Étienne DEROUIN1869 - 1920
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 2059
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1893 - 1920 (Chongqing [Chungking])
Biographie
[2059] DEROUIN Étienne, Pierre, Marie, François, est né le 23 avril 1869, à Rennes, dans la paroisse St Hélier, diocèse de Rennes (I. et Vilaine). Il étudia d'abord à Chantepie, à l'Oeuvre des vocations tardives, puis après deux ans dans cette Institution, il entra au Grand Séminaire de Rennes où il reçut la tonsure. Le 14 septembre 1889, il fut admis aux Missions Étrangères. Ordonné prêtre le 27 mai 1893, il reçut sa destination pour le Sichuan oriental, et il s'embarqua pour la Chine, le 27 juillet 1893.
Après quelques jours de repos à Chongqing [Chungking], son évêque l'envoya dans le district de Taopa, à une vingtaine de kilomètres de l'évêché, pour s'initier à la langue et aux coutumes chinoises. Après ces études, il fut nommé curé de la paroisse de Toneulpin, où il travailla de 1894 à 1910. Toneulpin, sous-préfecture de Ouchan, était situé à l'extrémité sud-est de la Mission, un des postes les plus éloignés de Chongqing [Chungking]. La chrétienté de ce district est la plus ancienne de la mission, dans ces coins reculés. Le Père Derouin commença sa vie missionnaire dans les hautes montagnes qui bordent le Sichuan et il se donna tout entier à ses chrétiens, leur apportant les secours spirituels qui leur permettaient de faire fidèlement leurs devoirs religieux.
Mais le Père rêvait de l'évangélisation des infidèles. À la faveur de circonstances providentielles, il put s'établir dans un gros marché qui s'appelait Miaoutsao. La religion catholique y fut apportée par un riche païen, personnage influent de ce marché, qui, après s'être fait expliquer la signification de croix et d'objets religieux qu'on lui avait donnés, s'était fait chrétien. Quand le Père Derouin arriva, il ne trouva que cet homme disciple du Christ. Il s'occupa activement de l'instruction des catéchumènes, dont le nombre grandissait chaque jour. Dans ce pays, où l'on ne voyait jusqu'ici que de superbes pagodes, le Père construisit une église fort jolie, en style ogival, dans laquelle il mit bientôt de belles statues venues de France, ainsi que deux cloches que l'on plaça dans le beffroi.
Le Père sut attirer ses chrétiens à l'église par l'éclat des fêtes. On se souviendra longtemps à Miaoutsao des splendides illuminations des nuits de Noël, des processions du Saint Sacrement dans les rues du marché, et des séances de projections du Catéchisme illustré. Il fut au service des chrétiens, tant au spirituel qu'au temporel, et resta toujours en bonnes relations avec les chefs du pays.
Cette époque n'était pas encore le temps de l'œcuménisme. Les Protestants eurent l'idée de venir contrecarrer l'influence catholique, en s'installant en face de la mission. Ils occasionnèrent au Père Derouin des misères sans nombre, mais celui-ci sut démasquer leurs manœuvres déloyales, même si parfois, il fallut aller devant les tribunaux.
Vint un jour où le Père dut aller se soigner à l'hôpital de Chongqing [Chungking]. Ce fut pour lui l'adieu à son cher district de Miaoutsao. Que de regrets il laissa parmi païens et chrétiens !
En mars 1910, son évêque le nomma aumônier de l'hôpital de Chongqing [Chungking]. Dans ce poste où il avait quelques loisirs, il réussit à fonder la Société des Religieuses du Sacré-Cœur, qu'il destinait à former des maîtresses d'école instruites, pieuses et zélées. Au mois de novembre 1915, il transporta sa Communauté dans un couvent qu'il avait aménagé près des Consulats européens. Les débuts furent difficiles, les épreuves ne manquèrent pas, mais cette Congrégation prospéra et son utilité fut reconnue par tous.
En 1918, il célébra son Jubilé d'argent sacerdotal. À cette occasion, on vit jusqu'où allait l'affection de son entourage : ce fut la dernière joie de sa vie missionnaire. Sa santé se détériora et il souffrit de plus en plus des intestins. Alors que son évêque lui proposa de retourner en France pour se soigner, il préféra rester dans sa mission. Le 25 février 1920, une très forte fièvre le saisit, et il souffrit de douleurs aiguës. Il reçut les derniers sacrements, et le matin du 26 février, il rendit son âme à Dieu dans les sentiments de la plus grande confiance en la miséricorde de Dieu. À la cathédrale, Mgr Chavallon célébra la messe de sépulture, entouré d'un grand nombre de prêtres et de chrétiens.
Nécrologie
M. DEROUIN
MISSIONNAIRE DU SETCHOAN ORIENTAL
M. DEROUIN (Etienne-Pierre-Marie), né à Rennes (Ille-et-Vilaine), le 23 avril 1869. Entré tonsuré au Séminaire des Missions-Etragères le 14 septembre 1889. Prêtre le 27 mai 1893. Parti le 27 juillet 1893 pour le Setchoan Oriental. Mort à Tchongkin le 26 février 1920.
M. Etienne Derouin naquit à Rennes dans la paroisse Saint-Hélier, le 23 avril 1869. Orphelin de bonne heure, il fut confié aux soins de l’abbé Maignan, de la paroisse Saint-Hélier, qui lui apprit à visiter les sanctuaires de Notre-Dame de Bonne Nouvelle et de Notre-Dame des Miracles, pèlerinages connus et vénérés dans toute la Bretagne. Il devint ensuite l’élève de M. le chanoine Gendron qui, à Chantepie, venait de fonder l’Œuvre des vocations tardives.
Il resta deux ans dans cette institution et réussit à y acquérir des notions de latin très suffisantes ; puis il entra au Grand Séminaire de Rennes où il reçut la tonsure.
Il entra aux Missions-Etrangères le 14 septembre 1889. Mais le mois suivant, il lui fallut en sortir pour accomplir l’année de service militaire que nos législateurs venaient d’imposer au clergé. Ce service terminé, il reprit avec joie le chemin de la rue du Bac.
Là son âme se trouva très à l’aise et il donna à ses supérieurs satisfaction sous tous les rapports. Ordonné prêtre le 27 mai 1893, il reçut sa destination pour la Mission du Setchoan Oriental. Embarqué le 27 juillet suivant en compagnie de MM. Faucon et Giraux, il arriva sans encombre à Tchongkin.
Après quelques jours de repos, son évêque, Mgr Chouvellon, l’envoya s’initier à la langue et aux coutumes chinoises dans le district de Taopa, à une journée de marche de Tchongkin (12 lieues) chez de vieux chrétiens.
Cet apprentissage de la vie apostolique lui fut si rude qu’après quelques mois, il dut revenir à Tchongkin et il acheva, sous la direction de M. Blettery, Provicaire, sa préparation au ministère en Chine. Lorsqu’il fut jugé apte à prendre en main l’administration d’un district, Mgr Chouvellon le nomma titulaire de Toneulpin, sous-préfecture de Ou-chan, à l’extrémité sud-est de la Mission, un des postes les plus éloignés de Tchongkin. Pour s’y rendre, il dut descendre le fleuve Bleu, qu’il avait remonté quelques mois auparavant.
La chrétienté de Toneulpin est la plus ancienne que possède notre Société dans ces coins reculés. Elle fut fondée vers 1750, par upe famille de la province du Houpé qui, chassée de Tienmienhien par la persécution, se réfugia dans les hautes montagnes qui bordent le Setchoan. C’est là que nofre jeune confrère commença ses premières armes ; il se donna sans réserve à ses chrétiens et ceux-ci le payèrent de retour par leur docilité et la pratique fidèle de tous leurs devoirs religieux.
Mais administrer et diriger de vieux chrétiens, ne suffisait pas à son zèle ; il lui fallait l’évangélisation directe des infidèles. La bonne Providence allait le servir à souhait. A la faveur de circonstances qu’il aimait à qualifier de providentielles, il put s’établir dans un gros marché de la sous-préfecture, où jusqu’alors on ignorait même l’existence de la religion chrétienne.
Des pêcheurs avaient trouvé sur les rives du fleuve Bleu des caisses d’objets religieux, et des croix étaient ainsi tombées entre les mains d’un riche païen, personnage influent du marché de Miaoutsao. Quelque temps après, rencontrant un missionnaire de passage, cet homme lui demanda des explications sur la croix ainsi que sur la religion catholique. Et c’est à la suite de cet entretien qu’il manifesta le désir de se faire chrétien, prélude des nombreuses conversions qui devaitnt plus tard former un district prospère.
Tous les missionnaires occupés à l’évangélisation des païens connaissent les tracas, les fatigues et les travaux qu’occasionne la fondation d’un poste. M. Derouin se dépensa sans compter. Son premier converti, grâce à ses relations, lui fut d’un précieux concours. Peu à peu, là où jusqu’alors le diable régnait en maître dans de superbes pagodes, s’éleva une fort jolie église en style ogival qu’ornèrent bientôt de belles statues venues de France. Puis deux cloches prirent place dans le beffroi qui leur avait été préparé. Ce fut ensuite le tour du presbytère et des écoles.
En même temps, M. Derouin s’occupait de l’instruction de ses catéchumènes, dont le nombre augmentait chaque jour. Dieu seul sait le soin qu’il apporta à ce devoir. Il composa à leur intention un résumé des vérités indispensables pour la réception du baptême. Et, pour leur faire aimer la sainte religion, il les attira à l’église par l’éclat des fêtes. On se souviendra longtemps à Miaoutsao des belles illuminations des nuits de Noël, des processions du Saint Sacrement à travers les rues du marché, des séances de projections du catéchisme illustré. Par ailleurs, il fut toujours d’un dévouement inlassable pour ses chers néophytes, les aidant dans leurs affaires temporelles, arrangeant leurs procès. Et, pour mieux réussir, il entretint constamment avec les chefs du pays des relations de courtoisie et d’amitié ; aussi eut-il souvent à se louer de leur bon vouloir.
Bientôt, en effet, les protestants, voyant les progrès de l’Eglise catholique à Miaoutsao, venaient s’installer en face du missionnaire pour contrebalancer son influence et paralyser son zèle. De fait, ils lui occasionnèrent des misères sans nombre. Mais tenace comme le granit de sa Bretagne, M. Derouin fit bravement face à ses adversaires, démasqua leurs manœuvres déloyales et réussit à obtenir justice des tribunaux de Tchentou, capitale du Setchoan, et même de ceux de Pékin.
Malheureusement, ces travaux et ces luttes ébranlèrent la santé de notre confrère et le contraignirent à entrer à l’hôpital catholique de Tchongkin. Mais, malgré les soins dévoués qu’il y reçut, sa santé ne s’améliora. guère. Il lui fallut se résigner à abandonner le vieux district. Comme il regretta alors Miaoutsao, où il avait tant travaillé et tant souffert ! Que de regrets il laissa parmi les païens comme parmi les chrétiens !
En mars 1910, son évêque le nomma aumônier de l’hôpital. Profitant alors des loisirs que lui laissait son nouveau ministère, il exécuta un plan qu’il avait déjà élaboré à Miaoutsao. Ainsi fut fondée la Société des Religieuses du Sacré-Cœur, destinée à former des maîtresses d’école instruites, pieuses et zélées, pour l’enseignement des jeunes filles, Œuvre dont tout le monde reconnaissait l’utilité. Au mois de novembre 1914, il transporta sa communauté dans un couvent qu’il avait aménagé à côté des Consulats européens. Dès lors, il donna sa démission d’aumônier pour s’occuper exclusivement de sa société ; il lui consacra le reste de ses forces et de ses ressources.
Les commecements, on le devine, furent difficiles ; les épreuves ne manquèrent pas et tout autre que lui se serait peut-être découragé. Son grand esprit de foi le soutint. Enfin le succès couronna ses efforts. Le couvent du Sacré-Cœur prospéra ; plusieurs religieuses envoyées dans des districts éloignés, rendirent de précieux services.
En 1918, sa communauté et les chrétiens de Tchongkin voulurent fêter le 25e anniversaire de son ordination sacerdotale. A cette occasion, on vit jusqu’où allait l’affection qu’il avait su inspirer dans son entourage : ce fut la dernière joie de sa vie de missionnaire.
Sa santé laissait à désirer depuis longtemps, son estomac s’accommodait mal du régime chinois ; il en était arrivé à se sustenter avec si peu de nourriture qu’on se demandait comment il pouvait supporter un jeûne presque continuel. Une maladie d’entrailles le minait sourdement. On lui conseillait de prendre du repos, et Mgr Chouvellon l’autorisait à aller se rétablir en France, mais il ne put jamais se décider à quitter son poste et sa Mission. Lors du passage de Mgr de Guébriant, Visteur Apostolique de la Chine, au milieu de février 1920, il participa aux grandes fêtes qui, eurent lieu à Tchongkin. Immédiatement après il prêcha les exercices de la retraite à ses religieuses. Le matin du 25 février, malgré sa faiblesse extrême, il eut encore la force de célébrer la sainte messe.
Mais, dans la journée, une très forte fièvre le saisit ; il éprouva de violentes crises vers 8 ou 9 heures du soir ; il reçut alors les derniers sacrements avec toute sa connaissance. Puis, à 2 heures du matin, les crises se calmèrent et, à 3 h. ¼ , notre cher confrère rendait son âme à Dieu, dans les sentiments de la plus entière confiance en la divine miséricorde.
La chapelle du couvent étant trop étroite pour contenir la foule, les funérailles eurent lieu à la cathédrale, le 28 février. Mgr Chouvellon célébra la sainte messe et donna l’absoute devant une très nombreuse assistance. Outre les confrères et les prêtres chinois de la ville et des environs, tous les membres des colonies française et étrangère étaient présents à la cérémonie. Un long cortège de chrétiens acc¬ompagna le cher Père à sa dernière demeure en chantant les prières liturgiques.
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Références
[2059] DEROUIN Étienne (1869-1920)
Références biographiques
AME 1910 p. 314. 317. 1919-20 p. 432. 1922 p. 127. CR 1893 p. 266. 1897 p. 87. 1899 p. 106. 107. 108. 1900 p. 84. 1901 p. 95. 1902 p. 102. 1903 p. 87. 89. 1904 p. 101. 102. 1905 p. 65. 1906 p. 81. 1907 p. 109. 1908 p. 84. 1909 p. 92. 93. 1910 p. 85. 91. 1912 p. 96. 1913 p. 108. 1915 p. 56. 1916 p. 54. 1918 p. 28. 1920 p. 147. 1921 p. 46. 1937 p. 53. 1938 p. 305. BME 1951 p. 47.