Léon CURLIER1863 - 1935
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1832
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Corée
- Région missionnaire :
- 1889 - 1935
Biographie
[1832] CURLIER Léon, Louis, Joseph est né le 13 septembre 1863 à Gillois, canton de Nozeroy, diocèse de St Claude (Jura), fils de Joseph Curlier et de Philomène Chauvin.
Entré tonsuré au Séminaire des Missions Étrangères le 13 septembre 1886, il y est ordonné prêtre le 3 mars 1889; destiné à la Corée, il part de Paris le 1er mai et arrive à Séoul le 21 juin 1889.
Le temps d'obtenir un passeport" des autorités civiles de Corée, en vertu de l'accord franco-coréen de 1886, le jeune Père Curlier est envoyé dès le mois suivant auprès du Père Couderc, à environ 120 km à vol d'oiseau au nord de Séoul, dans l'arrondissement de Su-an de la province du Hoang-hai, au lieu-dit Tek-kol2. Le Père Couderc se dit très content de son jeune compagnon; mais un an plus tard, en août 1890, celui-ci lui est retiré et envoyé dans la province du Choung-chong méridional succéder au Père Doucet, rappelé à Séoul.
En réalité, le Père Curlier et le Père Pasquier sont "cohéritiers" du Père Doucet et résident quelque temps ensemble dans l'arrondissement de Ye-san, au village de Kanyang-gol, là où se trouvait leur prédécesseur au moment de son départ pour Séoul. Quelque temps après, les deux confrères se séparent : le Père Pasquier s'en va vers le Sud, à Kong-jon, prendre la place laissée vide par le Père Guinand, quand celui-ci est parti pour le Séminaire de Séoul. Quant au Père Curlier, il va s'établir à la chrétienté de Yang-chon, dans le canton de Ko-dok, qui se trouve dans le nord du même arrondissement de Ye-san. Le Père Curlier se trouve alors à proximité du village où, en 1866, Mgr. Davelux et les Pères Aumaitre et Huin ont été capturés pour être conduits au martyre. Dans cette région, il y a un grand nombre de villages de chrétiens; mais dans les villages en majorité ou en totalité païens, le seul mot de "chrétien" inspire encore la terreur, tant le souvenir des persécutions reste vivace. Et ces scènes de massacres semblent vouloir se renouveler en 1894, quand les insurgés Tonghak proclament leur volonté de débarrasser le pays de tout ce qui est chrétien ou occidental. Prudent, Mgr. Mutel prie alors les missionnaires de se réfugier à Séoul.
Au bout de quelques années de "séjour" à Yang-chon (en réalité il passe la majeure partie de son temps à visiter les chrétiens), le Père Curlier se dit que sa "résidence" est mal placée et que le village qui, établi au pied d'une petite colline, au bord de la "route", et au milieu d'une vaste plaine, se trouve à 6 ou 7 km de Yang-chon, serait bien plus approprié. Comme par miracle, le Père Curlier peut obtenir pour une somme modique cette colline d'Hap-tok où il va pouvoir construire une résidence et une chapelle, ainsi qu'une petite école qui deviendront le centre d'un important district, et où il restera jusqu'en octobre 1904.
Le Père Curlier est alors envoyé au centre géographique -et à cette époque centre administratif de la province du Choung-chong méridional- à Kong-ju où il succède au Père Pasquier qui vient de repartir pour l'Europe. Il y reste jusqu'en avril 1909 et y construit un presbytère, mais le Père Curlier ne se sent pas fait pour résider en ville ni pour y ouvrir l'école que demandent les chrétiens, et dans un entretien avec le vicaire apostolique, Mgr. Mutel, se propose pour aller au Kanto, cette partie de la Mandchourie, territoire chinois légalement, mais en réalité habité surtout par des Coréens qui, depuis quelques dizaines d'années, y ont émigré en grand nombre, et où il y a un nombre non négligeable de chrétiens dont le Père Bret s'est occupé de loin, jusqu'à sa mort en 1908.
Du coup, Mgr. Mutel, qui songeait à l'envoi d'un missionnaire dans le Kanto, y envoie le Père Curlier en avril 1909. Il est le premier missionnaire à résider dans cette province chinoise de Kirin et à s'occuper des Coréens qui s'y trouvent. Il établit sa résidence à Yong-jeng, y construit église et presbytère, organise une dizaine de dessertes et y reste jusqu'en 1921. L'année précédente, les Pères Bénédictins de Ste Odile ont reçu la charge du nouveau vicariat apostolique de Won-san dans le nord-est de la Corée, et la "région autonome" du Kanto y est rattachée en attendant de devenir elle-même, en 1928, une préfecture apostolique confiée aux mêmes Pères Bénédictins.
En 1921, le Père Curlier est envoyé dans la province du Hoang-hai. Il a sa résidence à Mai-hoa-dong, dans le canton de Yong-moun de l'arrondissement de An-ak. Il succède au Père Chabot dans ce poste qu'a fondé le Père Wilhelm en 1896. Pour le Père Curlier, c'est une nouvelle vie qui commence, car les lieux lui sont totalement inconnus et les coutumes de la population sont différentes de celles du Kanto où il vient de passer 12 ans et de celles du Choung-chong où il a travaillé de 1890 à 1909. C'est à Mai-hoa-dong qu'il passe les 14 dernières années de sa vie et qu'il décède le 6 juin 1935, épuisé par une diarrhée rebelle.
1 d'après les sources MEP de Corée; Jean, Jules d'après la notice nécrologique du CR. 1935/1936, p.272.
2 la notice nécrologique parle improprement du "district d'I-tchyen". Il est toutefois exact que l'arrondissement de Su-an sera plus tard rattaché au district d'I-chon ou I-tchyen.
Nécrologie
M. CURLIER
MISSIONNAIRE DE SÉOUL
M. CURLIER (Jean-Jules-Léon), né le 13 septembre 1863 à Gillois (Saint-Claude, Jura). Entré tonsuré au Séminaire des Missions-Étrangères, le 13 septembre 1886. Prêtre le 3 mars 1889. Parti pour la Corée, le 1er mai 1889. Mort à Maihoatong (Séoul), le 6 juin 1935.
M. Curlier naquit dans le Jura en 1863 d’une famille bien chrétienne aux mœurs patriarcales. Comment lui vint la vocation sacerdotale ? on ne le sait pas ; mais on peut deviner cependant la raison pour laquelle il voulut être missionnaire. A son âme généreuse et à son esprit de sacrifice il fallait trouver le moyen de se dévouer. Il ne pouvait trouver mieux qu’en s’adressant au Séminaire des Missions-Étrangères parce qu’il était sûr de pouvoir exercer son zèle dans les missions.
Désigné pour la Corée, il arrive à Séoul le 21 juin 1889, époque où on commençait à y jouir de la liberté religieuse. Mais rien n’était encore installé à l’évêché pour recevoir longtemps un nouveau missionnaire ; on attendit juste le temps d’obtenir un passeport, et M. Curlier fut envoyé en province dans le district de I-tchyen, où se dévouait déjà M. Couderc. Celui-ci fut d’autant plus heureux de le recevoir, qu’il vit le jeune missionnaire doué de belles qualités. « Ce cher confrère, écrivait-il, a une belle intelligence, une mémoire très heureuse, mange bien le riz, toujours gai. Dans peu de temps, il s’en tirera, et comme ses vertus surpassent encore ses qualités naturelles, il deviendra en peu de temps un excellent missionnaire. L’avenir prouvera que la prédiction de M. Couderc était juste.
Au mois d’août suivant, M. Curlier fut envoyé dans la province de Tchoung-tcheng pour se partager avec un autre missionnaire le district de M. Doucet. M. Curlier devait rester dix-neuf ans dans cette province, mais en trois résidences successives. Il s’installa d’abord à Ryang-tchon, assez grosse chrétienté dans la plaine du Naipo, au milieu des rizières, à deux kilom. environ de l’endroit où avait été pris Mgr Daveluy. De là il rayonna dans toute la région où, vingt-quatre ans auparavant, beaucoup de chrétiens avaient été saisis par les satellites ou bien avaient dû fuir. A certains villages païens le nom seul de la religion catholique inspirait une grande frayeur, parce que le souvenir des massacres épouvantables des chrétiens leur était encore présent à la mémoire. Ces scènes de carnages horribles, M. Curlier faillit les revoir en 1894, au moment de la révolte des Tong-hak. Pour n’êtres pas officielle, la persécution n’en était pas moins réelle. Ces Tong-hak prétendaient se débarrasser par la violence de tout ce qui n’était pas oriental, et naturellement les chrétiens furent les premières victimes à cause de leurs relations avec les missionnaires étrangers. La situation était très grave. C’est pourquoi Mgr Mutel pria les missionnaires de se réfugier à Séoul où ils furent suivis des chrétiens. Il garda jusqu’à la fin de sa vie un clair souvenir de ces premières années et aimait à en parler.
Après avoir passé plusieurs années à Ryang-tchon, il se rendit compte de l’inopportunité de fixer sa résidence en cet endroit. A 5 ou 6 kilom. de là, il y avait un gros village, placé près d’un grand lac artificiel, jouissant d’un certain renom dans la contrée, et dans les environs une petite colline d’où l’on dominait à la fois ce fameux lac et une large plaine. M. Curlier avait jeté bien des fois un regard d’envie sur cette colline ; mais elle appartenait à un païen très riche qui, affirmait-on, refuserait de vendre puisqu’il n’avait pas besoin d’argent. Le missionnaire n’en crut rien ; il commença par prier, et un beau jour, il mit dans sa poche tout l’argent dont il disposait, prit avec lui quelques chrétiens et se rendit chez le riche propriétaire. C’est le fils qui les reçut. Dès les premiers mots sur cette affaire, il sembla bien qu’on n’arrive¬rait jamais à la conclusion désirée ; le fils prétendait que son père ne consentirait pas à cette vente, surtout à un prix aussi déri¬soire, et la discussion continuait sans chance d’aboutir. M. Cur¬lier demanda à saluer le vieillard, et fut aussitôt introduit dans l’intérieur. Après avoir présenté ses respects au maître de la mai¬son, il aborda le sujet qui l’intéressait. « Laissons les jeunes dis¬cuter, dit-il, et entendons-nous entre vieux. » M. Curlier n’avait qu’une trentaine d’années, mais sa barbe presque blanche lui en donnait davantage. « Je sais bien, ajouta-t-il, que votre terrain vaut un grand prix, mais je n’ai absolument que l’argent que j’ai apporté et que je vous propose ! Je sais aussi que vous êtes assez riche pour ne pas regarder à une petite somme. » Et ce bon vieux consentit sur-le-champ sans se faire prier. Et voilà comment fut acheté ce terrain où l’on vit bientôt après s’élever : presby¬tère, chapelle, et se former autour une chrétienté qui ne devait connaître que des progrès ! C’est la résidence d’Haptek.
M. Curlier y demeura jusqu’en 1904 puis fut envoyé à Kong-¬tjou la capitale de la province jusqu’en 1909, et dans l’intervalle y construisit un presbytère. A l’occasion de la retraite, il confia à Mgr Mutel qu’il n’avait pas les aptitudes requises pour diriger ce poste important, surtout pour ouvrir une école demandée par tout le monde. « Si Son Excellence avait pour moi, dit-il, un petit coin, même le Kanto, je quitterais Kong-tjou sans regret. » Ce fut une révélation pour Mgr Mutel qui était à la recherche d’un missionnaire pour le Kanto. M. Curlier fut donc destiné à cette région, territoire chinois en réalité, mais habité surtout par des Coréens qui avaient passé la frontière depuis quel¬ques dizaines d’années. Une bonne chrétienté s’y était formée qu’avait visitée jusque-là M. Bret, mort l’automne précédent. Mais le nombre des convertis demandait désormais l’établissement d’un prêtre à demeure : M. Curlier en fut le chef jusqu’en 1921, époque à laquelle ce coin de la mission fut cédé aux Pères Béné¬dictins.
Encore une fois, et ce fut la dernière, M. Curlier dut déména¬ger ; de nouveau, il dut faire connaissance avec des lieux incon¬nus pour lui, et une population nouvelle, car dans le Hoanghaito où il fut envoyé, les coutumes des habitants sont très différentes de celles de la province où il avait passé ses premières années. C’est là, quatorze ans après, à Maihoatong, que M. Curlier devait mourir, épuisé par une diarrhée rebelle.
Durant sa vie apostolique notre regretté confrère nous a donné l’exemple de belles vertus. L’esprit de mortification a été pour lui un grand moyen d’apostolat. Pour faire cesser certains abus dans quelque chrétienté, pour obtenir le retour de quelque pécheur, il commençait par se punir lui-même ; il jeûnait et priait autant qu’il le fallait. Il fut toujours le prêtre exemplaire, le confrère charmant, le missionnaire zélé. Il emporte dans la tombe les regrets unanimes de tous ceux avec lesquels il a vécu, et nous avons l’espérance que Dieu a déjà récompensé son fidèle ser¬viteur.
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Références
[1832] CURLIER Léon (1863-1935)
Références biographiques
CR 1935/36 p. 272-275
AME 1889 p. 99. 1894 p. 221 (art.). 1911 p. 160 (art.). 211. 212. 214. 277 (art.). 1912 p. 138 (art.). 1915-16 p. 78 (art.). 104 (art.). 1917-18 p. 267. 588. 1925 p. 89. 1934 p. 272. 1935 p. 186. CR 1889 p. 254. 1891 p. 22. 23. 1892 p. 267. 1893 p. 31. 1894 p. 29. 32. 1895 p. 399. 1896 p. 33. 1897 p. 35. 1899 p. 63. 1900 p. 58. 1902 p. 73. 1903 p. 55. 1904 p. 53. 1905 p. 37. 1906 p. 50. 1907 p. 65. 1909 p. 46. 50. 1910 p. 46. 1911 p. 46. 1912 p. 48. 1913 p. 61. 62. 1914 p. 23. 1915 p. 24. 1916 p. 42. 1917 p. 23. 24. 27. 1918 p. 17. 1919 p. 20. 1921 p. 29. 1922 p. 26. 1923 p. 32. 1924 p. 23. 1929 p. 39. 1931 p. 35. 1932 p. 39. 1933 p. 24. 1935 p. 242. 374. 1936 p. 260. 272. BME 1929 p. 425. 1930 p. 728. 1931 p. 84. 138. 437. 1932 p. 121. 195. 605. 1933 p. 438. 922. 1934 p. 15. 40. 630. 704. 1935 p. 498. 572. 724. 725. 1936 p. 504. 726. 1938 p. 242. 1939 p. 114. EC1 N° 316. MS 74 p. 39.