Marie-Julien GEOFFROY1871 - 1918
- Status : Prêtre
- Identifier : 2119
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- Vietnam
- Mission area :
- 1894 - 1918 (Qui Nhon)
Biography
[2119] Marie, Julien, Auguste GEOFFROY naquit le 11 Novembre 1871, à HOEVEILLE, arrondissement de LUNEVILLE, diocèse de NANCY, département de la MEURTHE-et-MOSELLE. Son père Eugène GEOFFROY, cultivateur aisé, avait été maire de sa commune ; sa mère Pélagie THIRIET était la soeur de M.Julien THIRIET, mep, de la mission de SAIGON, et de l'Abbé Joseph THIRIET, curé de DOUX-VILLE, fusillé par les Allemands à CRION, le 20 Août 1914. Elle eût cinq enfants, quatre garçons et une fille.
L'Abbé MILLIET avait remarqué la conduite et l'intelligence précoce du jeune Marie-Julien. Pendant deux ans, il lui donna des leçons de latin qui permirent de le présenter en quatrième au Petit Séminaire de PONT-à-MOUSSON où il se conduisit en élève travailleur et sérieux.
Le 14 Septembre 1890, laïque, il entra au Séminaire des Missions Etrangères. Tonsuré le 27 Septembre 1891, Minoré le 24 Septembre 1892, Sous-Diacre le 15 Octobre 1893, Diacre le 17 Février 1894, il fut ordonné prêtre le 01 Juillet 1894, et reçut sa destination pour le Vicariat Apostolique de la Cochinchine Orientale (Quinhon). Il quitta Paris le 29 Août 1894, s'embarqua à MARSEILLE le 02 Septembre suivant pour rejoindre sa Mission qu'on lui disait si belle et rénovée dans le sang des martyrs.
En passant à SAIGON, il eût le bonheur de rencontrer son oncle, qui était Supérieur du Séminaire de la Mission. Ce fut tout un évènement, car on aimait beaucoup l'oncle, -il devait mourir trois ans plus tard- et le neveu avait déjà des sympathies !
Le 02 Octobre 1894, M. GEOFFROY arriva à QUINHON et y étudia les premiers éléments de la langue viêtnamienne, puis il alla se perfectionner à KIM-CH+U. En Février 1895, il fut nommé vicaire à KIEU-DONG, et en Novembre de la même année, professeur à DAI-AN où il resta trois ans. Il aima ces années de silence, de piété, de travail réglé . Caractère réfléchi et pratique, habile à manipuler le tachéomètre, sinologue, musicien, il pouvait aborder tous les genres d'études. Ces rares qualités attirèrent sur lui l'attention de M.VILLAUME qui le chargea de diriger l'exécution d'un canal de vingt quatre kms, dont un tiers à peine était creusé.
M. GEOFFROY quitta QUINHON le 30 Décembre 1898, et arriva à PHAN-RANG dans les premiers jours de 1899. Pendant un an et demi il besogna comme auxiliaire de M. VILLAUME qui, le O6 Septembre 1900, allant se rendre compte de l'importance d'une rupture de la digue du canal d'irrigation, fut entrainé par le courant et se noya. Il resta alors seul pour exécuter ces importants travaux, qui durèrent une dizaine d'années.Dix autres années furent employées à mettre en valeur des terrains de brousse ou de palétuviers.
Dure et harassante vie que celle de ce chef de chantier ! Logeant dans une paillote à la toiture très basse, il y avait d'un côté, un autel primitif sur lequel il célébrait quotidiennement la sainte Messe, à trois heures et demie du matin, de l'autre côté, un lit formé de branches , et au milieu une table à usages multiples. Tout autour de ces meubles, s'étalait un amalgame d'outils et d'objets divers. Et tout en dirigeant les travaux, il apprit la langue cham qui était celle de ses employés, et devint capable de la parler et de l'écrire !
En 1906, il s'installa à HO-DIEM dans une cabane de huit mètres sur cinq, murs en torchis, portes en bambous. Mais la joie règnait dans cette demeure, on y venait avec plaisir, car M. GEOFFROY accueillait ses visiteurs toujours avec le sourire. Bon musicien, il réjouissait leurs oreilles en leur jouant quelques morceaux sur l'harmonium. Il était cependant prudent d'annoncer sa venue, car arriver à l'improviste, c'était s'exposer à jeûner ou tout au moins à faire un repas maigre !..
En 1913, il construisit le magasin à riz, et s'en réserva une partie comme habitation. Au début de 1914, il termina la construction d'une chapelle, et organisa la vie paroissiale. Soucieux de la vie spirituelle de ses fidèles, il donna beaucoup d'éclat aux célébrations liturgiques, bien préparées par des répétitions de chants quotidiennes, après la prière du soir. .
Couché à dix heures du soir, il se levait à trois heures et demie. A quatre heures, l'église était presque remplie, et vers quatre heures un quart, il commençait la messe. Les chrétiens étaient libres au lever du jour pour se rendre au travail. Il employait le reste de la journée à visiter les chantiers de défrichement,et les rizières déjà en culture...Telle fut la vie intense qu'il mena !.
Depuis longtemps, il était sujet à des accès de fièvre qu'il négligeait. En Septembre 1918, sur les conseils de son Evêque-Coadjuteur, il se rendit à SAIGON pour consulter un docteur, puis rentra chez lui. Le 24 Octobre, après une huitaine de jours passés à NHATRANG, son état devenant de plus en plus grave, on décida de l'emmener à SAIGON. Il entra aussitôt à la clinique. Malgré les soins du docteur et le dévouement des religieuses, après avoir supporté d'horribles souffrances, il s'éteignit doucement le 04 Novembre 1918, à trois heures de l'après-midi.
Février 1994
Obituary
M. GEOFPROY
MISSIONNAIRE DE LA COCHINCHINE ORIENTALE
M. GEOFFROY (Marie-Julien-Auguste), né à Hoéville (Nancy, Meurthe-et-Moselle) le 11 novembre 1871. Entré laïque au Séminaire des Missions-Étrangères le 14 septembre 1890. Prêtre le 1er juillet 1894. Parti pour la Cochinchine orientale le 29 août 1894. Mort à Saigon le 4 novembre 1918.
Le 4 novembre 1918, la Cochinchine Orientale déjà cruellement éprouvée, cette même année, par la mort de deux vétérans de l’apostolat MM. F.-X. Geoffroy et Joseph Laurent, eut la douleur de perdre encore M. Julien Geoffroy, qui, pendant vingt-trois ans, s’était sacrifié pour elle dans des conditions peu communes.
Marie-Julien-Auguste Geoffroy naquit à Hoéville, arrondissement de Lunéville (Meurthe-et-Moselle), le 11 novembre 1871. Son père, Eugène Geoffroy, cultivateur aisé, avait été maire de sa commune pendant plusieurs années ; sa mère, Pélagie Thiriet, réalisait le type de la femme forte de l’Evangile dirigeant le labeur au foyer et édifiant la paroisse. Elle avait du reste de qui tenir, étant sœur du « saint » Père Julien Thiriet, de Saïgon et de l’héroïque curé de Doux-ville, l’abbé Joseph Thiriet, odieusement fusillé par les Allemands à Crion, le 20 août 1914. Elle avait eu cinq enfants, quatre garçons et une fille ; et l’aîné, capitaine, est glorieusement tombé à Morhange, en 1914. La famille Thiriet a donc bien mérité de Dieu et de la France.
Notre regretté confrère, attiré par l’exemple de ses deux oncles, entendit de bonne heure l’appel du bon Dieu. L’abbé Milliet l’ayant distingué au catéchisme, tant pour sa bonne conduite que pour son intelligence précoce, lui donna pendant deux ans des leçons de latin qui permirent de le présenter en quatrième au Petit Séminaire de Pont-à-Mousson, où il se conduisit toujours en élève sérieux et sage. Sa rhétorique terminée, il entra directement au Séminaire de la rue du Bac, le 14 septembre 1890 et il fut de l’avis de tous, un modèle de piété et de régularité.
Ordonné prêtre le 1er juillet 1894, il s’embarqua à Marseille, le 2 septembre, à destination de la Cochinchine Orientale. Il partit le cœur joyeux pour cette Mission qu’on lui disait si belle, et merveilleusement rénovée dans le sang des martyrs, mais où tant de ruines étaient encore à relever. On pouvait donc toujours y souffrir pour la plus grande gloire de Dieu.
En passant à Saïgon, il eut le bonheur de revoir son cher oncle, supérieur du Séminaire de la Mission. Ce fut un événement que les religieuses de la communauté rappellent encore ; tout le Séminaire était en émoi, car on y aimait beaucoup l’oncle et le neveu y avait déjà des sympathies. On escomptait pour l’avenir de nombreuses rencontres, que la proximité des deux Missions et la fréquence des courriers faciliteraient encore. Hélas ! l’oncle avait trente-deux ans de plus que le neveu, il devait mourir trois ans plus tard, épuisé par une vie entièrement consacrée à la formation du clergé indigène.
Arrivée à Quinhon le 2 octobre 1894, M. Geoffroy y étudia les premiers éléments de la langue, puis alla se perfectionner à Kimchau. L’année suivante on le nomma en février, vicaire de Kieudong et enfin, en novembre, professeur à Daian. Il y resta trois ans et ce furent incontestablement les plus belles années de sa vie de missionnaire. Souvent, au milieu de travaux sans nombre qui absorbaient ses heures, il regrettera dans l’intimité, ces années de silence, de piété aisée de recueillement facile et de travail réglé qui convenaient si bien à son caractère réfléchi. Ses dispositions naturelles lui permettaient d’ailleurs d’aborder tous les genres d’études : comme sinologue, ce fut certainement le plus qualifié d’entre nous, et comme musicien il utilisait, à Hadiem, une série d’instruments variés. En certaines matières, sa supériorité était telle, qu’un ingénieur des chemins de fer du Sud-Annam aurait, dit-on, certain jour, déclaré à ses conducteurs : « Pour la manipulation du tachéomètre et la rapidité des opérations, le P. Geoffroy nous donnerait le point à tous. » Ces rares qualités, servies par un caractère pratique, attirèrent sur lui l’attention de M. Villaume qui, occupé à d’importants travaux d’irrigation, le chargea de diriger l’exécution d’un canal de vingt-quatre kilomètres, dont un tiers à peine était creusé.
M. Geoffroy quitta Quinhon le 30 décembre 1898 et arriva à Phanrang dans les premiers jours de 1899. Alors il commença cette vie pénible et absorbante de surveillant de coolies et de directeur de chantiers qui devait durer dix ans. Dix autres années furent employées à défricher et à mettre en valeur des terrains de brousse ou de palétuviers. Levé à trois heures et demie du matin, il célébrait la sainte messe, et se rendait aussitôt sur le chantier afin d’assister à l’appel des coolies et de leur faire commencer leur besogne au lever du jour. Il passait de longues heures en plein soleil soit pour surveiller, soit pour indiquer les travaux. Pendant un an et demi il besogna comme auxiliaire de M. Villaume qui, en septembre 1900, allant se rendre compte de l’importance d’une rupture de la digue, fut entraîné par le courant et se noya.
Resté seul pour diriger ces importants travaux, M. Geoffroy tout en les surveillant apprenait la langue cham, car la plupart des coolies appartenaient à cette race. Il parvint à la parler et même l’écrire, toutefois il s’en servit peu, les chams connaissaient également l’annamite.
En 1903, lorsqu’il travaillait à la réfection du barrage, il logeait dans une paillote, dont la toiture était si basse qu’on la touchait de la main. D’un côté, se trouvait un autel primitif, sur lequel il célébrait la sainte messe chaque jour à trois heures et demie ; d’un autre côté s’étendait un lit formé de branches à peine équarries. Au milieu, une table qui, entre les repas, servait de bureau et servait au besoin de lit lors d’une visite de confrère. Tout autour de ces meubles, c’était un amalgame d’outils et d’objets nécessaires aux terrassement : pelles, pioches, barres à mines, cartouches de dynamite. C’est là que de temps en temps il venait se mettre à l’ombre.
Enfin, en 1906, les travaux étant à peu près terminés, il s’installa à Hodiem où il restera jusqu’à sa mort. Installation peu confortable : une simple cabane de huit mètres sur cinq, murs en torchis, portes en bambous. Lorsque souffle le vent du nord, toute la maison tremble, si bien que les étrangers de passage craignent toujours un accident, surtout lorsqu’ils constatent que la colonne centrale, au lieu de soutenir la toiture est soutenue par elle-même. Cependant la joie règne dans cette demeure et tout le monde y vient avec plaisir, car le Père reçoit toujours avec le même sourire. De plus, bon musicien, il réjouit les oreilles de ses hôtes en leur jouant quelques morceaux sur l’harmonium. Enfin comme « ventre affamé n’a pas d’oreilles », chaque visiteur apporte de quoi garnir la table, car arriver à l’improviste chez le Père, c’est s’exposer à jeûner ou tout au moins à faire un repas plus que maigre.
En 1913, il construisit le magasin à riz, dont il se réserva une partie comme habitation, et cette dernière avait au moins un toit de tuiles. Il éleva aussi une chapelle qui fut terminée au début de 1914 et dans laquelle il put désormais conserver le Saint Sacrement. Il y célébra le mois de Marie avec tout l’éclat possible. Aux cérémonies s’ajoutaient les confessions et les communions quotidiennes ; on eut pu craindre que ce ne serait qu’un feu de paille et, cependant, malgré un peu de fléchissement, le mouvement se maintint à peu près pendant quatre ans. Chaque soir, après la prière, un petit mot, qui commençait toujours par rappeler la présence de Jésus au Saint Sacrement, venait ranimer la ferveur des assistants. Et, pendant ces quatre ans, il s’ingénia toujours pour célébrer ou faire célébrer la messe dans sa paroisse, afin de ne pas priver ses chrétiens de la communion quotidienne.
Afin de donner aux cérémonies tout l’éclat possible, il obligeait les enfants de l’école à en répéter les chants tous les soirs après la prière. La répétition se terminait vers neuf heures et demie. Couché à dix heures, il se levait à trois heures et demie ; quinze minutes plus tard il donnait lui-même le signal du réveil et, à quatre heures, l’église était déjà presque remplie. Vers quatre heures un quart, le Père commençait la messe, et ainsi ses chrétiens étaient libres au lever du jour pour se rendre au travail. Il employait le reste de la journée à visiter les chantiers de défrichement et les rizières déjà en culture, ou à indiquer l’emplacement des talus dans les terrains nouvellement défrichés.
Telle fut, pendant vingt ans, la vie intense qu’il mena ; et cependant, les confrères qui l’ont suivi de près, peuvent en témoigner, sa vie intérieure n’était pas moins active. Sa tenue au saint autel édifiait infiniment ; on eut dit qu’il se rendait la présence de Dieu aussi unitive qu’il se peut ici-bas. De même lorsque prêtre-adorateur, il montait son heure de garde aux pieds du Saint Sacrement, la tête bien droite et les yeux rivés sur le tabernacle. Du reste, sa piété avait gardé la candeur de l’enfance. Il était la simplicité même, sa gaieté sans éclat et sa bonne grâce sans recherche rendaient son commerce si agréable à tous qu’on pouvait dire, tant il avait d’amis : « sa bienvenue au jour lui rit dans tous les yeux ».
Il s’était soumis avec joie aux instructions de Pie X sur la communion quotidienne. Sur une population qui, par suite d’exodes continuels se maintint au chiffre moyen de 1.050 chrétiens, M. Geoffroy obtint en 1915-1916, un total de 62.162 communions, de 54.043 en 1916-1917 et de 41.682 l’année de sa mort. A un jeune confrère qui l’interrogeait sur l’opportunité contestée de la chose, le Père répondit : « Après expérience faite, c’est au moins deux années de vie chaste ajoutées à l’adolescence de mes jeunes paroissiens, garçons et filles. »
Ses jours, hélas ! étaient comptés. A la nouvelle de sa maladie, Annamites et Européens furent consternés ; à sa mort ce fut un cri général de regret.
Sujet depuis longtemps à des accès de fièvre qu’il négligeait, il resta dans un état fébricitant presque continuel à partir de 1918, mais jamais il ne se plaignait, et ne se soignait pas davantage. En septembre 1918, son voisin s’apercevant que ses sueurs étaient abondantes et jaunâtres, en informa Monseigneur le Coadjuteur alors à Saïgon. Sa Grandeur conseilla au malade de venir consulter le docteur, ce qu’il fit. Revenu avec Sa Grandeur, qui devait donner la Confirmation dans sa paroisse le 29 septembre, il passa quelques jours à Phanrang, et le 14 octobre, rentra chez lui, l’air bien portant. Le 15, il rejoignait Monseigneur à la gare pour l’accompagner jusqu’à Bangoi, où devait s’embarquer Sa Grandeur ; mais le soir, les forces lui manquèrent. Peu après il se rendait à Nhatrang, où il resta pendant huit jours entre les mains d’un docteur annamite. Puis son état devenant de plus en plus grave, on décida, le 24 octobre, de l’emmener à Saïgon. Après un voyage de quatorze heures de chemin de fer, par une chaleur torride, il entra aussitôt à la clinique. Mais malgré les soins du docteur et le dévouement des religieuses, après avoir supporté d’horribles souffrances, il s’éteignit doucement le 4 novembre, à trois heures de l’après-midi, en présence de deux religieuses et de son voisin qui avait pu arriver à temps pour le revoir une dernière fois et recueillir son dernier soupir.
Il a semé, d’autres récolteront ; il en va le plus souvent ainsi dans le plan de la Providence. Que Dieu qui lui-même est l’éternel laboureur dont nous sommes, nous, la terre d’élection, au témoignage de saint Paul, bénisse l’œuvre du bon serviteur mort à la peine, et qu’il lui accorde de lier au ciel la belle gerbe de mérites acquis sur cette terre d’exil !
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References
[2119] GEOFFROY Marie (1871-1918)
Références biographiques
AME 1894 p. 196. 1902 p. 324. 1919-20 p. 47. 74. CR 1894 p. 305. 1897 p. 343. 1914 p. 86. 1915 p. 105. 106. 1918 p. 80. 200. 1919 p. 76. 168. 1931 p. 171. 1933 p. 285. 1937 p. 149. 1948 p. 190. BME 1953 p. 899. 1931 p. 606.