Joseph LECLERC1860 - 1888
- Status : Prêtre
- Identifier : 1567
Identity
Birth
Death
Other informations
Missions
- Country :
- China
- Mission area :
- 1883 - 1888 (Chongqing [Chungking])
Biography
[1567]. LECLERC, Joseph-Ferdinand, vint au monde le 3 juin 1860 à Vierzon (Cher). Il sortait du petit séminaire de Saint-Gaultier, quand il entra laïque au Séminaire des M.-E. le 10 septembre 1878. Ordonné prêtre le 22 septembre 1883, il partit le 7 novembre suivant pour le Se-tchoan oriental, et, dès qu'il sut la langue, en 1884, il administra le district de Yuin-tchouan que désolait alors la famine.
A la fin de 1885, il reçut la direction du district de Tong-leang ; l'année suivante, au moment de la persécution, il ne quitta son poste que lorsque les païens eurent envahi sa résidence ; la paix rétablie, il s'empressa de rentrer chez lui. Il travaillait à relever les ruines, quand il mourut presque subitement le 6 mai 1888, à Tong-leang. Son corps fut transporté et inhumé dans le cimetière de la mission, à Tsen-kia-gay près de Tchong-king.
Obituary
M.LECLERC
MISSIONNAIRE APOSTOLIQUE DU SU-TCHUEN ORIENTAL
Né le 3 juin 1860
Parti le 7 novembre 1883.
Mort….. le 6 mai 1888.
« M. Joseph Leclerc naquit à Vierzon (cher) le 3 juin 1860. Dieu lui donna une mère profondément chrétienne. Elle sut lui communiquer dès sa plus tendre enfance une piété rare. Par sa vigilance scrupuleuse, elle put soustraire la jeune âme de son enfant aux influences malsaines, au souffle meurtrier des mauvaises doctrines en vogue surtout dans les centres ouvriers. Les mères chrétiennes n’ont pas seulement l’instinct de l’amour naturel, elles ont encore le génie de l’amour surnaturel. La mère de Joseph Leclerc, qui aimait à rêver pour son fils la gloire du sacerdoce, donna à la formation de son âme des soins d’une délicatesse infinie. Aussi Dieu bénit au delè de ses espérances les efforts de sa pieuse et tendre sollicitude ; son enfant put se préparer à sa première communion avec une foi pleine de candeur.
« La belle intelligence de cet enfant déjà jetait ses premières étincelles. Le vénéré doyen de Vierzon, frappé de ses réponses vives et sûres, de son imperturbable mémoire pendant les cours de catéchisme, pressentit toutes les ressources de cette riche nature. Après des études élémentaires de latin, il fut reçu au séminaire de Saint-Gaultier par le vénérable M. Pasdeloup.
« Notre futur missionnaire rencontra dans ses maîtres des cœurs qui le comprirent et qui s’attachèrent fortement à lui. C’est dans les séminaires que l’on sait aimer l’enfant, c’est là que l’on sait aider la grâce dans le développement graduel de la vocation ecclésiastique. Joseph Leclerc s’acclimata vite dans cette pieuse maison, parce qu’il y trouva ce qu’il avait laissé au foyer de la famille, l’affection paternelle sanctifiée aux sources de la grâce. Il avait d’autant plus besoin de cette affection que la mort lui ravit son père dès l’âge de quatorze ans.
« Au séminaire, sa piété se développa d’elle-même ; elle devint ce qu’elle restera toujours : sincère, simple et solide. Ane voir que la surface de son âme, on eût été tenté de lui trouver un caractère insouciant, incapable d’expansion ; mais quand on pénétrait un peu à l’intérieur, on y découvrait des trésors de délicatesse et des sentiments d’une grande élévation. Le seul mot d’abnégation le faisait tressaillir ; l’héroïsme dans le dévouement exerçait sur lui une attraction puissante. Il avait placé si haut ses ambitions que les avantages, les succès purement temporels n’avaient pas le don d’attirer son regard. Sa bonhomie confiante était peinte sur son visage. Il ne connaissait pas plus les calculs de la dissimulation que les vanités bruyantes de l’ostentation. Nulle recherche, nulle affectation dans ses manières ou dans sa parole. En lui, comme dans la plupart des jeunes gens, le sérieux et la gaieté se succédaient souvent sans transition. A la fin, la joie, celle de l’âme qui a fixé son choix et qui est contente de ce choix, devint le fond de son caractère. Cette joie saine et vraie, jointe à une pointe d’originalité, faisait de lui facilement un boute-en-train, dans le meilleur sens du mot. L’enjouement un peu espiègle de l’écolier était discipliné et tempéré par l’esprit de foi du séminariste.
« Son intelligence était remarquable autant par l’étendue que par la vivacité ; elle pouvait embrasser toutes les matières, toutes les branches de l’enseignement. Les sciences naturelles, les mathématiques, la littérature, la poésie, la musique, plus tard la linguistique, il menait tout de front, et en tout il était sans rival. Pour lui, les difficultés n’existaient pas ; elles s’évanouissaient dès les premiers efforts de son esprit. Par suite d’une application opiniâtre, il en était arrivé à posséder une véritable puissance d’assimilation pour les questions les plus ardues.
« Pendant l’année de sa troisième, le jeune séminariste fut assailli de diverses épreuves. Il est rare que les jeunes gens échappent à la crise redoutable de l’âge des illusions.Quelquefois la vocation finit par sombrer dans cette lutte ; parfois, hélas ! il n’y a pas que la vocation qui tombe en ruines sous les coups de l’esprit d’indépendance : à cet âge, une bouffée d’orgueil suffit pour enivrer et faire perdre l’équilibre. Quand, surtout, on recueille chaque année une riche moisson de lauriers, on est exposé à voir la vie à travers le prisme des faux enchantements et à se croire capable de gouverner, un jour, le monde. Dans cette lutte, Joseph Leclerc sentit sa vocation vaciller. La pensée du sacerdoce s’obscurcissait. Mais Marie et Joseph veillaient sur lui. Grâce à sa piété et à une direction aussi douce que forte, il remporta une victoire dont les fruits s’affirmèrent par la sublime vocation de missionnaire. Pendant le déchaînement des orages de l’âme, les éclairs dessillent les yeux des cœurs droits ; la vue et l’imminence du danger font prendre des résolutions d’une virilité qui nous étonne ensuite.
« Voyez-vous ce jeune homme de seize ans rêver la conquête des âmes sur les plages inhospitalières de l’Orient ! Il ne connaît de la vie que le printemps, et déjà il est tourmenté par le désir de la sacrifier. Déjà son cœur bat à l’unisson du cœur des apôtres, des martyrs. Une voix mystérieuse fait tressaillir toutes fibres de ce cœur, toutes les puissances de cette âme : c’est la voix de Dieu.
« Ce fut vers la fin de l’année de sa troisième que Joseph Leclerc entendit et comprit cette voix. Il y fit écho. Son choix était fait. Dès lors toutes ses pensées, toutes ses aspirations s’orientèrent de ce côté. Ce fut dès cette époque l’idée mère de sa vie d’écolier.Son imagination s’enflammait au récit des actes de courage et de dévouement des missionnaires.
« Il écrivait en 1876 : « Ma lettre est datée de Saint-Gaultier, mais à la rigueur je pourrais « la dater de Saïgon, de Pondichéry ou de Pékin, car je suis plutôt dans ce pays-là que dans le « département de l’Indre, et cesi s’explique parfaitement. L’âme est la partie la plus noble de « mon être ; or mon âme est en Asie. Je suis donc en Asie !. Mon rêve est toujours le même : « missionnaire ! missionnaire ! voilà le mot qui résume toutes mes pensées, toutes mes « espérances .
« Je ne pense qu’aux missions, je ne vis que pour cela…Pour me refroidir on me parle de « souffrances et de martyre ! mais le martyre ! c’est précisément ce qui m’attire le plus. Ainsi « on s’y prend bien mal…Au séminaire des Missions-«Étrangères je pourrai respirer l’air qui, « seul, peut me faire vivre, car je sens qu’ailleurs je mourrais.»
« Son zèle le rendait ingénieux afin d’exciter la générosité de ses condisciples pour l’Œuver de la Propagation de la Foi. Certains faits resteront comme une légende dans l’esprit de ceux qui en furent témoins.
« Pour se former à la vie de privations, pour endurcir son corps aux fatigues, il bravait les intempéries de l’air, les rigueurs du froid… Son ardeur un peu indiscrète a pu parfois égayer ses condisciples, personne n’en suspectait ni la sincérité ni la noble inspiration.
« Arrivé au séminaire des Missions-Étrangères, son âme put se dilater et respirer à son aise.
« Plus je vais, écrivait-il, plus j’aime cette maison et ma vocation qui m’y a conduit. « J’aime ma cellule ; je la trouve de plus en plus gentille ! Quel bonheur d’être seul avec le « bon Dieu, étudiant avec Lui la théologie.»
« Il s’y distingue, écrit le vénérable M.Delpech, par son intelligence vive et prompte, par « l’amour du travail, une mémoire sûre et une extrême facilité pour tout apprendre.»
« Dans cette maison, qui est comme le noviciat du martyre, l’abbé Joseph Leclerc se prépara avec une grande énergie aux travaux de l’avenir. Les ordres sacrés, le sacerdoce furent pour lui un Thabor. Sa belle âme se mûrit au contact de cœurs qui battaient à l’unisson du sien. Il aimait à respiter le fortifiant parfum qui se dégage du parterre empourpré que l’on appelle la Salle des martyrs.
« Là, il aimait à prendre des leçons de courage et de dévouement.
« En 1883, après être venu faire ses adieux à sa pieuse mère, à Graçay, et à ses amis du Berry, il s’embarquait, en novembre, à Marseille, à destination de la Chine.C’est bien de lui que l’on peut dire Hilarem datorem diligit Deus. Adieu, ô mère, ne pleurez pas. Là- bas, je vais combattre le bon combat. Adieu, ô France, adieu, amis d’enfance, plus jamais je ne vous reverrai sur la terre; mais au revoir, au ciel!.
« Ce qu’il fut au Su-tchuen Oriental, Mgr Coupat va nous le dire avec les accents émus d’un père que la mort à frappé dans ses plus vives affections. »
( Semaine religieuse de Bourges.)
« Le P. Leclerc n’a fait que passer parmi nous, écrit Mgr de Tagaste, mais son souvenir restera comme un modèle de zèle et le travail. Arrivé en 1884, au commencement de l’année, avec son cher compagnon M.Mury, il se mit aussitôt à l’étude de la langue, tant écrite que parlée. Dans cette étude, toujours aride aux débuts, il montra une ardeur extraordinaire qui ne s’est jamais ralentie pendant ces quatre années. Après six mois de travail, il lisait couramment tous nos livres chrétiens, et pouvait aborder les ouvrages de pure littérature. Nous étions tous émerveillés d’une intelligence si bien ouverte et d’une opiniâtreté si rare; aussi, au bout d’une année pouvais-je vous écrire : « Le P. Leclers est en train de devenir un sinologue distingué.»
« C’est à Yun-tchouan qu’il débuta dans le ministère, sous la direction du P.Décomps. Le poste était difficile: la famine sévissait, et presque chaque jour il fallait courir d’une extrémité à l’autre du district, pour administrer les mourants et distribuer des secours. Dieu seul sait ce que notre cher défunt souffrit dans ses courses en temps de famine, se soumettant au régime le plus simple, pour ne pas être à charge à ses chrétiens.
« Vers la fin de l’année 1885, je l’appelai à diriger seul le district de Tong-leang. Il y montra les mêmes qualités, redoublant encore de zèle pour instruire ses chrétiens, et d’ardeur dans l’étude de la langue. Il voulait se suffire à lui-même, et écrire seul ses lettes à ses chrétiens: il y était parvenu.
« La persécution de 1886 le trouva au milieu de ces occupations. C’est surtout dans ces terribles et si tristes circonstances, qu’il montra combien il possédait de courage et de prudence. Sa présence donnait confiance aux chrétiens; aussi, malgré des exhortations réitérées, malgré la faiblesse et peut-être la complicité des mandarins, refusa-t-il de quitter son oratoire. Ce n’est que quand sa demeure fut envahie par les pillards, quand les pierres lancées d’un monticule voisin mettaient sa vie en danger, qu’il consentit à fuir. Et dans quelles circonstances ! au mois de juillet, sous un soleil de plomb, ne sachant où diriger ses pas, suivi de près par une bande de pillards.Il arrive ainsi chez le P.Zeller. Il s’y repose quelques jours, puis, trop inquiet sur le sort de ses chrétiens, il retourne, au péril de sa vie, vers le centre de son district. Partout la désolation et la ruine ! Pendant ces tristes jours, jamais sa gaîté ne se démentit. C’était lui le plus malheureux, et c’était lui qui, par ses saillies, réjouissait les autres.
« Peu à peu cependant la tempête s’apaisa, des jours meilleurs vinrent, et il put songer à relever les ruines de son district. Telle à été l’oeuvre de ces deux dernières années; il allait y mettre la dernière main en terminant son oratoire, quand le divin Maître l’a rappelé à Lui d’une manière si inattendue pour nous. Vers le milieu du mois d’avril, j’appris par un chrétien que le P.Leclerc se trouvait indisposé. Je lui écrivis immédiatement de venir se reposer et se réconforter quelques jours à Tchong-kin. Le premier jour de mai, il me répondit :« Que Sa « Grandeur ne s’inquiète pas de ma petite santé. J’ai été indisposé, il est vrai, il y a deux « semaines. Actuellement je vais bien, j’ai éprouvé pendant trois jours un hoquet continuel ; je « sentais dans la poitrine un feu qui s’allumait graduellement jusqu’à devenir insupportable ; « alors arrivait le vomissement ; impossible de garder aucune nouritude. Je m’affaiblissais « beaucoup, mais aujour d’hui je suis très réconforté. J’ai acheté une petite chèvre blanche qui « me nourrit tous les matins. » Cette lettre me parvint le 5 mai, et le 6, dans la nuit , notre confrère allait à Dieu après une maladie de deux ou trois heures. À cinq heures du soir il surveillait encore ses ouvriers, et à dix heures il n’était plus !
« Quelle terrible nouvelle pour nous tous ! quel coup pour moi en particulier ! C’était mon premier nouveau missionnaire , je l’avais vu se former sous mes yeux , j’avais vu avec quelle ardeur il s’était lancé dans la lutte, pour arracher les âmes à l’enfer. Toutes mes lettres de ces dernières années, vous disaient combien j’étais content de ce jeune confrère, quelles consolations il nous donnait, quelles espérances la mission pouvait fonder sur lui, et le voilà enlevé à l’improviste ! Adorons la main du bon Dieu , même quand elle nous frappe ; mais vraiment cette perte m’a affligé plus que je ne saurais vous le dire.
« Une vive piété, un zèle ardent, une charité sans bornes, une gaîté et un entrain rares, tel était notre cher défunt. La mort ne l’a pas surpris.Je connais sa régularité et ses habitudes pieuses ; quelques heures avant sa mort, il disait encore à ceux qui l’entouraient, qu’il accepterait la mort avec résignation et joie ; enfin, si quelque chose doit nous rassurer complètement sur le sort de cette belle âme, c’est son édifiante dévotion à la très sainte Vierge, mère de Dieu, et à son patron, saint Joseph. Son chapelet ne le quittait jamais.
« Les funérailles de notre cher défunt ont été aussi solennelles que possible. Trois confrères, entourés d’une grande partie des chrétiens de Tong-leang ont prié pendant plusieurs jours auprès du corps. Puis, je l’ai fait transporter à Tchong-kin. Les chrétiens l’ont accompagné longtemps, en chantant leurs prières, au milieu d’une foule immense de païens accourus à ce spectacle si nouveau pour eux. Le Père Provicaire, entouré de plusieurs confrères et prêtres indigènes, attendait au bord du fleuve. Ils ont conduit notre cher défunt jusqu’à notre cimetière chrétien, où il repose à côté du P. Ouvrard. »
References
[1567] LECLERC Joseph (1860-1888)
Notes bio-bibliographiques. - A. M.-E., 1913, p. 259. - Sem. rel. Bourges, 1888, pp. 212, 226 ; 1889, pp. 59, 68.
Notice nécrologique. - C.-R., 1888, p. 240.