Louis RUÉ1874 - 1908
- Status : Prêtre
- Identifier : 2278
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1897 - 1908
Biography
[2278]. RUÉ, Louis, né dans la paroisse Saint-Laurent, au Creusot (Saône-et-Loire), le 24 mai 1874, fit ses études à la Maîtrise du Creusot, au petit séminaire d'Autun, et entra laïque au Séminaire des M.-E. le 1er octobre 1892. Il reçut la prêtrise le 13 mars 1897, et partit le 5 mai suivant pour le Kouang-si. Il débuta à Chang-se, et, peu après, fut chargé du poste de Long-niu. Il y acheva, en 1901, l'église Notre-Dame de Fourvière, commencée par Bertholet. Il s'appliqua particulièrement à former des catéchistes, et à faire d'un petit couvent de religieuses une pépinière d'institutrices.
Placé ensuite à Nang-ning, il concourut à la fondation du grand séminaire. Il mourut au sanatorium de Béthanie, à Hong-kong, le 31 mars 1908. Je ne crains pas la mort, disait-il à ceux qui le soignaient ; je me suis préparé à sa visite. "
Obituary
M. RUÉ
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU KOUANG-SI
Né le 24 mai 1874
Parti le 5 mai 1897
Mort le 31 mars 1908
Depuis sept ans la mort n’avait pas visité les missionnaires du Kouang-si. Elle leur avait donné le temps de multiplier leurs mérites et de féconder le champ confié à leurs soins, par la souffrance et les tribulations. Elle semblait vouloir les laisser encore longtemps à leur tâche, lorsque, contre toute attente, elle enleva dans toute la force de l’âge un de ceux qui avaient le plus contribué à imprimer un vigoureux élan au mouvement religieux de ces dernières années.
Le 31 mars 1908, M. Louis Rué mourait à Hong-kong dans sa trente-quatrième année, après dix ans de travaux apostoliques consacrés à la mission du Kouang-si. Ceux qui ne l’ont vu que dans les jours de sa longue agonie ont pu difficilement croire que ce mourant aux regards éteints, à la voix sans timbre, exsangue et décharné, personnifiait, pour ceux qui l’ont le plus counu, le zèle ardent et inlassable.
« Mon frère Louis, écrit sa sœur, naquit au Creusot le 24 mai 1874. Il était le douzième de la famille. Aussi, était-il le préféré, et il le méritait par son obéissance et plus tard par son travail. Dès sa plus tendre enfance il se fit remarquer par sa docilité, son esprit et son caractère bien décidé. Tout le monde l’aimait. Il était réfléchi, sérieux même, tout en aimant le rire et les jeux, quand le moment était venu.
« Mon père, voyant en lui de si heureuses dispositions, disait à ma mère : « Je veux faire « de Louis quelqu’un de bien. »
« Après l’école primaire, dit M. l’abbé Bobin, son oncle, il entra à la maîtrise du Creusot « qu’on venait de fonder, à la tête de laquelle était placé M. Manier, actuellement vicaire « général du diocèse. Il aimait beaucoup Louis et le regardait comme un de ses meilleurs « élèves.
« A la fin de sa dernière année à la maîtrise, il lui décerna le prix d’honneur, réservé à « l’élève qui avait été, durant tout le temps, le plus méritant par son travail, son obéissance et « sa bonne conduite.
« C’est pendant ces années de maîtrise qu’en lisant à la maison les Annales de la « Propagation de la Foi, il sentit naître sa vocation de missionnaire. Comme c’était un enfant « très humble, même timide et peu communicatif, il ne m’en a jamais parlé avant son entrée « au petit séminaire d’Autun, en quatrième.
Sa sœur était plus au courant de ses intentions. « Nous étions continuellement ensemble, «dit-elle. Souvent nous parlions de l’avenir. Je lui demandais : « Que penses-tu faire ? — Un «missionnaire. — Et où iras-tu ? — En Corée. — Mais pourquoi dans ce pays plutôt «qu’ailleurs ? — Parce que, répondait-il avec beaucoup d’ardeur et d’admiration, je voudrais «être martyr, et qu’en Corée je serais à peu près sûr de l’être, car le pays est mauvais. »
« Louis fis de sérieuses études, reprend son oncle, sans cependant se faire remarquer par « de grands succès. Il poursuivit son but : se préparer aux missions sans en parler ni à ses « condisciples ni à ses maîtres, sauf à son directeur. Ses amis ont remarqué chez lui, pendant « tout son séminaire, la volonté bien arrêtée de s’endurcir, de se fortifier, de se faire une santé « capable de toutes les endurances. Mais il l’eut bien vite usée au Kouang-si. Le bon Dieu lui « a certainement fait grâce en considération de son zèle pour lui gagner des âmes. Il me laisse « à moi, son vieil oncle qui l’aimais et l’admirais, l’exemple de son dévouement surnaturel et « de sa piété vraiment sacerdotale. Aussi je compte sur sa protection auprès du bon Dieu. »
M. Rué, après avoir terminé ses études secondaires au petit séminaire d’Autun, arriva à Bièvres. C’était le 1er octobre 1892. Il fut un aspirant travailleur, sérieux, à la piété forte et soutenue. Sa vie à la caserne comme séminariste est tout entière dans ces paroles qu’il écrivait le 4 novembre 1894 : « Je demande à Dieu de m’accorder la grâce de ne pas m’habituer à entendre les conversations des soldats, sans en ressentir un profond dégoût, et sans lui faire amende honorable pour l’offense qu’il en reçoit. »
Ordonné prêtre le 13 mars 1897, M. Rué reçut sa destination pour le Kouang-si. Il s’embarqua à Marseille le 5 mai suivant, et arriva dans sa mission au mois de juillet.
On était encore à l’époque où il fallait plus d’un mois pour se rendre de Hong-kong à Koui-hien, alors résidence du vicaire apostolique. De là il fut envoyé à Chang-se, berceau des chrétientés du sud.
Il n’y eut pas le temps d’exercer son zèle. Le 21 avril de l’année suivante, le drame de Yungang-tcheou laissait, par le meurtre de M. Bertholet, l’immense district du nord-est sans pasteur.
C’était un poste envié, mais que les circonstances rendaient particulièrement difficile. Les autorités jugèrent que le jeune titulaire de Chang-se, qui n’avait pas manqué de donner des preuves de l’énergie de son caractère, saurait soutenir et développer les œuvres que le missionnaire massacré avait créées à Long-niu.
Deux où trois mois après, il s’installait dans ce joli et pittoresque village. Il devait lui plaire avec ces fertiles rizières, sa ceinture de rochers verts et tout percés de grottes. Il aurait pu se livrer à ses goûts de botaniste, mais l’héritage de son prédécesseur ne lui laissait pas le loisir de se livrer à cette agréable étude de la nature.
Il trouvait, en arrivant, des chrétiens disséminés dans trois préfectures. Long-niu, comme centre des œuvres, n’était pas, tant s’en faut, ce qu’il devait le laisser neuf ans plus tard. Avec une audace pleine de foi, le P. Bertholet avait commencé son église, dédiée à Notre-Dame de Fourvières, et pour laquelle il avait fait un appel à la générosité des catholiques de Lyon. A sa mort, il laissait les constructions à peine sorties de terre, et les ressources étaient épuisées.
M. Rué, que les audacieux projets n’effrayaient pas, sans hésiter, réunit tout ce que ses ressources personnelles pouvaient lui fournir, et, secondé par ses chrétiens, poursuit l’œuvre commencée. Il se confie en la Providence, qui vient à son sec ours par un généreux catholique de Lyon.
Les travaux marchaient vite. Mais on était en 1900. La guerre des Boxeurs et les événements de Pékin, dont les nouvelles arrivaient tranformées en désastre complet pour les Européens, enthousiasmaient les fortes têtes qui parlaient déjà de se partager les briques des constructions.
M. Rué, sans se troubler, continua les travaux. Son bel entêtement et sa vigueur peu commune surent triompher de tout les obstacles. Aux fêtes de Pâques 1901, Mgr Lavest, dans sa tournée pastorale, bénit la première église du Kouang-si.
Cette construction cependant n’avait pas absorbé le missionnaire. Il poursuivait de pair son œuvre d’évangélisation. Au milieu de difficultés sans nombre que lui suscitent toute une pléiade de mandarins haineux, de lettrés hostiles et jaloux, il baptise, dans l’espace de huit à neuf ans, plus de 500 adultes. Les ouvriers apostoliques connaissent la somme de soucis et de travail que ce chiffre représente. M. Rué s’est adonné tout spécialement à la formation de bons catéchistes, pieux, zélés et patients, comme il les fallait pour enseigner les humbles et pauvres paysans, qui constituaient la plus grande partie de ses catéchumènes.
A mesure que la mission s’ouvrait, le besoin de catéchistes femmes et d’institutrices pour les catéchumènes et les chrétiennes, se faisait plus vivement sentir. En arrivant à Long-niu, notre confrère ayant trouvé un petit couvent en formation, il lui donna tous ses soins pour en faire une pépinière de maîtresses d’école. Il avait aussi à cœur de soutenir et de développer un asile de vieillards commencé par son prédécesseur.
De tous ses chrétiens éloignés, ceux qu’il aimait le mieux étaient les bons montagnards du Yu-fou. Il allait les visiter le plus souvent possible. C’est au retour d’une de ces excursions dans les montagnes, qu’il fit connaissance avec les fameux pillards dont on parlait tant. Surpris par une de leurs bandes, il reçut un coup de pistolet en pleine figure. Il eut le visage brûlé. Un instant on craignit pour sa vue.
Dans sa précipitation, le bandit qui lui déchargea le coup avait-il oublié de mettre la balle dans son arme, ou la laissa-t-il tomber par mégarde ? la Providence seule le sait. Il n’y eut que la poudre qui n’avait pas pris feu à pénétrer l’épiderme du blessé, en lui imprimant un curieux tatouage. Il s’en tira avec quelques blessures au front.
Ardent et vigoureux, M. Rué aimait la rencontre des obstacles et l’imprévu dans les voyages le charmaient. Mais, il était loin de s’exposer au danger sans raison. Si une entreprise, qu’il jugeait nécessaire, était périlleuse, il calculait froidement les chances de succès avant de l’entreprendre. Cette pleine possession de lui-même lui assurait un heureux résultat.
Les années passaient vite pour le jeune et zélé missionnaire, son activité était cependant assez souvent paralysée par la fièvre. En 1902 il fut même obligé de quitter son poste pour aller au sanatorium de Hong-kong prendre un repos de quatre mois. Comme il fut heureux de retrouver après cette longue absence ses œuvres et ses chrétiens ! Il se remit au travail avec un nouveau courage.
D’une grande fidélité à tous ses exercices spirituels, M. Rué se levait de très bonne heure et faisait une longue méditation avant sa messe, qu’il célébrait d’ordinaire au point du jour.
Il aimait l’étude. Les écrits de sainte Thérèse, dans lesquels il cherchait des conseils pour ses vierges chrétiennes, lui étaient familiers. Les nombreuses difficultés, qu’il rencontrait dans l’observation de la discipline ecclésiastique, l’avaient rendu familier avec son Collectanea que l’on trouvait toujours ouvert sur la table, avec son droit canon.
C’était un terrible logicien et pour peu que le caractère de son interlocuteur s’y prêtât, la conversation devenait vite animée, intéressante et instructive.
Ces deux dernières années lui apportèrent de sérieux ennuis. Les lettrés qui avaient tremblé devant les pirates, se vengèrent sur les chrétiens, qu’ils accusèrent d’être des hommes de désordre. Sans aucune preuve, quelques-uns furent mis aux fers et exécutés sans jugement. L’un d’entre eux fut décapité parce qu’il avait le malheur de porter le nom d’un voleur. Le mandarin le vit après coup, mais il s’en consola facilement : c’était un chrétien de moins.
Le missionnaire fit l’impossible pour rendre la paix à son troupeau. Voyages à la capitale, lettres et rapports à l’autorité, il mit tout en œuvre pour arriver à son but. Hélas ! malgré le bon droit, il dut s’avouer vaincu.
Au milieu de ces épreuves, espérant des secours qui ne venaient point, et ayant eu à subir en outre des ennuis dans ses œuvres elles-même, son robuste tempérament fut atteint. C’est dans ces circonstances, qu’il fut envoyé à Nan-nin pour prêter son concours à la fondation du grand séminaire. Mais peu de temps après, brisé par la maladie et miné par une grande faiblesse, il partit de nouveau pour Hong-kong, où il devait s’éteindre lentement, au milieu de ses confrères du sanatorium et malgré les soins les plus assidus. Le médecin avait donné à son mal le nom de maladie infectieuse.
Notre cher confrère vit venir la mort avec calme : « Je ne la crains point, disait-il quelques « jours avant le dénouement fatal : je me suis préparé à sa visite. »
Il n’avait pas à la craindre, en vérité, car, dit l’un de ses confrères voisins, « le P. Rué a été, pour ceux qui l’ont plus particulièrement connu, un modèle de régularité sacerdotale et de zèle apostolique. »
References
[2278] RUÉ Louis (1874-1908)
Notes bio-bibliographiques. - C.-R., 1898, p. 133 ; 1899, p. 166 ; 1900, p. 134 ; 1901, p. 135 ; 1902, p. 147 ; 1903, p. 139 ; 1904, p. 151 ; 1905, p. 123 ; 1906, p. 133 ; 1907, p. 159 ; 1908, p. 127. - M. C., xxxi, 1899, p. 340 ; xxxviii, 1906, p. 190. - Sem. rel. Autun, 1908, p. 414 1910, p. 33.
Notice nécrologique. - C.-R., 1908, p. 346.
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