Gérard MOUSSAY1932 - 2012
- Status : Prêtre
- Identifier : 4052
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Identity
Birth
Death
Biography
[4052] MOUSSAY Gérard est né à Brecé en Mayenne le 16 août 1932. Ordonné prêtre à Laval le 29 juin 1957, il part pour la mission de Nhatrang au Vietnam le 1er octobre 1957.
Vietnam (1957-1975)
Il commence l’étude du vietnamien à Banam, au Cambodge, puis en 1958, il est nommé vicaire à Phuoc-an. Il assure un intérim à Phuoc-thiên, dans la province de Ninh-thuân. En 1959, il remplace son confrère, le P.Joseph Viot, pendant son congé, comme curé de Tan-ly, dans la province de Binh-tuy.
En 1960, il rassemble trois cents familles, originaires du nord-Vietnam, et fonde au milieu de la forêt une nouvelle paroisse à Hiêp-Nghia, puis, en 1965, une autre paroisse à Hiêp-an
En 1968, il est chargé d’ouvrir à Phanrang un centre culturel pour la communauté Cham, où sont accueillis 250 jeunes étudiants. Ce Centre accueille également un groupe de lettrés Cham, qui collectent et étudient les manuscrits anciens. Il ferme en 1975 avec l’arrivée des communistes au pouvoir. Il dirige ce centre jusqu’à la prise du pouvoir par les communistes, date où il est contraint de fermer.
Indonésie (1976-1993)
En 1976, il reçoit une nouvelle affectation pour le diocèse de Pa-dang, en Indonésie. Il étudie l’Indonésien et le Minangkabau en 1976 et 1977, puis l’arabe et l’islamologie à Rome.
Il est vicaire à Bulittinggi, de 1978 à 1981, puis curé de Bukittinggi, de1981 à 1992. Il travaille en même temps sur la langue et la littérature Minangkabau..
Il est ensuite rappelé à Paris comme responsable du service des Archives des MEP à Paris.
France
De 1993 à 2012, il occupe le poste de Conservateur des Archives aux MEP.
Obituary
[4052] MOUSSAY Gérard (1932-2012)
Gérard Moussay était né à Brecé dans la Mayenne, le 16 août 1932, aîné d’une famille de quatre enfants. Ses parents, Lucien Moussay et Georgette Pelouin, étaient agriculteurs.
Baptisé le lendemain dans l’église de Brecé, au diocèse de Laval, il sera confirmé le 13 mai 1944 dans l’église d’une commune voisine, à Gorron. Entré la même année au petit séminaire de Laval, après avoir passé le baccalauréat, à partir de 1951 il poursuivra au grand séminaire du diocèse les études de philosophie et de théologie requises pour la préparation au sacerdoce. En 1952-1953 il fera son service militaire au Ministère de l’Air à Paris, et c’est le 10 août 1954 qu’il écrira à Mgr Lemaire, supérieur général de la Société, pour demander à être admis aux Missions Étrangères. Sa demande ayant été agréée, il entra le 14 septembre 1954 au séminaire de la rue du Bac où il parcourut les étapes qui conduisent à l’ordination : rite d’admission le 29 mai 1955, agrégation temporaire puis définitive à la Société, diaconat le 2 février 1957, avant d’être ordonné prêtre à Laval le 29 juin 1957. Quelques jours auparavant, le 15 juin, il avait reçu sa destination pour la mission de Quinhon-Nhatrang au Vietnam.
Quand Gérard Moussay arrive au Vietnam à l’automne suivant, le vicariat apostolique de Quinhon vient d’être amputé d’une partie de son territoire par la création, le 5 juillet 1957, du nouveau vicariat apostolique de Nhatrang. Le nouveau vicariat comprend les quatre provinces de Khanh-Hoa, Ninh-Thuân, Binh-Thuân, reprise au vicariat apostolique de Saïgon, et Binh-Tuy, récemment détachée administrativement de la province de Binh-Thuân. Mgr Piquet est devenu le premier vicaire apostolique de Nhatrang, un territoire qui compte 94 paroisses pour 72200 chrétiens.
1957-1975
Parti pour Nhatrang le 1 octobre 1957, Gérard Moussay commence l’étude du vietnamien à Banam, au Cambodge, puis en 1958 il est nommé à Phuoc-Thiên et Phuoc-An, vicaire du Père Jeanningros. Il assurera quelque temps l’intérim de ce dernier pendant son congé en France. Ensuite, en 1959, il est désigné pour remplacer, comme curé de Tan-Ly dans la province de Binh-Tuy, le Père Joseph Viot qui va, lui aussi, prendre un congé en France. La paroisse de Tân-Ly était alors entourée de plusieurs paroisses de réfugiés chrétiens du Nord-Vietnam qui avaient émigré et étaient venus habiter dans la région, après les accords de Genève de 1954 qui ont divisé le Vietnam en deux, au nord et au sud du 17ème parallèle. Beaucoup de ces migrants n’avaient trouvé pour s’installer que des terrains en bordure de la mer, un sol sablonneux non exploitable, souvent dans des secteurs malsains. Agriculteurs, ne connaissant pas les métiers de la pêche, les réfugiés voulaient pouvoir vivre de l’exploitation de la terre.
En 1960, une délégation de ces chrétiens vint un jour trouver Gérard Moussay pour lui demander de l’aide. Ils le priaient d’intervenir auprès des autorités administratives et d’obtenir pour eux l’autorisation de s’installer sur des terrains fertiles. Ils voulaient avant tout avoir la possibilité de planter du riz, du maïs et autres plantes potagères, tout spécialement dans la région forestière de Hiêp-Nghia, où on trouve des terrains bien irrigués à la frontière des provinces de Binh-Tuy et de Binnh-Thuân.
Gérard Moussay raconte lui-même : « Je parlais alors de ce projet au chef de province de Binh-Tuy. Il me dit que la création de nouveaux centres de réimplantation ne dépendait pas de sa compétence mais des autorités gouvernementales nationales. Je m’adressais alors directement au président de la république, M. Ngô dinh Diem pour lui soumettre ce projet. Contre toute attente, quelques jours plus tard, nous obtenions l’agrément du gouvernement et le chef de la province de Binh-Tuy était chargé de nous apporter son aide en personnel et en matériel. »
La réponse favorable du président permettait d’envisager l’établissement d’une communauté de réfugiés dans la région de Hiêp-Nghia. Il faudrait bientôt fonder là-bas une paroisse avec eux. C’est pourquoi l’évêque de Nhatrang, Mgr Piquet, qui avait projeté d’envoyer Gérard Moussay à Nhatrang pour étoffer l’équipe des professeurs du petit séminaire, renonça à ce projet et décida de l’affecter durablement au service du secteur de Tan-Ly et Hiêp-Nghia. Gérard Moussay se trouva dès lors partie prenante de tout le travail qui rendit possible l’installation des réfugiés, à la fin de l’année 1960 et au début de l’année 1961, dans la zone où ils voulaient travailler. Il a raconté en détails l’histoire des débuts de la paroisse de Hiêp-Nghia. En lisant son récit on sent poindre l’admiration qu’il avait pour le courage des hommes et des femmes qu’il a vus à l’œuvre au cours de cette période. Le courage, mais aussi la foi : un des premiers soucis des nouveaux arrivants à Hiêp-Nghia fut de construire une église. Dès leur arrivée, les hommes valides s’entendirent pour aller abattre des arbres dans la forêt, faire des colonnes et scier des planches, et au bout de quelques mois la nouvelle paroisse avait son église.
Le village et la paroisse se développent. Le curé parle de l’activité des villageois qui défrichent les terres et se lancent dans l’élevage de bestiaux. Il parle aussi de la Légion de Marie et de ses membres grâce auxquels des nombreux incroyants recevront le baptême. Il parle de la construction d’une école - ce qui avait été un des premiers soucis de la communauté -, de l’établissement d’un dispensaire ouvert chaque matin au presbytère à partir du début de l’année 1962, un service auquel participa pendant un temps le Père Charles Nédélec venu remplacer le père Hirigoyen à Hiêp-Nhia.
Il parle aussi des relations établies avec l’Association internationale des parents adoptifs, qui permirent à plus d’une centaine d’enfants de réfugiés de recevoir des bourses d’étude, certains des bénéficiaires ayant pu plus tard faire des études universitaires.
Pour répondre aux besoins des chrétiens de plus en plus nombreux qui vivaient dans la préfecture de Ham-Tân, il fallut bientôt ouvrir un nouvel ensemble paroissial à la sortie de la préfecture de Ham-Tân. Un ensemble qui comprenait une chapelle, une résidence, une école de couture et une école secondaire.
Le succès de la fondation de la paroisse de Hiêp-Nghia encouragea de nouvelles familles à émigrer dans la province de Binh-Tuy. En 1964 ces familles se regroupèrent au lieu-dit Bau-Gioi entre la mer et la forêt, un lieu où on pouvait cultiver la terre. Ainsi prit naissance une nouvelle paroisse, la paroisse de Hiep-An. Cette année là le Père Nédélec fut appelé à enseigner au séminaire de Nhatrang et c’est le Père Gantier qui vint le remplacer à Hiêp-Nghia, pour assurer également le service des paroissiens pendant le congé de Gérard Moussay en France en 1965.
Pendant son séjour en France le curé put collecter des fonds pour moderniser l’outillage des agriculteurs de la paroisse et favoriser ainsi le développement du secteur. À son retour il acheta un tracteur avec charrue à disques. Un conducteur fut choisi pour faire le service des labours dans les champs et les rizières appartenant aux habitants du village. Ce système permit aux agriculteurs de Hiêp-Nghia de développer leurs exploitations et d’avoir de meilleurs rendements.
À cette époque, outre son ministère paroissial, Gérard Moussay se vit aussi confier la responsabilité des distributions de vivres du Catholic Relief Service pour la province de Binh-Tuy, dans tous les villages pauvres du district, sans distinction d’origine ou de religion. Le travail était singulièrement compliqué parce qu’en beaucoup d’endroits il n’y avait pas de routes pour assurer le transport par camions.
Le 13 avril 1967, Mgr Nguyên-van-Thuân fut nommé évêque du diocèse de Nhatrang, succédant à Mgr Piquet récemment décédé. Après sa consécration épiscopale, il entreprit de faire le tour de son diocèse et, le 24 juin suivant, il vint visiter les paroisses de la province de Binh-Tuy. Comme la paroisse de Hiêp-Nghia était en bon état de marche, Gérard Moussay lui dit être disposé à céder sa place à un prêtre vietnamien, lui-même désirant tenter une nouvelle aventure en allant se mettre au service de la communauté cham. Et c’est ainsi que l’année suivante, quand le calme fut revenu après la grande offensive du Têt, il partit pour Phanrang pour ouvrir un centre culturel chez les Chams.
En s’installant en 1968 à Phanrang, dans la province de Ninh Thuân, Gérard Moussay fait le choix de vivre au milieu d’une minorité ethnique d’origine indonésienne, implantée au Sud-Vietnam et au Cambodge plus d’un millénaire avant l’arrivée des Vietnamiens, qui ne compte encore aucun chrétien. Un choix conforme aux orientations données par l’Assemblée générale de la Société MEP en 1968, qui invitait les missionnaires à se tourner résolument vers les non-chrétiens. Les Chams sont à l’époque environ 40000 dans la région. Ils sont les descendants des habitants de l’ancien royaume du Champa qui a été florissant entre le III° et le XV° siècle, avant d’être anéanti et digéré par les Vietnamiens. Les deux tiers de la population cham pratiquent « une religion qui fut sans doute autrefois le brahmanisme mais les Chams ne gardent plus aujourd’hui qu’un souvenir fort lointain de cette religion venue de l’Inde ». L’autre tiers est composé de Banis qui sont, ainsi appelés, descendants de Chams ayant opté pour l’islam depuis le XIV° ou le XV° siècle. Ces deux communautés ont chacune leurs villages, leur clergé et leurs rites différents. Elles ne se marient pas entre elles mais conservent beaucoup de traditions communes : même calendrier, cérémonies identiques... Une petite partie de cette ethnie se trouve dans le sud-ouest du pays, près de la frontière cambodgienne.
Les Chams avec qui Gérard Moussay a affaire au début lui demandent de fonder un internat. Parmi eux se trouvent quelques lettrés qui réclament son aide pour créer une sorte de centre de documentation pour recueillir et publier si possible des documents qui permettraient de sauver la culture cham. C’est pour faire droit à ces requêtes qu’il entreprend de fonder, grâce à l’aide financière de la Congrégation pour l’Évangélisation des peuples, de Misereor et d’un certain nombre de contributions privées, le Centre Culturel Cham de Phanrang. Le Centre comprend un foyer où prennent pension environ 200 jeunes qui vont suivre des cours dans les écoles secondaires de la ville. À peu près simultanément les sœurs Franciscaines Missionnaires de Marie ont pris en charge l’éducation des jeunes filles, en ouvrant une école ménagère et un internat à leur intention.
Le Centre accueille aussi dès le début un groupe de vieux lettrés qui se mettent à la recherche de manuscrits anciens en langue cham. Le fondateur précise ses intentions :
« Ce centre, première présence de l’Église au milieu d’une minorité ethnique qui ne compte encore aucun chrétien, s’est donné pour premier but de contribuer à la sauvegarde et à l’épanouissement des valeurs culturelles de cette ethnie qui garde la nostalgie de son brillant passé. »
Gérard Moussay doit lui-même travailler dur pour parvenir à maîtriser la langue et se rend bientôt compte de la nécessité de composer un dictionnaire. Il entreprend ce travail avec l’aide d’une dizaine de ces lettrés et le centre pourra publier en 1971 un Dictionnaire Cham-Vietnamien- Français. Un peu plus tard, en 1974, il publiera deux volumes d’archives cham. Le travail des chercheurs avait permis de rédiger 15000 pages de documentation pour préparer une nouvelle édition du dictionnaire quand le Centre Culturel Cham dut être fermé en 1975 avec l’arrivée des communistes au pouvoir. Entre temps Gérard Moussay avait dû retourner en France, d’abord pour subir une intervention chirurgicale, mais aussi pour terminer une étude qui lui permit d’obtenir un diplôme de Maîtrise de la IV° Section de l’École Pratique des Hautes Études. Le retour au Vietnam étant devenu impossible, ce fut un grand sacrifice pour lui de ne pas pouvoir poursuivre avec les Chams son travail de linguiste et de chercheur, un travail auquel il avait pris goût à tel point qu’on disait de lui qu’il était devenu lui-même plus cham que les Chams.
1975-1993
Les missionnaires expulsés ont dû quitter le Vietnam et rentrer en France. La Société MEP propose alors une nouvelle affectation pour un autre pays à ceux dont l’âge et l’état de santé permettent d’envisager un nouveau départ. C’est ainsi qu’en 1976 Gérard Moussay est désigné pour faire partie du groupe de ceux qui iront en Indonésie. Il est affecté au diocèse de Padang sur la côte ouest de l’île de Sumatra. En attendant leur visa les confrères concernés commencent alors l’étude de l’indonésien à Paris même, rue du Bac où des cours intensifs sont organisés pour eux par des professeurs de l’École des Langues Orientales. Gérard Moussay partira à la fin de l’année 1976 pour Padang. Il demandera à résider dans un village de la banlieue de la ville, Barat, où il continuera à étudier la langue nationale indonésienne tout en commençant à s’initier à une langue locale, le minangkabau, parlé par les habitants du secteur dont il sera chargé par la suite. Une parenté lointaine entre ces deux langues et celle des Chams devait jusqu’à un certain point faciliter son travail.
Gérard Moussay était doué pour l’étude des langues, à laquelle il attachait beaucoup d’importance. Il l’avait montré au Vietnam en apprenant le vietnamien et le cham. Arrivé en Indonésie, dont la population est en majorité musulmane, sachant que les Minangs au service desquels il était destiné, avaient “ un vernis” d’arabe, il éprouva le besoin d’aller se perfectionner en arabe. Selon lui « Chaque missionnaire a sa façon de chercher le contact. Moi je pense que la langue est un bon moyen d’aborder les gens... dès qu’ils voient qu’on cherche à étudier leur langue les gens sont toujours très contents. Les relations peuvent devenir très profondes si on maîtrise bien la langue ». En 1978 Il demanda donc à aller suivre des cours d’islamologie et d’arabe à Rome, et c’est seulement après une année scolaire passée à Rome qu’il fut nommé vicaire à Bukittinggi, à 100 kilomètres de Padang, au cœur de la zone culturelle où vivent les Minangs. À partir de 1981 et jusqu’en 1993 il deviendra curé de la paroisse.
Dès le début il dira comment il conçoit son travail de missionnaire. Il ne consacrera pas tout son temps aux quelques chrétiens de la paroisse mais se tournera résolument vers la communauté musulmane, qui représente à peu près 95% de la population du diocèse. Les catholiques, eux, sont bien de nationalité indonésienne mais ils ne sont pas considérés comme des autochtones. 70% des paroissiens de Bukittinggi sont des Chinois pour qui les relations avec les Minangs musulmans sont souvent difficiles. Il faudra leur faire comprendre le devoir qui incombe à leur curé, comme d’ailleurs à l’Église dans son ensemble en Indonésie, d’avoir le souci des musulmans, les non-chrétiens qui les entourent.
Gérard Moussay fera beaucoup d’efforts pour apprendre à connaitre la culture et l’histoire du pays Minang. Très vite il aura des relations avec des professeurs et des intellectuels Minangs dont beaucoup éprouvent le besoin d’entrer en contact avec des chercheurs étrangers et sont très satisfaits qu’on s’intéresse à eux. À peine arrivé il commencera à préparer une grammaire minang. Ce faisant il a conscience d’être fidèle à une tradition de la Société des Missions Étrangères. Au XVIII° et au XIX° siècles certains confrères ont réalisé des travaux remarquables au Vietnam et en Chine, qui se considéraient comme d’authentiques missionnaires. Lui aussi entend faire œuvre missionnaire en étudiant la culture minang. D’ailleurs il ne se limite pas à fréquenter le milieu des intellectuels. Pour s’introduire dans les villages il propose des cours de français aux jeunes qui désirent apprendre la langue de Molière. Bientôt le groupe d’étudiants qu’il aura recrutés comptera soixante jeunes qui viennent deux fois par semaine de leurs villages au centre. Le professeur est invité dans leurs familles : un moyen tout trouvé d’entrer en contact avec le milieu minang. Un peu plus tard il fondera et dirigera pendant un temps l’Alliance française de Bukittinggi, ce qui lui vaudra de recevoir à Djakarta la Médaille du Mérite National, des mains de l’ambassadeur de France en Indonésie.
En 1978 déjà Gérard Moussay a publié un article sur le Développement de l’Islam en pays Minangkabau aux XVII° et XIX° siècles, qui lui vaudra de recevoir de l’École des Hautes-Études en Sciences Sociales un Diplôme d’Études Approfondies.
En 1981 il publiera une étude sur la langue minangkabau dans le Revue Archipel, avant de s’atteler à la composition d’un dictionnaire Minangkabau-Indonésien-Français, en dépouillant systématiquement la presse locale entre 1965 et 1990, dans le but de présenter « la langue minangkabau telle qu’on la parle et telle qu’on l’écrit aujourd’hui ». Un ouvrage qui fait date selon les spécialistes. Ce dictionnaire, fruit d’un long travail poursuivi avec l’aide de collaborateurs et de collaboratrices minangs pendant près de quinze ans, sera publié à Paris en 1995 alors que son auteur était rentré en France.
La grammaire du minangkabau qu’il avait entrepris de composer a été présentée en 1982 pour une thèse qui lui a permis d’obtenir un doctorat d’Histoire et Civilisations à l’École des Hautes-Études en Sciences Sociales.
Alors qu’il est curé en titre de la paroisse de Bukittinggi Gérard Moussay ne peut pas se targuer d’avoir conduit au baptême un seul musulman. À un confrère qui lui demande comment il se situe en tant que missionnaire sans avoir obtenu aucune conversion, il répondra : « Mais j’entre en contact. J’approfondis le contact. Il ne s’agit pas d’une stratégie d’approche mais d’un grand intérêt que j’ai pour eux. À un musulman qui me demandait un jour pourquoi j’étais là, j’ai répondu que je considérais les musulmans comme des frères et que je voulais les aimer. Pour aimer il faut connaitre : voilà pourquoi je suis venu et pourquoi j’apprends à connaitre votre langue et votre culture. »
1993-2012
En 1993 Gérard Moussay est rappelé à Paris par le Père Rossignol, supérieur général de la Société, pour prendre la responsabilité du service des Archives des Missions Étrangères. Son goût pour l’étude et la recherche, l’expérience qu’il avait acquise en exploitant des documents anciens, sa curiosité insatiable le rendaient sans doute particulièrement qualifié pour exercer cette responsabilité. Son ministère au Vietnam d’abord et ensuite en Indonésie l’avait conduit à s’intéresser à l’histoire des missions. Il savait, il avait montré qu’on peut être missionnaire soi-même en accomplissant des tâches administratives. Il entreprit le travail qu’on lui confiait avec le même dynamisme qui l’avait poussé auparavant à se mettre au service des Chams et ensuite au service des Minangkabau.
Le fait est qu’en quelques années il sut moderniser le service des archives au point que certains ont pu parler, peut-être avec quelque exagération, de métamorphose de ce service. Il est vrai que très vite il a su mettre à profit les relations qu’il avait déjà à Paris grâce à ses travaux antérieurs pour intéresser des chercheurs aux richesses contenues dans les archives, un avantage que n’avaient pas toujours eu ses prédécesseurs. C’est ainsi que bientôt et de plus en plus au fil de ans de nombreux étudiants et parmi eux des savants chevronnés sont venus consulter aux archives des documents dont ils avaient besoin pour étayer leurs travaux. L’archiviste avait le don d’accueillir avec une affabilité souriante tous ceux qui se présentaient et savait les orienter dans ce qui pouvait au premier abord paraitre un labyrinthe. Il aida lui-même de nombreuses personnes très diverses dans leurs recherches sur les peuples et les Églises d’Asie. C’était pour lui une manière d’être missionnaire que de mettre les sources dont il disposait à la disposition d’un public élargi pour mieux faire connaître l’œuvre du Seigneur, le Maître de la Mission. Pour certains des visiteurs c’était une révélation d’apprendre que les archives des Missions Étrangères contenaient tant de richesses et étaient accessibles à tous les chercheurs.
Le nouvel archiviste s’efforça aussi, aidé par une petite équipe de collaborateurs et de collaboratrices, d’achever le recensement et d’améliorer le système de classement des documents, cherchant d’autre part à accélérer le travail commencé par ses devanciers pour mieux assurer leur conservation en faisant des copies sur microfilms : plus de deux millions de documents, des récits de voyage, des grammaires et des dictionnaires de la plupart des grandes langues d’Asie composés par les missionnaires, des chroniques, des traités de botanique, et d’innombrables lettres...
Et surtout il entreprit de rééditer, ou de publier en les éditant pour la première fois, certains ouvrages permettant de mieux connaitre l’histoire de la Société des Missions Étrangères. Ainsi la vie de François Pallu par Baudiment, les lettres du même François Pallu ou une nouvelle traduction du De deificatione justorum de Mgr Laneau... Le livre écrit par Madame Françoise Fauconnet-Buzelin sur Mgr Lambert de la Motte doit beaucoup à la documentation qu’il lui a fournie. La célébration en 2008 du 350ème anniversaire de la fondation de la Société fut marquée par une exposition à Paris, et par la publication d’un album illustré sur son histoire, réalisées l’une et l’autre sous sa direction. Il faut évidemment citer, en terminant une énumération qui demeure incomplète, le Répertoire des membres de la Société depuis les origines à nos jours, paru en 2004, fruit d’un patient travail de Madame Brigitte Appavou, précieuse collaboratrice de Gérard Moussay.
Après des années de labeur au service de la Mission, Gérad Moussay est décédé subitement dans sa chambre, le 1er février 2012, alors qu’il recevait un ami prêtre du diocèse de Laval. Ses obsèques ont été célébrées dans la chapelle du Séminaire des Missions Étrangères le lundi 6 février, sous la présidence du Père Georges Colomb, supérieur général. Il a été enterré au cimetière Montparnasse.
Jean-Paul Bayzelon
References
[4052] MOUSSAY Gérard (1932-...)
Références bibliographiques
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Akayet Inra Patra (Hikayat Inra Patra = Épopée Inra Patra) / Présentation par G. Moussay, Po Dharma, Abdul Karim. Kuala Lumpur : Perpustakaan Negara Malaysia & École Française dExtrême-Orient 1997 - Koleksi Manuskrip Melayu-Campa (Collection des Manuscrits cam) n° 1 ; 190 p.
Akayet Dowa Mano (Hikayat Dewa Mano = Épopée Dewa Mano) / Présentation par G. Moussay, Po Dharma, Abdul Karim. Kuala Lumpur : Perpustakaan Negara Malaysia & École Française dExtrême-Orient 1998 - Koleksi Manuskrip Melayu-Campa (Collection des Manuscrits cam) n° 2 ; 215 p.
Missions Étrangères et Langues orientales : Contribution de la Société des Missions Étrangères à la connaissance de 60 langues d'Asie. Bibliographie de 1680 à 1996 / Gérard Moussay ; collab. : Brigitte Appavou, Michel Trimaille, Annie Sablayrolles ; avec laide technique de Gérard Pennel et Antoine Vu dinh Khiêm. - Paris : L'Harmattan, 1996. 211 p. (Coll. Recherches Asiatiques). Index des auteurs et index des langues.
État de la Société des Missions Étrangères de Paris, de 1658 à 1998. I. Ordre alphabétique / G. Moussay & B. Appavou. Paris : Archives des Missions Étrangères, Collection "études et documents" 9, 1998 ; 130 p., 30 cm.
État de la Société des Missions Étrangères de Paris, de 1658 à 1998. I1. Ordre chronologique / G. Moussay & B. Appavou. Paris : Archives des Missions Étrangères, Collection "études et documents" 9, 1998 ; 130 p., 30 cm
Tata Bahasa Minangkabau (= Grammaire minangkabau) / Gérard Moussay. - Traduction en indonésien par Rahayu S. Hidayat. Jakarta : Ecole Française d'Extrême Orient - Yayasan Gebu Minang - University of Leiden - Projects Division - Kepustakaan Populer Gramedia, 1998 ; 372 p. (Naskah dan Dokumen Nusantara Sei XIII).
Les Archives des Missions Etrangères / G. Moussay. Paris : Archives de l'Eglise de France, 1999, n° 50, p. 25-32.
Nai mai mang Makah (Tuan Puteri dari Kelantan = La princesse qui venait du Kelantan) / Présentation et traduction par G. Moussay, Po Dharma, Abdul Karim. Kuala Lumpur : Kementerian Kebudayaan, Kesenian dan Pelancongan Malaysia & École Française dExtrême-Orient 2000 - Koleksi Manuskrip Melayu-Campa (Collection des Manuscrits cam) n° 3; 162 p.
MOUSSAY Gérard (1932-...)
VIETNAM-INDONÉSIE-FRANCE
Postes occupés. 1957-1958 : arrivée au Vietnam et étude du vietnamien 1959 : en charge de la paroisse de Tân-ly (province de Binh-tuy). 1960-1968 : responsable de la paroisse Hiêp-Nghia, fondée en 1960. 1968-1975 : fondation et organisation du Centre Culturel Cham de Phanrang, où prennent pension 250 jeunes étudiants Cham. Le Centre accueille aussi un groupe de lettrés Cham, qui collectent et étudient les manuscrits anciens. Le Centre Culturel Cham ferme en 1975 avec larrivée des communistes au pouvoir. 1976-1978 : Arrivée à Padang (Indonésie). Etude de lIndonésien et du Minangkabau. 1979-1992 : En charge de la paroisse de Bukittinggi. Travaille en même temps sur la langue et la littérature Minangkabau. 1993-2002 : Conservateur des Archives aux Missions Etrangères de Paris.