Le Bienheureux Jean-Martin Moyë à l’Isle de France
Jean-Martin Moyë naît à Cutting (Lorraine) en 1730. Ordonné prêtre à Metz en 1754, il rejoint le Séminaire des Missions Étrangères en 1771 : il s’embarque le 30 décembre de la même année pour la mission du Sichuan.
L’Isle de France
Il arrive à l’Isle de France, qui prend le nom d’Île Maurice au début du XIXe siècle, le 7 mai 1772, après « 4 mois et 7 jours » de voyage. Jean-Martin Moyë se rend à Pamplemousses « où l’air est meilleur », afin de guérir du scorbut contracté durant la traversée. Dans l’attente d’un bateau pour le conduire en Chine, il séjourne chez les lazaristes présents sur l’île depuis 1722. Ne pouvant rejoindre Madagascar dont l’accès lui est refusé par le préfet apostolique, il travaille à la conversion des habitants de l’île :
« Il y a icy plus de 20 à 30 mille nègres de toutes les Nations voisines. Tous parlent une langue différente ; à peine savent-ils un peu de francois à proportion du temps qu’ils sont arrivés. Ils sont tous esclaves nourris, habillés et traités comme des pauvres animaux. Cela me fait horreur et pitié, mon cœur en étoit si pénétré au premier aspect que j’en étois presque malade».
Le P.Moyë introduit ainsi les sacrements du baptême et de la confession en servant comme aumônier à l’hôpital. Il regrette notamment l’absence « d’une maîtresse » qui se chargerait du catéchisme auprès des nombreux enfants.
« Ils sont presque tous dans une grande ignorance, toujours accablés de travaux répandus ça et là dans les habitations, sans instruction, quand on leur parle de Dieu ils écoutent très volontiers, plusieurs se mettent à genoux au milieu du chemin les mains jointes et le chapeau bas s’ils en ont ce qui est assez rare. […] Ils adorent le vrai Dieu qu’ils appellent Jeatchar et ils n’ont pas de peine à croire que son fils s’est fait homme ».
Suite de la mission
Il constate dès lors qu’il s’agit d’un « champs mûr pour l’Evangile, prions donc le Seigneur qu’il y envoye des ouvriers ». Cependant, il reconnait que « cette grande œuvre » n’est pas celle qui l’attends « et si Dieu veut que j’y aille apparemment que le temps n’est pas venû » .
Jean-Martin Moyë quitte donc l’île le 9 juin 1772 en direction du Sichuan, où il reste dix ans. Maîtrisant rapidement le chinois, il fait preuve d’un zèle extraordinaire qui entraîne de nombreuses conversions. À son retour en France, il participe à refonder la Congrégation des Sœurs de la Providence. Il est déclaré Vénérable par le Pape Léon XIII en 1891 puis béatifié en 1954.
[IRFA, archives, cote 138, f°597-600, lettre du P.Moyë aux directeurs du Séminaire de Paris, Maurice, 16 mai 1772 et cote 503, f°2-5, lettres du P.Moyë à ses amis, Maurice, 21 et 27 mai 1772]