Jacques BOURGES (de)1630 - 1714
- Statut : Vicaire apostolique
- Identifiant : 0002
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Identité
Naissance
Décès
Consécration épiscopale
Biographie
Le premier nom connu de cette famille est Alain de Bourges, ou de Bourge, bourgeois de Paris, qui acheta en l’année 1500 la terre de Sainte-Croix en Normandie.
Jacques de Bourges, soutien des MEP à l’origine, naît à Paris vers 1630 ; il s’offre à Mgr Pallu qui l’accepte avec joie. Il quitte Paris lors du premier départ pour l’Extrême-Orient des missionnaires des MEP le 18 juin 1660, et embarque à Marseille du 27 novembre suivant. Avec l’évêque de Bérythe, Mgr Lambert de La Motte, et le P.Deydier, le missionnaire traverse à pied la Perse et l’Inde.
À peine arrivé au Siam, il en repart le 14 octobre 1663, sur l’ordre de Mgr Lambert de la Motte, afin de se rendre à Rome afin d’exposer la situation des missions, et solliciter de plus amples pouvoirs. Il fait le tour de l’Afrique et débarque en Angleterre en juillet 1664. De là, il se rend à Rome où il présente à la Propagande des mémoires analogues à ceux qu’avait déjà envoyés Mgr Lambert de La Motte.
Le caractère approfondi des études faites par le missionnaire, docteur en théologie, se traduit dans la précision de ses demandes, dont les conclusions sont agréées et vont servir de base à plusieurs décrets concernant des points comme la juridiction des vicaires apostoliques sur le Cambodge et le Ciampa, l’autorisation des ablutions sans vin à la messe, les pouvoirs pour la confession, les ordinations, l’observance des fêtes, les jeûnes, l’abstinence, etc. À Paris, il rédige et publie le récit de son voyage de France au Siam avec Mgr Lambert de La Motte et le P. Deydier¬ ; cependant, par respect, il inscrit dans le titre le nom seul de l’évêque de Bérythe. Cet ouvrage eut plusieurs éditions et fut traduit en hollandais et en allemand.
Tonkin (1666-1714)
En mars 1666, il rembarque à La Rochelle pour l’Extrême-Orient, et n’arrive au Siam qu’en 1669 ; il se rend au Tonkin, et se fixe à Hean (Hung-yen), petite ville située à environ 50 km. au sud-est d’ Hanoï, sur la rive gauche du fleuve Rouge, à 5 km. en amont de l’embouchure du canal des Bambous. À cette époque, Hean compte environ 2 000 maisons ; la localité est la résidence du gouverneur de la province et de quelques négociants hollandais et anglais ; les navires européens peuvent pénétrer dans le port.
Il vit avec le P. Deydier et se déguise en marchand, car la prédication de l’Evangile est proscrite. Dénoncé comme missionnaire, et arrêté, il est relâché. Lors d’une seconde arrestation, il est emprisonné et frappé. Délivré, il reprend ses travaux, parcourt les provinces de Hanoï et de Nam-Dinh, puis revient à Hean. Les résultats acquis à cette époque par les ouvriers apostoliques sont assez considérables. Les conversions annuelles, généralement obtenues par l’emploi de prêtres indigènes et de catéchistes, se chiffrent par milliers ; au nombre des convertis, on cite des mandarins et des membres de la famille royale.
Voici quelques exemples du nombre de baptêmes et de confessions:
en 1672, baptêmes 6096, confessions 38315,
en 1673, baptêmes 5386, confessions 46167,
en 1674, baptêmes 6690, confessions 53045,
en 1675, baptêmes 8831, confessions 55432,
en 1676, baptêmes 7769, confessions 56100,
en 1677, baptêmes 6523, confessions 59918,
Ces progrès de l’Evangile sont obscurcis par les difficultés rencontrées avec les Jésuites missionnaires au Tonkin, particulièrement avec les PP. Marini, Fuciti, Ferreira, qui refusent de reconnaître l’autorité des vicaires apostoliques. De Bourges relève 19 points jugés contraires à la bonne théologie et à la saine discipline, il les adresse à Rome pour les faire condamner.
Les Jésuites répliquent en demandant le rappel des missionnaires français du Tonkin. Ces divergences ont naturellement un écho parmi les chrétiens, qui prennent parti, les uns pour les prêtres des MEP., les autres pour les prêtres de la Compagnie de Jésus . Lles choses vont parfois très loin., comme l’attestent les annales et les journaux rédigés par les missionnaires et restés inédits .
Le 25 novembre 1679, à la demande de Mgr Pallu, le Tonkin est divisé en deux vicariats : le Tonkin occidental et le Tonkin oriental. Le P. de Bourges est nommé évêque d’Auren et vicaire apostolique du Tonkin occidental. Le seul évêque présent en Indochine est alors Mgr Laneau au Siam. Le P.de Bourges s’y rend afin de recevoir de lui la consécration épiscopale. La cérémonie a lieu à Juthia le 17 mai 1682.
Quatre ans plus tard, le 20 mai 1686, un décret le nomme administrateur général des MEP de Chine pour remplacer Mgr Pallu mort en 1684, mais cette nomination n’a pas de suite, et toute la carrière de l’évêque est consacrée au Tonkin.
De Juthia, le nouveau prélat retourne dans sa mission. Le 21 décembre 1682, il sacre le P. Deydier , nommé évêque d’Ascalon et vicaire apostolique du Tonkin oriental.
Il s’occupe ensuite de son vicariat, qui comprend le territoire formant actuellement les quatre vicariats des Tonkin occidental, Tonkin méridional, Tonkin maritime et Haut-Tonkin, peut-être même aussi le Laos.
On y compte environ 80000 chrétiens, 150 catéchistes, une douzaine de prêtres indigènes, et à peine 20 missionnaires européens: Jésuites portugais et espagnols, Augustiniens qui se retirent bientôt au Tonkin oriental, et prêtres des MEP.
Une des plus épineuses questions que l’évêque eut à résoudre est la délimitation des districts entre les prêtres des MEP et les Jésuites.
Pour comprendre cette question, il est bon de se rappeler le mode d’apostolat, au XVIIe siècle, dans un pays entièrement païen. Quand les missionnaires arrivent, ils prêchent dans les villages où la liberté leur est laissée, et baptisent les infidèles qu’ils trouvent bien disposés. Au cours des années, ils continuent à s’occuper de ceux qu’ils ont instruits, sans se soucier de tracer une limite à leur champ d’action. Tant qu’ils appartiennent au même Corps, les inconvénients de ce système ne se font pas notablement sentir¬ ; mais quand ils relèvent de Congrégations différentes, des complications surgissent, faciles à concevoir. Par exemple, dans un même village de 200 chrétiens, se trouvent trois églises édifiées par des missionnaires de trois Congrégations, ayant chacune une méthode d’évangélisation particulière, et parfois donnant sur les mêmes actes des directions contraires ; les chrétiens fréquentent exclusivement une de ces églises, et reconnaissent uniquement l’autorité du prêtre qui en était chargé, sans tenir compte de la distance ou de la proximité de leur demeure. Au Japon, les missionnaires se sont heurtés à cette difficulté d’une manière très sensible, puisqu’ils avaient une juridiction personnelle et non territoriale, c’est-à-dire une juridiction sur les individus, sans limites de territoires.
Au Tonkin, il en était à peu près de même, avec cette aggravation, que les vicaires apostoliques étaient une autorité nouvellement établie sur des travailleurs déjà anciens¬ ; que ces anciens étaient des religieux, dont l’opposition, leurs lettres le disent souvent, allait jusqu’à vouloir s’exempter de la juridiction épiscopale, non seulement en tant que religieux, chose ordonnée par l’Eglise, mais en tant que pasteurs d’âmes. Ils prétendaient aussi en exempter leurs chrétiens, conception entièrement contraire au droit.
De Bourges veut remédier à cette situation. Il demande à Rome de n’avoir dans son vicariat que des prêtres des MEP et des prêtres tonkinois. Ce projet, dont l’adoption aurait obligé les Jésuites à quitter le Tonkin occidental, n’ayant pas été agréé à Rome, l’évêque lui en substitue un moins radical, qui est de délimiter les districts des missionnaires, et de n’avoir dans un même district que des missionnaires d’un même Corps. Ce plan, en faveur duquel Rome ne devait se prononcer que plus tard, souleva des récriminations parmi les Jésuites que leurs chrétiens suivirent. Des deux côtés on écrivit à la Propagande et au Pape. Le 7 janvier 1689, par le bref Ingentis profecto (Jus Pont. de Prop. Fid., vii, supplém., p. 65), Innocent XI ordonna aux chrétiens de se soumettre au vicaire apostolique, tout en leur promettant de leur envoyer des Jésuites pour remplacer ceux qui avaient été rappelés Huit ans plus tard, le même ordre, qui n’avait été que médiocrement exécuté, fut renouvelé par le bref Gratissimæ nobis (Jus Pont. de Prop. Fid., ii, p. 157), du 15 janvier 1697, signé par Innocent XII.
Les opposants sont, comme au début des MEP, soutenus par les Portugais ; ceux du Tonkin sont appuyés par l’évêque de Macao, qui prétend avoir juridiction sur toute l’Indochine orientale. Innocent XII, par le bref Cum sicut (Jus Pont. de Prop. Fid., ii, p. 161), du 22 octobre 1696, ordonne à l’archevêque de Goa et aux évêques de Macao et de Malacca de respecter la juridiction des vicaires apostoliques, et d’obéir sur ce sujet à tous les ordres pontificaux. Le lendemain, 23 octobre, le bref Ex commissæ nobis (Jus Pont. de Prop. Fid., ii, p. 162¬ ; vii, supplém., p. 170) sépare le Tonkin du diocèse de Macao. Ces mesures importantes diminuent les difficultés sans les supprimer totalement.
La formation et l’augmentation du clergé indigène est un des principaux objectifs de Mgr de Bourges ; en 1701, on compte 25 prêtres tonkinois.
En 1688 ou 1689, il reçoit avec Mgr Deydier une lettre signée en 1687 par le cardinal Altieri, préfet de la Propagande, leur demandant les noms des prêtres indigènes qu’ils jugent capables de leur être donnés pour coadjuteurs. Tous les deux répondent qu’ils ne voient encore personne. Mais en 1694, le 14 décembre, de Bourges écrit qu’il a depuis trois ans un prêtre annamite, Joseph Phuoc, âgé de 35 ans, doué d’un tel mérite qu’il n’hésite pas, afin de satisfaire les désirs de la Propagande, à le proposer pour l’épiscopat. La proposition n’est pas retenue. Plus tard, quand elle fut de nouveau envisagée, Mgr Bélot ne jugea pas que Joseph Phuoc, malgré ses qualités et ses vertus, pût être élevé à l’épiscopat.
En 1702, de Bourges se choisit un coadjuteur, Edme Bélot, le plus ancien des deux seuls missionnaires des MEP placés sous sa juridiction.
C’est à cette époque qu’ils étudient le texte du Règlement des MEP, qui leur a été envoyé par les MEP. L’évêque adresse à ce sujet une longue lettre aux prêtres des MEP en Chine ; il compose et expédie aux MEP un projet de Règlement, qui s’éloigne notablement de celui qu’on lui avait soumis.
En 1705, une persécution éclate, rapidement apaisée ; l’année 1712 en vit une autre plus sérieuse. Le vieil évêque est expulsé du Tonkin en 1713, avec son coadjuteur, le P. Bélot ; ce dernier réussit à rentrer presque aussitôt ; de Bourges se réfugie au Siam, avec un certain nombre de séminaristes. Il meurt à Juthia le 9 août 1714, à l’âge d’environ 84 ans.
Les Annales de la mission du Tonkin occidental, apprécient sa carrière et son caractère, louent son zèle pour la formation des prêtres indigènes et des catéchistes. Son amour de la mortification lui fait observer jusqu’à la fin de sa vie tous les jeûnes prescrits par l’Eglise, et, de plus, accomplir les mêmes austérités le vendredi et le samedi de chaque semaine ; sa prudence et la force de son esprit « le rendant toujours égal à l’extérieur » ; son humeur douce et agréable qui charmait tout le monde, son esprit d’oraison et son amour pour la chasteté « qu’il gardait avec grand soin ».
Références
Bibliographie
— Relation du voyage de Monseigneur l’evesque de Beryte, vicaire apostolique du royaume de la Cochinchine, par la Turquie, la Perse, les Indes, etc., jusqu’au royaume de Siam, et autres lieux. — À Paris, chez Denys Bechet, rue Saint-Jacques, au Compas d’or et à l’Ecu au Soleil, mdc.lxvi, avec priv. du Roy et app. in-8, pp. 245 + 6 ff. au com. p. l. tit., l’ép. l’avis et l’es. + 1 f. à l. f. p. l. tab. priv. et app.
Id., 2e édit. — Id., mdc.lxviii.
Id., 3e édit. — A Paris, chez Charles Angot, rue Saint-Jacques, au Lyon d’Or, mdc.lxxxiii, avec priv. du Roy. et app., in-8, pp. 167 s. l’ép., l. t., etc.
Naaukeurig Verhaal van de Reis des Bisschops van Beryte. Uit Frankryk te Lant en ter Zee naar China : Namelijk Uit Marsilien over de middelantsche Zee naar Aleppo, en voort te lant deur Syrien, Arabien, Persiën, en verscheide Indiaansche Lantschappen. Met een naaukeurige Berschrijving van de Steden en Plaatsen, Godsdiensten en Zeden der Volken ; als ook van de kosten, tot deze Reis vereischt, en van de Munt, in deze Landen dienstig. Door M. de Bourges, Reisgenoot in deze Reis, in de Franche Taal beschreven, en van J. H. Glazemaker daar uit getrokken en vertaalt. Met bygevoegde Beschrijvingen van versheide voortreffelijke Steden en Landen. Metveel kopere Platen verçiert. — T’Amsterdam, Voor Abraham Wolfgang, Boekverkooper, aan d’Opgang van de Beurs, by de tooren in’t Geloof, 1669, in-4, pp. 126.
Id., [Autre traducteur]. — By Jan Bouman, Boekverkooper, in de Kalverstraet ; over de Kapel, 1683, in-4, pp. 126. Front. gravé.
Erzählung der Reise des Bischofs von Beryte nach Algier durch Syrien, Arabien, Persen und unterschiedene Indische Landschaften in das Reich Siam. — Leipzig, 1671, in-4.
Notes bio-bibliographiques
N. L. E., vi, pp. lxxviii et suiv., 161.
A. P. F., ii, 1826-27, p. 155 ;
M. C., iv, 1871-72, Sa mort, p. 344 ; v, 1873, Reçu par le roi du Tonkin, p. 155 ; x, 1878, p. 383.
B. O. P., 1891, p. 372, 1892, p. 472.
Relat. des miss. des evesq. franç., pp. 3, 19 et suiv., 288 et suiv., 321 et suiv. — Relat. des miss. et des voy. 1672-1675, pp. 68 et suiv., 135, 161 et suiv., 241, 247, 291 et suiv. — Relat. des miss. et des voy. 1676-1677, pp. 78, 90. — Ann. Cong. M.-E., pp. 133, 163 et suiv.
Docum. hist., Tab. alph. — Lett. de Mgr Pallu, Tab. alph. — Hist. gén. Soc. M.-E., Tab. alph. — Hist. gén. miss. cath., ii, 2e part., pp. 399 et suiv., 485 et suiv. — Lett. à l’év. de Langres, pp. 19 et suiv., 32 et suiv., 84, 326. — Hist. de l’ét. du Christ., i, pp. 44, 48, 95 et suiv. ; ii, pp. 19 et suiv., 37 et suiv., 81 et suiv., 126, 190 et suiv., 265 et suiv. — La vie de mess. Fr. Picquet, pp. 162, 163. — La Franc. pont., p. 677.
Anecd. sur l’ét. de la Rel., vii, pp. 49, 262. — Rép. de MM. des M.-E. à la prot. et aux rép. des Jés., p. 186. — Hist. nat. civ. et pol., ii, p. 143.
Collect., 13 janv. 1665 : nos 250, 1182 ; 14 mai 1681 : n° 662 ; 20 mars 1685 : nos 1977, 2005 ; 27 janv. 1687 : n° 281 ; 17 juin 1701 : n° 1285.