Joseph GANDON1850 - 1905
- Status : Prêtre
- Identifier : 1210
Identity
Birth
Death
Missions
- Country :
- Burma
- Mission area :
- 1874 - 1901 (Yangon [Rangoun])
Biography
[1210]. GANDON, Joseph-Jean, né le 28 avril 1850 à Meslay-du-Maine (Mayenne), fit ses études au petit séminaire de Mayenne, et au grand séminaire de Laval. Il en sortit en 1870 pour s'engager dans les volontaires de l'ouest (zouaves pontificaux). Après la paix, il chercha pendant quelque temps sa voie, et enfin se présenta au Séminaire des M.-E. le 15 novembre 1871. Ordonné prêtre le 30 mai 1874, il partit le 15 juillet suivant pour la mission de Birmanie méridionale.
Il étudia la langue à Rangoon et à Bassein, fut nommé vicaire à Kanazogon en 1876, passa en 1877 à Talaïn-dat, et en 1879 à Thonzeh où il bâtit une maison servant d'école et de résidence. En 1881, nous le trouvons curé de la paroisse de Saint-Patrick à Moulmein ; en 1884, il devint chapelain militaire à Rangoon ; en 1885, il dirigea, conjointement avec le P. D'Cruz, l'imprimerie de la mission à Bassein ; en 1888, il retourna à Thonzeh ; en 1890-1891, il passa à Okpho et à Thinganaing. Après un séjour dans la maison de Nazareth à Hong-kong, il fut appelé, en 1893, à la direction du catéchisat de la mission à Myaung-mya. Entre temps, il avait été nommé membre de la commission chargée de réviser la traduction en birman du Nouveau Testament.
A partir de 1901, il se consacra à l'imprimerie de Nazareth ; il mourut au sanatorium de Béthanie, Hong-kong, le 18 juillet 1905.
Obituary
M. GANDON
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DE LA BIRMANIE MÉRIDIONALE
Né le 28 avril 1850
Parti le 15 juillet 1874
Mort le 18 juillet 1905
M. Joseph Gandon naquit le 28 avril 1850 à Meslay-du-Maine, chef-lieu de canton du département de la Mayenne. Ses parents, cultivateurs aisés ¹, étaient d’excellents chrétiens. Dans toute sa famille, d’ailleurs, ascendants ou collatéraux, on retrouve la même note de foi vive et robuste.
L’enfant reçut donc une éducation profondément imprégnée d’esprit catholique. Très jeune, il fut mis en pension chez les Frères de Saint-Joseph, à Meslay, et facilement se plaça à la tête de sa classe. Son intelligence, sa piété et cette distinction native qui ne l’abandonna jamais, furent remarquées par le vicaire de la paroisse ², qui jugea qu’en cet enfant, il y avait l’étoffe d’un homme d’église. Il lui enseigna les premiers éléments du latin. L’élève fut la joie du maître ; il apprit vite et bien, et deux années plus tard il entra en quatrième au petit séminaire de Mayenne. Il y fut un excellent élève, tenant à peu près la tête de sa classe, remportant chaque année de nombreuses couronnes, donnant l’exemple de l’obéissance, de la ferveur et d’une aménité de caractère, faite de bonne grâce, d’esprit et de gaieté, qui le rendait charmant. Il devint préfet de la Congrégation de la sainte Vierge ; c’est un honneur et une récompense qui ne s’accordent qu’au plus digne.
1. A la ferme des Arcis.
2. M. l’abbé Alphonse Gougeon, vicaire, puis doyen de Meslay, mort chanoine titulaire de Laval.
En 1869, il passa au grand séminaire de Laval ; mais lorsque les défaites des mois d’août et de septembre 1870 écrasèrent la France, il crut devoir quitter la soutane et prendre rang parmi les zouaves pontificaux qui, sous le nom de « Volontaires de l’Ouest », honorèrent l’armée de la Loire. Ce fut la cause d’une épreuve assez pénible dans sa vie, jusque-là très douce et très unie, épreuve d’âme compliquée de la peine qu’involontairement il causait aux siens. Sa famille avait été si fière de ses succès de séminariste, elle désirait si vivement le voir prêtre, qu’elle ne put s’empêcher, quand il endossa l’uniforme, de craindre pour sa vocation. Lorsque, après la conclusion de la paix, il se présenta chez sa grand’mère et s’avança vers elle pour l’embrasser, la vieille dame recula de deux pas, et se redressant de toute sa hauteur, d’une voix sèche, accentuée d’un geste autoritaire : « Je n’embrasse pas les militaires, fit-elle en lui montrant la porte, va-t’en. »
L’ancien séminariste, devenu soldat par amour de la France, courba la tête sous l’apostrophe de la grand’mère, qui n’avait pas compris le dévouement de son petit-fils ; il n’eut pas même la permission de laisser sa malle ; il lui fallut la mettre sur son épaule, et traverser le bourg tout entier, sous les regards étonnés, attristés ou ironiques des habitants qui accouraient sur le seuil de leurs portes, appelant les voisins et les voisines : « Tenez, voyez donc l’abbé Gandon, en soldat, qui porte sa malle. »
L’arrivée à la ferme des Arcis fut moins dure, mais les semaines qui suivirent excitèrent plus d’une inquiétude. Qu’allait devenir Joseph ? Il ne voulait pas rentrer au séminaire de Laval. C’était tout ce qu’il disait et, en réalité, tout ce qu’il pensait.
Il avait beau regarder en lui, devant lui, autour de lui, il ne voyait pas. L’avenir était complètement fermé. Il supporta bravement cette obscurité. Il se mit aux travaux de la ferme, peina du matin au soir, dans les champs de labour, dans les étables, à la maison ; mais à ses silences prolongés, à la tristesse qui assombrissait son front, à son éloignement de toute distraction, on sentait ses souffrances inté¬rieures. Pendant plusieurs mois, le problème de sa destinée resta insoluble.
La mère souffrait également. Elle essayait de pousser son fils vers le sacerdoce ; elle lui rappelait ses joies de séminariste, ses études, ses succès ; elle lui montrait le bien qu’il ferait aux âmes ; elle y mêlait la petite note d’amour-propre que si peu de mères oublient : « On m’a affirmé que tu deviendrais vicaire général, » lui dit-elle un jour. Elle disait vicaire général, sans doute parce qu’elle n’osait pas dire évêque. En dehors de la famille, on agitait la même question ; et il paraissait à tous que ce grand jeune homme, d’intelligence prompte, de parole alerte, était plus propre à cultiver les âmes que les champs.
A la fin du mois d’août, des séminaristes de Laval qui partaient pour le Séminaire des Missions-Étrangères — l’un d’eux y est revenu — lui firent une visite d’adieu. Ils ne l’interrogèrent que discrètement sur ses projets, mais en le quittant, ils lui serrèrent chaudement la main : « Allons, au revoir, » lui dirent-ils, et l’accent signifiait : « Venez donc avec nous. » Joseph le comprit : « Si je reprends la soutane, répondit-il, c’est aux Missions-Étrangères que j’irai. » Au mois d’octobre, il réalisa cette parole.
Il arriva un matin au nº 128 de la rue du Bac, sans avoir demandé son admission, sans avoir prévenu personne ; et il raconta son histoire qu’il termina en exprimant le désir de devenir aspirant. Ce n’est pas que l’entrée de notre séminaire soit difficile, encore y faut-il quelques formalités d’ordre intérieur et extérieur. On envoya l’ancien volontaire de l’Ouest faire une retraite chez les Capucins de Versailles ; on écrivit au grand séminaire de Laval pour avoir des renseignements. La retraite se passa très bien, les renseignements furent excellents, et le 15 novembre 1871, Joseph Gandon était inscrit sur les registres du Séminaire des Missions-Étrangères.
Il demeura près de trois ans dans la maison, s’y montra bon séminariste, remarquable par sa charité. Il fut nommé maître de cérémonies, ce qui est considéré comme un témoignage d’estime, et paraît, aux yeux d’une jeunesse encore sans grande ouverture sur les choses de ce monde, comme une situation importante. Prise par un côté, qui n’est peut-être pas le plus habituel, quoiqu’il soit le plus vrai, cette appréciation n’est pas absolument dénuée de fondement, puisqu’une telle fonction permet de mieux connaître et de mieux apprécier la liturgie, et de travailler à rehausser, par des répétitions bien données, les cérémonies de l’Église.
Joseph Gandon partit le 15 juillet 1874 pour la mission de Birmanie méridionale. Après quelques mois passés à Rangoon, où il étudia l’anglais, il fut envoyé à Bassein, auprès du P. D’Cruz, pour se perfectionner dans cette langue : il y fit des progrès rapides.
A Kanazogon, en 1875, chez M. Bertrand, il commença l’étude du birman. Il y resta près de deux ans. Par ses qualités d’esprit et de cœur, il gagna l’affection de son maître et la garda toujours.
En 1877, il fut envoyé à Talaïndat, petit poste carian stérile, dans le voisinage de la ville de Yandoon. Le régime trop pauvre qu’il eut à y suivre, lui causa une maladie d’estomac, qui devait avoir sur sa vie et sur ses qualités plus d’influence qu’on ne l’a cru pendant longtemps.
De Talaïndat, il fut transféré, au commencement de 1879, à Thonzé, poste birman de fondation récente.
La rapidité avec laquelle il avait appris l’anglais et le birman, son caractère aimable et sérieux, son intelligence, la distinction de ses manières, avaient impressionné si favora-blement Mgr Bigandet, qu’il songea sérieusement à prendre M. Gandon pour coadjuteur. On fit remarquer au prélat que cinq années de mission sont insuffisantes pour donner l’expérience nécessaire à un évêque, et si on ne lui répéta pas le mot de Talleyrand « qu’il ne faut juger d’un homme qu’un quart d’heure après sa mort », du moins, lui dit-on qu’il faut attendre le temps et les circonstances, pour s’assurer si les qualités n’ont pas, comme les médailles, un revers dont il sera nécessaire de tenir compte. Au lieu d’être nommé coadjuteur, M. Gandon resta à Thonzé. Il y bâtit, grâce aux aumônes qu’il sut recueillir, une belle et bonne maison en bois de teck, qui a servi d’école et de résidence au mis¬sionnaire jusqu’en 1904. L’école anglo-birmane qu’il fonda et qui n’a cessé de se développer depuis, était déjà très prospère, quand il dut quitter Thonzé, en mars 1881, pour aller remplacer M. Zahm à Moulmein.
Il resta près de trois ans à Moulmein, s’occupant du couvent, de l’école des Frères et de la congrégation mixte attachée à l’église de saint Patrick.
Au mois de décembre 1883, il fut envoyé à Bassein pour diriger, conjointement avec le P. D’Cruz, l’imprimerie de la mission.
Thonzé le revit, puis Rangoon, où il remplit la charge d’aumônier militaire pendant quelque temps. Il passa aussi à Okpho chez M. Bringaud, et à Thinganaing chez M. Naude-Theil.
Après un séjour à notre maison de Nazareth, à Hong-kong, il fut, en 1893, appelé à prendre la direction du catéchisat de la mission, nouvellement établi à Myaung-mya. Ses anciens élèves se rappelleront toujours ses solides et claires leçons, données en un birman parfaite-ment pur et correct.
Pendant ce temps, il fut nommé par son évêque membre de la commission chargée de reviser la traduction du Nouveau Testament en birman.
En 1899, il revint en France refaire ses forces. Sa famille, ou plus exactement quelques-unes de ses sœurs et de ses nièces, vestiges de sa famille trop souvent touchée par la mort, le reçurent avec joie. Quand il se sentit mieux, il partit pour Hong-kong, acceptant volontiers de donner à notre imprimerie de Nazareth les restes d’une vie qui s’éteignait, sans qu’il le comprît bien exactement. Au commencement de 1905, la maladie d’estomac dont il souffrait s’aggrava, le médecin constata l’existence d’une lésion. Depuis le jour de l’Ascension, il fut incapable de célébrer la sainte messe. Dans les premiers jours de juillet 1905 le supérieur de la maison, M. Lecomte, écrivait : « Il ne supporte que le lait et un peu de bouillon, encore les « vomit-il une ou deux fois par semaine. Il garde la chambre, mais il n’est pas alité. Il prie et « lit sur une chaise. Il a toujours conservé l’espoir de guérir, disant : « Dès que je prendrai un « peu de nourriture, les forces reviendront tout de suite. En France, je fus malade, mes sœurs « me soignèrent et je guéris très vite. » Pour moi, voyant sa faiblesse et ses douleurs, je l’ai « invité à se préparer à la mort. Il a accepté et s’est résigné à la volonté de Dieu. Il a reçu « l’extrême-onction. Il a répondu aux prières, ayant toute sa connaissance. »
Le malade dicta alors à M. Lecomte pour ses sœurs, dont l’une est religieuse de la Charité d’Evron, la lettre suivante :
« MES TRÈS CHÈRES SŒURS. Depuis longtemps déjà je voulais vous écrire ; j’ai remis « de jour en jour. Je regrette beaucoup de ne pouvoir répondre à vos lettres, mais je n’ai plus « la force de tenir la plume.
« Je suis très faible. Avant-hier, j’ai reçu l’extrême-onction. Je vais peut-être mourir. Si je « meurs, je compte sur la miséricorde infinie du bon Dieu : Il me recevra dans ses bras. J’irai « rejoindre mon père, ma mère, mon frère et tous ceux que j’ai tant aimés. Au revoir, au ciel !
« Je vous remercie, vous, mes chères sœurs, tous les membres de ma famille, tous mes « amis, de votre affection, de vos bons soins. Je pense sans cesse à vous devant le Seigneur. « Tous les jours de ma vie j’ai prié pour vous ; je vous en conjure, priez beaucoup pour moi et « faites prier. Adieu, au nom des Sacrés Cœurs de Jésus et de Marie. Adieu. »
Le jour de la fête du Sacré-Cœur, il reçut le saint viatique avec une grande ferveur. Le 18 juillet, M. Lecomte eut à raconter ses derniers moments : « Il a passé une nuit et la matinée « dans un grand calme. A midi, il a eu une petite crise, sans perdre connaissance.
« Dans l’après-midi, voyant ses forces décliner, je l’ai confessé vers 5 heures. Il a récité les « prières et fait les invocations à Jésus, à Marie, à saint Joseph. A 5 h. 50, il a expiré.
« Il est mort sans secousse, tout doucement, sans agonie. Il venait de dire : « Jésus, « miséricorde ! » Et nous terminions les prières des agonisants.
« Ces derniers temps, il se confessait tous les jours. Il aimait à faire le signe de la croix, « prononçant la formule française, « comme ma mère m’a enseigné à le faire », disait-il.
« Nous avons exposé son corps à la chapelle : il est revêtu des ornements sacerdotaux. « Nous le veillerons toute la nuit. Demain, je chanterai la messe solennelle. Demain aussi, « plus de quarante prêtres célébreront la sainte messe pour lui.
« Maintenant nous récitons l’office des morts, faisons le chemin de la croix, disons le « rosaire, nous efforçant de lui gagner et appliquer de nombreuses indulgences pour hâter son « entrée au ciel. »
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References
[1210] GANDON Joseph (1850-1905)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1894, p. 246 ; 1895, p. 273 ; 1896, p. 273 ; 1897, p. 226 ; 1898, p. 218. - A. M.-E., 1912, pp. 56 et suiv. - Sem. rel. Laval, 1904-05, p. 643.
Notice nécrologique. - C.-R., 1905, p. 371.