Benoît SÂTRE1855 - 1885
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1456
- À savoir : Mort violente
Identité
Naissance
Décès
Biographie
[1456]. SÂTRE, Benoît, naquit le 2 décembre 1855 à Ampuis (Rhône). Elève du petit séminaire de Montbrison, du séminaire de philosophie à Alix, il entra tonsuré au Séminaire des M.-E. le 5 septembre 1877, reçut la prêtrise le 21 février 1880, et partit le 31 mars suivant pour le Tonkin méridional. Il étudia la langue à Van-loc, et fut envoyé dans la région laotienne, en mars 1881, avec M. Blanck. Le poste où il se trouvait ayant été détruit en 1883, Mgr Croc lui confia l’administration du district de Hoi-yen.
En 1885, il retourna dans le pays laotien où il dirigea les stations de Khe-nay et de Khe-rat. Bientôt la guerre contre les Français qui faisaient alors la conquête du Tonkin désola le pays. Le missionnaire se réfugia à Lang-moi (Nghe-an) avec ses chrétiens¬ ; il y fut assiégé le 24 novembre 1885, et dans une sortie qu’il tenta le 4 décembre, il fut frappé de trois coups de feu mortels. Le soir même, il expirait. Son corps, enterré dans l’église, fut exhumé par les rebelles qui le jetèrent dans le fleuve.
Nécrologie
[1456] SÂTRE Benoît (1855-1885)
Notice nécrologique
Né à Ampuis (Rhône), le 2 décembre 1855, M. Benoit Satre était déjà tonsuré quand il entra, en 1877, au Séminaire des Missions-Etrangères. Ordonné prêtre le 21 février 1880, il partit le 31 mars suivant pour la mission du Tonkin Méridional. « Depuis quelques mois il étudiait la langue à Van-Loc, écrit le P. Pédémon, lorsque Mgr Croc, étant venu donner une mission dans cette paroisse, reconnut en ce cher confrère les aptitudes qu'il désirait trouver dans les missionnaires qu'il envoyait au Laos. Au fait, le P. Satre jouissait d'une santé robuste, d'un tempérament énergique; il paraissait d'un jugement droit et franchement pieux.»
Généreux jusqu'au sacrifice, il s'offrit d'ailleurs de lui-même à son évêque pour l'expédition projetée. A sa grande joie, il reçut l'ordre de s'y préparer.
Le 6 mars 1881, il partait avec les PP. Blanck et Cudrey, pour soumettre au joug de l'Évangile les peuplades encore à demi sau¬vages des Muong. Remontant la vallée du Ngan-Pho, ils s'établirent à Na-Huong d'abord, puis à Ha-Trai. Mais l'insalubrité du climat et le mauvais vouloir des habitants les forcèrent à passer au Tran-Ninh l'année suivante. Là, Dieu bénit leurs efforts, plusieurs conver-sions furent obtenues, avec l'espoir de récolter plus tard une abon¬dante moisson. Le P. Blanck crut le moment venu d'aller prendre conseil de son vicaire apostolique sur la ligne de conduite à tenir. C'était en 1883. Ce confrère était à peine en pays annamite qu'il apprit la ruine du poste qu'il venait de fonder et la dispersion des chrétiens. Le P. Satre et son confrère durent reprendre la route du Ngan-Pho et se réfugier à Xa-Doai. Cette marche forcée de dix-neuf jours, avait comme anéanti ses forces. Sans parler des fièvres périodiques, il avait été atteint au Muong-Ngan d'une sorte d'hydropisie qui l'avait mis aux portes du tombeau; on espérait si peu l'en sauver, que déjà on avait commandé les nattes pour l'ensevelir.
La mission des sauvages étant devenue temporairement impossible, le P. Satre, tout en conservant sa destination première, fut chargé en pays annamite du district de Hoi-Yen qu'il administra jusqu'en juin 1885. « Cependant l'affection qu'il avait vouée à ses sauvages ne le quittait pas. D'eux chrétientés Muong venaient d'être fondées près de Lang; le P. Blanck en avait pris la direction, et le P. Satre appelait de ses vœux le moment où il pourrait partager ses travaux. » Son désir ne devait hélas ! que trop tôt se réaliser. Miné par une maladie cruelle, contractée dans un voyage chez ses sauvages, le P. Blanck se voyait forcé de quitter son cher troupeau. Il mourait à Xa Doai dans la nuit du 23 au 24 août.
Le P. Satre ne put assister aux derniers moments de son confrère. Dès le mois de juin, il était remonté à Lang pour prendre en main la direction du district et s'occuper des deux villages Muong, Khe-Nay et Khe-Rat. « Dites au P. Blanck, écrivait il, de se bien soigner pour nous revenir au plus tôt. Qu'il soit en paix pour ses chers petits; dites lui que j'en aurai soin, que je les aimerai comme nous aimions ceux du Muong Ngan. »
On était alors à l'époque où la rébellion des lettrés, après avoir ruiné toutes les chrétientés de l'Annam, gagnait les provinces du Tonkin. Le roi fugitif et son mauvais conseiller Thuyet avaient été vus aux environs de Lang, aussi s'attendait on dans ces montagnes à une lutte plus âpre que partout ailleurs. Dans les premiers jours de septembre, les rebelles s'emparaient presque sans coup férir de Anh-Son et de Dien. Ils n'étaient pas encore solidement organisés; si le pays leur obéissait, c'était plutôt par force que de bon gré. Le P. Satre n'ignorait pas qu'en les attaquant le premier, il en aurait eu facilement raison, mais il contint ses chrétiens, pour rester jusqu'au bout sur la défensive. Bientôt, l'ennemi devint si menaçant, qu'il fallut réunir à Lang Moi les chrétiens de Khe Nay et Khe Rat qu'on ne pouvait déjà plus défendre.
L'audace des rebelles augmentait au contraire tous les jours. « Du 4 au 23 novembre, dit le P. Pédémon, ils se massèrent et construisirent de nuit des fortins tout près du village. Le 24, l'attaque commença. Ils tiraient du canon à toute volée; on estime à 250 le nombre des boulets tombés dans ce petit village bondé de monde. Le 2 décembre, dans une sortie, le P. Satre fut atteint de trois coups de feu : deux à la main et un troisième qui lui perça le flanc de part en part. Le pauvre Père put à peine revenir chez lui. Jugez de la douleur de nos gens. Pour lui, il les rassurait et leur disait qu'il n'avait pas trop mal. Mais dès qu'il vit la gravité de son état, il demanda et reçut les derniers sacrements. Le P. Huê, prêtre indigène, son colla¬borateur chez les sauvages, les lui administra. Enfin il expira le 4 décembre sur les sept heures du soir, en invoquant saint Benoît son patron bien-aimé. Son corps fut enterré dans l'église cette même nuit. Avant de mourir, il recommanda à ses chrétiens de s'unir pour la défense commune et de pousser la résistance jusqu'à l'arrivée des Français. »
Le missionnaire mort, les chrétiens perdirent tout courage, ils se laissèrent tromper par des espions qui livrèrent la place à l'ennemi. Dès le 6 décembre, Lang était pillé et brûlé, et tous ses habitants massacrés. Les rebelles poussèrent la rage jusqu'à déterrer le corps de notre confrère pour le jeter au fleuve. Le P. Gras, arrivé avec une colonne française quelques jours plus tard, vit la fosse violée, mais il ne put retrouver le corps,
Références
[1456] SÂTRE Benoît (1855-1885)
Notes bio-bibliographiques
C.-R., 1881, p. 68¬ ; 1883, p. 14.
A. P. F., lviii, 1886, p. 150.
M. C., xiv, 1882, p. 231¬ ; xviii, 1886, Sa mort, p. 99.
— Le Tour du Monde, 1885, 2e sem., pp. 22 et suiv.
Les miss. cath. franç., ii, p. 479.
Portrait
— A. P. F., lviii, 1886, p. 125.