Pierre MÉSINI1934 - 2007
- Status : Prêtre
- Identifier : 4120
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Identity
Birth
Death
Missions
- Country :
- Korea
- Mission area :
- 1961 - 1974
- 1995 - 2007
Biography
[4120] MÉSINI Pierre est né le 2 janvier 1934 à Toulon (Var).
Ordonné prêtre le 29 juin 1961, il part le 24 septembre suivant pour la mission de Taegu (Corée).
Il étudie le coréen à Taejon, puis il est nommé vicaire à Po-hang (1963), à Andong (1963-1965), à Taegu Sin am dong (1965-1966), à Yécheon dans le vicariat forain d'Andong, devenu ensuite un diocèse (1966-1973), et enfin, curé de Hamchong, dans le diocèse d'Andong (1973).
Il revient ensuite en France et se fait prêtre-ouvrier, dans le diocèse d'Avignon (1974-1994).
En 1995, il retourne à Seoul et se remet à l’étude du coréen. En 1997, il est affecté au dispensaire Saint-Joseph de Séoul.
Il meurt le 26 janvier 2007.
Obituary
[4120] MÉSINI Pierre (1934-2007)
Notice nécrologique
PIERRE MÉSINI
(1934-2007)
Pierre Mésini est né le 2 janvier 1934 à Toulon, dans le Var, et il a été baptisé le 18 novembre de la même année dans l’église du Pradet, petite ville toute proche, au diocèse de Fréjus. Son père, Joseph Mésini, fils d’immigrés italiens, était travailleur journalier, et sa mère, Odette Véhézian, fille d’immigrés arméniens, était employée d’hôpital. Ils ont eu cinq enfants, quatre garçons et une fille. Pierre était le deuxième par rang d’âge. Malheureusement ses parents, qui n’étaient pas mariés religieusement, devaient se séparer en 1939, alors que Pierre n’avait que cinq ans, et sa mère se retrouva seule pour élever les enfants. Femme de foi profonde elle fit tout le possible pour leur donner une bonne éducation. Elle trouva un travail d’employée d’administration aux hospices de Clermont-Ferrand et Pierre put faire ses études non loin de là, à Courpière dans le Puy-de-Dôme, études primaires de 1942 à 1945 à l’institution Sainte-Marie, puis études secondaires à l’institution Saint-Pierre de 1945 à 1951.
On sait qu’au cours de ses études à Courpière Pierre Mésini était entré en relation avec le Père Henri Prouvost, alors directeur du service de l’information missionnaire au séminaire des Missions Étrangères, qui sillonnait la France pour faire connaître la Société. C’est sans doute en l’entendant parler qu’il en vint à désirer devenir missionnaire lui aussi. Tout en continuant à correspondre avec le Père Prouvost, en 1952 il choisit d’entrer d’abord au grand séminaire du diocèse de Clermont-Ferrand, à Chamalières, où il passa deux ans, avant de faire son service militaire, de septembre 1954 à février 1957.
Quand, en 1957, il demanda enfin son admission au séminaire des Missions Étrangères,
il dira avoir tardé à le faire parce que « depuis six ans on l’avait fait attendre » sans préciser qui était ce «on» rendu responsable du retard. Il se présente : « Je suis un garçon de 23 ans passés, encore trop confiant en lui mais qui n’a de cesse de se contraindre à un désintéressement complet et il me faut méditer la 1ère aux Corinthiens où saint Paul est si formel : qu’as-tu que tu n’aies reçu? et si tu l’as reçu pourquoi t’en vanter? J’attends depuis six ans mais je n’ai jamais maugréé. C’est lorsqu’on accepte tout comme venant de Dieu que l’on trouve la grâce en tout. »
Tous les témoignages reçus à son sujet montrent qu’il faisait impression par son souci de vie intérieure profonde et sa générosité au service des autres. L’aumônerie militaire le recommande comme un excellent séminariste, en même temps homme de prière et dévoué à tous, qui a eu une grosse influence sur ses camarades et a été très estimé de ses chefs. Les prêtres du diocèse de Clermont-Ferrand qu’il rencontrait au cours des vacances scolaires signalent également ses capacités d’animateur et sa fidélité exemplaire aux exercices de piété.
Au terme de son service donc Pierre Mésini retourne passer quelques mois au séminaire de Chamalières pour suivre des cours de philosophie et d’Écriture Sainte, et le 15 septembre 1957 il entre enfin au séminaire de Bièvres. Après quelques difficultés d’adaptation au début, surmontées grâce à son esprit de foi, aux efforts qu’il fait sur lui-même et à son caractère enjoué, il gagne vite la sympathie des aspirants et l’estime des professeurs, et c’est toujours à l’unanimité des suffrages exprimés qu’il sera admis à franchir chacune des étapes qui mènent vers l’ordination sacerdotale et l’envoi en mission.
Agrégé définitivement à la Société des Missions Étrangères le 27 juin 1960, il sera ordonné diacre le 21 décembre après avoir reçu sa destination pour la mission de Taegu en Corée du Sud. Ordonné prêtre le 29 juin 1961, il part pour la Corée le 26 septembre de la même année.
Arrivé en Corée, il résidera d’abord à Taejon, de novembre 1961 à Mai 1962, pour l’étude de la langue, étude qu’il poursuivra une fois nommé au poste de vicaire à Pohang, où il sera de juin 1962 à octobre 1963. De novembre 1963 à mars 1965 il sera vicaire à Andong. Ensuite, de mars 1965 à novembre 1966, ce sera à Taegu, à Sin Am Dong, toujours au poste de vicaire. Dans chacun de ces postes il ne restera que quelques mois, , chaque fois une année ou un peu plus, le temps d’apprendre à connaître la vie dans une petite paroisse de la Corée de l’époque. Mais en novembre 1966 il est nommé à Yécheon au diocèse de Taegu, dans le vicariat forain de Andong, vicariat qui deviendra diocèse en juillet 1969 sous la direction de monseigneur René Dupont. Yéchéon a la réputation d’être une paroisse difficile. Les gens du coin ont la tête dure. Ils sont connus pour être originaux, fiers et souvent rebelles. C’est une des régions où au temps de l’occupation japonaise, aucun Japonais n’avait pu résider durablement tant la population se montrait inhospitalière. Pierre Mésini restera sept ans à Yéchéon et il se trouvait là, disent ceux qui l’ont connu, comme un poisson dans l’eau. Lui qui était à certains égards un non-conformiste se trouvait à l’aise avec les fortes têtes et il a été vite adopté par les gens. Toute sa vie il gardera un souvenir enchanté des années passées à Yéchéon, au point que, quelque temps avant sa mort, se sachant condamné par les médecins, il dira souhaiter être incinéré pour qu’on puisse répandre ses cendres dans le cimetière catholique de Yéchéon. Ceux qui l’entouraient alors eurent quelque difficulté à obtenir qu’il renonce à ce désir, en lui faisant remarquer que ses anciens paroissiens préféreraient certainement trouver une tombe pour faire mémoire de lui.
En mars 1973 après entente avec Marcel Pélisse et Pierre Domon, Pierre Mésini accepta de changer de poste pour la mise en oeuvre d’une pastorale commune à un même secteur du diocèse. Assez vite il dut constater qu’il était difficile de s’entendre. On attendait de lui autre chose que ce qu’il avait espéré et ce fut pour lui une déception. En 1974 il décide de rentrer en France. Dans les différents postes qu’il a occupés il a rencontré des pauvres vivant des situations très difficiles. Sa fonction d’aumônier diocésain de la JOC l’a mis en contact avec des travailleurs victimes de beaucoup d’injustices. Il se sent appelé à partager la dure condition d’exploités de ces hommes et de ces femmes qui lui ont parlé de leurs difficultés. Fidèle à ses origines modestes, il s’est toujours senti à l’aise avec les laissés-pour-compte dans la course au progrès et il éprouve plus que de la sympathie pour eux. Il aime accompagner les petits groupes de pauvres « à la limite de la marginalité », comme il le dit lui-même. Il veut vivre avec eux et comme eux, et il ne voit pas comment pouvoir le faire en Corée en exerçant le ministère dont il est chargé. Il sent comme un appel à devenir lui aussi un travailleur pauvre, ce qui lui paraît incompatible avec le statut du prêtre tel qu’on le conçoit autour de lui. Prêtre, il voudrait l’être dans l’humilité et l’obscurité, à la manière du Père de Foucauld pour qui il a beaucoup d’admiration.
C’est ainsi qu’il va rejoindre en France une équipe sacerdotale chargée d’animer la paroisse Saint-Louis dans la banlieue d’Avignon. Il vivra là pendant vingt ans, de novembre 1974 à juillet 1994, avec des prêtres ayant le même idéal que lui. L’un d’entre eux, le Père Pierre Averan, vicaire épiscopal, qui a été lui-même pendant un temps missionnaire au Brésil, est plus spécialement chargé des tâches paroissiales, les autres ayant un travail salarié choisi avec le souci de rester en lien avec les gens les plus modestes. Dès le début, Pierre Mésini prend le parti de travailler à plein temps comme le tout venant des travailleurs ordinaires. Il devient agent hospitalier, spécialisé dans la rééducation des accidentés et des handicapés. Il sera plus tard employé dans les services de nettoyage et d’entretien : huit heures de travail pénible à la plonge dans les sous-sol de l’hôpital. Cela ne l’empêche pas de consacrer une soirée par semaine à l’alphabétisation des immigrés. Syndiqué, il prendra régulièrement une part active aux manifestations organisées par le syndicat pour protester contre les injustices et pour obtenir une amélioration des conditions de travail. Certains disent que l’évêque d’Avignon, qui l’avait accueilli dans le diocèse, tout en reconnaissant sa générosité n’appréciait pas toujours toutes ses interventions. Mais son activité sur le terrain professionnel n’empêchera jamais Pierre Mésini, qui est également membre d’un groupe de La Vie Nouvelle, de célébrer l’eucharistie et de prêcher à son tour le dimanche, ni non plus d’assurer quelques préparations au baptême ou au mariage
L’équipe de prêtres mène la vie commune dans un modeste appartement au milieu d’un grand ensemble en plein quartier populaire, chacun assurant à tour de rôle les tâches ménagères. On a aménagé un coin-prière dans une des pièces du logis, où on essaye de se retrouver pour prier ensemble mais, chacun étant très occupé, il est bien difficile de se réserver un temps libre pour ce faire tous à la même heure. Il faut souvent pratiquer “le seul seul avec le Seigneur”, et à cela Pierre Mésini ne manquera jamais. On pouvait s’en rendre compte quand on le rencontrait lors de ses rares apparitions au séminaire de la rue du Bac à Paris, ou encore lorsqu’il allait parfois rendre visite aux confrères de la maison de Lauris. Il ne manquait jamais d’aller prier longuement à la chapelle.
En 1994 il a soixante ans. Lui qui aimait se dire “prêtre ouvrier”, il doit prendre sa retraite : il ne sera plus ouvrier mais il est toujours prêtre. Du mois d’août 1994 au mois d’avril 1995 il ira loger à la Maison des Oeuvres du diocèse d’Avignon et il parle de lui en se disant “prêtre en réserve”. Situation qui ne convient guère à un homme comme lui qui a toujours été actif à plein temps. Avant de s’installer à la Maison des Oeuvres il a profité de quelques jours de vacances pour aller revoir la Corée, où il a rencontré des gens connus autrefois et des confrères avec lesquels il était resté en relation. Alors qu’il avait décidé ce voyage sans autre intention, semble-t-il, que celle de revoir des amis, touché par la cordialité de l’accueil qui lui est réservé, il est revenu en France en se demandant si, après tout, il ne pourrait pas reprendre une activité dans le pays où il avait été envoyé à l’origine. L’idée a fait son chemin et, à la fin de l’année 1994, il se décide à demander au supérieur général de pouvoir retourner en Corée pour y poursuivre sa vie missionnaire en lien avec les responsables de la Société.
Ayant obtenu l’accord des autorités, Pierre Mésini entreprend les démarches nécessaires
pour avoir un visa et peut enfin repartir pour Séoul en avril 1995. Il a appréhendé quelques difficultés prévisibles d’adaptation, notamment dans la pratique de la langue qu’il a un peu oubliée, mais il est manifestement heureux, “cela se voit”, disent les témoins. Il se sent même en meilleure forme physique. Pendant un an, en résidence à la maison régionale des MEP, il se remet à l’étude de la langue et au rythme de vie des Coréens, tout en pensant à une future implantation dans un lieu où il puisse “s’enfouir”. Il est membre en effet de la fraternité sacerdotale Jésus-Caritas et désire vivre comme le grain caché en terre, enfoui à la fois dans une Église et dans le monde des petits. En attendant une affectation il rend quelques services, en particulier en allant célébrer la messe, à l’hôpital gratuit de la Sainte Famille, à un dispensaire situé dans un quartier pauvre, chez les soeurs du Prado et chez les petites soeurs du Père de Foucauld, ou encore pour une équipe d’A.C.O. Si on lui demande ses impressions, il dit d’abord sa satisfaction : en France il a senti que sa décision n’avait surpris personne, ni dans sa famille ni dans son entourage. Quant à la Corée, il dit la retrouver telle qu’il l’a connue autrefois, comme s’il ne l’avait jamais quittée. Il découvre un pays en pleine expansion, un vaste chantier, des travailleurs en pleine activité, mais c’est toujours la Corée d’antan, ce pays où les relations humaines deviennent facilement cordiales et chaleureuses, avec lequel il est toujours resté uni. Tout au long des années passées en France il n’a jamais cessé de dire son chapelet en coréen pour entretenir cette communion. Il pense que “c’est par un effet de la délicatesse du Seigneur qu’il a pu revenir”.
En 1997 Pierre Mésini se met au service de la clinique Saint Joseph de Séoul, établissement fondé par des chrétiens dans un quartier populaire de la ville pour soigner gratuitement les malades pauvres qui se présentent. Un hôpital fonctionnant sans budget, au jour le jour, grâce à la générosité de quelque deux mille bienfaiteurs regroupés dans une association d’aide financière, grâce aussi à quatre-vingts médecins et autant d’infirmières bénévoles qui viennent régulièrement à tour de rôle seconder le personnel permanent. La clinique ouvre tous les jours de 1h. de l’après-midi à 9h. du soir pour prendre en charge les cent ou cent cinquante malades qui viennent frapper à la porte. La plupart repartent avec des remèdes à prendre chez eux, mais ceux qui ont besoin d’être hospitalisés le sont sans devoir rien débourser. Pierre Mésini est là, assurant une permanence, disponible pour renseigner et rendre service aux gens qui viennent, et il partage la vie d’un groupe d’anciens alcooliques logés dans une petite maison toute proche où il a élu domicile. Il s’agit en fait d’alcooliques ayant accepté de faire une cure de désintoxication qui sont hébergés gratuitement pendant une période de six mois. Au début, pour éviter les occasions de boire, ils ne sortent guère, puis lorsqu’ils ont retrouvé un peu d’assurance vont au travail dans la journée et rentrent le soir, en attendant de pouvoir retourner définitivement chez eux.
Pierre passe une grande partie de son temps dans ce milieu, en dehors de toute structure officielle de l’Église, mais cela ne l’empêche pas de rendre régulièrement des services à différentes communautés de religieuses, soeurs du Bon Pasteur, Soeurs du Perpétuel Secours, Communauté apostolique Saint François Xavier, etc..où il est invité à célébrer l’eucharistie et à confesser. Il accompagne activement les prêtres d’une Fraternité Jésus Caritas. Cela l’amène souvent à passer plusieurs heures par jour dans le métro ou les autobus, où il pratique la prière de Jésus en pensant à tous les gens qu’il côtoie. Il admire la générosité des chrétiens à qui il affaire. Il voit tous les efforts que fait l’Église pour aider les déshérités. « Oui, dit-il, on fait beaucoup pour les déshérités. Mais partager leur sort, vivre avec eux ?....ça, ce n’est pas dans l’air du temps ! » Expression d’un regret qui pour lui est une manière d’inviter à méditer le mystère de l’Incarnation.
À la clinique Saint-Joseph et au foyer des alcooliques anonymes, Pierre Mésini exerça ainsi pendant dix ans le ministère auquel il se sentait appelé, heureux de pouvoir le faire dans le pays où il avait passé les premières années de sa vie de prêtre, donnant ainsi un beau témoignage de fidélité à sa vocation missionnaire. En 2006, lui qui rencontrait chaque jour des malades, il connut lui aussi l’épreuve de la maladie. Le diagnostic du médecin ne lui laissa pas d’espoir de guérison : il était atteint d’un cancer dont on ne pouvait plus empêcher la progression. Il rentra alors passer quelques semaines en France pour dire adieu à sa famille puis retourna bien vite en Corée où il mourut le 26 janvier 2007. Ses obsèques ont été célébrées à Séoul, dans la paroisse de Gaepodong, présidées conjointement par Mgr Yeom, évêque auxiliaire de Séoul, et par Mgr Dupont. Le diocèse de Andong étant représenté par plusieurs prêtres venus tout exprès pour prendre part à la célébration.
J.P. Bayzelon