Alphonse MISNER1844 - 1897
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1116
Identité
Naissance
Décès
Biographie
[1116]. MISNER, Alphonse, né à Wittenheim (Haut-Rhin) le 16 décembre 1844, entra minoré au Séminaire des M.-E. le 14 octobre 1868. Ordonné prêtre le 25 mai 1872, il partit pour le Cambodge le 19 juin suivant. Il étudia la langue à Phnom-penh, dans la paroisse de Rosey-keo (Notre-Dame Auxiliatrice), et, après la division du district, devint en 1875 curé de la paroisse de Xom-bien (église Saint-Pierre et Saint-Paul) dans la même ville. Ce district comprenait les postes de Meat-krasa (Mot-kresar) et de Battambang ; il y fonda en 1881 la chrétienté d'An-long-sa ou Taam, et en 1882 celle de Khsach-pouy. En 1887-1888 il administra la paroisse de Rosey-keo.
Tombé malade, il vint se soigner en France, puis retourna en 1890 à son poste qu'il garda jusqu'en 1897. Cette année-là, il revint de nouveau au sanatorium de Saint-Raphaël à Montbeton (Tarn-et-Garonne), où il mourut le 24 décembre. C'était un esprit judicieux et avisé sous des formes originales. Il légua pour l'œuvre des catéchumènes les quelques centaines de francs qu'il possédait, et comme on lui observait qu'il ne resterait rien afin de faire célébrer des messes pour le repos de son âme : " Non, répondit-il, j'ai foi en la miséricorde du bon Dieu.
Nécrologie
M. MISNER
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU CAMBODGE
Né le 16 décembre 1844
Parti le 19 juin 1872
Mort le 24 décembre 1897
Le 24 décembre 1897, un peu avant midi, mourait à Montbeton, assisté des prières de tous les confrères présents au sanatorium, M. Misner, missionnaire apostolique du Cambodge. La veille au soir, il s’était confessé une dernière fois, et avait, quelques heures plus tard, reçu l’extrême-onction.
M. Alphonse Misner, né à Vittenheim (Alsace) le 16 décembre 1844, était parti le 19 juin 1872 pour le Cambodge, où il arriva au mois d’août suivant. Il fut tout d’abord envoyé à Pnom-penh pour y rem¬placer M. Leray qui avait été nommé à ce poste, mais qui mourut par accident avant de l’occuper. Il fit son apprentissage de la vie aposto¬lique sous la direction de M. Silvestre. Après un voyage que celui-ci dut faire en France, son district fut partagé, et M. Misner devint titulaire de la nouvelle station. Nha-lu ou Ben-song, auquel il donna dans la suite le nom de Rensim, devint ainsi le champ où, pendant vingt-cinq ans, il exerça son apostolat.
Notre regretté confrère dirigea en même temps, pendant quelques années, Mot-cresar et Battambang qui, plus tard, formèrent des cen¬tres d’action distincts ; il jeta aussi les premières assises de deux petites chrétientés : Along-sa et Ta-keo. Mais la station qui fut toujours la plus chère à son cœur, celle où il a le plus travaillé et a été le plus aimé, c’est Rensim qui, sous sa direction, a vu la population chrétienne s’élever de 300 âmes à 1.200. « C’est la plus belle chrétienté de la Mission, disait-il ; c’est la meilleure. » De fait, une famille, où l’union la plus parfaite règne entre la tête et les membres, est une belle famille ; elle se trouve dans les conditions les plus favorables pour demeurer bonne, ou le devenir, si elle ne l’est déjà.
Il y avait, peut-on dire, chez notre confrère deux hommes : le ¬P. Misner avec ses chrétiens, et le P. Misner avec les Européens, mis¬sionnaires ou autres.
Envisagé à ce second point de vue, M. Misner avait bien quelque grain d’originalité. Si j’osais citer ses boutades et ses reparties, on trouverait ample matière pour composer un chapitre supplémentaire aux Mosaïques, et ce ne serait peut-être pas le moins intéressant. Quand notre confrère se trouvait avec d’autres missionnaires ou des compa¬triotes, il prétendait « être en vacances, et en vacances, ou peut s’amuser. »
Mais rentré chez lui, il travaillait, et travaillait très sérieusement. Plusieurs fois je l’ai vu examiner des affaires fort embrouillées ; je me demandais comment il allait s’en tirer, et, je l’avoue, je ne reconnais¬sais plus mon homme. J’admirais le grand bon sens et la sagacité avec laquelle il éclaircissait les choses. Cette droiture et la générosité avec laquelle il aidait les pauvres expliquent très bien, à mon avis, l’affection qui exista toujours entre M. Misner et ses chrétiens.
Cette affection faisait admettre, sans réplique, les décisions portées par lui, bien que parfois elles fussent un peu sévères. Un jour, il ap¬prend qu’un de ses chrétiens a joué et perdu une somme assez forte. Il l’appelle et lui dit : « Tu ne crains pas, malheureux, de mettre ta famille dans la misère ? — Oh ! ce n’est rien, Père ; j’ai gagné suffisamment dans la dernière saison de pêche pour que la gêne ne nous atteigne point. — Eh ! bien, s’il en est ainsi, afin que le bon Dieu ne te punisse pas, tu vas donner pour aider les catéchumènes, autant que tu as perdu. » Le coupable trouva la punition fort juste et s’exécuta de bonne grâce.
S’il était possible de compter l’argent que M. Misner a dépensé pour ses catéchumènes, celui qu’il a procuré à des confrères pour cette même œuvre et pour d’autres encore, on serait étonné du total. Où et comment a-t.il pu trouver pareille somme ? Sans doute il demandait à ceux de ses chrétiens qui avaient fait bonne pêche, et qui lui donnaient largement. Mais il apportait sa quote-part : c’était le fruit des privations qu’il s’imposait.
L’an dernier, j’allais un jour dîner chez lui ; j’invite un jeune con¬frère à m’accompagner. Comme celui-ci tardait à répondre, je lui demande pourquoi il montre si peu d’empressement. « C’est que j’ai faim, dit-il, et je vous avoue que dans tout ce que sert le P. Misner, il n’y a rien de mangeable. — Ceux qui sont de cet avis, répliquai-je, ne manquent pas depuis vingt-cinq ans, mais venez quand même. Vous ne connaissez pas l’homme, vous verrez comment il faut s’y prendre. »
Nous arrivons ; après les salutations d’usage : « Père Misner, dis-je, nous venons dîner avec vous. — Pas besoin de le dire... — Pardon ! je crois au contraire qu’il faut le dire, car vous ne mangez que du poisson salé, et nous... — Bien, bien, je comprends. Dans ce cas, il faut avertir mon cuisinier. » Il l’appelle et lui fait force recommanda¬tions, puis se tournant vers moi : « Je l’ai toujours pensé, vous ne ferez jamais un trappiste. Pourtant, si le bon Dieu a mis tant de poissons et de piments dans ce pays, c’est bien parce que c’est la nour¬riture la plus convenable pour la santé. »
Ne serait-ce pas cette nourriture qu’il assaisonnait d’épices pour la rendre passable ; ne seraient-ce pas ces privations qui ont causé la maladie d’estomac pour laquelle notre confrère fut obligé d’aller deux fois à Hong-kong et deux fois en France ? S’il en est ainsi, Dieu qui voit le mobile premier de toutes nos actions et qui récompense géné¬reusement la moindre bonne volonté, Dieu n’aura-t-il pas magnifiquement récompensé tant de privations faites dans le but d’augmenter le troupeau du Christ ? C’est le ferme espoir de tous ceux qui ont connu et qui regrettent notre cher confrère.
† J.-B. GROSGEORGE,
Év., vic. apost. du Cambodge.
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Références
[1116] MISNER Alphonse (1844-1897)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1874 (déc.), p. 25 ; 1889, p. 184 ; 1896, pp. 235, 237. - M. C., vii, 1875, p. 138. - A. M.-E., 1913, pp. 254, 255.
Notice nécrologique. - C.-R., 1898, p. 286.