Eugène DRONET1857 - 1908
- Statut : Frère coadjuteur
- Identifiant : 2131
Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Biographie
[2131] DRONET, Eugène-Henri, frère d'un missionnaire du Tonkin occidental, naquit le 20 octobre 1857 à Vieillevigne (Loire-Inférieure), fit son service militaire, et le termina avec les galons de sous-officier. Il entra le 4 novembre 1889 au Séminaire des M.-E. en qualité de frère coadjuteur ou auxiliaire ; il porta le nom de frère Eugène ; il fut agrégé à la Société le 21 novembre 1894. Son emploi fut d'aider le procureur des commissions. Il s'y montra toujours laborieux et régulier ; sa piété était grande.
Miné par la tuberculose, il passa l'année 1906 au sanatorium Saint-Raphaël à Montbeton, et reprit sa tâche à son retour au Séminaire ; il succomba le 29 juin 1908, et fut enterré au cimetière Montparnasse à Paris.
Nécrologie
M. DRONET
Né le 20 octobre 1857
Entré au séminaire le 4 novembre 1889
Mort le 29 juin 1908
Eugène Dronet naquit à Vieillevigne, au diocèse de Nantes, le 20 octobre 1857. Il appartenait à une famille bien chrétienne de cette paroisse. Sa mère surtout, une femme de foi, était pleine de sollicitude pour la formation de l’âme de ses enfants. Malgré les préoccupations matérielles et les soucis quotidiens, elle savait trouver le temps pour la prière et recommandait souvent sa petite famille à Dieu, à la sainte Vierge et aux anges gardiens 1.
Pendant le temps qu’Eugène fréquenta l’école, il fut un bon élève sans toutefois sortir de la moyenne. Assidu eu travail en classe, il l’était aussi aux catéchismes où il donna toute satisfaction à son pasteur.
Appelé plus tard à la caserne, il fut un excellent soldat, estimé de ses camarades et de ses chefs. Il revint au pays avec les galons de sergent, ce qui lui donna un certain ascendant sur ses frères et sœurs.
On trouvait bien, à première vue, un peu de raideur dans ses allures et sa tenue, et les espiègles du quartier ne furent pas longtemps à en faire la remarque et aussi parfois l’objet de leurs malignes plaisanteries.
Ils veillaient toutefois à se tenir à distance dans la crainte de recevoir une correction bien méritée. Il est à peu près certain que quelques-uns ont eu lieu une fois ou l’autre de se repentir de leur petite étourderie.
(1) Nous devons ces notes sur les premières années de notre cher Frère, à son vénérable curé, M. Leclaire, chanoine honoraire, curé de Vieillevigne.
Malgré ce côté un peu singulier, Eugène se montra constamment un jeune homme modèle, réservé dans ses paroles et dans toute sa conduite.
Assidu aux offices de la paroisse le dimanche, il était également fidèle à s’approcher des sacrements de Pénitence et d’Eucharistie. En un mot, il ne cessa de donner le bon exemple et personne fut surpris de se voir choisir la vie religieuse.
Entré au Séminaire des Missions-Étrangères comme Frère coadjuteur le 4 novembre 1889, dès les premiers jours de sa vie religieuse il se montra tel que nous l’avons connu jusqu’à sa mort : régulier et d’une exactitude scrupuleuse dans l’accomplissement de ses exercices spirituels, comme dans la fidélité à remplir son emploi. Occupé à la procure des Commissions, il a toujours rempli cette charge à la grande satisfaction de tous, et s’est montré un aide précieux pour le directeur en fonction de cette Procure. Ami du travail, le cher Frère Eugène, comme s’il craignait d’en manquer et de perdre quelques minutes, demandait toujours quelle besogne il devait prendre quand il aurait achevé celle du moment. Homme de foi et de conviction profonde, il prenait toutes choses par le côté sérieux et les ramenant à une fin surnaturelle, il s’en servait pour sa propre sanctification. D’un abord toujours digne et réservé, c’était une âme simple, humble et droite sous des formes correctes qui ressemblaient un peu à de la raideur pour les personnes qui ne le connaissaient point.
Dès le commencement de l’année 1906, le Frère Eugène se sentit atteint de la terrible tuberculose qui devait le mener au tombeau. Les beaux jours venus, il alla se reposer quelques semaines à Bièvres et passa une partie des vacances à Sainte-Mesme, où des hémorragies abondantes firent croire que sa dernière heure était venue. Il y reçut l’Extrême-Onction et édifia toute la communauté par sa patience, sa résignation et son esprit de foi.
Cependant le bon Dieu voulait encore donner quelque temps de vie à son serviteur pour le purifier davantage et enrichir sa couronne. Entré dans une quasi-convalescence, le Frère Eugène fut assez fort pour faire le voyage de Montbeton, dont le ciel plus clément pouvait arrêter la marche de la maladie. Sa grande joie fut d’aller jusqu’à Lourdes, où il passa plusieurs jours, et donna libre cours à sa piété envers sa céleste Mère, la Vierge Immaculée. Il se remit entre ses mains pour la guérison ou la mort, avec la simplicité d’un enfant et la foi d’un vrai religieux.
Au Sanatorium de Montbeton, où il passa près d’une année, comme à Paris, comme à Bièvres, comme à Sainte-Mesme, le Frère Eugène fut un objet d’édification pour tous. Loin de se laisser abattre par le mal, il luttait pied à pied contre lui. Il lui fallait toujours du travail. Il voulait occuper jusqu’au plus petit moment que ses exercices spirituels lui laissaient libre dans la journée.
Rentré au séminaire de Paris au mois d’octobre, le Frère Eugène est tout heureux de revoir cette chère maison où s’est écoulée sa vie religieuse.
Sans se faire illusion sur la gravité de sa maladie qui triomphera de lui dans un avenir plus ou moins prochain, il espère cependant pouvoir encore rendre plus d’un service et demande du travail. Il aime à en avoir toujours devant lui, tant il craint de perdre une minute.— Que me donnerez-vous après ceci ? ne manque-t-il jamais de dire, quand il a reçu sa tâche. — Il continue à édifier la communauté par sa patience et sa régularité. Tous les matins il assiste à la sainte messe avec une piété qui frappe les aspirants.
L’amélioration de son état produite par son séjour au sanatorium de Montbeton dure jusque vers la fin de l’hiver. Il est pris vers ce temps d’un violent mal d’oreille qui le torture durant un mois; la toux le fait beaucoup souffrir. Une fièvre ardente qui le force à se mettre au lit le tient tous les jours durant trois ou quatre heures.
Sa faiblesse va chaque jour en augmentant. Ses jambes fléchissent sous lui à chaque pas. Malgré sa rare énergie, il ne peut plus lutter. Il lui devient impossible de suivre les exercices de la communauté auxquels il tient tant. Il doit s’aliter : « C’est bien fini, répète-t-il. Je n’ai plus que quelques jours à vivre. Enfin, à la volonté de Dieu. » Cette pensée de la mort le poursuit. Il toujours présente à l’esprit. Mais il ne tremble jamais devant elle. Il l’envisage avec sang-froid et une parfaite résignation, se remettant avec confiance entre les mains de Dieu.
Durant les dernières semaines, sa grande privation est de ne pouvoir assister à la messe, mais en échange il a obtenu de recevoir bien souvent la sainte communion dans sa chambre.
Le 24 mai, M. le Supérieur juge prudent de lui administres les derniers sacrements. C’est le jour de la fête de Notre-Dame Auxiliatrice, célébrée avec une grande solennité au séminaire. Le cher malade est averti et reçoit sans s’émouvoir cet avertissement que la fin approche. A 11 heures du matin, en présence de MM. Les Directeurs, des Fréres et de quelques aspirants, M. le Supérieur lui administre l’Extrême-Onction qu’il reçoit avec un grand esprit de foi. L’émotion gagne son âme très sensible. Mais, peu après la cérémonie, la joie et la sérénité reparaissent sur son visage, et c’est le sourire sur les lèvres qu’il remercie ceux qui le soignent, avec une grande effusion, et leur demande pardon de toutes les peines qu’il a pu leur causer.
Les quelques jours suivants, la vie semble revenir. Le malade a repris des forces. Mais à la fin du mois les signes non équivoques d’un dénouement prochain se manifestent. Il ne mange plus. L’estomac supporte difficilement la moindre nourriture. La poitrine est de plus en plus oppressée et les crises durent parfois plusieurs heures. Les chaleurs très fortes en ce moment viennent ajouter au supplice du pauvre moribond.
Malgré ses souffrances, la faiblesse et un abattement qui suit chaque crise, le Frère Eugène ne cesse de prier, vivant en union intime avec le divin Crucifié et la bonne Mère. La croix était le continuel sujet de ses méditations. Aussi longtemps qu’il peut lire, son livre préféré est l’Horloge de la Passion. Et quand ses yeux affaiblis ne lui permettent plus de s’appliquer à la lecture, il demande chaque soir aux infirmiers qui le soignent de prendre le livre pour lui en faire goûter la douceur de quelques pages. Chaque jour le Frère Eugène fait son chemin de croix, le crucifix sur les lèvres, et dans les moments où les souffrances sont plus aiguës, il presse sur sa poitrine l’image de son divin Sauveur. Ilme se sépare jamais non plus de son chapelet. Il adresse fréquemment de pieuses invocations à Marie. Quand on lui fait la lecture dans la Vierge Mère de Petitalot, il interrompt le lecteur pour lui faire admirer la grandeur, la sainteté, la miséricorde de notre bonne Mère du ciel.
Ses longues journées s’écoulent dans la prière. Quand la communauté est à la chapelle, il s’unit à elle. Il ne manque jamais de faire en esprit sa visite au Saint-Sacrement. Il reste en adoration pendant une demi-heure. Il assiste également chaque jour à la messe de 8 heures en union avec le prêtre. Notre cher malade ne vit ainsi que des pensées du ciel.
A partir du milieu de juin les nuits deviennent très mauvaises. La toux lui déchire la poitrine et il se croit à chaque instant arrivé à sa dernière heure. La fièvre le dévore. Il communie chaque matin, et trouve sa force dans cette divine nourriture. Il annonce sa mort imminente à MM. Les Directeurs qui le visitent.
L’heure marquée par la divine Providence pour mettre fin à ses douleurs et récompenser ce bon serviteur est le jour de la fête des apôtres saint Pierre et saint Paul, l’anniversaire de l’ordination sacerdotale de son frère, missionnaire, de ce frère qu’il aimait tant et dont il se plaisait à s’entretenir durant sa longue maladie.
Vers 3 heures de l’après-midi, le Frère Eugène demande à rester seul, puis vers 4 h. ½, il appelle les infirmiers et leur dit : « Je me meurs, je me meurs. » MM. les Directeurs accourent et les Frères se réunissent auprès du cher malade. L’agonie très douce se prolonge jusqu’à 7 heures. Il entend les prières et les invocations qui sont récitées au pied de son lit. Il conserve sa connaissance jusqu’au der-nier moment. Il tient son chapelet dans ses mains. Le râle commence et dure dix minutes. A 7 heures sonnants, au second coup de l’Angelus, l’âme du Frère Eugène disait adieu à la terre et allait terminer avec les anges le salut à la Reine du ciel et répondait au Seigneur : Ecce ancilla Domini; fiat mihi secundum verbum tum.
Les assistants tombent tous à genoux et récitent eux aussi l’Angelus puis le De Profundis pour le repos de l’âme du cher défunt. Du haut du ciel, où sans doute il est déjà, le Frère Eugène prie pour le cher séminaire qu’il a tant aimé et auquel il a sacrifié sa santé et sa vie. Les obsèques ont eu lieu le mercredi 1er juillet. La communauté en vacances depuis trois ou quatre jours est revenue à Paris pour accompagner le défunt à sa dernière demeure, au cimetière de Montparnasse, où il repose dans le caveau du séminaire des Missions-Étrangères.
~~~~~~~