Yves CHOIMET1912 - 2004
- Status : Prêtre
- Identifier : 3637
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Identity
Birth
Death
Other informations
Biography
[3637] CHOIMET Yves est né le 27 octobre 1912 à Nantes (Loire-Atlantique).
Ordonné prêtre le 29 juin 1939, il est affecté à la mission de Phnom Penh (Cambodge), mais ne peut rejoindre son poste qu’en 1946, en raison de la guerre.
A son arrivée en mission, il étudie le vietnamien à Cantho (1946-1950).
Rappelé en France pour enseigner au séminaire de Bièvres (1950-1952), il retourne ensuite à Cantho, où il est nommé curé, ainsi que professeur de français au lycée (1952-1956), avant d’être chargé des paroisses de Kompong-Cham (1956-1969) et de Chup (1969-1970).
En 1970, il part pour le Vietnam, nommé responsable de la maison de repos des MEP à Dalat. Il enseigne en même temps le français au séminaire et à l'université.
Expulsé du Vietnam en 1975, il devient curé de Hattigny (Moselle). Il se retire ensuite à Orlienas.
Il meurt le 30 septembre 2004 à Lyon.
Obituary
[3637] CHOIMET Yves (1912-2004)
Notice nécrologique
Yves, Augustin, Marie CHOIMET, fils de Augustin, Émile, Constant Marie et de Yvonne, Julienne, Berthe Chesnay naquit le 27 octobre 1912, à Nantes, département de la Loire Inférieure devenu à présent Loire Atlantique. Le jour même de sa naissance, il reçut le baptême, en l'église paroissiale Saint Pierre à Nantes. La famille dont les parents exerçaient la profession d'employés, comptait quatre enfants, tous des garçons.
Ses études primaires achevées et couronnées par l'obtention du Certificat d'Études, le jeune Yves Choimet entra, en septembre 1925, à l'école Saint Joseph d'Ancenis ; dans cette Institution, où il fut élève jusqu'en juillet 1932, il parcourut le cycle complet des programmes de l'enseignement secondaire et obtint les diplômes du Brevet Élémentaire, et du Baccalauréat complet.
En octobre 1932, il se dirigea vers le grand séminaire de Nantes où, selon le témoignage du Supérieur de cette maison, il passa "trois années, au cours desquelles il a fait complètement ses études de philosophie et de théologie fondamentale." En 1934-35, celles-ci furent interrompues par l'appel sous les drapeaux et son affectation dans un régiment d'artillerie, à Nantes. Son temps de service militaire accompli, il regagna le grand séminaire diocésain, en vue de continuer sa formation sacerdotale.
Le 8 juillet 1936, depuis Nantes, M. Yves Choimet adressait au Supérieur Général de la Société des Missions Étrangères, la lettre de demande suivante : .." Depuis longtemps, je me sens appelé à être missionnaire et je viens d'obtenir enfin le consentement de maman. Mon père est mort il y a douze ans. Je viens donc vous demander de bien vouloir m'admettre comme aspirant à la Société des Missions Étrangères. J'ai achevé l'an dernier mon service militaire et je viens de terminer au Grand Séminaire de Nantes ma troisième année (Apologétique et Morale fondamentale). Mon directeur spirituel et Monsieur le Supérieur me donnent toute permission de vous formuler ma demande. Monseigneur Gaillard administrateur du diocèse, à qui, sur le conseil de Monsieur le Supérieur, j'ai fait connaître mon dessein, ne s'y oppose en aucune manière, quoiqu'il ait jugé plus simple de ne pas me conférer la première tonsure, à laquelle j'étais appelé, à la dernière ordination…."
Dans sa lettre du 10 juillet 1936, Monsieur le Supérieur du Grand séminaire de Nantes consulté, écrivait au sujet de son séminariste :…" Libre vis-à-vis de sa famille, c'est de son plein gré qu'il quitte le séminaire pour suivre un attrait qui semble sérieux. Monsieur Choimet nous a toujours donné satisfaction par sa régularité, sa docilité, sa piété, son application à l'étude…" Admis comme "aspirant" le 11 juillet 1936, cette année là, sous le N° 21, M. Yves Choimet entra au séminaire des Missions Étrangères, le 18 septembre 1936. Il y continua ses études théologiques et commença sa première formation missionnaire.
Le 4 juillet 1937, dans la chapelle du séminaire, M. Yves Choimet était tonsuré par Mgr. Georges de Jonghe d'Ardoye ; quelques temps après, il recevait les ordres mineurs. Sous-diacre le 29 juin 1938, il fut ordonné diacre par Mgr. Ange-Marie Gouin, vicaire apostolique du Laos, le 24 décembre 1938. Le 29 juin 1939, Mgr. Georges de Jonghe d'Ardoye venu en avion de Bagdad à Paris conférait le sacerdoce, en la chapelle du séminaire à 14 nouveaux prêtres. M. Yves Choimet était du nombre. Au soir de cette même journée, il recevait du Supérieur Général de la Société, sa destination pour le service du vicariat apostolique de Phnompenh, au Cambodge.
Mais, le 3 septembre 1939, débutait la seconde guerre mondiale. Au lieu de prendre le bateau à Marseille, le 12 septembre 1939, comme cela avait été programmé au soir de leur ordination sacerdotale, les jeunes partants de septembre 1939 étaient rappelés sous les drapeaux, et regagnaient leurs unités. Le 15 septembre 1939, M. Yves Choimet et ses confères d'ordination mobilisés étaient agrégés temporairement à la Société des Missions Étrangères.
Et ce fut la "drôle de guerre" ! Lors des évènements militaires de mai -juin 1940, et de l'effondrement de la France, beaucoup de combattants malchanceux se retrouvèrent prisonniers de guerre, d'autres, en application des conventions d'armistice franco-allemand et franco-italien du 25 juin 1940, furent démobilisés et renvoyés dans leurs foyers, la France étant contrainte à déposer les armes. Ainsi, en août 1940, M. Yves Choimet se trouvait en instance de démobilisation. Rendu à la vie civile, et en attendant le jour de son départ en mission, le conflit mondial le rendant impossible, il reçut une destination provisoire. Avec deux autres jeunes confrères "partants", MM. Donation Béliard et Louis Lagrange, il fut adjoint au corps professoral du Petit Séminaire Théophane Vénard à Beaupréau, dans le Maine et Loire. Le 26 septembre 1940, comme récompense de leurs services, les jeunes partants employés comme professeurs, à titre temporaire, dans les deux maisons de formation des Missions Étrangères, à Beaupréau et à Ménil-Flin, furent inscrits comme membres de la Société.
A Beaupréau, après quelques mois d'occupation de la maison, les troupes allemandes évacuèrent le petit séminaire Théophane Vénard, le 25 septembre 1940. Il devint alors possible d'envisager sans tarder, la reprise des cours pour une nouvelle année scolaire qui commença le 1er octobre 1940. M. Yves Choimet enseigna à Beaupréau, de septembre 1940 à juillet 1946. Arrivait enfin le jour de "prendre le bateau".
Le 14 septembre 1946, M. Yves Choimet quittait Paris pour s'embarquer à Marseille afin de rejoindre sa mission. Jeune missionnaire de l'après-guerre, il fut accueilli avec grande joie par les confrères et par Mgr. Jean-Baptiste Chabalier, vicaire apostolique de Phnompenh, depuis 1937. Il attendait depuis si longtemps des jeunes missionnaires. Son vaste vicariat englobait alors tout le royaume du Cambodge et plusieurs provinces de la Basse Cochinchine. Mais, le chef de la mission, en cette période troublée, exerçait sa charge pastorale dans des conditions vraiment difficiles.
Le compte rendu de 1941-47 en relate les principales : …"Les premiers japonais arrivèrent à Pnompenh en juillet 1940….Il fallut leur céder tous les bâtiments construits en briques ; l'ancien grand séminaire, les écoles Miche, et Saint-Pierre furent réquisitionnées…A la fin de 1940, ce fut l'attaque des provinces de Battambang et Siemréap par les Siamois qui imposèrent à toute la population le régime du bouddhisme, s'emparèrent de nos écoles, nous obligèrent à avoir des maîtres de leur choix et à suivre leur méthode d'éducation…." Puis, dans toute la fédération Indochinoise, le coup de force japonais du 9 mars 1945, entraîna le regroupement des étrangers dans des camps d'internement,puis la résidence surveillée et imposée des missionnaires dans leur presbytère, et la prise du pouvoir par les éléments révolutionnaires Vietminh. Le 22 août 1945, M. Pierre - Marie David était massacré à Kratié.
Et le vicaire apostolique de continuer :…"Le mois de septembre 1945 fut le commencement de notre calvaire dans la partie cochinchinoise de la Mission"…Le petit séminaire établi dans cette partie de la mission fut incendié par les "Vietminh" et "nos confrères furent alors amenés d'abord à Long-Xuyen, puis à Chaudôc où ils eurent à subir les pires avanies. Quelques jours plus tard, sur l'ordre des Alliés, les japonais les conduisirent tous au presbytère de Cantho, où ils furent gardés jusqu'à la libération de la ville par les Français, le 29 octobre 1945...Durant les mois de mars et d'avril 1946, les assassinats se multiplièrent d'une façon effrayante…" Lors de ces bouleversements politiques, plusieurs religieuses, prêtres vietnamiens, notables de chrétientés périrent de mort violente.
En octobre 1946, pour débuter dans l'étude de la langue vietnamienne et faire sa première formation pastorale, Mgr J.B Chabalier envoya M. Yves Choimet dans la partie cochinchinoise de son vicariat, dans la ville de Cantho, chef lieu de province, capitale de l'Ouest cochinchinois, auprès de M. Yves Quimbrot, curé de cette paroisse depuis 1940. Non sans connaître quelques ennuis crées par les évènements , celui-ci avait été le seul des missionnaires de Basse Cochinchine qui, en 1945-46, avait pu rester chez lui. C'était chez lui que les japonais avaient gardé, après les avoir soustraits aux mains des "Vietminh", dix missionnaires français et huit religieuses, en septembre 1945.
Après un temps d'initiation, puis de pratique de la langue vietnamienne, M. Yves Choimet fut nommé vicaire de la paroisse de Cantho. Son curé, rempli d'une longue expérience du pays, lui confia une part du ministère paroissial, et s'appliqua à le mettre en contact avec la communauté chrétienne et la population vietnamienne de la région. Cependant, la sécurité n'était pas parfaite à Cantho, ainsi que le relate de chroniqueur de la Mission de Phnompenh, dans le Bulletin des Missions Étrangères de Novembre 1949 :…" Le Père Choimet est de Nantes, et Nantes est au pays des Chouans. Un soir donc du début de l'année [1949], le Père Quimbrot et lui, ayant fait un tour dans leur bonne ville de Cantho,-où une grenade éclate de temps à autre inopinément- s'en revenaient au presbytère à la nuit tombante. Soudain surgissent de l'ombre quatre énergumènes qui se précipitent sur les Pères avec des intentions non douteuses. Mais voici qu'une canne, menée par une main vigoureuse, arrête leur élan et trouble leur courage. Avant de fuir cependant, les sicaires –car c'en était- déchargèrent leurs révolvers. Le Père Quimbrot en fut quitte pour l'émotion. Le Père Choimet fut atteint plusieurs fois au bras. La blessure était sérieuse, il fallut une intervention chirurgicale puis le plâtre. Cela a duré plusieurs mois, et maintenant encore la poignée de main est moins forte qu'elle ne l'était autrefois. Mais oncques le moral ne fut atteint, et il demeure intact au milieu d'un ministère parfois difficile…"
M. Yves Quimbrot avait passé quarante-cinq années consécutives au service des chrétientés de Basse Cochinchine ; les changements et les troubles politiques, l'insécurité de la région, la guérilla intermitente, la situation de persécution contre les chrétiens engendrée par le mouvement révolutionnaire "Vietminh", avaient ébranlé sa santé. Il se résigna à demander au pays natal un regain de jouvence. Il confia sa paroisse à son jeune vicaire qui, de janvier 1949 à juillet 1950, en devint curé intérimaire. Pour l'aider dans son ministère, le jeune curé "pour un temps" reçut l'assistance de M. Jean Vuillemin, qui fit là, sous sa direction, ses premiers pas dans l'étude de la langue vietnamienne et les débuts de sa formation pastorale.
Le 1er août 1950, s'ouvrit au séminaire de l'Immaculée Conception à Bièvres, la première Assemblée Générale d'après guerre de la Société des Missions Étrangères. M. Georges Cussac, directeur en cette maison de formation missionnaire, fut élu 2ème assistant du Supérieur Général. Pour le remplacer, au cours de sa première séance tenue le 23 août 1950, le Conseil central rappela du Cambodge M. Yves Choimet pour exercer les fonctions de directeur et professeur en cette maison de Bièvres.
En juin 1952, l'année scolaire terminée, celui-ci exprima le désir de rejoindre sa mission du Cambodge. Sa demande ayant été acceptée, il remit sa chaire d'enseignant et sa charge de directeur à M. Alfred Barthod, de la mission de Chengtu. Le 10 novembre 1952, il embarquait à Marseille à bord du paquebot "La Marseillaise" pour gagner Phnompenh. Heureux de son retour, son évêque l'envoya de nouveau en Basse Cochinchine, à Cantho. Après son professorat de deux ans à Bièvres, il se retrouvait chez lui en compagnie de son curé M. Yves Quimbrot. Celui-ci lui passa sans retard les rênes du gouvernement du presbytère, de la paroisse et du district.
M. Yves Quimbrot avait bâti une église dans la chrétienté de Phung-Diên ; lors des évènements de 1945, les révolutionnaires "Vietminh" avaient occupé ce lieu de culte, l'avaient incendié et en avaient jeté les briques au fleuve. En 1953, M. Yves Choimet se fit bâtisseur ; il releva les ruines de cette modeste annexe paroissiale. Cette même année, il invita Mgr. Chabalier à venir bénir les locaux de la nouvelle chrétienté de Phung-Hiêp comprenant chapelle, maison d'habitation, école, le tout don généreux d'un Français. En plus de son travail pastoral ordinaire, et pour un meilleur contact avec les jeunes, il se fit professeur de français au Lycée Phan-thanh-Giang de Cantho.
En 1953, M. Noël Grannec de la mission de Hanoï tomba malade, et vint en convalescence à Dalat, ville d'altitude sur les Hauts-Plateaux du Sud Viêtnam, située alors dans le territoire du vicariat apostolique de Saïgon. Sa santé rétablie, les évènements de 1954 l'empêchèrent de rejoindre sa mission d'origine ; il reçut une nouvelle destination et il fut envoyé au Cambodge à Cantho où il devint le socius de M.Yves Choimet,
L'année 1954 était une année mariale. Elle fut aussi celle de la chute du camp retranché de Dien-biên-Phu, le 7 mai 1954. La première guerre d'Indochine se terminait par la conclusion des "Accords de Genève", le 20 juillet 1954. Le ViêtNam se trouvait divisé en deux "Républiques", chacune se réclament d'un système politique différent. Une zone démilitarisée, à la hauteur du 17ème parallèle servait de nouvelle frontière entre les deux Etats. Ce partage du Viêt-Nam déclencha un exode important de population du Nord vers le Sud. En raison des conséquences des clauses de ces "Accords de Genève", un très grand nombre d'Européens rentrèrent définitivement dans leur pays d'origine, et de nombreux vietnamiens laissant tout derrière eux, quittèrent par tous les moyens, le territoire de la "République Démocratique du Nord Viêtnam.", pour fuir le régime communiste. Accompagnés de leurs prêtres vietnamiens et de missionnaires, ils furent réimplantés en divers centres du Sud Viêtnam où bien souvent, ils reconstituèrent leurs paroisses d'origine.
En 1955, pour des raisons de santé, Mgr. Jean Cassaigne demandait à Rome l'autorisation d'être déchargé de ses fonctions de vicaire Apostolique de Saïgon. Il exprimait aussi le désir de prendre sa retraite à la léproserie de Djiring qu'il avait lui même fondée dans les premières années de son ministère pastoral dans cette région des Hauts Plateaux du Sud Viêtnam. Le 20 septembre 1955, le Souverain Pontife acceptait cette démission, et permettait à Monseigneur de choisir un lieu de retraite à sa convenance.
Pour lui succéder, le Saint Siège nommait le P. Simon-Hoà Nguyên-van-Hiên, prêtre séculier du vicariat apostolique de Hué, supérieur du collège de la Providence établi en cette ville. A la même date, le Saint Père détachait du vicariat apostolique de Phnompenh les provinces du Sud Viêtnam qui lui étaient rattachées, celles-ci constituant désormais le vicariat apostolique de Cantho. Le P. Paul Nguyên-van-Binh, prêtre séculier du vicariat apostolique de Saïgon, professeur au grand séminaire de Saïgon était nommé vicaire apostolique de cette nouvelle circonscription ecclésiastique, dont la population chrétienne était estimée à 70.000 fidèles environ. Le 30 novembre 1955, les deux nouveaux évêques reçurent la consécration épiscopale, en la cathédrale de Saïgon, des mains de son Excellence Mgr. Pierre Ngô-dinh-Thuc, assisté de Mgr. Jean Cassaigne et de Mgr. Pham-ngoc-Chi . Ainsi, le presbytère de Cantho devenait palais épiscopal. Mr. Yves Choimet remit la charge pastorale de sa paroisse entre les mains d'un prêtre vietnamien ; quant à lui, fixant sa résidence à la maison de retraite des personnes âgées de Cantho, il continua à assurer jusqu'à la fin de l'année scolaire en cours, sa charge de professeur de langue française au Lycée Phan-thanh-Giang de la ville.
En juillet 1956, M. Yves Choimet quitta Cantho, et regagna le vicariat apostolique de Phnompenh. Mgr. Gustave Raballand, nouveau vicaire apostolique, le nomma curé de la paroisse de Kompong-cham et chef de ce district, où il prit la succession de M. Michel Leroux. Il eut aussi en charge pour un temps, le district de Chup, en attendant l'arrivée de M. Noël Grannec, qui, après avoir étudié la langue kmer à Banam, serait nommé curé de cette paroisse en 1958. Dès son arrivée dans son nouveau poste, M. Yves Choimet entreprit la rénovation de son église, la transformation de son presbytère de sorte qu'il y ait une place pour chaque chose et qu'ainsi chaque chose soit à sa place. Une léproserie était établie dans une de ses stations voisines. Ses nombreuses dessertes à visiter l'éloignaient de Kompong-cham une vingtaine de jours par mois.
Avec l'indépendance du royaume kmer, progressivement, commença "la kmérisation" de l'enseignement. La situation des écoles sembla se stabiliser vers 1960. L'étude de la langue nationale devint primordiale dans toutes les écoles primaires. Pas de changement pour les écoles d'enseignement français rattachées à la Mission Culturelle Française. Quant aux établissements scolaires avec programme vietnamien, ils ne furent autorisées à exister que sous la forme d'écoles dites "de catéchisme" ; en plus des cours de religion, seul l'enseignement de la lecture et de l'écriture y était autorisé. En créer, était relativement facile. Une simple déclaration aux autorités provinciales suffisait pour en obtenir l'ouverture. Mais, pour continuer leurs études, les élèves vietnamiens devaient fréquenter les écoles kmers ou bien les collèges et lycées publics ou privés francophones dans la capitale ou en province.
M. Yves Choimet, ancien professeur, estimait que l'enseignement et l'éducation de la jeunesse si désireuse de s'instruire était une priorité pastorale. En 1960, à Kompong-cham, quatre Frères de la Sainte Famille de Banam avaient la responsabilité de l'école des garçons. Trois religieuses de la Providence de Portieux ouvraient, cette année là, une école de filles. Quant à lui, sans difficulté particulière, il mettait en route,au cours de l'année, trois "écoles de catéchisme", mais c'était "ad tempus", car il devait compter avec le nombre insuffisant du personnel enseignant.
En mai 1958, M. Joseph Vulliez, était arrivé au terme de son mandat de Supérieur de la communauté missionnaire de Phnompenh ; il était nommé consulteur du Supérieur de la Région Sud Indochine. M. Yves Choimet fut choisi pour le remplacer. Tout en gardant sa charge de curé et de chef du district de Kompong-cham, il fut un supérieur local attentif à chacun. Sa maison était grande ouverte pour tous les confrères de passage et il savait recevoir. Il exerça cette charge jusqu'en mai 1961. Il la remit alors entre les mains de M.André Lesouëf, ancien supérieur du Grand Séminaire de Saïgon. Celui-ci venait d'être libéré de cette fonction, car la direction de cette maison venait d'être transférée au clergé séculier vietnamien. Plus tard, le 3 janvier 1967, le Supérieur Général de la Société détacha la Communauté missionnaire de Phnompenh de la région Sud Viêtnam et l'érigea en Région missionnaire du Cambodge, Le 20 juin 1967, M. François Claudel était nommé premier Régional du Cambodge. Les communications et les rapports entre les deux pays étaient devenus plus difficiles.
Après un congé en France, du 13 mars 1961 au 8 septembre 1961, M. Yves Choimet reprit son travail pastoral à Kompong-cham.
Indépendant depuis 1953, le royaume du Cambodge, sous la direction du Prince Norodom Sihanouk, se voulait à la fois neutre et socialiste. C'était le seul État de la Péninsule Indochinoise à connaître la sécurité intérieure, alors que les pays voisins, Laos et surtout Viêtnam, étaient ravagés par la guerre. On pouvait, en effet, s'y promener sans incident, de jour ou de nuit, en ville comme en brousse. Cette situation fut favorable au développement du pays. En même temps que grandissaient les œuvres d'enseignement, cette paix appuyée par l'aide extérieure, permettait aussi une remarquable expansion économique. Des travaux d'infrastructure et d'embellissement étaient entrepris dans la capitale et dans les villes importantes du royaume. Un effort notable était fait pour intensifier, diversifier, développer les diverses cultures, et pour mettre en valeur des terrains en friche, sans oublier la pêche sur les grands lacs et l'exploitation des forêts. Des coopératives étaient crées. Les plantations d'hévéa et la production de caoutchouc tenaient le deuxième rang après la riziculture. En 1963, Kompong-cham ville située au centre de gravité d'une province très peuplée se classait en tête des producteurs de coton. Elle présentait l'avantage d'être à la fois desservie par eau et par route. C'est pourquoi, elle fut choisie par les spécialistes chinois et les techniciens cambodgiens pour l'implantation d'une usine de textile construite avec l'aide chinoise.
Depuis de nombreuses années, deux fortes minorités étrangères étaient implantées au Cambodge. En 1961, on comptait dans le pays, environ 250.000 vietnamiens et quelques 220.000 chinois. A la même époque; le nombre total des catholiques était estimé 54.108 fidèles, répartis dans 84 paroisses. Soixante écoles catholiques dispensaient instruction et éducation à 12.178 élèves. En 1964, la situation politique du royaume et les orientations nouvelles données par le concile Vatican II, invitaient à une réflexion approfondie sur l'apostolat missionnaire auprès du monde kmer. Dans le passé, un nombre important de missionnaires avaient travaillé dans les provinces du Sud Viêtnam ; les résultats obtenus venaient de donner naissance aux deux nouveaux diocèses vietnamiens de Cantho d'abord, et de Longxuyên ensuite.
Dans le présent, amputée de sa partie située en pays vietnamien, la mission de Phnompenh se devait de repenser son apostolat en fonction de son nouveau territoire et de la culture propre au peuple kmer. Au Cambodge, les relations entre l'Église et l'État étaient bonnes. Cependant, la majorité des chrétiens demeurant au Cambodge, en ce temps là, étaient d'origine vietnamienne. Les uns vivaient dans la capitale où ils avaient leur paroisse, leurs écoles, les autres établis dans les villes importantes du royaume et dans des villages mixtes situés principalement sur la frontière est du pays, s'exprimant et priant dans leur langue maternelle. Ainsi, en 1965, la ville de Kompong-cham ne comptait guère plus de 260 chrétiens ; mais M. Yves Choimet, chef de ce grand district, avait en charge cinq autres chrétientés totalisant 1.550 fidèles, et dans lesquelles il venait d'ouvrir trois nouvelles écoles de catéchisme. Au cours des années à venir, les évènements aidant, un gros et progressif effort d'insertion va être entrepris pour rendre l'Église catholique réellement présente dans le monde kmer.
En 1968, par division de son vaste territoire, le vicariat apostolique de Phnompenh confié à Mgr.Yves Ramousse, depuis 1963, donnait naissance à deux Préfectures apostoliques. La première, remise aux soins du clergé autochtone, sous la conduite pastorale de Mgr. Paul Tep-Im-Sotha, avait son siège en la ville de Battambang, à l'ouest du royaume. La seconde avait pour centre la ville de Kompong-cham, à l'est du pays. Mgr. André Lesouëf, provicaire à Phnompenh, en devenait le premier Préfet Apostolique. De ce fait, M. Yves Choimet était incardiné à cette nouvelle circonscription ecclésiastique
A la fin du mois de janvier 1970, M. Yves Choimet quittait Kompong-cham et était nommé curé de Chup, centre important de plantations d'hévéas de la région. Il y prenait la succession de M.Noël Grannec, qui s'en allait prendre en charge la paroisse de Vinh-loi. Mais l'activité pastorale de M. Yves Choimet dans ce district fut de courte durée, en raison des graves évènements politiques qui allaient secouer le Cambodge.
Le 11 mars 1970, dans la capitale du royaume, des manifestations anti viêtcong se transformèrent en opposition violente à tout ce qui était vietnamien, et plus particulièrement chrétien. Des éléments "incontrôlés" saccagèrent le quartier vietnamien de la ville, l'église St. Joseph et son presbytère, et le lendemain l'église de Russeykeo. Dans la Préfecture Apostolique de Kompong-cham des groupes de lycéens vandalisèrent deux églises : celle de Kompong-Trabêk, le 17 mars 1970, et le lendemain, celle de Neak-Loeung, proche de la frontière vietnamienne. Le 18 mars 1970, le prince Norodom Sihanouk, chef de l'Etat, était renversé. En plus de son autoritarisme, et de sa politique économique jugée mauvaise, on lui reprochait sa trop grande sympathie envers les Vietcong et les Nord-Vietnamiens devenus envahissants. Ces derniers avaient installé; en plusieurs points du territoire kmer, des "sanctuaires" qui servaient bases de départ pour des opérations militaires contre le Sud Viêtnam. Le Cambodge faisait ainsi son entrée dans la guerre, attirant de la part de ses adversaires bombardements et opérations militaires sur ses frontières.
Ces manifestations dans la capitale et les villes importantes du royaume entraînèrent le massacre et l'arrestation de plusieurs centaines de vietnamiens ; plusieurs dizaines de milliers se trouvèrent regroupés dans des cantonnements, en vue de leur protection et en attendant leur rapatriement dans leur pays d'origine. La Mission de Phnompenh mit très largement ses locaux à leur disposition, les aidant généreusement et grand dévouement, à la fois au plan matériel, humain et spirituel.
Le compte-rendu de 1970 nous rapporte succinctement la situation à Chup, et les décisions prises : .."… Le 24 mai [1970], l'armée sud-vietnamienne occupe la plantation de Chup et transporte dans ses véhicules et dans les camions de la plantation tous les vietnamiens qui veulent partir. Le P. Choimet et les Sœurs, eux, sont conduits par hélicoptère à Kongpong-cham.." Et du 24 mai jusqu'à la fin du mois d'août 1970, M. Yves Choimet fut l'hôte de Mgr. André Lesouëf à Kompong-cham, puis il gagna le Sud Viêtnam, où pendant six mois, il redevint professeur de français à l'Abbaye trappiste de Phuc-Son, à 17 kms de Saïgon, en direction de Honaï .
Son enseignement à la Trappe résigné, il fut nommé économe de la maison régionale des Missions Étrangères, à Dalat. Sa mission consistait à accueillir et aider des jeunes missionnaires étudiants en langue vietnamienne, ainsi que les confrères venus se reposer dans cette ville calme des Hauts Plateaux du Sud Viêtnam, à 1500 mètres d'altitude. Mais on connut rapidement les services antérieurs et les qualités pédagogiques de M. Yves Choimet. Celui-ci fut heureux de mettre sa culture et ses compétences au service des Petit et Grand Séminaire diocésain, de l'Université Catholique implantée à Dalat, et de l'Alliance Française de la ville, en leur assurant des cours de langue et de civilisation française. Afin de mieux remplir sa tâche de professeur grâce à l'utilisation des nouveaux moyens pédagogiques, il suivit une formation en ce domaine, et il obtint son Diplôme audio-visuel pour l'enseignement.
Au début du mois de mars 1975, à partir de Banméthuôt, ville des Hauts-Plateaux servant de point de départ, les troupes communistes du Nord Viêtnam lancèrent leur dernière attaque vigoureuse contre l'armée du Sud Viêtnam. Il s'en suivit un exode massif des populations désemparées et démoralisées vers les villes, espérant y trouver la sécurité. Mais successivement et très vite, ces villes importantes du pays et les chefs-lieux de province, après un temps assez court de résistance, passèrent sous contrôle communiste. Saïgon, la capitale du Sud Viêtnam tomba entre leurs mains le 30 avril 1975. Avec d'autres confrères, M. Yves Choimet quitta Dalat en direction de Nhatrang, vers le 21 mars 1975, puis gagna la maison régionale à Saïgon. Le 26 avril 1975, il arrivait à Paris.
De retour en France, au hasard d'une visite dans sa famille à Heming, en Lorraine, un curé ami mit M. Yves Choimet en relation avec Mgr. Schmitt, évêque de Metz. Celui-ci lui proposa un poste de curé dans son diocèse, et le nomma à la tête de la paroisse de Hattigny (Moselle), à quelques 90 Kms au sud est de Metz, et vicaire économe de deux petits villages voisins. A l'un de ses amis, il confiera qu'il n'avait jamais regretté ce choix. L'Alsace-Lorraine étant sous le régime du concordat, pour raison d'âge, il quitta cette paroisse, et le pays lorrain. Le 1eraoût 1986, il prit sa retraite dans un appartement proche du cabinet médical de l'un de ses neveux à Orliénas, un bourg d'environ 2.000 habitants, à une trentaine de kms au sud ouest de Lyon, dans le département du Rhône.
M. Yves Choimet voulut avoir une retraite active. Avec dévouement, et pendant de nombreuses années, il se mit alors à la disposition du clergé local jusqu'au jour où, en 2000, les paroisses du secteur furent regroupées en un ensemble pastoral, avec de nouvelles structures. De ce fait, il se trouvait dégagé du ministère pastoral, mais il n'avait pas le temps de s'ennuyer, comme en témoigne, au jour de sa sépulture, le délégué pour la diaspora : "Homme cultivé, il consacre alors le plus clair de son temps à la lecture, à la méditation d'œuvres historiques et philosophiques. …Homme de prière, il se souvient qu'un missionnaire a épousé sa terre de mission, et qu'au Cambodge, l'Église a été anéantie au cours du génocide.."
Les ennuis sérieux de santé débutèrent vers Noël 1999 . En résumé :… "Il se trouve bloqué dans un super marché de Givors, sans pouvoir bouger. Le sang refuse de circuler dans sa jambe droite : intervention, longue anesthésie, réveil pénible, arthrite, puis embolie pulmonaire, pontage des vaisseaux de la jambe droite et enfin amputation."
M. Yves Choimet rendit son âme à Dieu, à l'hôpital Antoine Charrial de Francheville, le 30 septembre 2004 ; ses obsèques furent célébrées le mercredi 6 octobre 2004, à 15h00 en l'église d'Orliénas. Il fut inhumé dans le cimetière de village du lyonnais.