si les confrères qui sont passés à Béthanie étaient interrogés, ils seraient unanimes à reconnaître et à admirer la serviabilité du P. Morel.
Que dire des longues parties de billard, le soir, après souper ! Le Père y excellait et visiblement en jouissait ; il était heureux de trouver des partenaires à son niveau...
Quand le billard « chômait », le P. Morel charmait les hôtes par de la belle musique enregistrée, car il aimait la belle musique ; mais il faisait aussi passer des disques humoristiques, toujours de bon goût, qui déridaient tout le monde. Vraiment, après sa longue épreuve d’un mauvais état de santé, il était resté ce jeune que Mgr Fourquet en 1934 dépeignait comme « celui qui est toujours gai et qui sait trouver la manière de dérider les vieux ».
Le secret de ce dévouement, d’oubli de ses misères physiques est à chercher dans sa vie spirituelle, car il n’avait rien de l’activiste. Il ne trouvait pas le temps long les jours où par hasard personne n’avait besoin de ses services. Il était fort discret sur sa vie intérieure, mais on le sentait d’une foi profonde, d’un grand esprit sacerdotal. La Sainte Eucharistie et la Sainte Vierge étaient les principaux objets de sa dévotion. Il ne cachait pas sa souffrance devant la nonchalance spirituelle ou du moins l’apparence d’une tiédeur ou d’un manque de respect ou encore devant certaines réflexions parfois peu orthodoxes touchant la foi ou la morale.
Ministère spirituel
Le P. Morel fit peu de ministère pendant les années passées à Béthanie. Ses fonctions l’astreignaient à la présence dans la maison, lui interdisant des absences pour une aide régulière dans une paroisse. Il devait en souffrir ; cependant il ne s’en plaignit jamais. Il avait le culte du devoir et pour lui ce devoir consistait à être toujours à la disposition des confrères, hôtes de Béthanie. Il assura cependant la messe chaque dimanche pour des familles françaises chrétiennes de la Société des Dragages qui construisait un barrage dans l’île de Lan-Tao, à Shek Peak. Il accepta ce ministère à la demande d’un des directeurs, fervent chrétien. Malgré une assistance irrégulière et très clairsemée, le P. Morel continua son ministère sans guère de consolations spirituelles.
Un jour, il fut invité à prêcher la retraite annuelle des religieuses canadiennes. Il s’y prépara avec beaucoup de soin. Je ne sais ce qu’il leur dit mais je n’ai pas oublié l’appréciation de la supérieure. Elle me dit : « Vous pouvez être fiers d’avoir dans votre Société de tels prêtres ! »
En 1966, le P. Morel prit un congé en France et au retour il s’arrêta en Terre Sainte ; il put visiter les Lieux saints sous la direction d’un ami fort expert. Il s’était aussi procuré sur place une série de vues très intéressantes. Rentré à Béthanie, il organisa des séances de projections, commentant lui-même les vues. Ces séances furent très appréciées.
Fin juin 1968, le P. Morel qui depuis plusieurs semaines se sentait particulièrement fatigué se décida à suivre le conseil qui lui avait été plusieurs fois donné de consulter le docteur. Ce dernier jugea très grave l’état du Père et déclara que le retour en France était d’une urgente nécessité. Le P. Morel fit ses préparatifs et d’après les dispositions qu’il prit, on peut conclure que, dans sa pensée, sans toutefois le dire, le départ cette fois était sans retour. En effet, il se sentait gravement atteint. Il quitta Hongkong le 1er juillet 1968.
Accueil à Paris
Certainement le P. Morel à son retour de Hongkong était très fatigué. Il se remit cependant mieux et plus vite qu’on n’avait osé l’espérer. Après un repos de quelques mois et les soins que nécessitait son état, il fut en mesure de prendre la responsabilité du « Service d’accueil » à Paris. Il en fut chargé du mois de février 1969 à la fin de 1976. Comme à Hongkong, il se dévoua au service des confrères, spécialement de ceux qui venaient en congé. Un mot résumera toute son activité pendant ces sept années : il était tout à tous. Dans ses moments libres, il aimait bricoler, arranger ou réparer ceci ou cela pour les confrères de la maison. En plus d’un acte de charité, c’était pour lui une détente.
Aumônier à Candé
Après ces sept années au Service d’accueil, le P. Morel sentit la nécessité de prendre un travail moins lourd. Il avait eu en effet quelques attaques cardiaques et la prudence lui imposait de ralentir ses activités. Il trouva, d’accord avec les Supérieurs de la Société, un petit poste d’aumônier à l’Hôpital rural de Candé, dans le Maine-et-Loire, au diocèse d’Angers. Périodiquement il revenait à Paris pour des visites médicales ; mais il était toujours sous la menace d’une attaque cardiaque. C’est ce qui se produisit dans les derniers jours de mars 1981. Hospitalisé à Angers « pour un petit infarctus » disait-il, il eut une attaque subite le dimanche 5 avril dans l’après-midi et il expira sous les yeux du curé de Candé qui était venu lui rendre visite. Voici comment le curé de Candé relate l’événement : « Le dimanche 5 avril dans l’après-midi je me rends au centre hospitalier d’Angers pour une visite au P. Morel. J’ai trouvé le Père très joyeux et envisageant son retour à Candé pour les fêtes de Pâques, le 19 avril... Tout à coup, pendant la conversation, le P. Morel porte la main à l’abdomen ; je vois son visage crispé et je lui dis que je vais appeler l’infirmière. Il me fait « oui » d’un signe de tête et dit : « Le copain ne vaut pas cher. » Ce seront ses dernières paroles. Il retombe inerte sur l’oreiller. Aussitôt massages cardiaques, piqûres ; mais rien n’y fait : le Père est mort. Tout s’est passé en 2 ou 3 minutes.
Ses obsèques eurent lieu en l’église Saint-Laud à Angers le 8 avril. L’abbé Richou, neveu du P. Morel, présida la concélébration entouré de 28 prêtres, dont 10 confrères des Missions Etrangères, et fit l’homélie. A la fin de la cérémonie, le P. Audiau, Angevin comme le P. Morel et du même « bateau » prononça quelques mots, résumant à grands traits la vie sacerdotale et missionnaire du P. Morel et faisant ressortir son caractère gai, sa disponibilité de tous les instants, en un mot sa charité. Il souligna son culte pour la Sainte Eucharistie, sa dévotion à la Sainte Vierge et conclut par ces mots : « Il a pu faire ainsi beaucoup de bien dans la simplicité de sa vie et la fidélité à sa vocation. »
~~~~~~~
Références
[3467] MOREL Francis (1907-1981)
Références biographiques
AME 1932 p. 246. photo p. 241. CR 1932 p. 133. 311. 1934 p. 94. 95. 1935 p. 92. 1947 p. 116. 1974-76 p. 248. BME 1929 p. 511. 1932 p. 722. 938. 969. 1935 p. 613. 1940 p. 51. 749. 1935 p. 804. 1936 p. 588. 1937 p. 592. 1939 p. 274. 1948 p. 189. 372. 374. 1949 p. 437. 789. 1951 p. 577. 1961 p. 507. 874. EPI 1962 p. 691. Enc. PdM. 14P4. ECM 1942 p. 138. 1943 p. 350. 371. 372. 1944 p. 53. 54. 1945 p. 130. 1946 p. 26. 1981 p. 18. 1982 p. 45. R.MEP n° 116 p. 45. EC1 N° 178. 247. 252. 449. 454. 457. 460. 463. 464. 473. 696. 702. 764. 769. NS. 11P322. 18P97. 26P4. 40P104. 57P302. 63P147. 65P208. 68P296. 67P270. 69P328. 70P24. 79P303. 83/C2. 94/C2. 95/C2. 97P178. 98P212. 99P248. 104P49. 106P113. 122/C3. 130P186. 141P183. 142P213.