Alphonse DARRIS1877 - 1939
- Status : Prêtre
- Identifier : 2648
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Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1903 - 1939
Biography
[2648] DARRIS Alphonse, Marie, Pierre, Daniel, est né le 3 août 1877 à Ségoufielle, diocèse d'Auch (Gers). Il fit ses études primaires à Ségoufielle et ses études secondaires au Petit Séminaire d'Auch, puis il entra au Grand Séminaire d'Auch, où il fut tonsuré. Il entra, le 13 septembre 1898, au Séminaire des Missions Étrangères à Bièvres pour sa philosophie, puis à Paris pour sa théologie, et fut ordonné prêtre le 22 juin 1902.
Il partit le 30 juillet pour la mission du Kouytchéou. Il passa par Hongkong, puis Shanghai et remonta le Fleuve Bleu. Quelque temps après, un petit bateau vapeur le déposa à Ichang, point terminus de la navigation à vapeur. De là une jonque chinoise, halée par des tireurs, l'amena à Chungking où il arriva en novembre 1903. Enfin, ce fut un voyage par voie de terre jusqu'à Kweiyang, après 15 jours de tribulations.
Il se mit immédiatement à l'étude de la langue chinoise, et après 6 mois, il fut envoyé à Touchan comme vicaire de son compatriote M. Bacquet. L'année suivante, il fut nommé à Touyun comme curé. Au début, il fut très populaire, mais il devint l'objet de menaces, et fut obligé de se cacher comme un vulgaire malfaiteur. En 1906, il fut transféré à Tsen-Y, district le plus vaste et le plus important de la mission. Il resta là trois ans, obligé de faire de longues marches pour visiter ses chrétiens et secourir les malades.
Puis, en juin 1909, il fut nommé à Tinfan, vaste district comportant une soixantaine de dessertes. Au cours de ses longues et pénibles marches, il fut souvent attaqué par des brigands, surtout une fois, où sa vie fut réellement en danger; mais il réussit à s'échapper sans trop de mal. Il fut le bon pasteur de son troupeau et avait un grand talent pour l'enseignement du catéchisme à ses paysans.
Survint la Révolution chinoise. Il fut nommé à Kweiyang, curé de la paroisse Saint Louis, où il modernisa les écoles, s'occupa de la jeunesse catholique. Il fut aussi chargé des relations avec les autorités civiles locales, et dans ce poste, il réussit à maintenir les meilleures relations avec le gouvernement, en ces temps troublés et instables.
Après la famine de 1925, M. Darris fut désigné par le gouvernement provincial pour aller porter des secours aux malheureux des régions de l'Est. Il profita de ces voyages pour parler de la doctrine chrétienne dans ce pays entièrement païen. Il réussit à amorcer des conversions, en plus d'un endroit.
Quand il revint à Kweiyang, il céda la paroisse St Louis à un confrère et repartit vers l'Est, pour guider les Pères du Sacré Coeur d'Issoudun, qui venaient juste de s'installer dans cette région.
Au bout de trois ans, de retour à Kweiyang, il prit un congé en France. L'année suivante, il revint à Kweiyang pour reprendre la paroisse St Louis jusqu'en 1937, où il devint aumônier des Religieuses.
A Pâques 1939, désirant être rendu à la vie active, il fut envoyé à Ts'Ingay, où il rêvait de passer de longues années. Mais l'âge et une maladie d'entrailles le forcèrent à la prudence. En septembre, pendant l'absence de son vicaire parti faire sa retraite annuelle, il dut faire un long chemin pour visiter un malade dans les montagnes. Il fut surpris par le froid et la pluie, et au retour, il eut encore la malchance de glisser et de tomber dans une rizière. Il revint à l'évêché, fut bien soigné par un docteur chinois, et malgré le dévouement de nos Soeurs canadiennes, il ne put surmonter fièvre et dysenterie. Il rendit son âme à Dieu le 2 décembre 1939. C'était la veille de la fête de St François Xavier, patron des Missions. Le 5, le Père Derouineau, son successeur à la paroisse St Louis, chanta la messe des funérailles, en présence de deux évêques, des Pères, des Séminaristes et des chrétiens de trois paroisses de la ville de Kweiyang. M. Darris n'avait que 63 ans.
Obituary
M. DARRIS
MISSIONNAIRE DE KWEIYANG
M. DARRIS (Alphonse-Marie-Pierre-Daniel) né le 3 août 1877 à Segoufielle, diocèse d’Auch (Gers), entré tonsuré au Séminaire des Missions-Étrangères le 13 septembre 1898, prêtre le 22 juin 1902, parti pour la Mission du Kouytcheou le 30 juillet 1902, mort à Kweiyang le 2 décembre 1939.
M. Darris naquit à Ségoufielle (Gers), le 3 août 1877, d’une famille de cultivateurs dont le père était resté de longues années maire de sa commune. Quelque temps avant de mourir, il nous racontait ainsi l’origine de sa vocation : « Je faisais, disait-il, mes études à l’école laïque, « sans songer le moins du monde à entrer au séminaire, lorsqu’un jour, pendant une « récréation, je fus soudain saisi par l’idée que je devais un jour être prêtre. Cette idée « m’obséda si profondément que je la considérai comme un appel manifeste de Dieu. J’en fis « part à mon père, et à la fin de la rhétorique j’entrai au grand séminaire d’Auch. »
Avouons que pour une vocation, celle-ci avait quelque chose d’extraordinaire. Aussi pour y répondre plus pleinement, le jeune Darris ne se contenta pas de devenir prêtre dans son diocèse, mais il choisit le vaste champ d’apostolat des missions. En septembre 1898, il entrait à Bièvres et, quatre ans plus tard, il était ordonné prêtre et recevait sa destination pour le Kweichow, avec M. Gros. A ce sujet, M. Darris nous a narré ce qui suit : « M. Gros qui devait « m’accompagner se trouvait, par un hasard tout fortuit, assis à côté de moi à la salle des « exercices. Il était tellement préoccupé par la destination donnée à un de ses amis assis en « face qu’il n’entendit pas la voix du Père Delpech le désignant pour le Kweichow, si bien « que, la liste des appels finie, il s’adressa à moi et me demanda : « Et moi, où suis-je « envoyé ? » — Mais, avec moi, au Kweichow ! vous n’aves pas entendu ? — Pas possible ! « ah alors, embrassons-nous, et vive le Kweichow ! » Le soir, après souper, se trouvant ensemble au jardin, M. Gros de¬manda à mon compagnon : « Le Kweichow ! mais où se « trouve¬-t-il ? » Et le P. Darris de répondre : « Voici : c’est en Chine, on passe par « Hongkong, on débarque à Shanghai, on remonte le Fleuve bleu, et puis on finit par arriver « comme on peut. »
C’est de fait ce qui se passa. En septembre, ils débarquèrent tous deux à Shanghai. Quelque temps après, un petit vapeur re¬montant le fleuve les déposait à Ichang, alors point terminus de la navigation à vapeur. De là il restait encore quelques centaines de kilomètres à parcourir pour arriver à Chungking, terme du voyage par eau. Ils le firent, comme les autres missionnaires de l’époque, en jonque chinoise halée par des tireurs. Ça n’allait pas vite, le voyage demandait un mois, parfois quarante jours mais il ne manquait pas de pittoresque. D’après un chroniqueur du temps, et qui a bonne mémoire, il paraît que, durant leur escale a Ichang les deux compères escaladèrent une montagne, et de là-haut envoyèrent à tous les échos « Les Allobroges » et « Montagnes Pyrénées ». Cela prouve que tout en évoquant la patrie absente, ils ne broyaient pas trop de noir.
Durant le mois de novembre ils arrivèrent à Chungking. De là à Kweiyang, encore 500 km par voie de terre : actuellement, avec les autres, le voyage se fait en deux ou trois jours, mais il fallait marcher à pied ou employer le palanquin et, selon la pré¬vision de M. Darris, on finissait par arriver seulement après quinze jours de tribulations.
D’après le chroniqueur susdit, lorsque, le sixième jour de voyage, M. Darris foula pour la première fois le sol du Kweichow, il descendit de chaise, se mit à genoux, baisa la terre et s’écria tout ému : « Sauver une âme et mourir ! »
Arrivé à Kweiyang, il dut s’atteler à l’ingrate besogne de l’étude de la langue. Heureusement chaque semaine il y avait un jour de relâche : les deux nouveaux allaient passer le jeudi au collège.
Après six mois, M. Darris fut envoyé à Touchan comme vicaire de son compatriote M. Bacqué, puis l’année suivante nommé à Touyun. Là, volant de ses propres ailes, il commença à faire paraître son aptitude spéciale à attirer les païens ; de nombreuses familles vinrent à lui. Malheureusement, vers 1905 et 1906, il se trouva pris dans un dédale d’inimitiés, de révoltes, de procès, et dut s’exercer au rôle ingrat de pacificateur. Bientôt lui-même devint l’objet de menaces vraies ou feintes, bien difficile de le voir sur l’heure, et il fut obligé de se cacher comme un vulgaire malfaiteur. — « Mourir martyr, c’est bien, note-t-il sur un petit carnet, « mais il serait peu séant de se faire occire dans une vulgaire bourrasque ! » Enfin la situation empire, et le 16 mai 1906, il croit son dernier jour arrivé : il fait le compte de ses intentions de messes, demande pardon à Dieu, à son évêque et à ses confrères, se dit heureux de mourir à son poste, « mais, ajoute-t-il, ce n’est pas mourir en martyr », aussi prie-t-il ses confrères de se souvenir de lui au saint-autel.
Il s’en tira. A l’automne de cette même année, nous le retrou¬vons à Tsen-y, district le plus vaste et le plus important de la Mission, et, suivant son attrait, il s’y dépense largement à la visite des stations de campagne. Cependant la plus grosse difficulté venait des courses aux malades. Pendant que son vicaire était pris par la visite des chrétiens d’un endroit, de tous les autres on courait au centre chercher le curé ; celui-ci partait aussitôt, de jour, de nuit, faisait ses 30 ou 40 kilomètres et rentrait au logis surveil¬ler les enfants de la Sainte-Enfance et les élèves, quitte à repartir dans une autre direction le lendemain ou le surlendemain.
En juin 1909, M. Darris fut nommé à Tinfan. Secondé par un vicaire, il avait à sa charge les deux districts actuels de Tinfan et le Tongtcheou, avec une soixantaine de stations. Il parcourut en tous sens son vaste territoire, heureux de trouver çà et là des catéchumènes à instruire. Son rôle était comme toujours celui de défricheur, de broussard. A l’époque de la révolution chinoise, un jour qu’il venait de visiter des chrétiens, il fut attaqué par une vingtaine de brigands dans un endroit désert. De loin, ils tirèrent sur lui ; sans perdre son sang-froid, il déchargea son fusil de chasse dans leur direction, mais quand il se retourna pour demand¬er au palefrenier d’apporter d’autres cartouches, il eut la stupéfaction de constater que le brave s’était sauvé en entraînant sa mule avec lui. Privé de tout secours, M. Darris n’en fit pas moins front contre ses adversaires : remarquant que l’un d’eux tenait une lance d’une façon maladroite, il réussit à s’en emparer en un clin d’œil, fonça sur les autres, et les mit promptement en fuite.
D’autres broussards ont parcouru les campagnes, mais peu ont fait avec plus de goût, de joie et de succès. Volontiers gai et affable, il était, devant un auditoire de paysans, catéchiste hors de pair. Le vivace souvenir qu’après 25 ans gardaient de lui ses chrétiens laisserait croire que, si parmi ses successeurs, d’aucuns ont pu l’égaler, nul ne l’a éclipsé. Il semblait fait pour la campagne, et il en eut toujours la nostalgie.
La révolution chinoise était survenue, introduisant avec elle parmi les chrétiens un esprit nouveau, alors l’autorité songea qu’il convenait d’adopter des œuvres nouvelles : écoles plus modernes, jeunesse catholique, et M. Darris lui parut être l’ouvrier apte à organiser ces changements. Nommé à Kweiyang, curé de la paroisse Saint-Louis, il se mit à la besogne, réalisa les perspectives, et les eût maintenues si elles eussent été durables. En même temps, Il se donna tout entier au soin de la paroisse, et fut encore, comme ses prédécesseurs, chargé des relations entre la Mission et les autorités civiles. Son affabilité, son caractère franc et ouvert, ses manières polies le firent apprécier de tous, aussi, durant une vingtaine d’années, malgré les temps troublés, des gouvernements branlants et sans cesse renouvelés, la Mission n’eut pas à subir de graves désagréments.
Après la famine de 1925, M. Darris fut désigné par le gouver¬nement provincial pour aller porter des secours aux malheureux des régions de l’est. Le voyage dura plusieurs mois en pays en¬tièrement païen. Il profita des occasions pour parler de doctrine un peu partout et, la charité aidant, il réussit à amorcer des conversions en plus d’un endroit. A son retour il obtint de céder la paroisse Saint-Louis à un confrère et repartit vers l’est, tant pour cultiver le bon grain qu’il avait jeté en terre que comme conseil¬ler des Pères du S. C. d’Issoudun auxquels venait d’être cédée la région. Au bout de trois ans, de retour à Kweiyang, il prit un congé en France pour aller embrasser son vieux père. Hélas, celui-ci ne put l’attendre : en débarquant à Marseille, notre confrère eut la douleur d’apprendre qu’il venait de quitter ce monde. L’année suivante il nous revenait, pour reprendre la paroisse Saint-Louis jusqu’en 1937 où il devint aumônier des religieuses.
A Pâques 1939, désirant être rendu à la vie active, il fut en¬voyé à Ts’ingay, poste pas trop éloigné ni trop pénible. Il rêvait de s’y dévouer de longues années, mais l’époque des grandes ran¬données était passée. L’âge et une maladie d’entrailles datant de longtemps déjà lui commandaient la prudence. Malheureusement cette façon de calculer ne cadrait pas avec son dévouement, et c’est par un acte de charité au-dessus de ses forces que le bon M. Darris devait achever sa belle vie de missionnaire.
En septembre dernier, pendant que son vicaire était en re¬traite à Kweiyang, on vint de la campagne le chercher pour ad¬ministrer un malade. La course à faire était pénible : une mon-tagne à franchir pendant une quinzaine de kilomètres par des sentiers abrupts, étroits et tortueux, et pas de monture. Le mis¬sionnaire n’écoutant que son zèle, se mit en route à pied. Pour comble d’infortune, la pluie commence à tomber, et il arriva là-haut à 8 ou 9 heures du soir, harassé de fatigue, trempé de sueur et de pluie. Durant les trois ou quatre jours que le mauvais temps l’obligea à rester chez son malade, il fut gêné par le froid, particulièrement sensible à cette altitude, et pendant le voyage de retour il eut encore la malchance de glisser et de tomber dans une rizière.
Après une quinzaine de jours, se sentant de plus en plus indisposé, il vint à l’évêché. Nous constatâmes que les traits du visage étaient tirés et qu’il était dans un état presque continuel de somnolence. Après quelques jours de mieux, le mal empira et il dut se résigner à garder la chambre. Il fut soigné durant un mois, avec beaucoup de dévouement, par un docteur chinois qui avait fait ses études à l’étranger, et par nos Sœurs canadiennes. Malgré quelques amélio-rations passagères durant lesquelles nous renais¬sions à l’espoir, il apparut bientôt que son organisme n’était plus en état de lutter contre la fièvre et la dysenterie qui ne le lâ¬chaient plus. Le 2 décembre après-midi, entouré des confrères présents à l’évêché, et gardant sa connais-sance jusqu’à la fin, le malade rendit sa belle âme à Dieu. C’était la veille de la fête de Saint-François-Xavier patron des missionnaires. Le 5, M. Deroui¬neau, son successeur à la paroisse Saint-Louis, chanta la messe des funérailles en présence de deux évêques, des Pères, des sémi¬naristes et des chrétiens de trois paroisses de la ville de Kweiyang.
La mort de M. Darris, à 63 ans seulement, creuse un grand vide dans la Mission, mais nous sommes sûrs qu’il jouit là-haut de la récompense promise au bon serviteur et surtout au bon pas¬teur qui donne sa vie pour ses brebis.
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References
[2648] DARRIS Alphonse (1877-1939)
Références bibliographiques
AME 1902 p. 327. 1907 p. 222 (art). 226. 1922 p. 93 (art). 1926-27 p. 228. 229. 1930 p. 42. CR 1902 p. 302. 1903 p. 131. 1905 p. 103. 1906 p. 114. 1908 p. 114. 1909 p. 121. 1910 p. 120. 121. 405. 1911 p. 102. 1912 p. 152. 1915 p. 78. 1917 p. 62. 1921 p. 56. 1922 p. 66. 1925 p. 68. 1927 p. 65. 66. 1928 p. 71. 72. 1929 p. 93. 1930 p. 104. 1934 p. 78. 1936 p. 84. 317. 1939 p. 220. 290. 1940 p. 50. BME 1923 p. 314. 508. 510. 736. 799. photo p. 399. 1924 p. 570. 631. 731. 1926 p. 314. 508. 570. 631. 1927 p. 23 (art). 33. 35. 80 (art). 115. 143 (art). 209 (art). 252. 280 (art). 441. 511. 636. 695. photo p. 65. 257. 1928 p. 49. 434. 492. 562. 690. 1929 p. 48. 108. 145. 175. 176. 240. 482. 484. 682. 749. 629. 1930 p. 48. 115. 181. 489. 810. 1931 p. 64. 71. 160. 750. 1932 p. 44. 129. 373. 1933 p. 125. 618. photo p. 775. 1934 p. 290. 496. 712. 1935 p. 592. 660. 798. 802. 804. 1936 p. 51. 52. 1937 p. 26. 199. 358. 430. 513. 722. 796. 1938 p. 335. 490. 796. 1939 p. 127. 497. 756. 1940 p. 121. RHM 1926 p. 457. MC 1914 p. 304. 1915 p. 352. 1916 p. 40. 1917 p. 76. 1918 p. 99. 1939 p. 226. 227. EC1 N° 213. 221. 227. 414.