Jean COMBALBERT1852 - 1906
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1360
Identité
Naissance
Décès
Missions
- Pays :
- Vietnam
- Région missionnaire :
- 1878 - 1906 (Saigon)
Biographie
[1360]. COMBALBERT, Jean-Ferdinand, né le 3 (m) ou le 5 (é) décembre 1852 à La française (Tarn-et-Garonne), élève du petit séminaire de Moissac, aspirant du Séminaire des M.-E. le 22 septembre 1874, reçut le sacerdoce le 22 septembre 1877, et partit le 27 décembre suivant pour la Cochinchine occidentale. D'abord vicaire dans la paroisse de Mac-bac, il fut, un an plus tard, professeur au séminaire de Saïgon.
En 1880, il fut chargé du district de Dat-do, où il travailla jusqu'à la fin de sa vie ; il fonda quatre nouvelles stations ; dans celle de Lang-lon, il obtint une vaste concession de terre et y établit de nombreux païens qui se convertirent. Malheureusement, l'œuvre si prospère au début fut ruinée par le mauvais vouloir de l'administration civile. Le missionnaire mourut à Saïgon le 22 juin 1906. Il possédait bien la langue annamite.
Nécrologie
M. COMBALBERT
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE LA COCHINCHINE OCCIDENTALE
Né le 5 décembre 1852
Parti le 26 décembre 1877
Mort le 22 juin 1906
« Jean-Ferdinand Combalbert, né le 5 décembre 1852 à Lafrançaise, gentille petite ville du département de Tarn-et-Garonne, fit ses études au séminaire diocésain de Moissac. C’est là qu’il sentit éclore en con cœur les premiers germes de la vocation apostolique. Après avoir mûrement réfléchi pour connaître la volonté de Dieu, il demanda à entrer dans cette maison de la rue du Bac à Paris, où se forment les jeunes gens qui s’en vont au loin évangéliser les peuples plongés encore dans les ténèbres du paganisme. Ordonné prêtre le 22 septembre 1877, reçut sa destination pour Saïgon, où il arriva le 1er février de l’année suivante. A cette époque, je venais d’être chargé de la paroisse de Mac-bac. Le supérieur de la mission, sachant que le nouveau débarqué était un compatriote et croyant, avec raison, me faire plaisir, me le donna comme vicaire. M. Combalbert apprit très vite l’annamite ; après six mois d’étude, il put monter en chaire, mais ce premier sermon lui causa une certaine émotion.
« Pendant son court séjour à Mac-bac, M. Combalbert montra combien vive et ardente était la confiance qu’il avait en la sainte Vierge. Cette paroisse est située près du Bassac le plus grand fleuve de la Cochinchine, en comparaison duquel le Tarn et la Garonne ne sont que de minuscules ruisseaux. Peu de temps après son arrivée, je conduisis le jeune vicaire faire une visite de politesse à notre plus proche voisin, le doyen des missionnaires du Cambodge, qui habitait sur la rive opposée. Ce jour-là, le passage du fleuve offrait un réel danger. En voyant les vagues s’élever comme des montagnes, M. Combalbert, né dans un pays que baignent deux rivières ordinairement très calmes, éprouva une petite frayeur, et moi-même, quoique habitué aux colères du Bassac, j’étais fort peu rassuré.
« Plaçons-nous sous la puissante protection de Marie en chantant l’Ave « Maris stella », me dit mon vicaire. Je me rangeai à ce sage conseil ; je joignis ma voix à la sienne, et tandis que nos deux voix, mêlées au mugissement des vagues, célébraient les louanges de la Reine du ciel, la barque qui nous portait arrivait sans encombre de l’autre côté du fleuve. Nous étions sauvés.
« M. Combalbert resta un an à Mac-bac ; après quoi, il fut envoyé au séminaire de Saïgon en qualité de professeur. Mais Dieu lui destinait une vie plus active et moins uniforme que celle qu’on mène dans une maison d’éducation, où tous les exercices de la journée sont réglés avec une exactitude qui peut ne pas plaire à certains tempéraments. Enfermé dans une étroite enceinte, notre jeune confrère se considérait un peu comme un oiseau captif dans sa cage, qui soupire après le jour où il pourra déployer ses ailes et vivre en liberté. Aussi, quand, au commencement de 1880, le vicaire apostolique offrit à M. Combalbert le poste de Dat-do, celui-ci l’accepta-t-il avec plaisir et reconnais¬sance. A cette époque, le district ne comptait que deux chrétientés : Dat-do, le centre principal, où résidait le missionnaire, et Thom. Quelques années après, quatre nouvelles stations étaient fondées : Huyen-moc, Go-sam, Thuoc-hai, Lang-lon.
« Les débuts brillants de cette dernière chrétienté et la catastrophe qui la fit disparaître constituent, dans l’existence de notre confrère, un épisode sur lequel il convient de s’arrêter quelques instants. C’est comme le feuillet d’un livre, dont la première page ne ressemble pas du tout à la seconde : le recto raconte les joies et les espérances ; le verso, les tribulations et la chute finale.
« Le poste de Dat-do se trouve au sud-est de Saïgon, sur la frontière de l’Annam. Ce voisinage inspira à M. Combalbert la pensée de demander une vaste concession de terrain, sur la partie qui dépend du roi de Hué, mais qui reste soumise à l’administration d’un fonctionnaire français ayant le titre de Résident. Les démarches faites dans ce sens ayant abouti, notre confrère chargea un de ses notables, homme actif et intelligent, de trouver des gens pour peupler le nouveau domaine. Cet Annamite, appelé Qua, se montra digne de la confiance que le missionnaire lui avait manifestée et, quelques jours après, il prenait le chemin de Lang-lon avec deux ou trois chefs de famille. Les gens qui composaient cette petite caravane commencèrent par élever de modestes cases, afin de se mettre à l’abri de la pluie et du soleil ; puis, ayant défriché, non sans fatigue et sans peine, ces terres vierges et sur lesquelles jamais n’avait passé une charrue, il les ensemencèrent. La première année, la récolte fut supserbe ; une riche moisson les dédommagea amplement de leur labeur. C’était plus qu’il n’en fallait pour que les païens des environs, voyant ces terres rémunérer de la sorte ceux qui les cultivaient., vinssent en foule augmenter le nombre des premiers colons. Selon la recommandation du missionnaire, Qua recevait volontiers les nouvelles recrues et si même, dès le principe, il devait délier les cordons de sa bourse pour les aider dans les frais de l’installation, il s’exécutait de bonne grâce.
« Lang-lon avait progressé avec les ans ; le pusillus grex était devenu un troupeau considérable, et l’humble grain de sénevé, un grand arbre à l’ombre duquel les oiseaux bâtissaient leur nid. Malgré les 50 kilo¬mètres qui séparaient Dat-do de Lang-lon, M. Combalbert allait souvent visiter ceux qui s’y étaient établis. L’accroissement rapide de la jeune colonie et l’union parfaite des chrétiens avec les païens lui faisaient entrevoir le jour prochain où, lui aussi, à son tour, pourrait cueillir les précieuses gerbes d’une moisson spirituelle. En effet, il se plaisait à espérer que ces païens, après avoir récolté une suffisante provision de riz, leur permettant de subvenir aux nécessités de la vie présente et aux besoins du corps, demanderaient à recevoir le baptême qui, en purifiant leur âme, les arracherait à l’empire du démon pour les ranger sous la bannière de Jésus-Christ.
« Notre confrère estima que le moment était venu de bâtir une église au milieu de la concession. Lorsque, jadis, Salomon voulut construire le temple de Jérusalem, il écrivit au roi de Tyr, le priant d’envoyer une équipe de ses sujets couper des cèdres sur le mont Liban. M. Combalbert n’eut qu’à envoyer des hommes vers la forêt voisine, où ils trouvèrent, en abondance, du go, du cam sec et autres arbres, d’une espèce aussi précieuse que ceux qui furent expédiés par Hiram au glorieux fils de David. Abattre les plus grosses pièces et les transporter jusqu’à l’endroit où la maison de Dieu devait être élevée n’était pas une besogne facile ; néanmoins, les païens, ayant uni leurs efforts à ceux des chrétiens, elle fut accomplie heureusement ; tant il est vrai que l’union fait la force. Le jour où notre confrère fit la béné-diction du nouvel édifice, il ressentit, au fond du cœur, une joie qu’il est plus aisé de comprendre que d’exprimer. Cette joie fut augmentée encore lorsque, l’année suivante, il eut la consolation de répandre, sur le front d’une cinquantaine de catéchumènes, l’onde régénératrice du sacrement qui, de ces esclaves du péché, de ces suppôts de l’enfer, faisait autant d’enfants de Dieu et d’héritiers de son royaume. Ce petit noyau de païens, qui venaient d’abandonner le culte des idoles pour entrer dans le giron de l’Église catholique, constituait les prémices de l’apostolat exercé par M. Combalbert au sein de la colonie naissante. C’était la première conquête de la vérité sur l’erreur, la première victoire de la croix sur l’idolâtrie.
« Ainsi, grâce à l’heureuse inspiration d’un missionnaire français, ce coin de terre perdu au fin fond de l’empire annamite, après quelques années d’un pénible travail avait été merveilleusement transformé ; le désert sauvage s’était changé en une vaste oasis.
« La nouvelle colonie prospérait donc au double point de vue matériel et spirituel. Le mouvement de conversion ayant commencé, notre confrère se plaisait à croire qu’il irait toujours en progressant. Lang-lon, en annamite, signifie terre submergée par les eaux ; M. Combalbert aimait à penser que ce vaste étang deviendrait un autre lac de Tibériade, dans lequel il pourrait lancer ses filets, et, comme saint Pierre, autrefois, prendre une grande quantité de poissons. Erreur profonde, déception amère ! C’est précisément quand cette chrétienté donnait les plus belles espérances, qu’elle se vit soudain atteinte dans sa floraison et, après avoir végété encore quelques temps en un triste marasme, finit par disparaître complètement.
« Inutile de raconter en détail pour quelle cause et à la suite de quels événements cette colonie, qui faisait présager un si bel avenir, a eu une fin si déplorable . L’antique scène du paradis terrestre se renouvela, il y a trois ans, dans cette partie de l’empire d’Anam. Le fonctionnaire, sous l’administration duquel se trouvait Lang-son, joua, vis-à-vis des gens de M. Combalbert, le funeste rôle du serpent infernal auprès de nos premiers parents. Le démon, jaloux de la félicité qu’Adam et Ève goûtaient sous le feuillage de l’Éden, résolut d’y mettre fin ; on sait de quel artifice il usa et combien il réussit. Le fonctionnaire en question, voyant de mauvais œil l’influence morale que Qua avait sur les Annamites installés dans la concession, jura ses grands dieux qu’il l’en dépouillerait, et, pour atteindre un si triste but, il ne craignit pas de se montrer injuste, féroce. Un indigène, exerçant un brin d’autotité sur d’autres indigènes, au nom d’un curé, c’était impardonnable ! Qua fut traduit devant les tribunaux et condamné pour abus de pouvoir à six mois de prison. Les simples chrétiens eurent beaucoup à souffrir, et les païens eux-mêmes ne furent point épargnés. Les uns et les autres se virent en butte à tant de vexations, que la situation devint intolérable. En face d’une telle malveillance, M. Combalbert résolut, l’âme remplie de douleur, d’abandonner Lang-lon, de transporter à Dat-do l’église qu’il y avait bâtie, et d’engager les habitants, catholiques ou païens, à venir se fixer dans une de ses anciennes chrétientés.
« M. Combalbert avait toujours joui d’une excellente santé ; tandis que la plupart des confrères, dès leur arrivée en mission, sont plus ou moins éprouvés par le climat, lui n’avait jamais été sérieusement malade.
« Après vingt-cinq ans passés sous le ciel des tropiques, il avait conservé une figure épanouie commne une rose fraîchement éclose. Sa florissante santé commença à faiblir après le désastre de Lang-lon, et beaucoup de confrères pensent que c’est le chagrin qui a ébranlé sa forte constitution. Néanmoins, au début, rien ne faisait prévoir un fatal dénouement. M. Combalbert souffrait d’un asthme qui, parfois, lui rendrait la respiration difficile. Il y a environ trois mois, il vint à Saïgon pour consulter un médecin. Celui-ci, croyant pouvoir arrêter les progrès du mal, lui prodigua ses soins avec un zèle au-dessus de tout éloge ; mais, après quelques semaines de traitement, ayant constaté que la maladie, loin de diminuer, s’aggravait de jour en jour, il conseilla à notre confrère un retour en France.
« M. Combalbert se disposait à partir par un des plus prochains paquebots, quand son état empira de telle sorte que le docteur ne crut pas prudent de l’embarquer, par crainte qu’il ne pût arriver à Marseille. Cette crainte n’était que trop fondée, et si notre confrère avait pris place sur le bateau, probablement il aurait été jeté à la mer.
« La décision du médecin causa tout d’abord une véritable déception au malade, mais il accepta le sacrifice avec un courage et résignation, et ne songea plus qu’à préparer son voyage pour la patrie céleste. Si la science et le dévouement avaient pu guérir notre confrère, il eût vite recouvré la santé, car le Dr Augier fit tout ce qui était en son pouvoir pour obtenir un tel résultat, mais le pieux missionnaire était un fruit mûr pour le ciel. Dieu voulait le cueillir ; dès lors, tout effort humain devait nécessairement rester impuissant pour le tenir attaché plus longtemps à l’arbre de la vie. Le samedi 2 juin, veille de la Pentecôte, notre confrère, se sentant plus fatigué, manifesta le désir de rece¬voir l’extrême-onction, et, comme ce jour-là Mgr Mossard était en tournée de confirmation, en qualité de compatriote et d’ami il me pria de lui administrer les derniers sacrements. Pendant que je récitais les prières du rituel, ma voix tremblait d’émotion. M. Combalbert, selon son habitude, était calme et tranquille, ne paraissant nullement ému. La cérémonie terminée, ayant voulu m’approcher pour lui adresser quelques paroles de consolation et d’encouragement, je crus voir le moment où les rôles allaient être intervertis : le malade consolant le bien portant, le mourant encourageant celui qui jouissait d’une excellente santé.
« Notre confrère vécut encore trois semaines, endurant ses souffrances avec une patience qui édifiait tous ceux qui en étaient témoins. Enfin le 22 du même mois, fête du Sacré-Cœur de Jésus, pour lequel il avait toujours eu une grande dévotion, le cher M. Combalbert expirait doucement, vers les 4 heures du soir, ayant à ses côtés deux missionnaires, qui récitaient les prières des agonisants pour l’aider dans ce passage du temps à l’éternité, de la terre au ciel. Le lendemain furent célébrées les obsèques du regretté défunt et, après le chant des vêpres dans la chapelle du séminaire, nous conduisîmes sa dépouille mortelle au tombeau de l’évêque d’Adran, près duquel se trouve le cimetière des missionnaires. Tous les confrères de Saïgon et des environs, un nombre considérable de religieuses françaises et annamites, ainsi qu’un petit groupe de chrétiens venus de Dat-do, suivaient le funèbre cortège.
« Les paroissiens de M. Combalbert ont montré combien vive et ardente était l’affection qu’ils avaient pour lui. Au commencement de la maladie, quelques-uns n’avaient pas craint de parcourir une grande distance, afin de se procurer la satisfaction de voir encore une fois leur bien-aimé pasteur. Ils entouraient la couche où celui-ci reposait, manifestant leur joie si un mieux se déclarait dans son état, ne cachant pas non plus leur chagrin aussitôt que cet état devenait alarmant. Si la présence de ces braves gens n’eut aucune efficacité sur la santé du malade, du moins ce témoignage d’attachement était comme un baume bienfaisant, qui adoucissait un peu ses souffrances. Au jour des funérailles, la paroisse de Dat-do fut encore représentée par deux ou trois dignitaires, qui avaient voulu donner cette suprême marque de sympathie et de reconnaisance à leur missionnaire.
« M. Combalbert, par son bon caractère, avait conquis l’affection générale : il était tendrement aimé, non seulement de tous ses confrères, mais encore de ses chrétiens.
« Voir des prêtres étroitement unis par les liens de la charité est chose si commune, que cela ne saurait étonner ; mais voir la fleur de la première des vertus s’épanouir dans l’âme de ces Annamites, naguère encore païens, voilà qui peut paraître étonnant et ne s’explique que par la salutaire influence du christianisme. En voyant les chrétiens de Dat-do pleurer autour du cercueil de leur bien-aimé pasteur, on songeait aux larmes que versa autrefois notre Sauveur sur son ami Lazare, ce qui fit dire aux juifs qui étaient là : « Voyez comme il l’aimait ! » Les confrères qui furent témoins de la douleur manifestée par les paroissiens de M. Combalbert, ne manquèrent pas de s’écrier à leur tour : « Voilà comme ils l’aimaient ! » Il n’y eut pas que des larmes qui tombèrent des yeux, beaucoup de prières ferventes s’exhalèrent aussi des cœurs et montèrent vers le ciel, demandant à Dieu d’accorder à son serviteur ce que l’Église sollicite pour ses enfants pieusement décédés : Refrigerii sedem, quietis beatitudinem et luminis claritatem. »
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Références
[1360] COMBALBERT Jean (1852-1906)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1899, p. 216.
Notice nécrologique. - C.-R., 1906, p. 354.‹