Aloys SCHOTTER1857 - 1924
- Status : Prêtre
- Identifier : 1513
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Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1882 - 1924
Missionaries from the same family
Biography
[1513] SCHOTTER Aloys, est né le 5 janvier 1857 à Fessenheim-Le-Bas "Fessenheim", au diocèse de Strasbourg (Bas-Rhin). Il fait ses études secondaires au Petit Séminaire de Strasbourg jusqu'en seconde et, sans faire de rhétorique, passe au Séminaire de philosophie. Avant son ordination, il est professeur à Pont-à-Mousson, puis à Ferrières. Il entre diacre au Séminaire des Missions Étrangères le 6 novembre 1880. Ordonné prêtre le 24 septembre 1881, il part le 9 novembre suivant pour la mission du Kouytcheou, où l'avait précédé son frère Alphonse.
Il s'initie à la langue sous la direction du Père Eslinger, après quoi on lui confie le district de Touanpo qu'il visite en tous sens (1882-1895). Pendant la persécution de 1884, il se réfugie chez les néophytes et puis répare les dégâts, relève les ruines et bâtit une église pour ses fidèles, visitant aussi son frère Joseph nommé à Yeouyang au Setchuen, à une dizaine de jours de marche de chez lui.
En 1895, il se voit confier une partie du district de son frère Alphonse à Shing-ny-fou. L'appréhension du début fit place à l'enthousiasme quand il est conquis par les réceptions cordiales des Dioi. Il restera vingt-cinq ans dans ce district (1895-1920) et en sera nommé vicaire forain.
En 1920, il est nommé à Mouyeousen où il ne fait que passer. Il veut mourir dans la mission de Lanlong et se retire près du tombeau de son frère Alphonse. Il y meurt le 3 janvier 1924, deux jours avant de fêter ses 67 ans, dont 43 de mission.
Obituary
[1513] SCHOTTER Aloys (1857-1924)
Notice nécrologique
La jeune Mission de Lanlong venait à peine d’être érigée en Préfecture Apostolique et mise en demeure de voguer sous ses propres voiles qu’elle perdait le plus expérimenté de ses missionnaires. Notre bon doyen, M. Aloys Schotter, nous était enlevé par la mort le 3 janvier 1924. Le spectacle de son zèle, sa grande expérience des hommes et des choses de ce pays nous étaient une exhortation vivante et un guide sûr. Il a plu au Maître des Apôtres d’en priver la Mission ; que son Saint Nom soit béni !
M. Aloys Schotter était né en Basse-Alsace au hameau de Fessenheim-Le-Bas "Fessenheim", diocèse de Strasbourg, le 5 janvier 1857. Ses parents, Michel Schotter et Catherine Schir appartenaient à la forte race des terriens, attachés au sol, nourriciers de la patrie. Sa mère, assez instruite pour une femme de sa condition, avait été gouvernante dans un presbytère. Tous deux étaient riches de foi et de mérites.
Quelle était la piété, quelles furent les vertus de ce foyer ? Les pays heureux n’ont pas d’histoire, assure un dicton ; les foyers vertueux étant nécessairement heureux, celui-ci non plus n’a pas laissé de documents à ses historiens éventuels. Il est possible cependant de conjecturer la ferveur qui y régnait en constatant que le Roi des Apôtres y choisit trois missionnaires pour notre Société. Nous savons qu’on lisait en famille les Annales de la Propagation de la Foi et que, devant ses enfants déjà émus par cette lecture, la femme forte qu’était la mère faisait ressortir combien il est beau et méritoire d’aller convertir « les nègres de la Chine». Aussi, sur quatre de ses enfants, un seul, l’aîné, qui devait survivre à tous ses frères, resta dans la famille et continua la lignée ; les trois autres, Alphonse, Joseph et Aloys, allèrent convertir « les nègres de la Chine ». Alphonse et Joseph partirent en 1875, le premier pour le Kouytcheou où il est mort après vingt-sept ans d’apostolat le plus fructueux, Joseph pour le Sutchuen Oriental où il donna jusqu’en 1892, date de sa mort, de nombreux exemples de piété et de vertu. Enfin le troisième, qui fut notre « Père Aloys», vint aussi au Kouytcheou unir son zèle à celui d’Alphonse ; il eut le bonheur de lui être adjoint dans son œuvre, de l’assister à sa mort et d’être enterré à ses côtés.
Sur l’enfance du Père Aloys, comme nous l’appelions tout court, nous n’avons aucune donnée importante. Il dut, comme ses frères avant lui, faire ses premières études chez les Frères de la Doctrine Chrétienne. Il gagna chez eux la première formation de cette foi jalouse que n’effleurait aucun doute, qui éconduisait toute objection sans lui accorder un regard.
À treize ans – on était en 1870, l’année terrible – nous le trouvons au Petit Séminaire de Strasbourg, où il entre en sixième. Il fera dans cet établissement toutes ses études secondaires jusqu’en seconde inclusivement. Il y tint une « conduite louable » et y remporta « des succès satisfaisants » comme en témoigne le certificat que son Supérieur, l’abbé Murry lui remit à sa sortie. Des excursions et des pèlerinages occupaient ses vacances : Le mont Saint-Odile, Marienthal et même Einsiedeln le virent plusieurs fois. A cette époque de sa vie, nombreuses pages de son carnet sont couvertes de voyage et de croquis. Avec le désir de s’instruire, l’adolescent avait le goût du changement et de la nouveauté. Plus tard, sur le point de quitter le monde occidental et de s’embarquer pour d’autres cieux, il poussera jusqu’à Rome pour voir la ville éternelle et se faire bénir par le pape.
— De quel diocèse êtes-vous ? lui demandera Léon XIII ?
— De Strasbourg, Saint-Père.
— Strasbourg, vous habitez Strasbourg ?
— Je vais en Chine ; j’y ai déjà deux frères ; bénissez-nous tous.
— Je vous bénis tous et vous souhaite bon courage ; il faut du courage.
Il revint de Rome en passant par La Salette, où il voulait prier pour sa mère, morte quelques années auparavant.
Le jeune Aloys ne fit pas de rhétorique ; de la classe de seconde il passa au Séminaire de philosophie. Ses études théologiques terminées à Strasbourg, il n’avait pas encore l’âge requis pour être admis à la prêtrise. Il ne voulait pas non plus entrer de suite aux Missions-Étrangères, jugeant ses goûts pour l’apostolat lointain insuffisamment étudiés. Le chef de certaine maison d’éducation à Pont-à-Mousson le demanda à ses Supérieurs pour un cours de mathématiques ; mais arrivé sur les lieux, le jeune abbé s’aperçut à temps que, sur la matière à professer, « ses élèves en auraient su plus long que lui », disait-il. Toutefois il était en France et tenait à y rester pour ne pas s’exposer de nouveau aux sévères formalités de la frontière. Il s’engagea donc dans l’établissement comme « professeur de vertus appliquées » selon son euphémique expression, mais il n’était pas surveillant, emploi qu’il redoutait. L’an d’après, il passa à Ferrières. Là, il eut, disait-il en riant, l’honneur d’éduquer « des enfants de France ». C’était fils de France qu’il voulait dire, mais dans ce cas, il ne s’agissait que des enfants de quelque gros personnage qu’attirait au Petit Séminaire d’Orléans, la réputation d’éducateur de Mgr Dupanloup.
Son pèlerinage de Rome accompli et ses lettres démissoires obtenues, il entra diacre au Séminaire des Missions-Étrangères, le 6 novembre 1880. Les lettres de ses frères l’excitaient et le tenaient en haleine ; aussi soupirait-il après son départ, malgré certaines préoccupations d’ordre scientifique auxquelles il consacrait ses loisirs. C’était le temps où les recherches sur la direction des aérostats et l’allègement des moteurs battaient leur plain. Aloys qui suivait ces questions dans les revues scientifiques conçut le principe d’un moteur léger et puissant. Il songea à un brevet ; pour l’obtenir, il engagea des correspondances, commença des visites : M. Moigno l’encouragea ; M. Tissandier lui parla de la Chine ; le capitaine Renard plaisanta, sans lui répondre autrement, les curés qui veulent « lancer des ballons ». Et l’aspirant missionnaire sentit bien quelque blessure dans son amour-propre d’inventeur méconnu ; mais finalement il s’en consola en apportant son ballon idéal en Chine jusqu’au Sutchuen où son frère Joseph, par quelques amicales plaisanteries, le guérit de son penchant pour les excursions dans le domaine de la fantaisie.
Le 24 septembre 1881, il recevait la prêtrise des mains de Mgr Gasnier, Vicaire Apostolique de Malacca, et était désigné pour le Kouytcheou où il allait rejoindre son frère Alphonse.
A Kouyyang, le paternel Mgr Lions le confia, pour ses premières études de la langue, à un autre Alsacien, M. Eslinger. La prononciation des sons chinois et la gymnastique des tons l’arrêtèrent quelque temps ; mais, avec la patiente ténacité de sa race, il eut raison de toutes les difficultés et parvint à manier fort passablement la langue de Confucius. Quand il eut, sous la direction cordiale de son compatriote, assimilé les caractères du catéchisme chinois et put un peu dialoguer avec les natifs, on lui confia le district de Touanpo. Dans ces temps reculés, les ouvriers apostoliques manquaient encore plus qu’aujourd’hui. Aussi, dès que le nouvel arrivé pouvait non pas encore voler, mais se servir un peu de ses ailes, on était bien aise de faire appel à son concours. Après l’avoir muni de quelques caractères chinois, on le lançait en disant : La langue parlée, il sera toujours bien obligé de l’apprendre.
Le district de Touanpo était alors très vaste, s’étendant jusqu’à Chetsien. M. Schotter le parcourut chaque année régulièrement, confirmant les néophytes dans la foi, instruisant les catéchumènes et prêchant les païens. La persécution de 1884 s’étendit bien jusque chez lui, mais il sut à temps se mettre à l’abri. Retiré chez des néophytes à la campagne, il y attendit la fin de la tourmente. Le calme rétabli, il reprit ses occupations apostoliques, simplement, réparant les dégâts, relevant les ruines. La paix se confirmant et son troupeau s’accroissant peu à peu, il sut tenir compte des aspirations de ses ouailles : Les chrétiens chinois sont toujours fiers de ce qui les rehausse aux yeux des païens, surtout d’un bel oratoire. Le P. Aloys édifia donc, pour ses fidèles de Touanpo, une église chaperonnée d’un clocher, célèbre dans les fastes des missionnaires du Kouy Tcheou, de style remarquable … par sa nouveauté. Il inspira à un confrère venu de loin pour le voir des vers humoristiques où « l’architectural effort » était magnifié.
Sur ces entrefaites, son frère Joseph du Sutchuen venait d’être nommé à Yeouyang. Une dizaine de jours de marche seulement les séparait ; Aloys eut tôt fait de franchir la distance. Les deux frères dans cette entrevue s’encouragèrent mutuellement et refirent provision d’entrain et de gaîté.
En 1895, le P. Alphonse, à Shingnyfou, voyait son zèle couronné des plus larges succès. Ses deux orphelinats étaient pleins à déborder et de tous côtés lui arrivaient des listes d’adorateurs ; même avec l’aide d’un vicaire chinois il ne pouvait suffire à la besogne ; seule la formation de tous ces catéchumènes eût suffi à occuper plusieurs missionnaires, mais on ne les avait pas alors. Du moins le fardeau fut divisé et la moitié du poids placé sur d’autres épaules. Pour que l’œuvre fût plus sûrement continuée dans l’esprit de celui qui l’avait commencée et menée dans l’union et la cordialité, l’autorité, toujours paternelle au Kouytcheou, adjoignit au P. Alphonse son propre frère Aloys. Avec une abnégation toute fraternelle, le P. Alphonse céda son poste à son cadet. A Shingnyfou, les œuvres étaient déjà lancées, les assises du poste étaient solides. Lui se retira à Tchenfong, assumant le travail sans gloire de la visite des campagnes et méditant de nouvelles conquêtes.
A Shingnyfou cependant, le P. Aloys restait quelque temps sceptique sur le succès de l’œuvre qu’on lui avait laissée. Arrivant dans ce pays nouveau tout pénétré des méthodes employées dans le Nord, ignorant tout du caractère de ces populations aux éléments si hétérogènes quoique juxtaposés, la manière large et hardie de son frère l’effrayait bien un peu. Ces admissions à la Sainte-Enfance sans grand examen préliminaire ni garanties pour l’avenir, ces conversions en masse pour lesquelles on ne recevait que des listes de noms de famille ou de villages, apportées de loin et qu’on devait aller repérer ensuite, plus tard, quand on le pouvait, le laissaient bien un peu dans l’appréhension. Il ne se rallia de cœur que lors de ses visites au pays dioi. Les Dioi le conquirent ; leurs réceptions enthousiastes et cordiales le retournèrent. Dans les profondes vallées du Ouangmon comme sur les montagnes du Cheten, on criait à son arrivée : « Touen sien thong ma lo ! » Le bon génie du ciel est descendu parmi nous ! Ces bons campagnards voyaient poindre enfin l’aurore de leur libération d’un asservis-sement séculaire.
Le P. Aloys tint ce fief de Shingnyfou pendant vingt-cinq ans. C’était sa petite Alsace. Il forma à l’orphelinat la foi et les mœurs de nombreux jeunes gens qui, retournés dans leur pays, ont fondé des foyers chrétiens autour desquels cristalliseront des stations ; il accrût en ville et à la campagne le nombre des chrétiens ; et aux jeunes ouvriers apostoliques, venus après lui semer dans ce champ nouvellement défriché et d’autant plus fertile, ses conseils ne manquèrent jamais :
— « Soyez soldats, soyez surtout capitaines ! A la tête d’une compagnie d’auxiliaires, on remporte des succès plus grands. »
— « Visitez assidûment vos chrétiens ; n’attendez pas qu’ils viennent eux-mêmes à vous. »
Pour donner plus de poids à ses conseils et à sa direction, son Vicaire Apostolique le nomma vicaire forain pour cette partie de la Mission. Sa prudence consommée, née de son expérience de tous les dangers, le désignaient pour cet emploi.
Les travaux apostoliques n’absorbaient pas entièrement sa grande activité. Sa bonne ville de Shingnyfou, assise au faîte d’un double versant, ne se développe que lentement, faute de pouvoir nourrir ses habitants. Les campagnes suburbaines, composées de plateaux nus et de plaines hautes mal arrosées, entretiennent avec peine une population clairsemée. Où puiser pour approvisionner la cité ? Il y a bien sous les remparts, au Nord-Est, une large plaine dont la production en riz suffirait à nourrir plus de bouches que n’en contient actuellement la ville ; mais c’est une cuvette fermée tout autour, et les pluies, chaque été, y amènent une nappe d’eau de plusieurs mètres de hauteur. Quelle chance cependant si l’on pouvait donner ces terrains à agriculture nourricière ! La population de la ville doublée ; des campagnes populeuses ; le champ de l’apostolat rendu plus vaste et moins ingrat ; la Mission honorée, devenue l’objet de la reconnaissance de chacun ; un hôpital à côté de l’Eglise … Ce mirage captiva longtemps le regard du curé de Shingnyfou. Vint un jour où il se dit : Que perdrait-on à essayer ? Et il fit coller des affiches, composa des tracts et remua l’opinion. Le conseil municipal s’émut ; on composa un bureau pour la répartition et la vente des terrains à récupérer. Mais l’ours n’était pas tué. Enfin les travaux commencèrent, un canal s’ébaucha. Si l’entreprise n’a pas encore abouti, ce n’est pas la faute du P. Aloys qui s’y dépensa sans compter : Pauvre mouche autour d’un coche qui ne veut pas avancer ! Ce n’étaient pas les difficultés techniques, certes, qui arrêtaient l’attelage ; mais en Chine, les Chinois sont les maîtres et qui compte sans leur chauvinisme et leur duplicité doit compter deux fois. L’entreprise du missionnaire ne fut cependant pas sans porter quelques fruits : Parmi les ouvriers qui exécutaient les travaux, il recueillit une abondante moisson de baptêmes in articulo mortis ; l’esprit de la ville s’améliora à l’égard de la Mission et quand l’œuvre sera reprise et menée à bonne fin, devant les nombreux avantages qu’il en retirera, le bon peuple de Shingnyfou saura reconnaître qu’il les doit d’abord à la Mission catholique.
Ce gros poste devint trop lourd au P. Aloys désormais les bras chargés de mérites, mais aussi les épaules d’années. Il fut remplacé. Pour ne pas rester inactif, il demanda le poste moins absorbant de Mouyeousen, où il ne fit d’ailleurs que passer. Voulant mourir dans la Mission de Lanlong qui venait d’être créée et où il avait laissé son trésor et son cœur, il se retira à Tchenfong, auprès du tombeau de son frère Alphonse. Il n’eut pas longtemps à y attendre l’appel du Maître. En plein exercice de son zèle, tout à coup il dut s’arrêter et demander secours. Depuis plusieurs années déjà il était en proie à une profonde anémie ; puis des accès de malaria mal soignée lui avaient mangé le sang. Il dut s’aliter ; ses pieds enflèrent, bientôt après ses mains. A son appel, Mgr Carlo d’abord, un confrère ensuite étaient accourus. Mais l’œdème rapidement gagna les organes internes et l’étouffa le 3 janvier 1924. Il avait soixante-sept ans moins deux jours et quarante-trois ans de Mission. Il s’en alla au Christ, accompagné des centaines d’âmes de petits enfants régénérés par ses baptiseurs et des nombreux adultes qu’il avait lui-même baptisés. « Venientes autem venient portantes manipulos suos. »
M. Aloys Schotter fut un prêtre vertueux et un missionnaire zélé. Pieux, il le fut dès l’enfance. Sur son carnet de jeune homme il aimait à noter la date des nombreuses retraites qu’il faisait, retraites annuelles, retraites du mois, et les résolutions qu’il y prenait. Plus tard, ce sera son journal de missionnaire qu’il couvrira de réflexions pieuses. Ses exercices de piété étaient toujours faits à temps et à loisir, son bréviaire récité avec attention. Ses goûts habituels trahissaient son esprit sacerdotal : il eût voulu une grande église, de belles cérémonies, des messes chantées. Il avait coutume de dire aux jeunes confrères : Il ne faut se livrer qu’à des études qui ne nous éloignent pas trop de l’esprit de notre état et surtout ne nous en détournent pas. Quand il était à la résidence, il conservait toujours le Saint Sacrement, l’entourant de fleurs et de propreté ; et il venait souvent se prosterner devant son autel, plongé dans l’adoration et la prière.
Sa charité confraternelle était exemplaire. On était toujours reçu à bras ouverts chez lui. Quand les confrères arrivaient de la brousse à son poste central de Shingnifou, fatigués, fourbus, il se montrait heureux de leur arrivée et les soignait de son mieux. Non content de les accueillir, il les invitait même : – « Sortez de chez vous à la saison malsaine ; venez respirer l’air des plateaux.» Aux confrères de la frontière il disait un jour : « Passez de temps en temps de l’autre côté du fleuve ; allez rendre visite aux confrères de là-bas et si possible amenez-les ici. »
Il cultiva toute sa vie le goût de l’étude et des travaux de l’esprit. Il avait toujours quelque travail en chantier, plusieurs même quelquefois, ou une idée qu’il mûrissait. Il s’occupa ainsi de recherches sur les origines et les progrès de l’Eglise du Kouytcheou et édita ce travail en chinois sous le titre de « Kien Kiang tchou tchen » ou Les Confesseurs de la Foi du Kouytcheou. On a de lui un aide-mémoire destiné aux pharmaciens et baptiseurs de la Sainte-Enfance pour le judicieux emploi des remèdes qu’ils distribuent ; des notes géographiques et ethnographiques assez abondantes pour une histoire de la Province ; plusieurs articles de presse sur divers sujets.
Il n’eut pas de vertus que pour lui : il fut un missionnaire zélé et heureux. S’il passa quelquefois trop facilement d’un champ à un autre avant que mûrissent les grains qu’il avait semés, ce fut moins par manque de constance que par excès de zèle. Il agissait beaucoup par ses auxiliaires, plus encore par lui-même. En campagne comme à l’oratoire, s’il avait devant lui des auditeurs qui pussent entendre sa langue, trois fois par jour il leur rompait le pain de la parole ; entre-temps, il visitait les familles, catéchisait les enfants ; dans la rue, sur les routes, à la résidence, il prodiguait à chacun exhortations et conseils. A Touanpo, après les troubles de 1884, plusieurs néophytes effrayés avaient laissé refroidir leur première ferveur et, sans apostasier formellement, abandonné les lois de l’Eglise. A chaque visite le missionnaire, patiemment, leur rappelait qu’ils avaient une âme à sauver. Dieu bénit son zèle et il eut la joie de les voir reprendre les obligations de leur baptême. C’est dans les sacrements qu’il mettait toute sa confiance pour élever et sanctifier les âmes. Ils sont la source de la grâce ; aussi y conviait-il fréquemment ses chrétiens. Et si d’aucuns parmi ses confrères trouvaient qu’il donnait trop facilement le pain céleste sans l’entourer des conditions subjectives qui eussent assuré un plus grand fruit, il répondait : Les sacrements ne produisent-ils pas la grâce ex opere operato ? Et le « compelle intrare » de Notre-Seigneur ? L’opinion de ce théologien en vaut bien une autre.
Sur la fin de sa vie, voulant se créer, disait-il, des introducteurs au ciel, il intensifia son œuvre des baptêmes in articulo mortis. A la ville et à la campagne, il multiplia les baptiseurs et, pour leur donner crédit, il achetait au loin du vaccin qu’il leur distribuait. Ces auxiliaires occasionnels songeaient sans doute plus à assurer à leur tournée un bon rendement en sapèques qu’en baptêmes d’enfants ; toutefois des centaines furent baptisés ainsi. Pour atteindre les adultes moribonds, il avait établi derrière sa résidence ce qu’il appelait un … « moritorium ». C’était un petit local avec quelques lits. Les pauvres portaient là leurs malades dès qu’ils les voyaient à l’extrémité ; les individus de passage, malades dans les hôtelleries ou chez des amis, étaient aussi portés là pour y mourir. Le Père, après les avoir sommairement instruits, puis baptisés, assumait les frais de la sépulture. Il additionnait ainsi au bout de l’an plus de cent baptêmes.
Enfin, c’est pour assurer une meilleure évangélisation de ce pays et partant le salut d’un plus grand nombre d’âmes que le P. Aloys pensa à le séparer en mission spéciale. La mesure certes est de nature à obtenir ce résultat. Dès 1909 il demandait la création d’un petit séminaire dioi ; puis, peu à peu, il préparait l’installation de la nouvelle Mission en achetant terrains et maisons autour de sa résidence.
Adieu donc, chère Père Aloys, votre souvenir vivra longtemps parmi nous. De votre côté, n’oubliez pas là-Haut que nous sommes entrés dans vos travaux et ceux de votre frère Alphonse. Levez les mains pour la jeune Mission de Lanlong.
References
[1513] SCHOTTER Aloys (1857-1924)
Références bio-bibliographiques
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EC1 N° 57.