Jean-François MATRAT1856 - 1921
- Statut : Prêtre
- Identifiant : 1506
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Identité
Naissance
Décès
Autres informations
Missions
- Pays :
- Japon
- Région missionnaire :
- 1881 - 1921 (Nagasaki)
Biographie
[1506] MATRAT Jean-François, Marie, naquit le 15 septembre 1856 à Farnay (ou Franay), au diocèse de Lyon (Loire). Il fit ses études secondaires au Petit Séminaire du diocèse, puis il entra au Grand Séminaire de Lyon. Il y reçut la tonsure le 2 juin 1878. Cette même année, le 7 septembre, il devint aspirant des Missions Étrangères. Minoré le 21 décembre 1879, sous-diacre le 20 septembre 1880, diacre le 12 mars 1881, il fut ordonné prêtre le 24 septembre. Destiné à la mission du Japon méridional, il s'embarqua le 26 septembre.
Accueilli à Nagasaki par Mgr. Petitjean, le Père Matrat après quelques mois d'étude de la langue fut nommé vicaire du Père Raguet, qui était chargé du district de Kuroshima-Hirado. Tandis que son curé résidait à Himosashi en Hirado, le jeune père s'installa dans l'île de Kuroshima. Mis à part quelques mois passés aux Gotô pour remplacer le Père Bourelle, péri en mer, et un court séjour à Hongkong pour soigner ses yeux, il resta quarante années dans ce district, dont, d'ailleurs, il devint responsable en 1887, quand le Père Raguet fut appelé à d'autres tâches.
Le Père Matrat fut un grand constructeur d'églises pour le besoin de ses communautés dispersées. En 1896, il édifia à Kamikosaki une église dédiée à St François-Xavier, qui en 1550 avait séjourné en cet endroit. En 1898, l'église St Joseph vit le jour à Hoki. En 1903, pour les Amantes de la Croix, il construisit un oratoire et une résidence. En 1909, c'est à Hirado qu'il construisit une église et un presbytère. À Ikitsuki en 1911, c'est une belle église en briques qu'il édifia pour les besoins d'une communauté composée de chrétiens dits cachés" qui avaient rejoint le giron de l'Église. Puis en 1912, il en construisit une autre à Kota. Enfin, en 1918, à Tabira, il édifia une église en l'honneur des Martyrs japonais.
Le Père Matrat travailla jusqu'au bout de ses forces. Le 28 juin 1921, après une courte maladie, il rendit son âme à Dieu. Il est inhumé dans le cimetière chrétien de Tazaki.
Nécrologie
M. MATRAT
MISSIONNAIRE DE NAGASAKI
M. MATRAT (Jean-François), né à Farnay (Lyon, Loire), le l5 septembre 1856. Entré tonsuré au Séminaire des Missions-Etrangères le 7 septembre 1878. Prêtre le 26 septembre 1881. Parti pour le Japon Méridional le 26 octobre 1881. Mort à Tazaki le 28 juin 1921.
Jean-François Matrat était né à Farnay, archidiocèse de Lyon le 15 septembre 1856. La modestie du regretté Père qui parlait très rarement de lui-même, nous a privés de maints détails qui ne manqueraient pas d’être édifiants, sur son enfance et sa jeunesse.
Ses parents étaient des chrétiens convaincus ; aussi, formé par eux, le jeune Jean-François devint-il de bonne heure un homme de foi ardente, et lorsque Notre-Seigneur, jetant sur lui un regard affectueux lui fit entendre l’appel à une vie de dévouement, se montra-t-il plus fidèle à sa vocation que l’adolescent dont parle l’Evangile. A Farnay, nul ne fut surpris de voir ce pieux jeune homme entrer au Séminaire.
Là, tout en se livrant à l’étude, sous le magistère de maîtres pieux autant que doctes, le jeune abbé continuait d’écouter la voix de Notre-Seigneur, et lorsqu’il eut acquis la certitude que Jésus l’appelait à la vie apostolique dans les pays lointains, Jean-François dit adieu à ses amis du Séminaire de Lyon et demanda son admission à celui des Missions-Etrangères.
A Lyon, il venait d’entrer dans la cléricature en recevant la tonsure. De tout cœur il avait dit : « Dominus pars hoereditatis meae » et en retour il voulait se donner tout à Dieu son Seigneur, auquel il sacrifiait généreusement ses affections les plus chères en entrant au Séminaire de la rue du Bac le 7 septembre 1878.
Aux Missions-Etrangères, comme à Lyon il fut toujours un séminariste sérieux, fidèle à remplir scrupuleusement ses devoirs de chaque jour.
Ordonné prêtre le 24 septembre 1881, il quittait Paris le 26 octobre pour aller s’embarquer à Marseille où ses vénérés parents tinrent à l’accompagner jusqu’au paquebot qui devait emporter leur fils et douze autres jeunes missionnaires en Extrême-Orient ; au moment de la séparation, nouvel Abraham, le père de M. Matrat lui dit : « Va mon fils, nous te donnons à Dieu et au Japon », puis ils se quittèrent pour ne plus se revoir ici-bas. Mais Dieu qui a promis de récompenser un verre d’eau donné en son nom, aura sans doute fait un bon accueil à ces deux chrétiens qui venaient de lui offrir aussi généreusement leur fils le plus aimé. Jean-François voguait maintenant vers sa nouvelle patrie où durant quarante années il devait combattre pour Dieu et les âmes.
Après une heureuse traversée il débarqua enfin à Nagasaki au sein de sa nouvelle famille. Sans perdre de temps, sous la direction d’un maître indigène, il se met de tout cœur à l’étude de la langue japonaise, et quelques mois après, Monseigneur Petitjean peut-il l’envoyer comme vicaire au Père Raguet chargé alors de l’immense district de Kuroshima-Hirado.
Tel devait être le théâtre du zèle de M. Matrat pendant quarante ans, car il ne quittera guère Hirado que pour quelques mois passés aux Goto pour remplacer le regretté M. Bourelle mort naufragé le 16 avril 1885, ou pour de très courts séjours au Sanatorium, afin de soigner ses yeux que l’on crut un instant perdus, ainsi que quelques autres infirmités qui ne le quittèrent pour ainsi dire jamais.
Sous la direction de M. Raguet qui résidait à Hibosashi en Hirado, le Père Matrat s’établit dans l’île de Huroshima où il mit tout son zèle à diriger cette importante chrétienté.
Jusqu’en 1887 où le Père Raguet fut chargé d’aller évangéliser Fukuoka, M. Matrat fut toujours (au dire de son ancien curé), le modèle des vicaires.
Pendant ces quelques années, se fondèrent les chrétientés d’Ojima et de Tabira ; bien des efforts furent faits pour ramener au bercail les schismatiques de Ikitsuki.
En 1886 nos deux Pères eurent la joie de voir leur nouvel évêque, Monseigneur Cousin bénir à Hibosashi, l’église élevée par leurs soins, véritable merveille pour l’époque.
¬L’année suivante, M. Matrat devenait chef du district avec résidence à Kuroshima et un père japonais l’aidait à Hirado.
L’un des premiers soins du zélé missionnaire fut d’installer une école cléricale à Kuroshima dans sa maison « 18 jeunes gens composent cette pépinière d’où l’on pourra tirer plus tard des séminaristes ou des catéchistes qu’on achèvera d’instruire pour les envoyer chez les païens », écrivait-il en 1888. Ce souci de l’instruction des fidèles et de l’élite des fidèles ne quitta jamais le cher M. Matrat, il arriva ainsi à préparer des gens capables de l’aider en enseignant autrui.
Plusieurs de ses élèves rendent encore aujourd’hui de grands services.
Toutes les occasions lui sont bonnes pour instruire son troupeau. Lors des Jubilés du Saint-Père, il prêche la soumission à l’Eglise, la dévotion envers son Chef, le successeur de Pierre, et nous ne saurions dire combien ses fidèles récitèrent de chapelets et firent de chemins de croix aux intentions du Souverain Pontife.
Le travail accablant de l’administration de ses nombreuses chrétientés, ne lui fait pas oublier les séparés, il leur donne et fait donner des conférences à Ojima, à Shishi, à Ikitsuki (1891).
Pour mieux atteindre les parents il s’occupe activement des cnfants, préparant soigneuse-ment les premières communions solennelles dans son district, et cette cérémonie devient pour lui un excellent moyen d’apostolat.
Le ciel lui-même, pour raviver la foi de ses ouailles, lui vient en aide, une épidémie de dysenterie sévit dans Hirado, le Père lui-même est malade, mais rien ne l’arrête. « Loué soit Jésus-Christ quand même ! » s’écrie-t-il, et son zèle embrase celui de ses infirmières improvisées qui se répandent partout sans craindre la maladie, et tout enssoignant les corps recueillent une moisson de baptêmes.
C’est alors que le cher Père faillit devenir aveugle, et force lui fut d’aller faire un séjour à Béthanie (1894). A peine rétabli, il revient à son poste et redouble de soins pour la formation des jeunes gens, se dépensant sans compter pour leur faciliter la confession et la communion, voyant là avec l’Eglise et les saints de tous les siècles, le meilleur moyen de faire avancer ses enfants dans le chemin de la perfection.
Dès lors M. Matrat devient de plus en plus confesseur, mais sans oublier les autres nécessités de son district. Il va falloir se mettre à bâtir : ses enfants se sont multipliés, il leur faut des églises, et notre confrère, après avoir été comme Saint-Jean son premier patron une lumière éclairant son troupeau, un feu embrasant de zèle tous ses collaborateurs, va maintenant, à l’exemple du bon saint François devenir un constructeur d’églises. Lorsqu’il y aura mis tout son avoir, comme le pauvre d’Assise, il tendra la main et se fera quêteur pour élever des maisons au Bon Dieu.
Ses lettres qui s’en allèrent un peu partout demander l’aumône et promettre en retour des bénédictions du ciel aux bienfaiteurs de ses œuvres, c’est la nuit, en prenant sur son sommeil, qu’il trouvait le temps de les écrire, ou bien le jour, lorsque la maladie l’obligeait garder la chambre. Et Notre-Seigneur qui lui avait inspiré ce moyen de travailler à sa gloire, touchait le cœur des destinataires ; c’est ainsi qu’après avoir dépensé tout son avoir personnel, il put avec les modestes contributions de ses pauvres chrétiens, et surtout avec les aumônes que lui envoyèrent les anges visibles de la Providence, élever successivement sur divers points de son district de solides et de belles églises, dont quelques-unes ne seraient point déplacées en Europe.
La première en date (1896) fut l’église de Saint-François-Xavier, à Kamikosaki aux portes de Hirado où avait séjourné le Saint en octobre 1550.
L’année suivante, Monseigneur Cousin résolut d’envoyer M. Matrat aux Goto, mais le confrère qui devait le remplacer, ayant fait valoir à Sa Grandeur des raisons de santé qui ne lui permettaient pas prendre sur ses épaules un tel fardeau, M. Matrat qui avait déjà fait son sac et se disposait à quitter Hibosashi reçut une nouvelle lettre de Monseigneur et « c’est ainsi, nous disait-il quelquefois en riant que je suis devenu le curé renommé de Hirado. »
Toutefois l’Evêque lui enlevait une bonne partie de son district pour en former deux autres : celui de Sasabo et celui de Kuroshima (1897).
Le curé renommé de Hirado ne se plaint point de la combinaison. Désormais, écrit-il tout joyeux, je pourrai m’occuper plus sérieusement des chrétiens qui me restent (3.800) et des séparés dont j’espère toujours le retour » et il se remet au labeur avec ardeur.
Le 19 mars 1898, Monseigneur de Nagasaki bénissait en Hirado, l’église de Saint-Joseph de Hoki, véritable merveille, presque un monu¬ment fièrement campée sur une hauteur d’où elle domine tout le détroit de Hirado.
Après cette église, le Père construit une résidence avec oratoire à Tazaki pour la communauté des Amantes de la Croix (1903).
Puis dans un faubourg de Hirado ville où il a toujours rêvé s’ins¬taller, le Père Matrat achète un terrain, construit un oratoire et une maison pour le missionnaire près de laquelle il espère pouvoir construire plus tard une école de catéchistes pour les chrétientés de son vaste district (1909).
En 1921, à Ikitsuki, où enfin un bon nombre de séparés sont rentrés au bercail, il fait élever une jolie église en briques. L’année suivante il en construit une autre à Kota ; enfin, pendant la guerre, vers 1918, à Tabira en face de Hirado, sous la direction de M. Matrat et grâce surtout aux aumônes qu’il a pu recueillir, s’élève une magnifique église sous le vocable des Saints Martyrs Japonais.
En même temps qu’il s’occupait de ses temples matériels, notre cher confrère ne négligeait rien pour façonner l’édifice spirituel dont il était chargé. Bien avant les décrets de Pie X, la confession des enfants, des tout petits, était une de ses pratiques favorites, aussi avec quelle soumission joyeuse reçut-il la Direction Pontificale ! Lorsque les besoins de son district ne nécessitaient pas sa présence ailleurs, vous étiez sûrs de le trouver toutes les après-midi dans son église de Hibosashi confessant ses petits benjamins qui lui arrivaient à la sortie de l’école. Que d’heures n’a-t-il pas passées ainsi, par tous les temps, religieusement occupé à préparer ces petits ciboires vivants !
Bien que brisé par la fatigue et épuisé par diverses maladies : asthme, rhumatismes, etc…, etc..., il ne cessait par son exemple de stimuler le zèle de ses collaborateurs et de ses catéchistes. « N’aurons-nous pas l’éternité pour nous reposer ? » disait-il à ceux qui lui conseillaient de se ménager un peu.
Quel dévouement aussi n’a-t-il pas montré pour la communauté des Amantes de la Croix ! Non seulement il leur a élevé une maison solide à Tazaki, mais Dieu seul sait tout le mal qu’il s’est donné pour en faire de véritables épouses de Jésus-Christ et des auxiliaires dévouées de son apostolat.
Et quand, parmi ses jeunes brebis il croyait découvrir une âme choisie par Dieu, de quels soins délicats ne l’entourait-il pas ? La Mission de Nagasaki lui doit plusieurs bons prêtres et les congrégations religieuses établies au Japon plusieurs sujets fervents.
Quelle puissance d’entraînement ne devait pas avoir sur ces jeunes âmes l’exemple de leur dévoué pasteur, si bon, si généreux pour les autres et d’autre part si mortifié pour lui-même.
Aussi Dieu bénit-il son zèle en faisant croître sa famille.
En 1897, lors de la dernière division du district de Hirado, le Père Matrat conservait la direction de 3.800 chrétiens ; en 1921, il en laisse 8.300 à la sollicitude de son successeur et de ses collaborateurs. Tant qu’il l’a pu, ce bon pasteur s’est dévoué, et même, au dire de Monseigneur Combaz, il a toujours travaillé au-delà de ses forces. Depuis plus de dix ans il ne pouvait se coucher la nuit mais devait rester assis sur son séant, et très souvent après avoir ainsi passé des nuits blanches, le matin, n’en pouvant plus, il était obligé de faire une halte ou deux pour franchir les quelques cinquante mètres qui séparaient sa chambre de l’église, et cependant tous les matins il était fidèle au divin rendez-vous à l’autel, au pied duquel se pressait chaque jour un bon nombre de ses enfants avides de communier.
Malade lui-même, il se faisait porter auprès des moribonds qui réclamaient son assistance.
C’est même au cours d’une de ces visites aux malades, que vers la mi-juin le cher Père se sentit frappé au cœur d’une violente douleur ; quelques jours après il dut rester couché sur sa chaise longue.
Quatre ans auparavant, pareille chose lui était arrivée à Hirado même, c’était pendant la guerre en l’absence de son dévoué vicaire de Hoki le Père Joseph Bois mobilisé, et cette circonstance peinait énormément le cher Père. Chaque jour en effet il demandait au bon Dieu, biens humblement, la grâce de mourir bien préparé, muni de tous les secours de la religion et réconforté autant que possible par la présence de quelques confrères. Aussi le retour des confrères enfin démobilisés le combla-t-il de joie.
« Deo gratias », me dit-il un jour, depuis votre retour à tous, me voici plus tranquille, et pourquoi ? lui demandai-je. « Eh bien, voilà, on se fait vieux et sous peu on pourra avoir besoin d’une bonne assistance. »
J’étais loin de penser que ce dut être si tôt ; moins d’un mois après avoir eu la joie de la visite du bon Père, je recevais à Hibosashi un télégramme : « Père très mal, venez. » Quelques heures après j’étais au chevet du cher malade dont l’état nous parut très inquiétant, ainsi qu’au médecin lui-même. Aussi, en toute franchise, avons-nous prévenu le cher Père qui ne sut ensuite comment nous exprimer sa reconnaissance pour les secours religieux que nous lui avions donnés.
Il avait redouté de mourir seul, et son bon ange amenait près de lui nombreux voisins et vicaires. Et ne redoutant pas la fatigue d’un long voyage, de Nagasaki même, Mgr Combaz et le cher Père Raguet venaient apporter au cher malade, Monseigneur ses meilleures béné- dictions, le Père Raguet le souvenir d’une vieille et inaltérable affection. Tous, nous étions édifiés par la patience, l’esprit de foi, l’humilité et l’obéissance du malade. « Souffrez-vous ? » lui demandait parfois le médecin ? » Je m’en remets à la volonté de Dieu » répondait-il.
Les yeux fixés sur une image de la Sainte Famille, tenant en mains son crucifix qu’il baisait très souvent, invoquant toujours ses saints patrons et son ange gardien, demandant fréquemment l’eau sainte, communiant chaque jour, notre cher confrère se voyant près d’arriver au port tenait d’une main ferme le gouvernail, les yeux toujours fixés sur Marie, son étoile.
Il offrait sa vie pour la Mission et son district en particulier et attendait la mort ; tout en redisant « non recuso laborem », il acceptait de mourir, mais désireux de faire de cet acte suprême un acte méritoire, ce missionnaire si soumis à ses supérieurs me dit : « Appelez Monseigneur » , et à son évêque qui ne pouvait contenir son émotion, le cher malade dit : « Monseigneur, je vous demande l’autorisation de mourir ! » Monseigneur lui répondit : « Cher Père Matrat, je demande au Bon Dieu de vous guérir, mais s’il veut vous rappeler à Lui, je vous permets alors de répondre à son appel. »
Quelques temps après, il me dit également : « Père, permettez-moi de mourir, » et comme Monseigneur précédemment, je lui dis : « Eh bien oui, si le Bon Dieu le veut, mais pas une minute avant l’heure fixée. »
Mais pendant que le malade, évêque et confrères, ainsi que les médecins d’ailleurs, s’attendaient à l’issue fatale, les chrétiens se succédaient sans interruption, faisant violence au ciel pour obtenir de conserver leur Père bien aimé. Tant et si bien qu’un jour nous crûmes leurs vœux exaucés.
Le malade lui-même le crut un moment, ce fut alors que Monseigneur prit congé du Père Matrat, et en compagnie du Père Raguet rentra à Nagasaki. Mais peu après leur départ l’espoir de la guérison s’évanouit. Malgré les soins dévoués de deux médecins, l’état du Père empira et bientôt ce fut l’agonie. Alors encore il eut un dernier souvenir pour sa famille invoquant sur elle les bénédictions du Bon Dieu, puis il renouvela le sacrifice de sa vie à toutes les intentions de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Enfin il s’unit aux prières des agonisants que quatre confrères récitaient près de Lui, et après un dernier baiser à son crucifix muni d’une dernière absolution, l’âme du cher Père paraissait devant celui qui doit se lever pour sauver les humbles de la terre. Pour nous, nous avons l’espérance que le Bon Maître aura dit à son serviteur « Euge serve bone et fidelis », et tout en récitant près du corps de notre confrère, le « subvenite sancti Dei » il nous semblait voir les nombreuses âmes à qui pendant quarante ans il avait ouvert les portes du ciel, venir au devant de lui.
C’était le 28 juin à 3 heures du matin. Aussitôt les messes commencèrent pour le repos de l’âme du cher Père.
Ce fut alors comme durant la maladie, que l’on vit, combien par son zèle ardent, sa piété exemplaire, sa patience admirable, quelles que fussent ses souffrances ou ses ennuis, le bon pasteur d’Hibosashi s’était acquis l’affection de ses ouailles ! Chaque jour, malgré les travaux pressants de l’époque, arrivaient des délégations de chrétiens des divers points du district ; et pour tous, tant qu’il le put, le malade eut un mot affable, un bon conseil, une bénédiction.
Le jour de l’enterrement présidé par le vénéré M. Raguet, revenu rendre ce dernier devoir à son ancien vicaire, l’église était bien trop petite pour contenir l’assistance, et presque tous les yeux se mouillèrent de larmes quand avant l’absoute le célébrant rappela la carrière apos-tolique du regretté défunt.
La pluie ne permettant pas de faire l’inhumation le même jour, les fidèles continuèrent par petits groupes à prier auprès du cercueil de leur Père. Le lendemain 1er juillet, le soleil s’étant montré, ce fut une vraie procession triomphale ; 1.200 fidèles accompagnèrent à sa demeure dernière le corps du Père Matrat qui repose au cimetière de Tazaki à une heure de marche de Hibosashi.
Depuis ce jour sa tombe ne cesse de recevoir des visites. Tous les dimanches, dit-on, c’est un lieu de pèlerinage pour les jeunes gens qu’il a tant aimés. Ceux-ci entretiennent son tombeau, prient pour son âme, et, chose touchante, ils y chantent en chœur les cantiques que le cher Père aimait plus particulièrement. Quant aux messes demandées pour le regretté défunt, on ne peut les compter.
Que le bon Père dont le départ a imposé un lourd fardeau à son successeur et à ses auxiliaires, intercède près du Divin Maître, et lui redise là-haut la prière qu’il aimait à redire ici-bas : « Domine, mitte operarios in Messem tuam, Messis quidem multa operarii autem pauci. »
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Références
[1506] MATRAT Jean (1856-1921)
Références biographiques
AME 1904 p. 321 (art). 324. 1912 p. 130. 154 (art). 1917-18 p. 266. 1926-27 p. 460. 461. 464. 1933 p. 12. 1922 p. 199. CR 1881 p. 104. 1886 p. 22. 1887 p. 37. 1888 p. 21. 1891 p. 64. 1892 p. 43. 1893 p. 64. 1894 p. 61. 66. 67. 69. 1895 p. 72. 1896 p. 61. 1897 p. 55. 1898 p. 50. 1899 p. 28. 1901 p. 24. 1903 p. 19. 1906 p. 23. 24. 1907 p. 22. 23. 1908 p. 14. 1910 p. 21. 22. 1911 p. 23. 1912 p. 20. 26. 494. 1913 p. 30. 1914 p. 4. 5. 1915 p. 14. 1916 p. 10. 15. 1917 p. 11. 1918 p. 6. 8. 1919 p. 9. 1920 p. 6. 1921 p. 4. 5. 6. 186. 1922 p. 6. 1924 p. 7. 1925 p. 8. 1940 p. 140. BME 1926 p. 43. 1952 p. 384.