François GODEST1922 - 2005
- Status : Prêtre
- Identifier : 3768
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- India
- Mission area :
- 1947 - 2005 (Mysore)
Biography
[3768] GODEST François est né le 26 décembre 1922 à la Chapelle-Neuve (Côtes-d’Armor).
Ordonné prêtre le 21 décembre 1946, il part le 23 décembre 1947 pour la mission de Mysore (Inde).
Après l’étude de la langue, il est nommé professeur au séminaire Saint-Pierre de Bangalore (1948-1951), vicaire à Kodiveri (1952), curé de cette même paroisse (1952-1954), puis curé de Cowdalli et Thomayarpalayam (1954-1967), d’Ottertotti (1967-1989), de Martalli (1989-1992), d’Odakapallam dans le district de Chamarajanagar (1992- ???).
Il meurt le 17 septembre 2005 dans sa mission.
Obituary
Père François GODEST
(1922 – 2005)
« La vocation est don et mystère »
Cette phrase reprise du pape Jean-Paul II est ce qu’écrivait François Godest au début de « Souvenirs d’une longue vie missionnaire » en août 2001. Il avait rédigé ces quelques pages à la demande de son frère Léon qui pensait qu’elles intéresseraient plus d’un de ses neveux et petits neveux.
« Je suis né à Kermoruet, petite ferme sise en Chapelle-Neuve (Côtes d’Armor) le 26 décembre 1922, à une heure du matin, d’après ce qu’a dit ma mère et j’ai été baptisé le soir du même jour dans l’église Notre Dame de Pitié. Mon parrain fut mon oncle maternel François Nédélec. Ma marraine fut une cousine germaine Françoise Lavenant qui avait tout juste 16 ans. Mon parrain est mort du temps où j’étais au séminaire, rue du Bac. En cette année 2001, j’ai la joie d’avoir encore ma marraine qui aura 95 ans en décembre. »
Les parents Godest s’installent en septembre 1924 à Langam. Ils avaient alors 6 enfants. Trois autres y naîtront ; « nous étions donc une famille nombreuse, du temps où il n’y avait pas d’allocations familiales. Nos parents ont beaucoup peiné pour nous élever… en ces années-là, la situation des fermes bretonnes n’était pas réjouissante : des loyers très hauts, des rendements faibles faute d’engrais, des prix très bas et un travail très pénible. Ajouter à cela que dans la ferme de Langam, le bétail subit beaucoup de pertes. Cependant la ferme nous a toujours fourni pain, beurre, lard, et pommes de terre à volonté. Je remercie Dieu de m’avoir fait naître dans une famille très chrétienne qui gardait le souvenir de notre oncle missionnaire Jean-Marie Godest, mort en 1915 ».
François fait ses études primaires à Loguivy-Plougras de 1929 à 1934. C’était une école « libre » dirigée par l’abbé Coupin, aidé de 2 autres prêtres, pour une trentaine de garçons. « Cela voulait dire un trajet de 4 kilomètres à faire à pied, chaque matin, en sabots de bois, pour se rendre à l’école et autant le soir pour revenir. C’était une route empierrée sur laquelle j’ai usé bien des sabots. Nous étions en demie pension, si bien que nous mangions à l’école le midi. En 1932, un missionnaire est entré dans la salle de classe et a demandé qui voulait être missionnaire. J’ai levé la main et d’autres garçons aussi. Ce missionnaire est revenu quelques semaines plus tard et a posé la même question et cette fois-ci, j’étais le seul à lever la main. Comment savais-je que j’étais appelé aux missions ? Je n’avais entendu aucune voix. Je n’éprouvais pas le moindre enthousiasme et pourtant je savais avec certitude que j’étais appelé… Ce missionnaire Spiritain venant de Langonnet est donc venu trouver mes parents en vue de mon admission dans leur séminaire. Les parents voulaient bien mais n’avaient pas les moyens de payer ce qu’il demandait pour mes études. Sinon je serai allé en Afrique mais le Seigneur me voulait ailleurs. »
François fait sa 1ère communion dans l’église Saint Emilion en 1932. Dans la même église, il est confirmé par Mgr Serrand, Evêque de St Brieux et Tréguier. En 1934, il obtient le certificat d’études primaires (Etat) et le diplôme des mêmes études, conféré par l’enseignement diocésain.
« Après mes vacances d’été (1934) je suis dirigé sur l’institution St Joseph à Lannion. Je n’étais pour rien dans ce choix, ni mes parents non plus. L’abbé Tréguier avait pris contact avec le recruteur des Missions Etrangères de Paris qui était le père Paul Audren. Ce sont les Missions Etrangères qui ont payé à St Jo où j’ai étudié trois ans, obtenant le deuxième prix d’excellence à la fin de la 6ème, 5ème et 4ème ». De 1937 à 1941, François étudie au petit séminaire des Missions Etrangères à Beaupréau, à mi-chemin entre Nantes et Angers. « Ces 4 années au ‘Pinier’ m’ont laissé un excellent souvenir. Nos professeurs étaient des missionnaires rappelés en France pour préparer les futurs missionnaires. Ils nous ont formé à la piété et pour la 1ère fois de ma vie, j’ai eu un directeur de conscience. Il s’appelait le père Lassalmonie. Nous étions 37 en classe de troisième. Ce fut la classe la plus nombreuse de toute l’histoire au ‘Pinier’. Pour venir en congé, je prenais dans l’après-midi, le ‘tacot’ un petit train pour arriver à Nantes, dans la soirée, le train nous amenait à Rennes où, après minuit, un train venant de Paris me déposait à Plouaret. Là, je prenais l’autocar du matin pour Longuivy, pour terminer par une marche jusqu’à Langam. Les temps sont bien changés ! ».
La 2de guerre mondiale arrive en septembre 1939. Une partie du séminaire de Beaupréau devient hôpital militaire. Au moment de l’armistice (juin 1940) François est à la ferme en train de faire les foins quand arrivent de Vannes, ses frères Marcel et Emile qui y faisaient leur service militaire. Ils avaient pris la clef des champs, évitant ainsi de se faire cueillir par les troupes allemandes et 5 ans de captivité ! En octobre, les classes continuent à Beaupréau, « pour moi, c’était mon année de philosophie couronné par le deuxième baccalauréat passé à Cholet avec la mention bien. C’est à Lannion que j’avais passé le premier bachot et décroché aussi la mention bien ».
Au début d’octobre 1941, un après-midi, il débarque au 128, rue du Bac pour 6 ans d’études à Paris. « Je suis allé m’inscrire auprès du père Paul Destombes, supérieur du séminaire. C’est l’ordre d’inscription (N° 3768) qui détermine notre place à la chapelle, à la salle des exercices, au réfectoire pendant toute la durée du séminaire. Ainsi, un Nantais Jean Nouet est venu s’inscrire après moi… J’étais jeune et solide et j’ai bien dormi la première nuit. Quand je me suis levé, il faisait grand jour. Il n’y avait aucun bruit dans le couloir. Je suis descendu au rez de chaussée. Les Aspirants avaient déjà fait une demie heure de méditation, assisté à la messe. Ils se rendaient au réfectoire pour le petit déjeuner ! Notre séminaire était connu de toute la France, comme « l’école polytechnique du martyre » (Mgr Dupanloup). Les souvenirs des martyrs sont conservés dans une salle que nous visitions chaque matin. Le plus célèbre est St Théophane Vénard, le saint préféré de Ste Thérèse de l’Enfant-Jésus. Notre séminaire avait une atmosphère bien spéciale que j’aimais beaucoup… »
De 1941 à 1944, c’est l’occupation allemande à Paris. La France est divisée par la ligne de démarcation. Les esprits sont aussi divisées ! Les uns sont pour le gouvernement de Vichy, pour le maréchal Pétain, le héros de Verdun. D’autres suivant l’appel du Général de Gaulle s’engagent dans la Résistance. Plusieurs Aspirants ‘mep’ passent la ligne de démarcation, les Pyrénées pour s’engager dans les ‘Forces Françaises Libres’, via l’Espagne et le Portugal. Ils échappent ainsi au service du travail obligatoire en Allemagne. Le père Destombes plein de sagesse et de bon sens laisse la direction à la conscience de chacun.
Tous les Aspirants souffrant du rationnement du pain, de la viande. Les rutabagas remplacent les pommes de terre malgré les efforts du légendaire Père Bibollet et de son sidecar. Les études en souffrent aussi « mais les instructions spirituelles d’un demie heure à la salle des exercices sont un régal avec quelques nouvelles de la B.B.C. » au temps où il était interdit d’écouter radio Londres. En février-mars 1944, François rentre en Bretagne « où j’ai pris 4 kilos en 8 jours ». Retour à Paris après la Libération, pour 3 ans d’études à l’Institut Catholique. Le 21 décembre 1946, c’est l’ordination sacerdotale dans la chapelle des Missions Etrangères : grande joie et actions de grâces des 21 ordinands à qui le Supérieur Général donne leur destination pour les Missions : François Godest et Jean Nouet pour le diocèse de Mysore, Louis Solvignon pour le diocèse de Salem. François partira pour l’Inde, le 23 décembre 1947 ; il y arrivera le 16 janvier suivant.
« Les souvenirs d’une longue vie missionnaire » hélas n’ont jamais été achevés à cause de la maladie et nous avons peu de détails sur sa longue présence en Inde (1948-2005).
François est tout d’abord nommé professeur au Grand séminaire régional St Pierre à Bangalore. En 1948, le Supérieur est le père Bassaistèguy arrivé en Inde en 1926. A cause de la guerre, un long intervalle s’est écoulé entre l’arrivée des missionnaires et il y des tensions entres Anciens et Nouveaux ! François n’enseigne les séminaristes que pendant 3 ans. En janvier 1952, il est nommé vicaire à Peria Kodiveri pour se perfectionner dans la langue tamoule, langue qu’il parlera à la perfection. Son curé est le père Charles Chervier, un homme toujours souriant et d’une patience angélique. Après six mois, François lui succède comme curé ; la paroisse de Peria Kodiveri est fort ancienne, fondée par les Jésuites et St Jean de Britton au 17ème siècle ; les chrétiens y sont fervents mais célèbres pour leur attachement à l’esprit de caste ; trop souvent leurs curés ont eu à souffrir des ‘maniakarar’ chefs du village. Le nouveau curé n’échappa pas à cette épreuve et un soir d’octobre 1955 quitta précipitamment le village pour apaiser le conflit. Ce départ pour Mysore fit que le 1er Evêque du nouveau diocèse d’Ootacamund le considéra comme « persona non grata » bien que François ait pris un soin tout particulier pour les chrétiens Uralis de Gundri, baptisés par le père J.B. Petit. Il resta le reste de sa vie dans le diocèse de Mysore. Mgr René Feuga ‘mep’ le nomma curé de Cowdalli et Thomayarpalayam ; il y travailla pendant 12 ans (1955-1967). Lorsque la paroisse de Martalli fut divisée en trois, il devient curé d’Ottertotti et de Jellipalayam. Pendant 22 ans (1967-1989) il s’efforça d’améliorer le niveau de vie des paroissiens, nouveaux venus dans la région, car ils avaient du quitter terres, maisons, églises lors de la construction du barrage de Mettur sur la rivière Kaveri. François construisit des routes, des maisons, des petits ouvrages pour retenir l’eau des pluies et améliorer les cultures. Il n’oublia pas de bâtir la « maison de Dieu » ; les grilles des fenêtres en fer forgé reproduisent les dessins de la méthode catéchétique dite ‘Bernadette’. Les non-chrétiens n’étaient pas oubliés avec les visites de la Légion de Marie, les retraites charismatiques ; son 1er curé, le père Chervier était son companion et il termina sa vie à Ottertotti en avril 1987.
En août 1989, Mgr François Michellappa le nomme curé de Martalli puis en juillet 1992 curé d’Odakapallam. Son souci principal reste l’annonce de l’Evangile aux non-chrétiens de langue kannada. Des groupes anti-chrétiens l’ont dans leur ‘ligne de mire’ et l’accusent de faire des conversions. Ces persécutions ne découragent pas François. Pendant son congé en 1999 il passe plusieurs semaines en Italie avec la communauté charismatique « Koinonia Giovanni Baptista » communauté internationale de jeunes, hommes et femmes qui consacrent leurs vies à l’Evangélisation. Il y retourna en l’an 2000 et en août 2002. L’année précédente, il avait été menacé d’un ordre d’expulsion par le secrétaire des affaires intérieures de l’Etat du Karnataka.
Grâces à Dieu ; à des amis qui sont intervenus en sa faveur, cet ordre est annulé. Il obtient une prolongation de son permis de séjour. Il organise des sessions d’Evangélisation pour prêtres, religieuses et laïcs à Odakkapallam (2001) Wellington (2003) et dans plusieurs diocèses du Tamil Nadu, avec l’aide du père Pannir Selvam (Salem). Il est aidé par des religieuses, en particulier Sœur Rosita fmm.
Hospitalisé en novembre 2004 pour un cancer de la vessie, François semble avoir surmonté cette épreuve de santé et part en Bretagne en avril 2005. Après son retour en Inde, les docteurs lui découvrent un autre cancer inopérable à la gorge, qui le fait beaucoup souffrir. Sa dernière joie est la pose de la 1ère pierre d’une école d’Evangélisation à Odakkapallam le 27 août par Mgr Thomas Vazhapilly, son Evêque. Il est décédé paisiblement le samedi 17 septembre dans la soirée, à Holdsworth Mission hospital, Mysore. Le 19 septembre au matin la messe des funérailles a eu lieu dans la cathédrale de Mysore, messe présidée par Mgr Vazhapilly entouré d’une cinquantaine de prêtres ; ensuite le corps a été transporté à Odakkapallam selon le désir qu’avait exprimé François, quelques jours avant sa mort. Dans l’après-midi, Mgr Singaroyan , Evêque de Salem a présidé la messe d’enterrement ; plus de 4000 chrétiens venus de Martalli, Ottertotti, Sandanapalayam, Cowdalli, Thomayarpalayam et même du lointain Peria Kodivery y participent. Dans son homélie, Mgr Singaroyan qui connaissait le défunt depuis longtemps a souligné l’exemple d’une vie pauvre : ‘Je ne suis pas venu en Inde pour vivre une vie de confort’. Telle avait été, un jour, la réplique de François. Sa confiance en Dieu était le fruit de son adoration de l’Eucharistie. Les dernières prières en tamoul furent récitées par l’Evêque de Mysore. François est inhumé à côté de l’église, selon son testament.
Une lettre de Sœur Rosita résume bien sa vie : ‘Je connaissais le père Godest depuis 1986, puisqu’il m’avait demandé de donner des retraites à ses paroissiens ; j’ai beaucoup appris de lui, en ce qui concerne la sincérité et le pardon des offenses. Il a beaucoup souffert dans ses paroisses mais il acceptait ces souffrances sans se plaindre. Il avait l’habitude de dire : ‘Que Dieu les bénisse car ils ne savent pas ce qu’ils font. Gardons les dans notre prière et Dieu fera le reste.’ Sa vie a été transformée par le Renouveau charismatique ainsi que la vie de ceux et celles qui avaient des contacts avec lui. Ses dernières paroles ont été : ‘Priez, croyez en l’Evangile, faîtes pénitence’.
Ce témoignage rejoint ce que François écrivait au début de « Souvenirs d’une longue vie missionnaire » :
‘Je désire remercier le Seigneur et sa sainte Mère pour tant de grâces, pour leur protection au milieu de bien des dangers, comme l’émeute du 9 mars 1992 où ma vie fut en danger’.
R. Lefèvre