Claude MIGNERY1853 - 1929
- Status : Prêtre
- Identifier : 1528
Identity
Birth
Death
Missions
- Country :
- India
- Mission area :
- 1882 - 1927 (Pondichéry)
Biography
[1528] Claude-Marie MIGNERY naît le 25 octobre 1853 à Nollieux, diocèse de Lyon dans le département de la Loire. Il fait ses études primaires à l'école des Frères au chef-lieu de canton, puis entre au Petit séminaire de Saint-Jodard. Un peu plus tard, il est reçu au Grand séminaire de Saint-Irénée, où il est un brillant étudiant. Le 8 juin 1879, il est ordonné prêtre par le Cardinal Caverot. Nommé vicaire dans une paroisse très chrétienne, il ne supporte pas cette vie paisible, lui qui a un tempérament de lutteur. Il demande son admission aux Missions Étrangères et y entre le 1er septembre 1881. Il part pour la Mission de Pondichéry le 2 août 1882.
Une personnalité incomprise aux débuts difficiles
Après un court séjour au Petit séminaire de la ville, on l'envoie au Collège de Karikal (1). Le P. Mignery n'est pas fait pour l'enseignement et il revient vite à Pondichéry. Mgr Laouénan décide, par mesure disciplinaire, de le garder près de lui. Alors, la Providence amène à Pondichéry le P. Prieur, confrère expérimenté en l'art d'initier les jeunes au ministère apostolique. L'idée vient au vicaire apostolique de lui confier M. Mignery. ‘‘J'ai là, dit-il, le P. Mignery dont je ne sais que faire. Si vous pensez pouvoir en tirer quelque chose, je vous le donne gratis.’’
Un missionnaire actif
Le soir même, M. Prieur emmène son nouveau vicaire dans sa charrette à bœufs à Attipâkam (2). Les rapports de son curé lui sont si favorables qu'au bout de six mois, le vicaire est nommé curé à son tour dans le district des chrétiens de langue telugu (3) de Pudur (3) et de Thatchur (3). L'église de Pudur étant en ruines, il la rebâtit avec l'aide des chrétiens de caste.
Mgr Gandy rappelle le P. Mignery pour l'envoyer à Nelliankuppam. Il y arrive le 11 février 1894 en la fête de Notre-Dame de Lourdes. Il y vit six ans, heureux comme un prince, affirme-t-il. Nelliankuppam est une vieille chrétienté, en liaison avec d'autres chrétientés au sud et à l’est, mais au nord et à l'ouest, dans un rayon de 50 à 65 kilomètres, s'étend une immense étendue totalement exempte de chrétiens.
Le P. Mignery a le regard tourné de ce côté, épiant les circonstances favorables. Ses premières visées se portent à l'Ouest sur Vandiwash (3), grosse agglomération à la lisière de laquelle se sont installées quelques familles chrétiennes. Il y acquiert un terrain, près du champ de bataille qui vit l'écrasement des troupes françaises en 1760. Il groupe les chrétiens, construit église et presbytère et finit par obtenir quelques conversions et catéchumènes.
En 1899, il franchit le Cheyar, à une vingtaine de kilomètres de Vandiwash. Là vivent, autour de la ville de Tiruvatur (4), quelques chrétiens parias, cordonniers et blanchisseurs. Il réussit à faire des conversions, bâtit bientôt une petite église et une maisonnette. Dès lors, son champ d'apostolat s'étend au nord dans la direction d'Arkât (5) où il fonde les belles chrétientés de Sérangatour et de Moranam près du diocèse de Madras. Le mouvement de conversions qu’il suscite est vraiment intense entre 1899 et 1901 : plus de 600 baptêmes au cours de ces trois années.
En 1909, il se retire à Tiruvatur pour s'occuper de ses néophytes les plus récents. Mais le mouvement de conversion s'étant ralenti, il poursuit maintenant son travail d'organisation et de formation chrétienne. Par esprit d'économie, il vend son cheval et d'intrépide cavalier, il devient intrépide marcheur. Il va de village en village, mange le riz du pauvre, assaisonné de légumes et de piment. Les heures libres du milieu du jour sont consacrées à l'étude. Il semble connaître la Vulgate par coeur, tant il la cite par cœur.
En 1927, il baptise ses derniers catéchumènes. Cette année-là, il éprouve une douleur à la bouche. Le médecin diagnostique un cancer. Il part en France pour se soigner. On considère le mal comme incurable. On fait un grattage de la gencive et rien de plus. En octobre, il se rend à notre maison de Montbeton (6). Le mal suit lentement son cours ; la bouche se ferme au point qu'il doit cesser de monter à l'autel pour la sainte Messe. Bientôt il ne peut même plus communier. Un jour il reçoit la visite du P. Gavan-Duffy qui lui fait un plaisir immense.
En février 1929, les souffrances redoublent. Il les accepte en esprit de pénitence et les offre pour ses chers néophytes. Le 30 juin, en la fête de l'Apôtre des Gentils, Dieu le rappelle à Lui. On peut lui appliquer les paroles de St. Paul : ‘‘Cursum consummavit, fidem servavit, in reliquo reposita est ei corona justitiae (7)’’.
1 – L’un des cinq comptoirs français en Inde, sur la côte de Coromandel au sud de Pondichéry.
2 – Entre Pondichéry et Salerne.
3 – Langue dravidienne, parlée au nord de la région tamoule.
4 - Entre Pondichéry et Madras (Chennai).
5 – Probablement Trivatur.
6 – A l’est de Vellore.
7 – Dans le Lot et Garonne, Maison de repos des MEP.
8 – ‘‘Il a tenu sa route, il a gardé la foi, la couronne de justice lui est remise pour l’éternité’’
Obituary
M. MIGNERY
MISSIONNAIRE DE PONDICHÉRY
M. MIGNERY (Claude-Marie), né à Mollieux (Lyon, Loire) le 25 octobre 1853. Entré prêtre au Séminaire des Missions-Etrangères le 1er septembre 1881. Parti pour Pondichéry le 2 août 1882. Mort à Montbeton le 1er juillet 1929.
Claude-Marie Mignery naquit le 25 octobre 1853 à Mollieux, petite paroisse du diocèse de Lyon. Des parents profondément chrétiens préparèrent sa jeune âme à correspondre généreusement à l’appel de Dieu . Après de solides études primaires à l’école des Frères du chef-lieu de canton, il entra au Petit Séminaire de Saint-¬Jodard. Il y conquit la première place de son cours et la conserva jusqu’au bout malgré l’émulation de son principal concurrent, le futur Mgr Dadolle. Au cours de sa rhétorique, un incident mit à l’épreuve sa vocation sacerdotale : un maître d’études inexpérimenté crut découvrir en lui un meneur dangereux et le Supérieur jugea prudent de l’inviter à rentrer provisoirement dans sa famille.
Quelques mois après, le jeune homme fut reçu au Séminaire de philosophie. A Alix, puis à Saint-Irénée, il fut un brillant élève ; il gagna la confiance des directeurs et devint servant de messe de M. Bacuez, dont il conserva toujours un souvenir ému. Le 8 juin 1879, il reçut la prêtrise des mains du Cardinal Caverot. Nommé vicaire dans une paroisse très chrétienne, il semblait prendre racine dans le diocèse. Mais cette vie paisible n’était pas faite pour son tempérament de lutteur. Le 1er septembre 1881, il entra au Séminaire des Missions-Etrangères, et le 2 août 1882, il partit pour Pondichéry.
Il fut d’abord professeur de cinquième au Petit Séminaire ; mais, à l’essai, on s’aperçut que son extérieur sévère et sa voix autoritaire ne le recommandaient pas à ses élèves. On décida de l’envoyer au Collège de Karikal. A cette époque, le voyage de Pondichéry à Karikal se faisait par mer. Le Procureur de la Mis¬sion remit à M. Mignery un billet de troisième classe avec des provisions pour deux personnes, un autre confrère voyageant sur le même bateau, mais en première classe. La traversée fut longue et mouvementée ; le jeune passager de troisième classe fut bien secoué, mais eut la consolation de manger à sa faim, cependant que le passager de première se résignait à un jeûne de deux jours.
Le nouvel essai ne fut guère plus long ni plus heureux à Karikal. M. Mignery retourna donc à Pondichéry, où l’accueil de Mgr Laouënan n’eut rien de maternel. Le Vicaire Apostolique semonça vertement le jeune missionnaire, puis lui assigna une cellule, d’où il ne devait pas sortir, sous peine de renvoi immédiat en France. Le prisonnier se soumit docilement, comprenant qu’il lui restait beaucoup à faire pour tuer le vieil homme et pour devenir un instrument malléable entre les mains de Dieu et de ses représentants ici-bas. Or, quelques jours après, la Providence amenait à Pondichéry M. Prieur, confrère expérimenté dans l’art d’initier les jeunes au ministère apostolique. L’idée vint à Sa Grandeur de lui confier son prisonnier : « J’ai là, dit-il, le P. Mignery, dont je ne sais que faire. Si vous pensez « pouvoir en tirer quelque chose, je vous le donne gratis. » Et le soir même, M. Prieur emmenait son nouveau vicaire dans sa charrette à bœufs. A Attipâkam, M. Mignery fit de rapides progrès dans la langue tamoule. Les rapports de son curé lui étaient si favorables qu’au bout de six mois le vicaire fut nommé curé à son tour. On lui confia les chétiens télégous de Poudour et de Tatchour, à mi-chemin entre Pondichéry et Madras.
Dès son arrivée, il eut l’occasion de s’initier aux métiers d’architecte et d’entrepreneur. L’église de Pondour étant en ruines, il la rebâtit avec l’aide des chrétiens de caste ; il fut convenu que la nef serait réservée à ceux-ci et que les parias pourraient disposer des bras du transept. Quand l’église fut achevée, des meneurs venus de Madras poussèrent les gens de caste à refuser l’entrée de l’église aux parias. Ne pouvant aboutir à un compromis, raison-nable, le missionnaire se retira chez les parias de Madurantakam. Il y bâtit une chapelle et une modeste résidence, et entreprit la conversion des parias païens. Son premier catéchumène fut un fumeur d’opium. Le travail des conversions ne lui fit pas négliger l’administration des chrétiens ; il trouva même le temps d’apprendre le télougou : ce fut une agréable surprise pour les fidèles de Tatchour de l’entendre prêcher dans leur langue.
Le district de M. Mignery touchait au diocèse de Mylapore ; des catéchistes goanais venaient parfois semer la zizanie sur le territoire de la Mission de Pondichéry. M. Mignery en prit un en flagrant délit et le corrigea sérieusement ; le curé du délinquant se plaignit à Mgr Laouënan, dont la seule réponse fut une lettre de félicitation à son ancien prisonnier.
Comme l’affaire de Poudour ne s’arrangeait pas, Mgr Gandy, sucessseur de Mgr Laouënan, rappela M. Mignery. On essaya d’en faire un planteur, ce fut un insuccès, et il fallut bien rendre le missionnaire à la vie apostolique. Il remplaça à Nelliangoulam, le légendaire M. Pierre ; il y arriva le 11 février 1894, en la fête, de Notre-Dame de Lourdes, et y vécut six ans, heureux comme un prince, disait-il. Il était alors dans toute sa force : plutôt petit, mais bien pris, il avait un tempérament de fer qui ne connut jamais la maladie, et qui lui permit de s’adapter à tous les régimes, de braver toutes les fatigues. Sa force musculaire était prodigieuse et quand il avait été réduit à en faire une démonstration, on en conservait le souvenir ! Au moral, ce qui frappait le plus chez lui, c’était la force de volonté : toute sa physionomie respirait l’énergie. Douze années de mission et plusieurs échecs avaient, sans amollir son caractère, poli les angles et préparé l’homme au rôle que la Providence lui assignait : cette rare énergie, au service d’une brillante intelligence, allait trouver à se dépenser.
Nelliangoulam était une vieille chrétienté, en liaison vers le sud et l’est, avec d’autres chrétientés ; mais au nord et à l’ouest, dans un rayon de 30 à 40 milles, s’étendait le « no man’s land ». Dans cette immense étendue, parsemée de pagodes et de mosquées, le vrai Dieu n’avait pas même une modeste chapelle. Tout en exerçant le ministère ordinaire auprès de ses fidèles, M. Mignery avait le regard tourné de ce côté, épiant les circonstances favorables. Ses premières visées se portèrent à l’ouest sur Wandivash, grosse agglomération à la lisière de laquelle s’étaient installées quelques familles chrétiennes. Il y acquit un terrain, près du champ de bataille qui vit l’écrasement des troupes françaises en 1760. Mais, là où la force armée n’avait pu imposer la domination du roi de France, un missionnaire français allait asseoir le règne du Roi des Cieux. Il groupa les chrétiens, construisit église et presbytère, pendant que s’allongeait la liste des néophytes et des catéchumènes. De Wandivash, il poussait des reconnaissances en tous sens ; par ses néophytes, il entrait en relation avec des familles païennes bien disposées, puis il leur faisait visite après une ardente prière à l’ange gardien du lieu. De nouveaux îlots de vrais adorateurs parsemèrent bientôt cette région naguère toute païenne.
En 1899, notre missionnaire franchit le Cheyar, à 12 milles au nord de Wandivash Là, autour de la ville de Tirouvatour, vivaient quelques chrétiens, cordonniers et blanchisseurs. Les visites à ces pauvres gens mirent le missionnaire en relation avec des parias d’alentour : la moisson s’annonçait abondante ; sur un vaste terrain à deux milles au nord de la rivière, s’éle-vèrent bientôt une petite église et une maisonnette, que le développement ultérieur de Tirouvatour mit plus tard aux portes de la ville. Dès lors son champ d’apostolat s’étendit au nord dans la direction d’Arcot ; il y fonda les belles chrétientés de Sérangatour et de Moranam, aux confins de l’archidiocèse de Madras. C’est de 1899 à 1901 que le mouvement de conversions fut le plus intense ; pour ces trois années, nous avons relevé plus de 600 baptêmes d’adultes.
Nelliangoulam est désormais trop excentrique ; Wandivash devient en 1900 le chef-lieu d’un district qu’il laissera en 1909, avec 4.000 chrétiens, à un jeune confrère, pour se retirer à Tirouvatour et s’occuper de ses néophytes les plus récents. On lui donne charge également de Parasour et de Maduré, dont les parias, baptisés à Arni en 1898 par M. Millard, avaient bien oublié le chemin de l’église. Mais le mouvement de conversions s’est ralenti, il faut poursuivre le travail d’organisation et de formation chrétienne. Le bon pasteur s’y donna tout entier, et désormais on le verra plus rarement aux réunions des confrères, dont il avait été longtemps le poète attitré et le vrai boute-en-train. Par esprit d’économie, il a vendu son cheval ; d’intrépide cavalier il devient intrépide marcheur. Plus tard, dans les dernières années de son apostolat, il voyagera dans une minuscule charrette traînée par un petit bœuf. En attendant, il marche : 20, 30 kilomètres ne l’effrayent pas ; il marche, il prie en marchant, et sa prière se fait plus ardente chaque fois qu’il aperçoit une pagode. Il va de village en village, séjournant plusieurs semaines dans chacun, sous la tente, et plus tard dans de modestes chaumières. Il mange le riz du pauvre, assaisonné des légumes et des piments du pays. Sa table ne voit guère la viande qu’à la visite d’un confrère ; et même alors la préparation laisse bien à désirer, car le cuisinier n’a pas été initié aux secrets de l’art. Les heures libres du milieu
du jour sont consacrées à la lecture, et à l’étude. Sa mémoire prodigieuse lui permet de traiter tous les sujets en conversation. Il semble connaître la Vulgate par cœur, tant il la cite avec à-propos. En spiritualité il est passé maître, et les connaisseurs qui l’ont entendu prêcher des retraites proclament la sûreté et la profondeur de sa doctrine.
En mai 1927, M. Mignery baptisa ses derniers catéchumènes. Cette année même, vers la fin de juin, il éprouva une douleur à la bouche ; il avait grande répugnance à consulter un médecin ; il se décida enfin à cette démarche ; le médecin diagnostiqua un cancer. Le malade partit pour Bangalore : en franchissant le petit ruisseau qui limitait son district, il eut l’impression qu’il ne rentrerait plus, et des larmes coulèrent sur les joues du vétéran. A Bangalore, on se refusa à tenter une opération, et on lui conseilla de partir pour la France au plus vite. La robuste verdeur du cancéreux laissait espérer à tous le succès d’une intervention chirurgicale et un prochain retour en Mission. Mais à Paris, le mal fut jugé incurable. On fit un grattage de la gencive, et on laissa au malade les illusions tenaces qu’il gardait sur son état.
En octobre il se rendit à notre Sanatorium de Montbeton. De là son esprit et son cœur s’envolent tous les jours vers l’Inde. Il écrit à Mgr Morel : « Quoique loin des Indes, je veux rester missionnaire jusqu’à la fin. Que Dieu me fasse la grâce d’être encore utile à nos néophytes par mes souffrances et par mes prières ! » Il conserve l’espoir du retour, il attend cette faveur de l’intercession de la très sainte Vierge dont il a tant cherché à promouvoir le culte ; il retrouve justement dans sa chambre les statues de Notre-Dame de Lourdes, à qui il a dédié sa première chapelle ad gentes à Madurantakam, de Notre-Dame des Sept Douleurs, patronne de Tirouvatour, de Notre-Dame des Victoires, qu’il a donnée pour titulaire à la chapelle de Parasour.
En février de 1928, il est l’objet des soins paternels de Monseigneur le Supérieur Général venu à Montbeton pour la retraite annuelle de nos malades. Il supplie Sa Grandeur de lui permettre de retourner en Mission. La réponse de Monseigneur fut d’inviter les confrères à faire en commun une neuvaine à Sainte Thérèse de l’Enfant Jésus pour la guérison du vénéré malade. On l’invita à s’associer à cette neuvaine : « Pour moi, écrivait-il, je ne puis guère « demander ma guérison, mais je célébrerai neuf messes, demandant par l’intercession de « cette petite Sainte que la volonté de Dieu s’accomplisse en moi. » En même temps, d’ardentes prières montent vers le ciel, de Sathonay, où se trouve sa sœur religieuse, et de Pradines, où son cousin associe à ses prières les Sœurs Bénédictines dont il est l’aumônier.
Les égards que l’on témoigne au cher malade déconcertent son humilité : « Quand je songe « dans ma solitude à tout l’intérêt qu’on me porte depuis que je suis malade, écrit-il, à tout ce « que l’on fait pour moi, je n’y comprends rien et j’ai envie de pleurer. Que suis-je « maintenant ? un débris de missionnaire, un manteau usé jusqu’à la corde. » L’humidité et le froid le confinent dans sa chambre ; lui qui a trotté quarante-cinq ans par les sentiers de l’Inde, s’habitue à la solitude et apprécie ce mot de l’Imi¬tation : Cella continuata dulcescit.
Le mal suit lentement son cours ; la bouche se ferme au point qu’il doit cesser de monter à l’autel, bientôt même il ne peut plus communier. Au retour des beaux jours il fait de courtes apparitions dans le parc et au cimetière : « J’y médite parfois, dit-il, sur ce texte : Haec requies mea... hic habitabo ; mais je laisse tomber le quoniam elegi eam, parce que je n’avais jamais songé à Montbeton pour ma sépulture. » A partir de juin, il peut de nouveau communier avec une parcelle d’hostie ; il se sent alors plus fort et plus généreux pour supporter les souffrances. Une autre joie bien douce fut la visite inopinée de sa sœur religieuse qui lui consacra deux jours.
Vers la même époque, il reçut également la visite de M. Gavan-Duffy, dont il fut très touché : « Pendant le court séjour du Père ici, il me semblait, écrit-il, que j’étais encore dans « l’Inde. Oh ! la belle journée, la bonne journée ! mais le bon Dieu me réservait mieux encore. « Le 2 septembre a été pour moi un beau jour, un jour de vrai bonheur : j’ai pu célébrer la « sainte messe, et j’espère pouvoir continuer. J’étais resté quatre mois sans pouvoir la dire, je « suis même rester six semaines sans pouvoir communier. » Dans la même lettre adressée à son Archevêque, il lui fait part des impressions que lui a causées la nouvelle de la cession de son district et des districts voisins aux PP. Salésiens : « La Propagande, dit-il, a fait aux « Salésiens un cadeau de roi. Je leur souhaite d’avoir des succès plus brillants que ceux que « nous avons eus. Je ne pense pas qu’ils fassent beaucoup plus de miracles que nous. Le bloc « du paganisme hindou restera toujours difficile à entamer ; nos successeurs auront comme « nous à travailler au milieu des difficultés, ils auront à peiner, à gémir, et à souffrir comme « nous. Sans doute le Ciel bénira leurs travaux, et la foi ira progressant dans l’Inde : c’est tout « ce que nous désirons. Que le Seigneur soit connu et aimé de plus en plus dans ce cher pays « où nous avons semé dans les larmes ! » Il continuait à s’intéresser de loin à ses chers néophytes ; il fut bien consolé d’apprendre qu’un confrère avait passé les fêtes de Noël à Tiravatour et que le bon Dieu avait résidé quelques jours ,dans un tabernacle vide depuis des mois.
En février 1929, les souffrances redoublèrent, et les derniers mois furent un Calvaire continu, qu’il gravit lentement et qui devenait plus pénible à mesure que diminuait la capacité de réaction d’un tempérament autrefois si résistant. Ces longues souffrances, acceptées en esprit de pénitence et si apostoliquement offertes pour ses chers néophytes, furent l’édification des confrères présents et des visiteurs. Le 8 juin, ses tortures ne l’empêchèrent pas de se souvenir du cinquantième anniversaire de son ordination sacerdotale. Il remercia le Divin Maître, qui après avoir daigné l’associer à son sacerdoce, lui faisait aussi l’honneur de l’associer aux souffrances de sa Passion.
Enfin, le 30 juin, Dieu jugea son âme assez épurée : en la fête de l’Apôtre des Gentils, il rappela à Lui le bon serviteur. De notre regretté confrère nous oserons répéter, proportion gardée, ce que le grand Paul disait de lui-même : « Cursum consummavit, fidem servavit, in reliquo reposita est ei corona justitiae. »
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References
[1528] MIGNERY Claude (1853-1929)
Références biographiques
AME 1894 p. 132. 1899 p. 229 (art.). 1901 p. 216 (art.). 1929 p. 180. CR 1882 p. 103. 1891 p. 210. 1895 p. 306. 307. 1896 p. 410. 411. 1897 p. 246. 1898 p. 239. 1899 p. 259. 1900 p. 221. 1901 p. 231. 232. 234. 236. 1903 p. 268. 1905 p. 312. 1906 p. 233. 1907 p. 275. 1908 p. 240. 242. 1909 p. 229. 1912 p. 287. 1914 p. 104. 1922 p. 147. 1928 p. 150. 1929 p. 199. 335. 1930 p. 263. 1936 p. 202. 1938 p. 269. 281. 1952 p. 92. BME 1927 p. 768. 773. 1928 p. 186. 1929 p. 570. EC1 N° 139. 140. 179.