Jean MONNIER1856 - 1910
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1476
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Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Chine
- Région missionnaire :
- 1881 - 1888 (Shenyang [Moukden])
- 1888 - 1910 (Jilin [Kirin])
Biographie
[1476]. MONNIER, Jean-Christophe, vint au monde le 30 janvier 1856 à Saint-Ferréol d'Auroure (Haute-Loire). Après avoir fait ses études classiques au petit séminaire de Monistrol, il entra laïque au Séminaire des M.-E. le 16 septembre 1877, fut ordonné prêtre le 26 septembre 1880, et partit le 10 novembre suivant pour la Mandchourie. Il étudia la langue et travailla d'abord à Nieou-tchouang. Chargé en 1882 du district d'Ing-tse, il s'y occupa activement de l'orphelinat de Tong-kia-touen dirigé par les Sœurs de la Providence de Portieux. En mai 1888, il fut placé dans le district de Paien-sou-sou ; il en développa les œuvres, y détermina des conversions, et se dévoua auprès des néophytes avec un zèle ardent et une bonté toujours compatissante. En 1891, il fut nommé provicaire. En 1896, il alla secourir R. Souvignet qui venait d'être attaqué à Hou-lan, et par des négociations bien conduites obtint une réparation.
En 1898, lors de la division de la Mandchourie en deux vicariats, il appartint à la Mandchourie septentrionale, toujours en qualité de provicaire. Pendant la révolte des Boxeurs en 1900, il lui fallut quitter son district, et à son retour, en 1901, il dut se réfugier à Tchang-lin-tse. La paix conclue, son évêque, Mgr Lalouyer, l'envoya à Pékin réclamer une indemnité pour les pertes que la mission venait de subir par la ruine d'une partie de ses établissements ; son savoir-faire et sa modération y furent appréciés. Ensuite, il devint procureur de la mission, et chef du district de Kouan-tcheng-tse où il eut bien vite ranimé la ferveur des chrétiens. Il travaillait à Harbine, province de Ghirin, depuis dix-neuf mois environ, lorsqu'il mourut dans sa résidence le 24 mai 1910. Affable, doux et zélé, il suscita des mouvements de conversion dans toutes les paroisses qu'il dirigea.
Nécrologie
M. J.-C. MONNIER
PROVICAIRE DE LA MANDCHOURIE SEPTENTRIONALE
Né le 30 janvier 1856
Parti le 10 novembre 1880
Mort le 24 mai 1910
Dans ces dernières années, en Mandchourie Septentrionale, la mort avait, de préférence, choisi ses victimes parmi les jeunes confrères nouvellement arrivés en mission ; cette fois-ci, elle nous a ravi le plus ancien des missionnaires, après trente ans de labeurs apostoliques. Rien ne faisait prévoir que le cher Provicaire dût nous être si tôt enlevé, car ses 54 ans ne lui paraissaient pas une charge trop lourde, et nous le voyions aussi robuste que d’habitude. Néanmoins, tout nous fait croire qu’il n’a pas été surpris. Il écrivait dernièrement à un confrère : « Je dois faire en sorte de bien employer le peu de temps que Dieu me donnera à vivre. » A son voisin de district il avait donné, d’autre part, certains renseignements sur des affaires qui intéressaient la Mission et son poste, et cela, disait-il, dans la crainte qu’il ne lui arrivât quelque accident.
Le dimanche 22 mai, il assistait à un mariage de catholiques Polo¬nais. Il se sentit subitement indisposé et se retira quelques instants à la sacristie. Il revint continuer la cérémonie et il semblait que son état n’avait rien de grave. La journée du lundi se passa comme d’habitude. Mais, pendant la nuit suivante, se trouvant plus mal, il appela Mes¬sieurs Revaud et Dassier, qui étaient de passage chez lui et cou¬chaient à proximité. Il les pria de l’aider à se lever. A peine fut-il sur son séant qu’il poussa deux soupirs et se laissa tomber : c’était fini. Notre-Dame Auxiliatrice était venue, le jour de sa fête, prendre son fidèle serviteur et le récompenser de ses longs travaux de mission.
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Jean-Christophe Monnier naquit à Saint-Ferréol d’Auroure, le 30 janvier 1856. Sa famille était une des plus honorables de la localité. Son vénéré père, vieillard de plus de 80 ans, lui survit encore ; sa mère était une de ces femmes chrétiennes à forte trempe, comme il s’en trouve encore parmi les religieuses populations du diocèse du Puy. Il reçut d’elle une éducation solide et sérieuse, faite non de sentiments trop tendres, mais de leçons et d’exemples de dévouement et d’atta¬chement au devoir, deux vertus qui furent la caractéristique de sa vie. Aussi, avec quelle joie se rappelait-il son souvenir ! Comme on était le bienvenu auprès de lui, quand on lui parlait de sa mère ! Et quel bon sourire s’épanouissait sur sa figure, lorsqu’il racontait lui-même quel¬ques anecdotes de son enfance, où il était question d’elle.
Sa mère fut son bon ange le jour où il fallut faire le choix d’une carrière. Le père aurait voulu le garder pour l’établir plus tard chef de la famille ; mais il s’inclina devant les désirs de sa chrétienne épouse, et le jeune Jean-Christophe put commencer l’étude du latin et entrer au petit séminaire de Monistrol. Il y fut un élève brillant et laborieux; sa belle intelligence lui permit d’acquérir des connaissances solides et variées ; il se fit surtout remarquer par la sincérité de sa piété et l’ardeur de sa foi.
En septembre 1877, il entra au Séminaire des Missions-Étrangères où il passa quatre années, pendant lesquelles il fut un aspirant régu¬lier, studieux, franc et ouvert, qui promettait le parfait missionnaire qu’il a été.
Vers la même époque, sa sœur Antoinette quittait la maison pater¬nelle et frappait à la porte du noviciat des Filles de la Charité de la rue du Bac. Ce second départ fut un rude coup pour la famille ; il combla de joie le futur missionnaire qui vit dans cette vocation des gages très sûrs de bénédictions pour les siens.
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Le 10 novembre 1880, M. Monnier recevait sa destination pour la Mandchourie, où il arriva au printemps de l’année suivante. Mgr Dubail, de vénérée mémoire, l’envoya apprendre la langue et se former à la pratique du ministère dans la ville de Niou-Tchouang, à 90 lys du port d’In-tze. Un an après, il recevait la charge de ce vaste district. Le champ ouvert à son activité était immense. A Toung-kia-touen se trouvait le grand établissement des Sœurs de la Providence qui contenait plus de 300 enfants. M. Monnier, sans négliger l’administration de ses chrétientés, se donna spécialement à cette œuvre si féconde en fruits de salut pour les âmes. Elle devint son œuvre de prédilection. Tout ce qu’il possédait était pour les orphelins. Comme il savait, et toujours à propos, émailler de quelques plaisirs la vie de cette exubérante jeunesse ! C’est à partir de cette époque, c’est-à-dire dès les commencements de sa vie de mission, qu’il adopta une singulière manière de vivre. Son cuisinier n’avait pas à se préoccuper de la quantité ou de la qualité de nourriture que pouvait réclamer l’etomac de notre Confrère qui se contentait, le plus ordinairement, de la plus frugale pitance. Il conservera ce régime dans tous les postes où il passera : partout le soin de son corps sera relégué au dernier plan ; il mangera un peu plus ou un peu moins, un peu plus tôt ou un peu plus tard, suivant ses occupations, suivant aussi la bonne humeur de son cuisinier. Il faut pourtant signaler une exception : la fête de saint Christophe était toujours dignement célébrée : ce jour-là, la table était copieusement servie et les orphelins de Toung-kia-touen se régalaient aux dépens de leur Père bien-aimé.
Notre Confrère était encore aumônier des Religieuses d’In-tze. Ce n’était pas une petite charge. Tous les quinze jours, par la pluie ou par la neige, par les chaleurs les plus torrides comme par les froids les plus vifs, il faisait sa demi-journée de course. Que de fois il arriva à la procure trempé jusqu’aux os, crotté par la boue des marécages, portant sur ses habits les signes non équivoques de ses glissades et de ses chutes. Il avait confiance en son cheval ; ce n’était pas sans raison. Par lui, en effet, il fut tiré d’une foule de mauvais pas et arraché à bien des périls. Il voyageait seul, ce qui n’est pas toujours prudent en nos pays. Sans les remarquables qualités de sa monture, il lui serait arrivé plus d’un malheur ; outre le danger de rester dans les bourbiers, il y avait celui d’être pillé : un coursier sûr et rapide est une aubaine dans les deux cas.
Le soin d’un vaste district, la direction de deux grands orphelinats, séparés par une longue distance, ne suffisaient pas au zèle de notre cher M. Monnier. Il brûlait du désir de convertir des âmes à Jésus-Christ. Affable, avenant, d’une grande bonté, il était bien doué pour amener les païens à entendre la parole de lumière ; partout où il a passé il a su créer un merveilleux mouvement de conversions. Ce n’est certes pas lui qui aurait exigé de ses néophytes des qualités et des vertus que de vieux chrétiens ne possèdent qu’à un degré imparfait ; s’adaptant à leurs faiblesses, compatissant à leurs misères physiques et morales, il était, à l’exemple du Divin Maître, plein de miséricorde et de charité. Ses bras étaient grands ouverts à toutes les infirmités, et toutes les infirmités venaient à lui avec l’espérance de trouver le pardon et le remède. Que plusieurs de ses néophytes ne soient pas restés parfaitement fidèles à leurs devoirs, après le départ de leur père dans la Foi, personne ne le niera ; mais personne n’osera chercher dans l’indulgence et la bonté du pasteur la cause de ces défections isolées.
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Au mois de mai 1888, Mgr Raguit demanda à M. Monnier de faire le sacrifice de son cher district de Niou-Tchouang pour prendre la direction de celui de Pa-Yen-sou. Le nouveau vicaire apostolique désirait avoir, en cet endroit, un successeur entre les mains duquel les œuvres fondées par lui au Nord de la Mandchourie seraient en sûreté. C’était une marque de haute confiance.
Aujourd’hui, grâce au chemin de fer, on va en deux ou trois jours du port d’In-tze à Pa-Yen-sou. En 1888, il fallait s’y rendre en voiture chinoise, et le voyage durait de 15 à 20 jours. Les routes étaient des fondrières pendant six mois de l’année, de mai à octobre. Après de nombreux incidents, le nouveau titulaire parvint à son poste, vers la fin du mois de juin. Il y trouva une magnifique chrétienté, un orphe¬linat de la Sainte-Enfance abritant plus de 50 enfants et des écoles florissantes. Là, comme à Niou-Tchouang, il se donna tout entier aux œuvres de son district. Les conversions des païens s’accentuèrent et il recueillit des baptêmes par centaines.
Moins d’un an après son arrivée, il eut la douleur d’assister aux der¬niers moments de son évêque, Mgr Raguit, qui mourut dans cette chrétienté, où il avait beaucoup travaillé et qu’il venait de quitter.
La vie de notre regretté Provicaire fut, à Pa-Yen-sou, ce qu’elle avait été à Niou-Tchouang, mais avec un surcroît de travail. Il avait la charge d’une chrétienté nouvellement fondée, à 40 lys de sa résidence, sur des terrains qui venaient seulement d’être défrichés. La fièvre des bois décimait les habitants de cette localité. Chaque année, le Mis¬sionnaire subissait une période de surmenage, par suite des voyages fréquents qu’il devait faire pour porter les secours religieux aux fidèles, que la maladie attaquait régulièrement aux environs du printemps. Dans une de ses visites, il fut atteint lui-même, et il ne dut qu’à sa robuste constitution d’échapper à la mort.
D’autres ennuis lui vinrent du côté des ennemis de la Religion chré¬tienne. En 1896, M. Regis Souvignet était attaqué dans son poste de Hou-Lan par un groupe de soldats et laissé pour mort dans sa rési¬dence. M. Monnier vole à son secours et, avec beaucoup de tact et de sagesse diplomatique, obtient une juste réparation de cet attentat, sans qu’il soit nécessaire de recourir aux autorités supérieures.
En 1900, après le massacre de MM. Georjon et Leray par les Boxeurs, il dut prendre la route de l’exil avec les confrères qui purent échapper au fer des persécuteurs. Moins d’un an après, il retournait à Pa-Yen-sou et ne trouvait que les quatre murs de sa résidence. Au lieu de relever les ruines, il dut encore fuir devant les brigands et se réfugier à Tchang-Lin-tze. Après la paix, il se rendit à Pékin, avec mission de demander une indemnité pour les pertes subies par nos établissements. Ses efforts persévérants furent couronnés de succès ; il obtint ce qui était nécessaire pour réparer nos désastres.
A son retour de Pékin, Mgr Lalouyer lui confia la procure de la Mission et le district de Kouan-Tcheng-tze. Les chrétiens n’étaient pas nombreux dans ce poste ; la tourmente les avait dispersés. M. Mon¬nier sut, par son zèle, ranimer la vie religieuse et susciter un beau mouvement de conversions. Chaque année lui donnait une moisson de 100, quelquefois de 200 baptêmes d’adultes.
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La grande ville de Kharbine devait être le terme de ses pérégri¬nations. Il y était depuis un peu plus de 18 mois, pendant lesquels il avait ramené à Dieu un grand nombre d’âmes, quand il nous a subite¬ment quittés pour un monde meilleur.
M. Monnier est mort en laissant l’exemple d’une vie bien remplie. Ses confrères perdent en lui un ami sûr ; ses chrétiens, un père dévoué ; et tous les pauvres, un bienfaiteur. Le tao-taï de Kharbine, Alfred Se, a voulu honorer d’une visite la dépouille mortelle du défunt que nous pleurons et a manifesté son intention de l’accompagner, avec sa suite, jusqu’à la gare, si nous avions pu transporter son corps à Siao-pa-kia-¬tze. Notre cher Provicaire aura pu répéter, avec la sincérité de sa foi, en paraissant devant le Souverain Juge : Bonum certamen certavi, cursum consummavi, fidem servari, in reliquo reposita est mihi corona justitiæ quam reddet mihi Dominus justus judex.
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Références
[1476] MONNIER Jean (1856-1910)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1885, p. 17 ; 1886, p. 8 ; 1887, pp. 10, 253 ; 1889, p. 5 ; 1890, p. 4 ; 1891, p. 7 ; 1892, p. 17 ; 1893, p. 10 ; 1894, p. 17 ; 1897, p. 21 ; 1898, p. 8 ; 1899, pp. 75, 82 ; 1900, pp. 72, 401 ; 1901, p. 80 ; 1904, p. 72 ; 1905, p. 53 ; 1906, p. 71 ; 1907, p. 86 ; 1908, p. 63 ; 1909, p. 78. - A. P. F., lxxii, 1900, p. 430 ; lxxvii, 1905, p. 18. - A. S.-E., lvi, 1905, p. 367. - M. C., xxi, 1889, pp. 207, 412 ; xxxii, 1900. p. 444 ; xxxiii, 1901, Persécution en Chine, p. 13 ; Ib., Persécution en Mandchourie, p. 505 ; xxxvi, 1904, Sur le théâtre de la guerre, p. 147 ; Ib., p. 565.
B. O. P., 1896, p. 571 ; 1897, p. 693. - A. M.-E., 1900, Le district de Paien-sou-sou, pp. 229, 265, 275 ; 1905, p. 50 ; 1906, p. 201. - Sem. rel. Le Puy, 1880, p. 80 ; 1881, pp. 427, 456 ; 1882-83, p. 104 ; 1903-04, p. 483 ; 1904-05, p. 136 ; 1909-10, Sa mort, p. 553. - Le Lorrain, 1904, Assassinat de M. Trécul, n° du 29 nov.
Notice nécrologique. - C.-R., 1910, p. 377.