Fernand FABRE1908 - 1999
- Status : Prêtre
- Identifier : 3480
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Biography
[3480] Adrien, Fernand FABRE, fils de Léon-Pierre et de Falguières Albina-Philomène, naquit le 20 janvier 1908, au lieu dit La Treille, commune de Cransac, canton d'Aubin, département de l'Aveyron. Il fut baptisé le 9 février 1908, à Cransac, paroisse du diocèse de Rodez. Son père agriculteur, né à Maleville, non loin de Villefranche de Rouergue, vint s'installer; comme mineur, près de la ville de Cransac, dans le Bassin Houiller Aveyronnais, alors en pleine expension. En 1903, il épousa, en l'église de Cransac, Albina Falguières. De leur union, naquirent quatre enfants, tous des garçons, qui reçurent dans leur famille, une solide éducation chrétienne, sens de la rigueur, du devoir, du dévouement et l'amour du travail bien fait.
Après ses études primaires à Cransac et à Lalo, M. Fernand Fabre fut envoyé, en octobre 1920, au Collège-Petit Séminaire de Graves, près de Villefranche-de-Rouergue, pour y parcourir le cycle de l'enseignement secondaire d'alors. En octobre 1925, il se dirigea vers le Grand Séminaire de Rodez où il fit ses études de philosophie et de théologie, interrompues en 1929-30 par le service militaire au 3ème R.I.A.à Hyères, dans le Var. Sous-diacre le 29 juin 1931, diacre le 26 mars 1932, il fut ordonné prêtre, à Rodez, le 29 juin 1932.
Dans sa lettre du 22 juin 1932, rédigée au grand séminaire de Rodez, alors qu'il commençait la retraite spirituelle préparant à l'ordination sacerdotale, il demandait à Mgr. de Guébriant "son admission dans la Société des Missions Etrangères". Il y faisait part de ses motivations. Je le cite : .." Pourquoi ai-je tourné mes regards vers la rue du Bac ? Pour plusieurs des raisons que vous nous avez exposées, vous-même, Monseigneur, récemment à Rodez, et que vous nous présentiez comme les caractéristiques de la Société dont vous êtes le Supérieur aimé et vénéré. Là, on reste séculier ; on est sûr d'être missionnaire au plein sens du mot; la Société a des charges, des responsabilités écrasantes ; elle s'attaque au bloc païen, le plus compact..".
Admis le 30 juin 1932, il entra au séminaire des Missions Etrangères, le 15 septembre 1932. Au soir du dimanche 2 juillet 1933, au retour de la réception solennelle à Notre Dame par le Cardinal Archevêque de Paris, de Mgr.Tong, premier évêque viêtnamien sacré à Rome le 11 juin précédent, Mgr. de Guébriant donna leur destination aux dix-neuf jeunes partants. M.Fernand Fabre était envoyé à Hong-Kong pour le service des Procures. Le 18 septembre 1933, au séminaire des Missions Etrangères, et selon le cérémonial accoutumé, eût lieu, la cérémonie du départ. Le 22 septembre 1933, avec le groupe des partants, il s'embarqua à Marseille à destination de Hong-Kong.
Dans un interwiew à Lauris en 1997, M. Fernand Fabre résumait ainsi son activité missionnaire : "J'ai aidé et servi les missionnaires".mais, dans les procures, "On n'était pas missionnaire dans le sens missionnaire qu'on entend.." Assistant-Procureur, il se mit à l'entière disposition de ses supérieurs ; il consacra la plus grande partie de son temps à accueillir les confrères de la Société, les missionnaires de divers Instituts de passage à Hong-Kong, les malades venus se soigner ou prendre un temps de repos, dans cette colonie anglaise. Il allait les recevoir à bord des bâteaux, il les aidait dans les diverses démarches administratives, s'occupant de leurs bagages à dédouaner ou à enregistrer, de leurs billets de transport, puis de leur embarquement vers leurs destinations respectives. Il fallait prévoir leur hébergement à la Procure. Que dire du temps passé à faire, en ville, et pour les missions et les missionnaires travaillant à l'intérieur de la Chine, des commissions et des achats fort divers, et à en assurer l'expédition. A tout cela, s'ajoutaient le courrier, la tenue rigoureuse des comptes financiers des diverses missions et des missionnaires. Tel fut, pendant deux ans, le travail missionnaire de M. Fernand Fabre à la Procure de Hong-Kong.
En 1935, M. Biotteau, pour raison de santé, demissionna de sa charge de Procureur Général. Pour lui succéder, Le Conseil Central nomma M. Vircondelet qui prit ses fonctions à compter du 1er décembre 1935. Cela nécessita quelques changements dans le personnel des Procures ; ainsi, M. Fernand Fabre fut envoyé à Saïgon comme assistant procureur, où, jusqu'en avril 1946, il travailla sous la direction de M.Pierre Moreau, procureur. Comme à Hong-Kong, il servit les missions et les missionnaires avec le même dévouement, malgré les difficultés crées par la guerre et l'occupation japonaise.
Après le coup de force japonais du 9 mars 1945 contre la présence française en Indochine, des manifestations de plus en plus violentes se déroulèrent au Viêtnam. Organisées par le mouvement révolutionnaire"viêtminh", soutenues par les autorités japonaises, elles visaient surtout les Européens et les missionnaires que les occupants nippons avaient contraints au regroupement dans des camps et des quartiers spéciaux dans certaines grandes villes.
Les 24 et 25 juillet 1945, des chasses à l'homme s'organisèrent en plein Saïgon. Le 22 août 1945, le gouvernement révolutionnaire "viêtminh"prit le pouvoir. Le dimanche 2 septembre 1945, la cure de Saïgon et la procure furent attaquées, au cours d'une grande manisfestation. M.Tricoire, vicaire à la Cathédrale de Saïgon, fut sauvagement assassiné, alors qu'il essayait de mettre en sûreté dans le presbytère, deux Frères des Ecoles Chrétiennes. M.Soullard, curé de la Cathédrale, MM. Moreau et Fabre, procureurs furent blessés ; arrêtés, ils furent relâchés le lendemain.
Chassés du centre de la ville de Saïgon, le 23 septembre 1945, les forces viêtminh se regroupèrent en banlieue, assassinant deux prêtres viêtnamiens ; le surlendemain, la cité Héraud proche fut attaquée; 200 français et 100 viêtnamiens y furent massacrés. L'agitation gagna les provinces. Le 30 septembre 1945, à l'Hôtel de ville de Saïgon, les dirigeants viêtminh décidèrent d'assassiner Mgr. Cassaigne, vicaire apostolique, et désignèrent même son assassin.
Nommé procureur à Marseille, M.Fernand Fabre s'embarqua à Saigon, en avril 1946 ; il fit la traversée, dit-il, "logé en quatrième classe. Nous étions environ une quarantaine".. Très importante était la procure des Missions Etrangères de la rue Nau, à Marseille.: ..." Là, on avait tous les départs des missionnaires plus également ceux des autres congrégations." Là, débarquaient aussi tous ceux qui rentraient de mission, qui pour un congé, qui pour des soins médicaux, et parfois pour un retour définitif. On sortait de la guerre, mais c'était encore le temps des restrictions, des "tickets de pain et des cartes de ravitaillement."
Comme dans les postes précédents et avec le même dévouement, M. Fernand Fabre, doué d'un grand sens pratique, et ennemi des dépenses inutiles, s'acquitta, dans un esprit de service, de sa charge de procureur qu'il connaissait bien. Il demandait que, comme dans toutes les maisons communes, chacun en respecte le règlement.
Et puis arriva le jour où le transport aérien supplanta le bâteau. Etait il encore necessaire de garder une procure à Marseille ? Après 22 ans passés à la tête de cette maison, il revint à M. Fernand Fabre d'en assurer la fermeture, le 13 juillet 1967. Il partit alors à Lauris (Vaucluse), car entre temps, il avait réussi à récupérer pour la Société, le château sis en ce village, et offert aux Missions Étrangères; trois armées l'avaient occupé pendant la guerre. Il travailla à son aménagement comme maison de repos pour les confrères.
En février 1968, M. Fernand Fabre fut nommé à la tête de la Procure de Lille. Celle-ci recevait surtout des étudiants des Missions Etrangères qui suivaient des cours à l'Université ou qui faisaient des stages d'initiation à la médecine, un savoir très utile pour les missionnaires en poste dans les districts isolés. Mais, en 1970, il lui fut demandé de fermer cette maison qu'il quitta le 16 janvier 1970; proposition lui fut faite se rendre à Montbeton, où il pourrait peut être faire des prospections pour une aumônerie ou un poste qui lui permettrait d'avoir une certaine activité sacerdotale. Ce fut, pour le Conseil Central de la Société, l'occasion de lui exprimer, dans une lettre du 12 janvier 1970, gratitude et remerciements pour la tâche accomplie : ..."Permettez-moi de vous dire, cher Père Fabre, notre grande reconnaissance à tous pour votre dévouement dans les procures. Votre travail n'a pas toujours été facile : vous l'avez toujours fait cependant en esprit de service pour les Missions. Veuillez donc agréer l'expression de la reconnaissance de tous, celle du Père Supérieur d'abord, et celle de tous ceux (et je suis parmi eux) qui ont bénéficié de vos services..."
Mr. Fernand Fabre passa quelques temps au sanatorium St.Raphaël de Montbeton ; en 1971, il revint à Lauris ; il y resta jusque vers le 20 septembre 1997. Durant cette période, il accepta d'assurer parfois des interims, ainsi, dans le diocèse de Rodez, en 1977. À sa demande, en septembre 1997, il rentra à Montbeton où, se sachant atteint d'un cancer au colon, gardant ses habitudes de piété profonde, il décéda le 28 octobre 1999.
Obituary
[3480] FABRE Fernand (1908-1999)
Notice nécrologique
Le Père Fernand Fabre naquit à Cransac, un verdoyant village de l’Aveyron, le 20 janvier 1908, dans une famille d’agriculteurs, dont il hérita le sens pratique et l’amour du travail bien fait. C’est là que Dieu vint le chercher, dans une famille de quatre enfants, tous des garçons. Il suivit le parcours classique des prêtres de cette époque : études secondaires au petit séminaire à Graves, dans la banlieue de Villefranche de Rouergue, philosophie et théologie au Grand Séminaire de Rodez, de 1925 à 1932. C’est là qu’il fut ordonné prêtre le 29 juin 1932.
La vocation missionnaire de Fernand naquit, ou du moins se précisa, à l’occasion d’une conférence donnée par Mgr de Guébriand, alors supérieur général des Missions Etrangères. Dans sa lettre de demande d’entrée dans la Société, Fernand précisait que quatre caractéristiques des Missions Etrangères l’avaient séduit : ses membres restent prêtres séculiers ; on est sûr d’être missionnaire au plein sens du mot, puisque tout le monde part en mission ; la Société a des responsabilités écrasantes quant aux territoires à évangéliser ; enfin elle s’attaque au bloc païen le plus compact : l’Asie. Cela résumait parfaitement les buts premiers de la Société et Fernand y fut admis le 15 septembre 1932.
Nommé « aux Procures »
Le soir même de l’ordination, le Père Fabre recevait sa destination : les Procures. Il fut cerainement un peu déçu, car il avait rêvé d’un apostolat direct auprès des païens, comme il le déclarait des années plus tard. Or le travail des procureurs consistait surtout en des tâches matérielles, aussi essentielles que peu enthousiasmantes : d’abord recevoir les confrères, soit les jeunes à leur arrivée de France pour rejoindre leurs missions respectives, et cela constituait par exemple en 1933, des groupes de vingt partants, soit des missionnaires en congé. Le procureur allait les chercher au bateau, il passait leurs bagages à la douane, s’occupait de leur logement à la procure, prenait leurs billets, enregistrait leurs bagages pour rejoindre leur nouveau poste. Les procureurs recevaient aussi les commandes des missionnaires pour les besoins de leur poste et ils les leur faisaient parvenir : on imagine le travail que cela représentait d’expédier jusque dans des villages reculés de Chine ou d’autres pays d’Asie des fournitures aussi diverses que du vin de messe, des bicyclettes, du petit électroménager, et surtout des pièces détachées pour des jeeps datant de la deuxième guerre mondiale et aussi pour d’autres vieilles voitures hors d’âge mais toujours en service et précieusement réparées dans les stations de mission.
Mais le Père Fabre était doué d’un grand sens pratique, (c’est pour cela certainement qu’il avait été nommé procureur) et il accomplissait toutes ces tâches fidèlement et sans bruit, dans un esprit de devoir et de service que tous lui reconnaissaient. Mais s’attendait aussi à ce que les autres en fassent autant. Entre autres, il ne plaisantait pas avec le règlement : les horaires de la procure devaient être respectés : malheur à celui qui était sorti en ville et qui ne rentrait pas avant l’heure de fermeture de la porte : il ne lui restait plus qu’à trouver lui-même un logement ! C’est du moins ce que l’on dit, mais on peut être certain que le Père Fabre était quand même compréhensif et savait faire opportunément des exceptions !
Le P. Fabre passa 37 ans au service des confrères et des Missions dans diverses Procures. Il fut d’abord nommé à la Procure de Hong Kong et y resta de 1933 à 1935 ; puis à celle de Saïgon de 1935 à 1946, puis à Marseille, de 1946 à 1967 soit pendant 21 ans.
C’est quand il était à la Procure de Saigon que le P. Fabre vécut, ainsi que ses confrères quelques journées dramatiques. Voici en résumé comment elles sont racontées dans le bulletin « Echos Missionnaires » de mars-avril 1946, p. 59 à 61. De mars à décembre 1945, les Japonais, qui occupaient l’Indochine, se voyant vaincus, arrêtèrent un certain nombre de Pères, à commencer par Mgr Cassaigne, évêque de Saigon ainsi que le P. Moreau, procureur, sous l’inculpation d’espionnage, puis ils les relâchèrent. Mais ils excitèrent en sous-main des groupements de jeunesse annamites contre tout ce qui était Français, en les encourageant à demander l’indépendance immédiate. Un tract écrit en langue annamite, était répandu en ville, proclamait : « Le nommé Cassaigne est mille fois plus dangereux que Pigneau de Béhaine ! » Le 2 septembre, le P. Tricoire était assassiné en se portant au secours de deux Frères annamites poursuivis. Le même jour, plusieurs Pères français et aussi un cochinchinois furent roués de coups. Les Pères Moreau et Fabre furent blessés.
Pendant ces quelques mois de terreur, quatre prêtres annamites du clergé de Saigon furent massacrés, d’autres furent pris en otages. Les grands séminaristes furent dispersés et groupés par les soins du Viêt-Minh à raison de trois par famille païenne, chez les Annamites du delta, probablement pour les surveiller. En Annam, même les lépreux de Qui-hoa devinrent persécuteurs : ils proféraient les pires calomnies contre leurs infirmières, les dévouées Franciscaines Missionnaires de Marie, et des menaces de mort étaient lancées à leur adresse et à celle de leur aumônier, le P. Hutinet. Il fallut prendre des mesures en conséquence. Le P. Hutinet fut remplacé par un prêtre annamite et un mois plus tard, les religieuses partaient pour Hué, ainsi que les Filles de la Charité de Saint Vincent de Paul, accompagnées de leurs petites orphelines métisses.
Un grand nombre d’églises et de résidences furent profanées, pillées ou incendiées par les Viêt-Minh. Malgré cela et bien qu’il ait été deux fois condamné à mort par les révolutionnaires, Mgr Cassaigne écrit que « le moral reste au beau fixe » !
Il est intéressant de comparer ces faits rapportés par les « Echos Missionnaires » à la réponse du P. Fabre, alors retiré à Lauris (ou Montbeton ?) dans la seule interview que nous avons de lui. À la question : « Avez-vous eu des répercussions de la guerre ? », il répond : « On a eu les Japonais, mais on n’a pas été embêtés. Il y en a même un qui était chrétien et qui a demandé une messe. Les autres Japonais sont venus par complaisance. Ils ne cherchaient pas à nous embêter. Le ravitaillement était difficile, mais le Japonais chrétien nous a aidés. C’était un bon chrétien ! » Cela montre qu’il faut entendre plusieurs points de vue pour se faire une idée juste !
Pendant très longtemps, la Procure de Marseille fut la plus importante de la Société car c’est là que passaient presque tous ceux qui partaient pour l’Asie ou en revenaient, ainsi que des missionnaires appartenant à d’autres sociétés. Donc un très grand pourcentage des membres de la Société eurent l’occasion de connaître le P. Fabre et de profiter de ses services. Puis les transports évoluèrent à partir de la fin de la guerre : les missionnaires commencèrent à partir en avion, si bien que bientôt l’avion remplaça complètement le bateau et la Procure de Marseille devint inutile. Elle fut fermée et le P. Fabre fut nommé à Lille, où la Procure abritait principalement les édudiants des MEP qui suivaient les cours de l’université ou faisaient des stages d’initiation à la médecine, des connaissances qui étaient très utiles à beaucoup dans les stations de missions isolées de Chine ou des autres pays d’Extrême Orient. Le P. Fabre resta 2 ans à Lille, de 1968 à 1970. Puis cette Procure elle aussi fut fermée. Dans l’interview de lui dont nous avons déjà parlé et où on lui demandait de parler de cette période de sa vie, il s’exprimait de façon concise et précise, sans fioritures, et il terminait par cette phrase : « J’ai toujours été au service des Procures. 2 ans à Hongkong, 10 ans à Saigon, 22 ans à Marseille, 2 ans à Lille avant d’aller à Montbeton et à Lauris (ce sont les deux maisons de retraite pour les Pères des Missions Etrangères). J’ai maintenant 90 ans et j’attends la mort. » On peut difficilement être plus concis et plus direct ! Cela ressemblait tout à fait au caractère du P. Fabre.
Son abnégation et son obéissance étaient remarquables. Un épisode significatif le montre. Il ne connaissait qu’un peu d’anglais, nécessaire surtout à Hong Kong pour faire les commissions, prendre les billets de bateau ou de train. Il voulut apprendre le chinois, mais on le lui refusa. La raison ? « En Chine, racontait-il, les Sœurs de Saint Paul de Chartres, qui avaient un grand hôpital, avaient demandé un aumônier pour six mois. Un confrère était parti, puis avait refusé de revenir à la Procure, c’est pourquoi on ne m’a pas permis de me procurer un livre pour apprendre le Chinois, car le procureur de Hong Kong craignait que je quitte la Procure. » Il obéit sans même faire une remarque !
Le Bulletin des Missions Étrangères mentionne que rarement le nom du P. Fabre tout au cours de cette principale période de sa vie, sauf à l’occasion d’une réunion de confrères, ou de sa visite dans une mission à l’occasion de ses vacances : on apprend ainsi, au détour d’un article du Bulletin, qu’il visita les ruines d’Angkor, au Cambodge, ou Pakhoi, en Chine.
Il ne dilapidait pas l’argent de la société ! À la procure de Marseille, un jour, comme d’habitude, il avait été chercher au bateau des confrères qui arrivaient d’Asie. L’un d’eux, géologue, avait ramené dans sa valise des échantillons de diverses pierres et autres minéraux qui pesaient fort lourd. Les confrères demandèrent au P. Fabre de prendre un taxi. Pas question, car un taxi, cela coûte cher ! On porte les bagages à la main ! Les missionnaires prirent chacun une valise, et comme par hasard, ils lui laissèrent la valise pleine de cailloux. Il sua sang et eau mais, beau joueur, il la transporta. Il riait lui-même du bon tour qu’on lui avait joué et il racontait souvent cette histoire.
LA RETRAITE
La Procure de Lille ferma en 1970. Le P. Fabre était encore jeune : 62 ans et capable de travailler. Le Supérieur Général lui proposa d’aller à la maison de retraite de Montbeton, et de faire des prospections pour une aumônerie ou un poste qui lui permettraient de garder une certaine activité sacerdotale. En fait, il se retira d’abord à Lauris, de 1971 à 1997, puis à Montbeton de 1998 jusqu’à sa mort en 1999. Il assurait parfois des intérims, comme on le voit mentionné en 1977, où il était aumônier dans son diocèse d’origine de Rodez.
Il passa donc près d’une trentaine d’années dans les maisons de retraite. Tout le monde le connaissait évidemment, non seulement dans la maison, mais aussi dans les villages environnants, car c'était un grand marcheur et chaque jour, matin et soir, il faisait une promenade. Et tout le monde se souvient de sa silhouette : chapeau colonial, éternelle pipe à la bouche (il en avait toute une collection dans sa chambre), allure rapide et décidée, verbe haut, il semblait indestructible. « L’ancien colonial type », résumait quelqu’un. Un peu coléreux et soupe au lait. Il avait une très belle voix : une « voix de bronze », disait-on (mais il paraît qu’il ne suivait pas beaucoup la mesure !). Des colonies, il avait aussi hérité de l’amour des jeux de cartes : il fallait absolument jouer tous les soirs après dîner et surtout ne pas le déranger à ce moment-là, et il n’aimait pas perdre !
Des Procures, il avait gardé l’esprit de service : au réfectoire, il était un des rares à desservir la table, et quand, au début de sa retraite, il avait une voiture, il était toujours prêt à aller chercher des confrères à la gare. Et il aidait discrètement des confrères et des postes de mission avec son argent personnel : la mission de Kontum, où résidait son ami Paul Renaud, avait particulièrement ses faveurs. Quant aux Sœurs des Missions Étrangères, l’une d’elles me disait : le P. Fabre était l’un de nos bienfaiteurs particuliers. Tout cela sans bruit, on le sait seulement parce que des confrères en parlaient à l’occasion.
Tous les témoignages mentionnent qu’il fit une fin extraordinaire. Il était atteint d’un cancer au colon et il le savait. Il ne changea pas pour autant sa manière de vivre, ni surtout ses habitudes de piété, car il était très pieux, d’une piété classique et qui n’avait rien d’ostentatoire. Entre autres, on le voyait tous les jours déambuler à grands pas en récitant le chapelet, il faisait l’édification de tous. Calme, pas paniqué, il mourut le 28 octobre 1999, à l’âge de 91 ans.
« Il a passé sa vie au service des Missions dans un travail humble mais indispensable, celui des Procures. Une belle vie missionnaire », conclut un de ses confrères.
References
[3480] FABRE Fernand (1908-1999)
AME 1933 p. 251, 237 (photo).
CR 1933 p. 251, 55 ; 1947 p. 116.
BME 1932 p. 723 ; 1933 p.723 ; 1933 p. 724, 959 ; 1935 p. 1 (photo), 196, 909 ; 1936 p. 840 ; 1937 p. 32 (photo) ; 1939 p. 664 ; 1948 p. 220.
EC1 n° 270-75, 444-46.
NS n° 6 p. 161 ; 28 p. 69 ; 108 p. 184.
EC2 1946 p. 60.
HIR n° 137.