André EB1904 - 1981
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 3435
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Identité
Naissance
Décès
Biographie
[3435] EB André est né le 12 avril 1904 à Saint-Sauveur (Oise).
Admis aux MEP en 1925, il est ordonné prêtre le 29 juin 1931 et part le 7 septembre suivant pour la mission de Hué (Vietnam).
Après avoir étudié le vietnamien àl
Lai-sa, il est nommé professeur au petit séminaire d’An-ninh (1932) puis professeur au collège de la Providence à Hué (1936-1940). Il est ensuite curé de Co-vuu (1940-1951) et aumônier des frères des écoles chrétiennes à Dalat.
En 1956, il est affecté à la mission de Paksé au Laos (activités ?).
Il rentre en France en 1971 et se retire à Lauris, où il meurt le 17 janvier 1981.
Nécrologie
[3435] EB André (1904-1981)
Notice nécrologique
André Eb naquit à Saint-Sauveur au diocèse de Beauvais dans l’Oise le 12 avril 1904, dans une famille modeste mais très chrétienne. Après ses études primaires à Saint-Sauveur, il entra au petit séminaire St-Lucien à Beauvais en 1916, à l’âge de 12 ans. Sa sœur a bien voulu nous donner quelques renseignements dont voici l’essentiel : « Nos parents étant très chrétiens, le milieu familial et surtout notre mère ont sans doute favorisé sa vocation. Notre père travaillait à l’usine en tant qu’ouvrier professionnel et notre mère était repasseuse. Les choses étaient très simples chez nous et André était très gai pendant les vacances qu’il passait à la maison pour ma plus grande joie, car nous n’étions alors que deux enfants ; une petite sœur devait naître au foyer lorsqu’il avait 19 ans ; il l’a d’ailleurs fort bien accueillie et gâtée par la suite. »
Ses études terminées au petit séminaire St-Lucien, André Eb accomplit son service militaire de dix-huit mois au camp de Châlons de juillet 1924 à novembre 1925. C’est vers la fin de son service militaire qu’il adressa sa demande d’entrée aux Missions Etrangères, exactement le 8 septembre. Voici l’essentiel de ce qu’il écrivait à Mgr de Guébriant, Supérieur général : « Après avoir longtemps prié et mûrement réfléchi avec l’aide de mon directeur, il me semble que Dieu m’appelle aux Missions. Aussi je vous serais reconnaissant, Monseigneur, de considérer si vous me jugez digne d’entrer dans votre séminaire sitôt ma libération du service militaire, en novembre prochain. Monsieur le Supérieur du petit séminaire et mon directeur m’ont aidé de leurs conseils à me diriger dans cette voie...» Le Supérieur du petit séminaire ajoutait son appréciation sur cette même lettre et écrivait : « Je suis heureux de pouvoir donner, en ce qui me concerne, un avis favorable à la demande présentée par M. André Eb. Il a une foi forte, une piété réfléchie, une volonté tenace. Son caractère devra se briser à une discipline plus exacte et à une souplesse plus parfaite, mais il est de ceux que la grâce transforme parce qu’ils ont le cœur droit. » Comme on peut le constater, cette lettre comportait de légères réserves, mais rien de grave. Aussi André Eb fut-il admis le 10 septembre et, son service militaire achevé, il entra à Bièvres le 16 novembre 1925.
Il n’y a rien de bien spécial à signaler pendant ses années de séminaire, soit à Bièvres, soit à Paris, sinon une certaine tendance à ne pas frayer avec tout le monde et à aimer se promener seul pendant les jours de promenade à Meudon. le mercredi.
Ordonné prêtre le 29 juin 1931, il reçut le jour même, suivant la tradition d’alors, sa destination pour la Mission de Huê, au Viêt-Nam. C’est le 7 septembre qu’il quitta la France pour rejoindre son poste avec 15 autres jeunes missionnaires du même « bateau ».
Arrivé à Huê au début d’octobre, il commença l’étude de la langue vietnamienne à Lai-An, paroisse près de Huê, sous la direction d’un prêtre vietnamien. A la rentrée scolaire de 1932, il fut envoyé comme professeur au petit séminaire de Huê, situé à An-Ninh, tout au nord de la Mission. Il devait y rester jusqu’en 1935. C’est alors qu’il fit une année de ministère dans la paroisse de My-Phuoc. Mais à la rentrée de 1936, il fut de nouveau affecté à l’enseignement au Collège de la Providence à Huê et cela jusqu’en 1940. A cette époque, il demanda une « permission de détente » de quelques mois qu’il passa au monastère cistercien de Phuoc-Son. Après quoi il fut nommé en charge de la paroisse de Co-Vuu (Quang-Tri). Il administra cette paroisse sans doute jusqu’au mois de mars 1945, c’est-à-dire jusqu’au coup de force de l’armée japonaise. Tous les Pères ainsi que tous les Européens dispersés dans la « brousse » furent concentrés à Huê. Après la défaite japonaise, au mois d’août 1945, les communistes vietnamiens s’emparèrent du pouvoir et la concentration dura jusqu’au mois d’octobre 1946, c’est-à-dire jusqu’à l’arrivée à Huê des troupes du Corps expéditionnaire français. Retourna-t-il alors dans sa paroisse pour un temps ? Les documents ne permettent pas de préciser ce point. En tout cas, dans le courant de décembre 1946, il partit pour un congé en France. Arrivé le 10 janvier 1947, il prolongea son congé jusqu’au mois de juillet 1948. De retour à Hué, il reprit sa paroisse de Co-Vuu. C’est sur cette paroisse que se trouve le sanctuaire de Notre-Dame de Lavàng, célèbre au Viêt-Nam, surtout depuis qu’il a été développé par le premier Archevêque de Huê, Mgr Ngô dinh Thuc. Le P. Eb devait rester encore trois ans dans cette paroisse.
Le « Bulletin de Hongkong » de 1951 signale que le P. Eb a demandé à se retirer, au moins pendant quelque temps, à Dalat qui dépendait encore à cette époque du Vicariat apostolique de Saïgon. Ce changement s’est produit par accord amiable entre le Vicaire apostolique de Huê et celui de Saïgon. On ne sait pas exactement pourquoi le P. Eb demanda à aller à Dalat. Il avait certainement des raisons qui furent jugées suffisantes. Il faut aussi noter qu’il se rapprochait ainsi de son grand ami le P. Octave Lefèvre qui avait fondé au Cam-Ly, en bordure de Dalat, le Centre montagnard et qui devait décéder des suites d’un accident de voiture au mois d’octobre 1955. Le P. Eb fut nommé aumônier du Collège des Frères des Ecoles chrétiennes et il y exerça son ministère jusqu’au mois d’octobre 1956.
À cette époque le « Bulletin de Hongkong » note que le P. Eb a été affecté au Vicariat apostolique de Thakhek au Laos, mais sans en donner les raisons. Le P. Eb fut envoyé dans le sud de la Mission, dans la région de Paksé. Il fut chargé de deux groupes de chrétiens vietnamiens. Le premier se trouvait au village du km 42, à 8 km de Paksong. Ce village, construit de toutes pièces avec presbytère et chapelle par la coopérative agricole, était composé de travailleurs vietnamiens du Nord recrutés par cette coopérative. On l’appelait couramment le « village tonkinois ». Il y avait environ 200 chrétiens parmi ces travailleurs. Ce furent les « paroissiens » du P. Eb. Le deuxième groupe se trouvait à Paksé, au quartier de Tha-Hin et était composé de pêcheurs qui exerçaient leur métier dans la Sédone et le Mékong. En fait, le P. Eb s’installa au village du km 42 près de Paksong. De temps en temps, il descendait à Paksé distant de 42 km. Tout en s’occupant des Vietnamiens, le P. Eb apprit aussi le laotien et s’intéressa également aux Kha-Loven dans la région de Paksong. Il resta là jusqu’à la prise de Paksong par les communistes. Alors, par des chemins détournés, il réussit à gagner Paksé à pied. Il eut un moment l’intention de continuer à travailler en milieu laotien. Mais à cause sans doute de son tempérament froid, il se rendit vite compte que très difficile serait pour lui le contact avec les Laotiens. De plus, certaines coutumes de cette population, très différente des Vietnamiens, le choquaient un peu. Ajoutons encore que le « champ d’action » se rétrécissait de plus en plus autour de Paksé avec l’avance des communistes. Pour toutes ces raisons on lui conseilla de rentrer en France. Il jugea que cette invitation était sage. Il rentra donc au mois de décembre 1971 et se retira à Lauris où il décéda le 17 janvier 1981.
Non pour juger ni même apprécier la vie du P. Eb, mais bien plutôt pour donner un aperçu de sa personnalité, nous allons le considérer d’abord comme professeur, ensuite comme missionnaire en paroisse et enfin donner quelques traits de sa « personnalité ».
Le P. Eb exerça cette fonction d’abord au petit séminaire d’An-Ninh où il enseignait le français et le latin en 3e . Son enseignement était minutieux, bien préparé ; il avait une belle intelligence et son travail, du moins au petit séminaire, l’intéressait et il en parlait volontiers. Surtout il aimait parler de ses élèves qu’il connaissait bien et qu’il suivait de près. Il en parlait avec cordialité et même avec humour. Pendant les jours de congé, il aimait aller rendre visite aux confrères voisins qui travaillaient en paroisse ; il passait la journée avec eux et il revenait très détendu de ces sorties, car au fond la vie de communauté ne l’enchantait pas et ces sorties faisaient naître sans doute en lui le désir d’entrer dans le ministère paroissial qui laisse plus de facilité pour une vie personnelle. — À La Providence, il semble qu’il se soit moins plu, car les élèves étaient fort différents. Il soignait cependant son enseignement et le préparait avec exactitude, ne laissant rien à l’improvisation. Ajoutons le témoignage d’un confrère, professeur comme lui à La Providence, témoignage qui nous fera connaître aussi ses qualités intellectuelles : « Le P. Eb était à coup sûr d’une intelligence supérieure qu’il employa toute sa vie à acquérir une culture quasi encyclopédique. Lors des discussions à bâtons rompus, à table, il n’était pas rare, quand les interlocuteurs butaient sur un fait historique, un nom propre, une date ou un terme technique, que le P.Eb — qui écoutait généralement en silence — intervînt alors pour fournir sans hésiter le renseignement demandé. Ses cours de français et de latin étaient préparés avec soin et très appréciés des élèves. »
Dans bien des cas, le professorat a empêché des missionnaires d’apprendre convenablement la langue du pays. Pour le P. Eb, il en fut autrement. On peut dire qu’il s’acharna à apprendre le vietnamien, même quand il était professeur et à en poursuivre l’étude avec persévérance. Sans doute voulait-il ainsi se préparer à l’apostolat en paroisse qu’il désirait. Cette connaissance approfondie de la langue populaire lui facilita grandement son ministère et ses contacts avec les gens du peuple, chrétiens ou non. Tout de suite le courant passait avec les mots du terroir. C’est pendant son séjour à Co-Vuu qu’il compléta par des remarques personnelles la « Grammaire vietnamienne » qu’avait préparée le P. Cadière et il en assura l’édition. Si l’on considère attentivement la vie du P. Eb, on remarque qu’il a passé la plus grande partie de sa vie missionnaire dans le ministère paroissial soit au Viêt-Nam, soit au Laos. Il s’occupait attentivement de ses chrétiens, mais avait une attention particulière pour les petites gens et les enfants. Il avait inventé et mis au point pour eux une méthode pour leur apprendre rapidement à lire. En quelques semaines, les enfants étaient capables d’utiliser le livre de catéchisme. C’était un grand avantage pour leur formation chrétienne. Un confrère qui a vécu quelques mois avec lui dans la paroisse de Co-Vuu dit que les enfants pouvaient faire tout ce qu’ils voulaient avec lui : « Ils étaient les rois... »
Il faut avouer qu’elle est difficile à cerner, car elle est faite de contrastes qui étonnent. Notons d’abord une remarque de sa sœur : « Sur la fin de sa vie, son caractère n’avait rien de commun avec ce que la famille avait connu de lui dans sa jeunesse, si ce n’est toujours ce même attachement à la famille qui s’était agrandie, aux amis et sa grande affection pour ses petits-neveux et nièces qui le lui rendaient bien. » Cette remarque nous permet de dire qu’il y a eu au cours des ans une grande évolution dans le caractère du P. Eb. Au lieu de parler d’une certaine « sauvagerie », il serait sans doute plus juste de parler d’intériorisation de plus en plus profonde. Tout en vivant en communauté, soit au petit séminaire, soit à La Providence, il se réservait une vie personnelle de silence qu’il consacrait sans doute à la prière, à la préparation de ses cours et à diverses autres études, spécialement celle de la langue. Mais il ne s’enfermait pas dans son silence. Un confrère qui a longtemps vécu avec lui le caractérise bien : « Il était fidèle en amitié, peu loquace, peu porté aux confidences, mais d’un jugement sûr et équilibré. Il donnait l’impression d’un confrère un peu froid, mais sûr. On pourrait dire qu’il ne manquait pas d’une certaine originalité, ou mieux d’une personnalité qui le rendait très sympathique. Etant donné sa franchise, ses jugements et ses attitudes n’étaient dictés par aucun conformisme. Il marquait une réelle indépendance de caractère. Il aurait pu se heurter aux autres, mais il avait assez de bon sens et un brin d’humour pour ne pas s’émouvoir et ne pas adopter des attitudes tranchantes. En définitive, un confrère de relations agréables. » — Une fois arrivé au Laos et chargé des Vietnamiens, il se fit presque « ermite ». Dans l’homélie qu’il prononça lors de ses obsèques à Lauris, l’ancien supérieur de la Communauté missionnaire de Paksé insista sur cette particularité : « Il avait l’art d’être du Groupe, de lui être utile, de travailler pour lui, puis de se retirer seul au moment de la fête pour prier dans le secret et d’en ressortir le cœur et l’esprit libres. Malgré sa connaissance remarquable du vietnamien et une bonne connaissance du laotien, ce n’était pas l’homme à faire de grands discours. Toutes les ressources de son savoir — et elles étaient grandes — il les réservait à de petits groupes, des enfants surtout, qu’il remettait en d’autres mains dès qu’ils avaient suffisamment progressé, afin de pouvoir lui-même, ayant rompu toute attache, repartir à zéro avec un autre groupe. »
Il faut noter aussi sa grande pauvreté et sa charité : « Jamais personne ne lui a vu un habit neuf ou un objet qui aurait pu passer pour quelque chose de « riche ». Mais personne n’est passé devant sa porte sans qu’il l’ait soulagé efficacement. On n’a jamais su ce qu’il mangeait ni à quelle heure il mangeait... Mais tous les jours et cela pendant des mois et des mois, dès les premières heures du jour, il a apporté à une vieille femme seule une marmite fumante qu’il cachait comme un voleur. Jusqu’à ses derniers jours au Laos, le peu d’argent qu’il ait jamais eu, il l’a distribué aux réfugiés qu’il connaissait, ravi sans doute que les destinataires ne puissent lui manifester une reconnaissance qui l’aurait importuné. » Cette pratique de la pauvreté, il l’a poursuivie jusqu’au bout comme le prouve le témoignage d’un confrère de Lauris : « Il mettait la maison très peu à contribution. Il ne paraissait qu’au repas de midi ; il n’a jamais accepté qu’un membre du personnel entre dans sa chambre. Il se chargeait lui-même de la propreté chez lui et du lavage de son linge. Sa générosité à l’égard de ses anciens chrétiens était sans limite. Le courrier qu’il recevait des “réfugiés”, soit de Thaïlande, soit de France, était abondant. Il y répondait toujours et faisait tout son possible pour aider ces pauvres gens. Il gardait de tout cela une comptabilité méthodique. Pauvre, il le fut jusqu’à sa mort, ne gardant pour lui-même que le strict nécessaire. »
Un autre trait caractéristique du P. Eb fut son sens de la prière, mais plutôt prière personnelle que communautaire, comme on le soulignait dans l’homélie. Cette vie de prière, il la continua plus que jamais à Lauris : « Toujours très matinal, il célébrait la messe bien avant le lever du jour. Chaque après-midi, il priait seul à la chapelle de 4 h à 5 h. Lorsqu’il remontait chez lui, tout le monde savait qu’il était 5 h juste.»
Ce tableau superficiel nous montre cependant que le P. Eb a pris l’Evangile au pied de la lettre et suivi le chemin que le Seigneur lui traçait dans son cœur. De ce fait, il nous laisse un « message ». Ce qui a pu passer pour originalité et comme une sorte de « sauvagerie » aux yeux des autres était une réponse à un appel « personnel » par un don total de lui-même. Il nous montre un cœur ouvert aux dimensions du monde, capable de donner et d’accueillir parce qu’il fut présent à Dieu et aussi aux hommes quand il le fallait. Sans préjuger de la sentence du Seigneur, nous avons la plus grande confiance que le P. Eb est allé rejoindre le Seigneur, ce Dieu qu’il a aimé et pour lequel il s’est dépouillé et que nous pouvons lui appliquer la promesse de Jésus : « En vérité, je vous le dis, nul n’aura laissé maison, frères, sœurs, père, mère, enfants qu’il ne reçoive le centuple dès maintenant et dans le monde à venir la vie éternelle » (Mc 10, 20).
Références
[3435] EB André (1904-1981)
Références biographiques
AME 1931 p. 178. photo p. 229.
CR 1931 p. 275. 1932 p. 214. 1936 p. 159. 1962 p. 73. 1964 p. 48. 1965 p. 97. 1966 p. 116. 1967 p. 83. 1969 p. 86. 88.
BME 1925 p. 714. 1931 p. 693. 851. 913. 1932 p. 553. 1935 p. 605. 674. 1936 p. 593. 755. 1937 p. 664. 1941 p. 55. 199. 1949 p. 247. 1950 p. 130. 341. 1951 p. 501. 1953 p. 196. 1954 p. 913. 1955 p. 47. 1956 p.895. 1006. 1957 p. 264. 1092. 1960 p. 176. 1961 p. 685.
Epi 1963 p. 294.
MDA 1954 p. 133A.
EC RBac N° 92. 224. 316. 451. 464. 604.
EC2 N° 9 p. 285. 15 p. 23. 48/C2.